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Le Candidat McCain: Un choix risqué
Par Prof Rodrigue Tremblay
Mondialisation.ca, 02 septembre 2018
The New American Empire 12 août 2008
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https://www.mondialisation.ca/le-candidat-mccain-un-choix-risqu/9806

Cet article a été publié initialement le 11 août 2008 par Mondialisation.ca. Nous republions le texte du professeur Rodrigue Tremblay à l’occasion du décès du Sénateur John McCain, candidat présidentiel républicain en 2008, politicien controversé et qualifié par plusieurs, non pas comme un héros, mais comme « un criminel de guerre ».

« Lors d’une entrevue en 1997 à l’émission « 60 minutes » du réseau CBS, McCain a franchement admis: « Je suis un criminel de guerre ; j’ai bombardé des femmes et des enfants innocents. » C’était une déclaration honnête, mais loin d’être un argument en faveur de sa présidence. » (McCain et le Vietnam : l’histoire révisée en préparation à de nouvelles guerres, publié le 23 juin 2008)


«Je crois que le peuple irakien nous accueillira comme des libérateurs. »

Sénateur John McCain, (le 20 mars, 2003)

« Comme vous le savez, il y a des membres d’Al-Qaida qui sont en Iran et qui reçoivent une formation militaire, et ils retournent ensuite en Iraq. »

Sénateur John McCain, 2008 candidat présidentiel présomptif républicain, (À Amman, en Jordanie, le 18 mars, 2008)

« L’Iran est de toute évidence en train de se doter d’armes nucléaires. … En bout de ligne, nous ne pouvons pas laisser l’Iran avoir l’arme nucléaire. »

Sénateur John McCain

« Toute personne qui s’inquiète de combien de temps nous [les Etats-Unis] resterons en Iraq ne comprend pas les militaires. »

Sénateur John McCain

« Avec John McCain, [Dick] Cheney fera penser à Gandhi. »

Pat Buchanan, journaliste et homme politique

« McCain était un pilote de chasse, qui a largué des missiles à 35000 pieds d’altitude. Il était loin depuis longtemps quand ils ont frappé leurs cibles. Que s’est-il passé quand ils [les missiles] sont arrivés à terre ? Il ne le sait pas. On doit se soucier de la vie des gens. McCain ne s’interroge jamais sur ces questions. »

Le sénateur Jay Rockefeller (D. W.Va.)

Plusieurs m’écrivent pour me demander mon avis sur la présente fournée de candidats à l’élection présidentielle aux États-Unis. – Tout d’abord, permettez-moi de faire une observation générale. Le système électoral américain, tout particulièrement au niveau présidentiel, est inhumain et inefficace. Il s’agit d’un énorme et terrible hache-viande qui oblige les candidats à faire campagne pendant des mois, sinon des années, dans le cadre de primaires ou caucus qui sont tenus dans les 50 États et Territoires, les force à quêter des dizaines et même des centaines de millions de dollars et à voir leur vie privée exposée et critiquée. On comprendra qu’avec un tel système, il n’est pas étonnant que peu d’Américains doués d’une grande intelligence et de caractère soient disposés à se soumettre à une telle épreuve. Vous ne trouverez pas de grandes personnalités du calibre d’Abraham Lincoln, Franklin D. Roosevelt, Dwight Eisenhower ou John F. Kennedy, même si les candidats les plus “cervelle fêlée”, ont été écartés. Les candidats restants ne sont pas le meilleur de ce que l’Amérique peut offrir et s’offrir.

Permettez-moi de débuter par une appréciation du candidat présidentiel républicain présomptif, le sénateur John McCain (R-AZ). Dans l’ensemble, ma conclusion est relativement négative.

Du côté positif, le sénateur McCain s’est construit une réputation d’indépendance au Sénat américain, à tel point qu’il est souvent considéré comme un franc-tireur. À titre d’exemple, le sénateur McCain a froissé de nombreux républicains en soutenant les politiques de réforme des finances électorales, en dénonçant la politique de torture de l’administration Bush-Cheney et même en critiquant au début la manière dont l’administration Bush-Cheney a lancé la guerre en Irak. Sur ce dernier point, toutefois, on peut dire que le sénateur McCain a reculé et il s’est par la suite aligné plus étroitement avec la Maison-Blanche sous contrôle républicain.

Sur la question de la torture, le sénateur McCain a promis de mettre la clé dans le Centre de détention militaire à Guantanamo Bay, sur l’Île de Cuba. Il a aussi déclaré qu’il allait s’engager plus activement dans les négociations internationales sur les problèmes climatiques (pour autant que la Chine et l’Inde acceptent des réductions des émissions polluantes). On peut également affirmé que le sénateur McCain n’est pas ce que l’on pourrait appeler un candidat « religieux », et je doute fort qu’il tienne des sessions bibliques hebdomadaires comme on dit que George W. Bush en tenait dans l’enceinte de la Maison-Blanche. Ces différences avec l’administration actuelle sont peut-être mineures, mais je pense qu’elles sont réelles.

Du côté négatif, toutefois, les sujets sur lesquels le sénateur McCain est d’accord avec le président George W. Bush et le Vice President Dick Cheney sont beaucoup plus nombreux et beaucoup plus importants. Sur la plupart des questions importantes, ce serait avec John McCain « du pareil au même ». C’est la raison pour laquelle le Président George W. Bush s’est déclaré disposé à faire tout en son pourvoir pour que le sénateur John McCain soit élu président. Il a dit qu’il s’emploiera à recueillir des fonds pour le candidat républicain. Bush sait pertinemment bien qu’avec McCain à la présidence, ce serait comme un troisième mandat pour sa propre présidence décriée. En effet, tous ceux qui ont aimé ce que Bush a fait ou défait au cours des huit dernières années devraient voter pour McCain sans grande crainte d’être déçus. En particulier, c’est une personne reconnue pour son militarisme et son caractère belliqueux.

En contre-partie, ceux qui se sont sentis trahis ou ont été victimes de l’administration Bush-Cheney, et cela inclut les 81 pour cent d’Américains qui pensent que leur pays est sur la mauvaise voie, devraient réfléchir à deux fois avant de prolonger un jour de plus que nécessaire la présidence désastreuse de George Bush.

Approfondissons un peu plus la question.

D’une part, on peut s’attendre à ce que le sénateur McCain, comme un commentateur en a fait la remarque, se comporte comme une sorte de George W. Bush sur les stéroïdes. Certains vont même jusqu’à le décrire comme un candidat qui aspire à devenir un président “McBush”, parce que beaucoup de des politiques qu’il met de l’avant sont une réplique des politiques de Bush. Par exemple, le sénateur McCain est partisan de la théorie de la présidence impériale, mise de l’avant et mise en pratique ces derniers temps par l’administration Bush-Cheney. Comme McCain l’a confirmé le 5 mai dernier, il faut s’attendre, s’il est élu président, à ce qu’il abandonne avec enthousiasme toute retenue en ce qui concerne les restrictions que la Constitution américaine impose au pouvoir exécutif et fasse sienne la doctrine Bush-Cheney d’un pouvoir exécutif quasi absolu.

Le sénateur McCain semble particulièrement préoccupé par la crainte que les tribunaux s’en tiennent à la lettre et à l’esprit de la Constitution américaine et repoussent toute  tentative de la part de la Présidence d’établir une dictature de fait aux dépens des prérogatives du Congrès. De l’avis de McCain, le pouvoir exécutif aux États-Unis est déjà trop contraint par les cours de justice, lesquelles, à ses dires, « montrent peu de respect pour l’autorité du président. » Sur cette question, toutefois, le sénateur McCain semble vouloir à la fois le beurre et l’argent du beurre. Est-il sincère ou est-ce uniquement un moyen de créer de la confusion ? Par exemple, le 15 mai dernier, le sénateur de l’Arizona a tenté de prendre ses distances de l’administration Bush-Cheney et a déclaré qu’il acceptait maintenant le concept constitutionnel de “checks and balances” (contrôle et équilibre). Quel est le véritable McCain ? De toute évidence, des éclaircissements additionnels s’imposent.

