Guerre fraîche, Italie avariée
Il y a une semaine seulement, à la question de Franco Venturini sur le Corriere della Sera : « Et sur le bouclier antimissile, comment voyez-vous les propositions de Poutine ? » le ministre des affaires étrangères Massimo D’Alema a répondu : « L’affaire avait mal commencé, même l’OTAN avait été marginalisée dans les plans des Usa. A présent nous revenons sur la voie juste, qui est celle d’impliquer tout le monde, Russie comprise, dans un système de sécurité contre les menaces de missiles ». La décision, aussi dure que prévisible, du président Poutine qui suspend le Traité sur la réduction des forces conventionnelles en Europe (Cfe), poutre maîtresse du désarmement dans l’après-guerre froide, met en évidence la distance entre paroles et réalité. Peut-être n’étaient-ils pas clairs les deux testes de missiles russes d’il y a un mois, l’un capable de franchir le bouclier Usa et l’autre de le détruire ? Que de bavardages sur les « tournants » du G8 et sur le récent sommet entre Poutine et Bush qui, ensuite, a prolongé les « travaux ». L’OTAN a approuvé. L’Italie aussi. En silence.
Du reste, en février, le gouvernement italien a adhéré en secret au système anti-missiles Usa. Le parlement et la coalition de gouvernement elle-même ont été informés une fois les choses accomplies, quatre mois plus tard. Et pourtant c’est un accord lourd, qui nous implique avec charges, coûts, bases, recherche, plus de dépenses militaires, et accroissement du rôle des bases Usa sur notre territoire.
Une partie dangereuse est en train de se jouer au cœur de l’Europe. Avec le lancement du système radar en République tchèque et des rampes de missiles intercepteurs en Pologne, les Etats-Unis veulent disposer d’un système non pas de défense mais d’offensive, en mesure de lancer un « first strike » contre un pays doté d’armes nucléaires, en se fiant à l’effet « bouclier » en cas de représailles. Bush présente l’opération dans un cadre anti-Iran – qui même dans trente ans n’aura pas de têtes nucléaires- mais à Moscou on voit l’évidence d’une menace armée aux frontières. Noam Chomsky a écrit : « Le bouclier installé en Europe de l’Est est pratiquement une déclaration de guerre ». Ainsi la militarisation de l’Europe imposée par les Usa réamorce la militarisation, croissante, de la Russie. La guerre revient, fraîche, sur le Vieux Continent.
Edition de dimanche 15 juillet de il manifesto
http://www.ilmanifesto.it/Quotidiano-archivio/15-Luglio-2007/art20.html
Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio