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George Galloway : entre la critique et l’apologie du discours officiel
Par Julie Lévesque
Mondialisation.ca, 18 novembre 2010
18 novembre 2010
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Après avoir été interdit d’entrée au Canada en mars dernier parce qu’il constituait, selon Ottawa, « un danger pour la sécurité nationale », George Galloway était à Montréal hier où il entamait une tournée de conférences au pays. Considéré comme une menace par le ministère de l’Immigration en raison de son « appui » au Hamas, « organisation terroriste antisémite » selon le ministre Jason Kenney, M. Galloway a tenu à remercier le juge de la Cour fédérale Richard Mosley, qui, le 27 septembre dernier, a conclu : « Qualifier l’organisation d’un convoi d’aide humanitaire comme étant « du soutien » ou « du soutien financier » […]aux activités d’une organisation terroriste constitue une interprétation excessive de la loi. »

Accueilli chaudement par la foule, M. Galloway s’est exprimé au sujet de la liberté d’expression, de l’Afghanistan et de la Palestine. Bien malgré lui, il a dû toutefois répondre à une question visiblement mal venue sur l’origine d’Al Qaïda et le refus du mouvement antiguerre de questionner la version officielle des attentats du 11 septembre 2001.

M. Galloway a d’abord avisé le ministre de l’immigration Jason Kenney qu’il n’en avait pas fini avec lui et qu’il allait le revoir devant les tribunaux. « Je ne laisserai pas ceux qui ont propagé des mensonges et des propos diffamatoire à mon endroit s’en tirer en toute impunité. Je crois en la liberté d’expression, mais elle a des limites. Il existe des lois contre le libelle et la diffamation et vous en apprendrez sur ces lois M. Kenney. »

Le conférencier a déclaré qu’il n’acceptait pas d’être qualifié d’antisémite. M. Galloway a promis d’utiliser tous les fonds qu’il espère obtenir en Cour pour bâtir le mouvement antiguerre au Canada.

Par ailleurs, l’ancien parlementaire britannique s’explique mal pourquoi il est reçu partout dans le monde par des représentants officiels, sauf au Canada. « Ce n’est pas ma vision qui est controversée, mais celle de M. Harper. M. Harper appuie le gouvernement le plus extrême qu’Israël ait connu. Ce n’est pas moi qui recrute des terroristes, ce sont les Bush, Blair et Harper. Mais ils n’ont pas lu Frankenstein jusqu’à la fin! M. Frankenstein perd le contrôle du monstre qu’il a créé. »

M. Galloway a réitéré qu’il ne soutien pas le Hamas, mais la démocratie : « Les seuls à pouvoir choisir les chefs de la Palestine sont les Palestiniens. Pourquoi je parle avec le Hamas? Parce que c’est le gouvernement élu. En réalité tout le monde parle avec le Hamas : les Britanniques, les Étasuniens, même les Israéliens! Les seuls qui refusent de le faire sont M. Harper et le gouvernement du Canada. »

En ce qui concerne « les promesses non tenues » du gouvernement conservateur sur le retrait des troupes d’Afghanistan, George Galloway se demande pourquoi personne au Canada ne pose la question suivante : « Comment se fait-il que l’armée afghane ait besoin d’autant d’entraînement? Personne ne forme les talibans et ils semblent très bien s’en tirer! »

M. Galloway a rappelé que deux tiers des soldats afghans entraînés font défection et se joignent aux rangs des talibans, lesquels offrent des salaires compétitifs. « Personne n’a réussi à occuper l’Afghanistan, pas même Alexandre le Grand. Et M. Harper, vous n’êtes pas Alexandre le Grand. »

Pas de paix en Palestine, pas de paix dans le monde

Dans son discours enflammé, le conférencier a rappelé que tant qu’il n’y aura pas de paix en Palestine, il n’y aura pas de paix au Moyen-Orient, ni dans le monde.

Touchant à une controverse sur l’Iran, M. Galloway a tenu à préciser que contrairement à ce que veut la rumeur persistante, le président iranien Mahmoud Ahmadinejad n’a jamais dit qu’il désirait « rayer Israël de la carte ». « Israël a toutefois la capacité de rayer tous ses voisins de la carte, et s’il est un pays qui a été rayé de la carte, c’est la Palestine! Regardez dans le dictionnaire, il n’existe plus! » L’Iran, selon lui, est ciblé pour une seule raison : son opposition à l’occupation de la Palestine.

Il a ajouté que « la Palestine est un camp de concentration, que l’on bombarde avec des armes illégales. On punit la population pour la façon dont elle a voté lors d’élections libres. Pour ajouter l’insulte à l’injure, les Palestiniens, victimes du terrorisme, sont appelés terroristes et les Israéliens, les véritables terroristes, sont appelés victimes! »

Le conférencier a averti le gouvernement israélien que son « régime d’apartheid » serait combattu à l’aide de boycott, de désinvestissement et de sanctions (campagne BDS). Par ailleurs, un bateau canadien fera partie d’une prochaine flottille visant à briser le blocus de Gaza. L’organisme Bateau Canadien pour Gaza a besoin de 300 000 dollars pour pouvoir appareiller au printemps 2011. Cent mille dollars ont déjà été recueillis.

George Galloway appuie la version officielle des événements du 11 septembre

Lors de la période de questions qui a suivi, M. Galloway a semblé particulièrement agacé par une question de Micheal Pengue du mouvement pour la vérité sur le 11 septembre Montreal 9/11 Truth. M. Pengue lui a demandé pourquoi son mouvement antiguerre ne révèle jamais la véritable identité d’Al-Qaïda, une création des États-Unis, et pourquoi il ne remet pas en question les attentats du 11 septembre, à l’origine de la guerre en Afghanistan. (pour voir la vidéo, cliquez ici)

« Il est complètement fou de croire que le gouvernement étasunien était derrière ces attaques. Ce sont bien 19 terroristes arabes qui ont mené les attentats du 11 septembre. De plus les États-Unis n’ont pas créé Al-Qaïda, ce que vous dites est faux. Ce que vous avancez est complètement fou. »

Or, M. Galloway, qui dit connaître l’histoire de l’Afghanistan, devrait savoir qu’Al-Qaïda a été créé par les États-Unis pour contrer les Soviétiques en Afghanistan dans les années 1980. Il s’agit d’un fait documenté et même admis par Zbigniew Brzezinski. Comme bien des gens, M. Galloway ne semble pas non plus savoir qu’un certain nombre de ces 19 terroristes ont été interviewés après les attentats par des journalistes des médias dominants comme ABC et la BBC : non seulement ils étaient toujours en vie, mais ils n’avaient rien à voir avec des nébuleux terroristes.

En prononçant à maintes reprises le mot « fou » (insane) pour qualifier les arguments du truther, M. Galloway n’utilise-t-il pas la même tactique que le ministre qu’il pourfendait en début de soirée? En réponse à la question visiblement irritante, M. Galloway à court d’arguments convaincants, a disqualifié l’intervenant, à l’instar de Jason Kenney, en s’attaquant à sa personne plutôt qu’à ses arguments.

George Galloway poursuit sa tournée pancanadienne jusqu’au 27 novembre. Il n’a pas donné de détails quant à la poursuite qu’il compte intenter pour libelle diffamatoire contre le gouvernement canadien.


Julie Lévesque est journaliste au Centre de recherche sur la Mondialisation

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