Deuxièmement, en matière de politique étrangère plus qu’en tout autre domaine, on peut s’attendre à ce que McCain soit une sorte de “McBush”. On doit s’attendre à ce qu’il soit un mélange d’un George W. Bush simpliste et d’un Dick Cheney farouchement nationaliste et interventionniste, les deux derniers toujours prêts à bombarder des gens d’une façon immorale et à se poser des questions plus tard. Le sénateur McCain se dit prêt à continuer la politique étrangère insensée de l’administration Bush-Cheney. Par conséquent, on ne devrait guère s’attendre à ce que les politiques d’une administration McCain soient très différentes de ce que ce duo a fait au cours des huit dernières années, c’est-à-dire la poursuite d’une politique avant tout axée sur l’interventionnisme, l’unilatéralisme et le militarisme. Sous McCain, les États-Unis continueraient à se comporter comme le voyou de la planète.

Il en résulterait plus d’instabilité géopolitique à l’échelle planétaire, plus d’endettement extérieur pour les États-Unis, et plus de perturbations économiques dans le commerce international, en particulier en ce qui concerne le pétrole et les produits de base. Il y aura un prix économique élevé à payer sous une présidence américaine à la McCain, il ne faut pas s’y tromper. Le ralentissement économique actuel n’est peut-être qu’un avant-goût de ce qui attend l’économie mondiale.

En effet, à l’écouter, on a le sentiment que le sénateur McCain n’a jamais rencontré une guerre qu’il n’aimait pas. Par exemple, s’il n’en tenait qu’à lui, les soldats américains seraient encore au Vietnam, pays qu’il a bombardé quand il était pilote de chasse dans les années ’60. Il a également déclaré qu’il aimerait intervenir encore plus directement dans les affaires des pays de l’Amérique du Sud. Et, au Moyen-Orient, il a confié qu’il ne lui répugnerait pas que l’occupation militaire américaine là-bas s’étende sur une période de cent ans. À ses yeux, l’Irak est devenue une colonie américaine pour toujours, de sorte qu’il en résultera un climat de guerre permanente et d’occupation militaire permanente dans cette partie du monde. En 1999, le sénateur McCain a même fait pression sur l’administration Clinton pour que les États-Unis envahissent la Yougoslavie avec des troupes au sol. Les pères fondateurs des États-Unis se retourneraient dans leurs tombes s’ils pouvaient voir leur chère république transformée en un empire militariste!

En troisième lieu, le sénateur McCain ne semble pas connaître ou respecter le droit international. En effet, non seulement le sénateur McCain semble constamment confondre les sunnites et les chiites en Irak, après toutes ces années, mais il semble être complètement perdu sur la véritable signification de l’expression de la guerre dite “préventive” et celle de la guerre de caractère essentiellement “défensif”. Une guerre de type défensif peut être une mesure de légitime défense, entreprise contre un autre pays qui constitue une menace inévitable et imminente parce qu’il est sur le point d’envahir notre pays, ou parce qu’il menace d’attaquer dans un avenir rapproché. Une guerre préventive est plutôt une guerre facultative ou une guerre d’agression qui est lancée en prévision d’une perte de sécurité ou d’un avantage stratégique dans un avenir plus ou moins lointain, ou qui est lancée pour acquérir des territoires étrangers et des ressources. Si une guerre défensive relève de la légitime défense, une guerre préventive est fondamentalement impérialiste. Dans les mots qu’emploie le sénateur McCain, les deux notions sont confondues car il dit qu’il n’exclurait pas de lancer des guerres préventives contre des ennemis éventuels qui ne constitueraient pas des menaces immédiates pour les États-Unis. Il s’agirait alors de guerres d’agression et non pas de guerres défensives.

