Caracas dans le viseur de Washington
Venezuela . Inquiets de l’influence continentale d’Hugo Chavez, les États-Unis multiplient les attaques.
En appelant, jeudi, la communauté internationale à constituer un « front uni » contre le président vénézuélien Hugo Chavez, qualifié de « danger pour l’Amérique latine », la secrétaire d’État américaine, Condoleezza Rice a fait monter d’un cran les tensions entre Washington et Caracas. Elle l’a accusé « d’influencer ses voisins pour les conduire hors des processus démocratiques » devant la Chambre des représentants. « Nous devons donner plus de publicité à certaines choses », a-t-elle poursuivi, en allusion à une probable grève des transporteurs vénézuéliens. Précisant qu’elle a informé ses homologues d’Autriche (présidente de l’Union européenne), d’Espagne et du Brésil qu’ils « devraient faire attention à ce qui se passe là-bas ».
La réponse de Caracas ne s’est pas fait attendre. Vendredi, le président vénézuélien Hugo Chavez a avertit : si « le gouvernement américain franchit la ligne, il n’y aura plus de pétrole ». Cinquième exportateur mondial, Caracas fournit 15 % des importations américaines. En réponse aux allusions de Condoleezza Rice, le syndicat des travailleurs UNT a estimé que l’appui de Washington à « des travailleurs censés protester contre un gouvernement légitime et démocratique est une vieille méthode déjà utilisée au Chili », en allusion au coup d’État contre Salvador Allende. Quant à Brasilia, elle a qualifié d’« excellentes » ses relations avec Caracas.
Cette escalade verbale intervient au moment où Washington rencontre des difficultés pour imposer ses vues dans la région. Le premier revers, et non des moindres, est le rapprochement entre Caracas et Cuba. Un axe politico-économique rejoint récemment par la Bolivie d’Evo Morales. L’Alternative bolivarienne pour les Amériques (ALBA), un fonds de coopération regroupant les ressources et les services du continent pour une répartition équitable de ces biens, promue par le Venezuela et Cuba, s’est imposée dans la région comme un contre-projet au « marché unique des Amériques » ultralibéral (ALCA) voulu par les États-Unis.
Cette influence du président vénézuélien, candidat archi-favori à sa succession en décembre prochain, dans les résistances actuelles et dans les accords régionaux grâce au pétrole, sur fond de poussée des gauches en Amérique latine, au détriment de l’hégémonisme états-unien, est ainsi ressentie comme une menace dans le bureau ovale. À défaut donc d’imposer son projet, Washington s’est rabattu sur des accords bilatéraux. Lesquels se heurtent aux résistances populaires, comme en Équateur où de récentes manifestations ont dénoncé la mainmise des multinationales anglo-saxonnes sur les ressources naturelles.