Une guerre défensive peut parfois être légale et justifiable, et être en conformité avec l’article 51 de la Charte des Nations Unies. Cependant, une guerre préventive constitue un acte d’agression, et n’est jamais légale en droit international.

Quatrièmement, il semble que M. McCain est un homme qui nourrit de la rancoeur, ce qui fait également penser à George W. Bush, et ce qui fait de lui un homme dangereux en qui il serait dangereux de confier la gourverne d’un pays lourdement armé comme les États-Unis. Par exemple, il garde des souvenirs amers de son expérience de pilote de chasse et de prisonnier de guerre pendant la guerre du Vietnam. Quelque cinquante ans plus tard, McCain dit qu’il aimerait aller à Cuba pour «punir» les soldats cubains qui auraient, à ses dires, maltraité ses compagnons d’armes. Le gouvernement cubain a déclaré qu’il n’y avait pas de soldats cubains au Vietnam, mais McCain garde quand même de la rancune.

Un autre parallèle peu flatteur avec M. Bush est le fait que M. McCain, qui aura 72 ans en août de cette année, a fréquenté l’Académie navale d’Annapolis où il s’est classé près de la queue de sa classe, finissant 894e sur 899 élèves. Ainsi, on ne doit guère s’attendre à que le sénateur McCain soit une sorte de  » président philosophe » et il devrait gouverner avec ses tripes plutôt qu’avec son intelligence.

Cinquièmement, le sénateur McCain est un candidat néoconservateur. En effet, le Lobby pro-Israël et les Néocons, c’est-à-dire la petite clique d’idéologues peu futés qui ont murmuré des conseils à l’oreille de George W. Bush pendant des années, et qui ont commencé à murmurer dans l’oreille de McCain, seraient ravis d’avoir un ancien militaire belliqueux en la personne de McCain à la Maison-Blanche. Ce serait pour eux un rêve devenu réalité. Cela accroîtrait grandement les chances de réalisation de leur projet chéri d’une guerre contre l’Iran.

Le sénateur McCain est né sur une base militaire américaine dans un pays étranger (Panama), et il est le fils et petit-fils de militaire de carrière. Ceci peut expliquer pourquoi il est épris de tout ce qui est militaire. C’est un homme qui croit qu’il y a une solution militaire à tout problème politique. Il devrait faire sienne la “doctrine Bush” d’inspiration nécoconservatrice. Il adopterait également le projet néo-impérialiste d’extrême droite, appelé projet du nouveau siècle américain (PNAC) qui propose une domination américaine mondiale. Armé de ces deux « doctrines », le sénateur McCain, s’il est élu président, pourrait donc se lancer dans des guerres d’agression illégales à travers le monde pour assurer la suprématie américaine. Ceux qui ont aimé George W. Bush vont adorer John McCain. Ils auront tous les feux d’artifice et plus encore. Est-ce qu’une telle approche belliqueuse est bonne pour les États-Unis, pour son économie et pour sa réputation, et pour la stabilité du monde ? C’est une tout autre question.

Sixièmement, un John McCain à titre de président serait un cadeau du ciel pour le complexe militaro-industriel américain. Il est facile de voir pourquoi. —En effet, le sénateur McCain a promis d’augmenter la taille des forces armées américaines, pour les faire passer de 750 000 qu’elles ont présentement à 900 000 membres. Sous sa gouvernance, le budget militaire du Pentagone, déjà pléthorique à un point d’être plus grand que les dépenses militaires de l’ensemble des 191 autres pays tous confondus, augmenterait encore davantage. Un autre signal de danger vient du fait que McCain s’est entouré d’une foule de gens qui proviennent des groupes de pression d’extrême droite. Cela signifie que si jamais il est élu, il sera prisonnier de ces éléments d’extrême droite. Ce n’est guère une perspective encourageante.

Septièmement, le sénateur John McCain a appuyé George W. Bush lorsque ce dernier décida d’accorder d’énormes réductions fiscales aux contribuables les plus riches. Une telle mesure a fortement contribué à creuser le déficit budgétaire américain et a placé les États-Unis dans sa position actuelle de surendettement extérieur et de crise financière, avec une monnaie qui ne cesse de se déprécier. Ce n’est pas étonnant que George W. Bush soutienne avec enthousiasme le candidat John McCain, bien qu’un tel soutien pourrait s’avérer être une arme à double tranchant, puisque Bush est au plus bas de sa popularité, et alors qu’une grande majorité des Américains pensent que leur pays s’en va dans la mauvaise direction.

Huitièmement, il ne faut pas passer sous silence le caractère soupe au lait de McCain. C’est un homme qui est reconnu, et cela depuis sa tendre enfance, être sujet à de brusques et incontrôlables crises de colère. Son biographe Robert Timberg (« John McCain: An American Odyssey ») a dévoilé que jusqu’à la vingtaine, McCain fut un individu extrêmement violent, « prêt à se battre à la moindre provocation ». Cette propension à la colère semble être au cœur de sa personnalité. En effet, parlant de son enfance, McCain a reconnu avoir un tempérament soupe au lait et une grande impatience (voir ses mémoires “Worth the Fighting for: A Memoir”) et il confessa que, jeune « à la plus petite provocation, j’entrais dans une folle frénésie, et, soudain, je m’écrasais au sol inconscient. Lorsque j’étais en colère, je retenais mon souffle jusqu’à ce que je tombe inconscient !  » Par après, ses parents devaient le plonger dans l’eau froide, tout habillé, afin de le sortir de sa torpeur.

Un homme doté d’un tel tempérament est un homme dangereux, surtout si on songe lui confier la garde d’armes nucléaires. Même certains de ses collègues sénateurs républicains disent qu’il est trop téméraire pour être commandant en chef. Et cela, sans prendre en considération ses prises de position militaristes et agressives en matière de politique étrangère et son manque flagrant de connaissances en matière économique.

Neuvièmement, il y a aussi la question légitime de son âge avancé et son état de santé personnelle. Le journal ‘The New York Times’ s’est récemment plaint d’un manque d’informations médicales sur le candidat républicain présomptif à la présidence et combien peu on en savait sur son état de santé. Après tout, ce n’est pas une mince affaire, car le sénateur McCain aura 72 ans en août (2008) et il a subi une intervention chirurgicale en août 2000 pour un cancer du mélanome, soit un des cancers les plus meurtriers. Un rapport publié récemment sur l’état de santé de McCain n’a pas dissipé les craintes que plusieurs entretiennent à ce sujet.

Et dix. Puisque les médias ont critiqué le sénateur Barak Obama pour les liens étroits qu’il entretenait avec un ministre du culte noir, il est intéressant de noter que le sénateur John McCain a également reçu l’appui d’un des pires fanatiques religieux aux États-Unis, soit le révérend John Hagee du Texas, reconnu pour ses propos anti-catholiques et anti-musulmans. Il faut savoir que le télévangéliste du Texas (à la tête d’une église géante à San Antonio) a déjà déclaré que l’ouragan Katrina de l’été 2005 était une vengeance de Dieu contre la ville de la Nouvelle-Orléans. Il a également déjà appelé l’Église catholique romaine une « grande prostituée » et l’a qualifiée de « faux culte » et « d’Église apostate.” (Il y a quelque 60 millions de catholiques aux États-Unis et ceux-ci pourraient voir d’un mauvais oeil de telles insinuations.) Et, pour en rajouter, le révérend Hagee a également déclaré que Dieu avait envoyé [Adolf] Hitler pour qu’il commette le génocide de l’Holocauste afin de forcer les juifs à immigrer en Israël!

Par conséquent, il est certainement légitime de se demander pourquoi les médias ont accordé autant d’attention à l’association du sénateur Barack Obama avec un pasteur controversé, et si peu à celle du sénateur McCain avec un autre pasteur tout aussi, sinon plus controversé. Doit-on voir là un exemple de deux poids, deux mesures ?

Pour conclure, lorsqu’on regarde les choses de près, il semble clair que le sénateur « 100 ans » John McCain est un personnage trop dangereux et trop imprévisible pour se voir confier la présidence d’un pays aussi lourdement armé que les États-Unis. Est-ce que les Américains souhaitent vraiment voir un homme que certains appellent « le sénateur Tête Chaude», devenir « le Président Tête Chaude  » et lui confier d’aussi importantes responsabilités ? Espérons que l’électorat américain saura réfléchir suffisamment à tout cela avant que les événements ne se déroulent, et non pas après. Si les Américains croient vraiment que leur pays fait présentement fausse route, est-t-il vraiment logique de soutenir un candidat qui veut aller encore plus loin dans la même direction ?

Il existe de nombreuses autres questions qui se rapportent au candidat McCain, mais dont les médias ne font pas de cas.

Par exemple, il faut souligner que le sénateur McCain est toujours opposé à toute réglementation publique des grandes entreprises qui ont dans le passé, et qui continuent aujourd’hui, de soutirer des milliards de dollars au public américain. Ainsi, le sénateur McCain s’est récemment opposé à un projet de loi agricole parce que le projet de loi en question prévoyait une surveillance des contrats à terme pour les produits énergétiques, un marché qui permit à la célèbre Cie Enron de manipuler les prix de l’électricité en Californie, au cours de l’été de 2001, soutirant ainsi aux résidents californiens des centaines de millions de dollars.

Il faut se rappeler également qu’il y a environ vingt ans, le sénateur McCain fut accusé de corruption après qu’il fut dévoilé qu’il avait été fortement impliqué dans le scandale des caisses d’économie et de prêts. En effet, McCain et quatre autres sénateurs étaient intervenu pour empêcher qu’un organisme public de réglementation (le Federal Home Loan Bank Board) supervise des prêts risqués avancés par des institutions prêteuses, telles la Lincoln Savings and Loan Association de Irvine en Californie.

En effet, le sénateur McCain et les quatre autres sénateurs (appelés les cinq de Keating : John McCain, John Glenn, Alan Cranston, Don Riegle, et Dennis DeConcini) avaient reçu $ 1,3 millions en contributions électorales du président Charles Keating de la Lincoln Savings and Loan Association. —Le sénateur McCain fut réprimandé par un Comité sénatorial sur l’éthique pour avoir  « manqué de jugement » en intervenant auprès des instances réglementaires du gouvernements fédéral en faveur de M. Keating. Les quatre autres sénateurs ont depuis quitté la politique, mais le sénateur McCain est encore très actif et il est le candidat républicain présomptif à l’élection présidentielle américaine de novembre 2008.

Il faut aussi garder à l’esprit que le sénateur McCain a été un des plus ardents supporteurs de la guerre de George Bush contre l’Irak. En effet, le sénateur John McCain est celui-là même qui a donné la réplique au sénateur Robert Byrd quand ce dernier prononça sa magistrale dénonciation de la guerre de Bush, le 19 mars, 2003. Par conséquent, ceux qui se sont opposés à la guerre en Irak ne peuvent pas voter pour McCain, à moins de trahir leur conscience. Par contre, ceux qui aiment les guerres d’agression devraient voter pour le candidat McCain.

Ils sont nombreux les squelettes politiques dans le placard du sénateur McCain. Si seulement les médias faisaient mieux leur travail, l’électorat américain serait mieux renseigné avant de songer à voter pour lui. Malheureusement, cela ne semble pas être le cas.

Rodrigue Tremblay
Le 2juin 2008

Article en anglais, Candidate McCain:

Candidate McCain: A Risky Choice

Pour aller plus loin : McCain et le Vietnam : l’histoire révisée en préparation à de nouvelles guerres, publié le 23 juin 2008

 

Rodrigue Tremblay est professeur émérite de sciences économiques à l’Université de Montréal et peut être rejoint à l’adresse suivante: [email protected]. Il est l’auteur du livre «Le nouvel empire américain.» Visitez son blogue à l’adresse suivante: www.thenewamericanempire.com/blog.

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