Le combat pour briser le siège illégal de Gaza continue

Cinquième convoi international de Viva Palestina

Accueil du convoi Viva Palestina, Place Bellecour à Lyon, le 20 septembre 2010.

Lancé par l’ancien député britannique Georges Galloway (*), le cinquième convoi de Viva Palestina (**), comprenant au départ 55 véhicules (surtout des ambulances) chargés de produits urgents, comme de la poudre de lait pour enfants, et 75 participants venus d’Australie, de Nouvelle Zélande, du Canada, de Malaisie, des États-Unis, d’Irlande du Nord, est parti de Londres le 18 septembre 2010, en route pour Gaza. Durant les semaines que durera son voyage, d’autres participants vont se joindre au convoi.

Ce sont, en majorité, des gens que nos sociétés islamophobes stigmatisent et soupçonnent de fanatisme avec une déconcertante facilité [1]. Ils sont mûs par de nobles intentions. Ils veulent être utiles. C’est leur unique motivation. Ils souffrent de savoir que leurs frères et sœurs sont maltraités. Ils se sacrifient par amour de leur prochain. Ce n’est pas un sacrifice du reste : ils ont besoin de se sentir en paix avec eux-mêmes. Ils savent combien leur solidarité compte dans le cœur des victimes de l’oppression qui aspirent à la reconnaissance de leurs droits.

Commençant leur voyage par la France, ils ont apprécié l’accueil que leur ont réservé les militants d’Europalestine à Paris ; et les militants du Collectif 69 de soutien à la Palestine [2] à Lyon.

Nous étions présents le 20 septembre 2010 lors de l’arrivée du convoi par une belle journée estivale. Ils n’étaient là qu’au début d’un long périple qui devrait les conduire à Gaza, après l’Italie, la Grèce, la Turquie, Latakié en Syrie, début octobre, où ils devraient être rejoints par deux autres convois en provenance de Casablanca et de Doha. Partant de là, ce seront plusieurs centaines de personnes et de véhicules qui devront obligatoirement embarquer sur un navire – l’Egypte leur interdisant le passage par terre – pour atteindre le port d’El-Arich. Puis, si tout va bien, gagner Rafah, pour entrer à Gaza.

La simplicité, la modestie des participants anglophones à ce convoi, ont touché le cœur des lyonnais venus les accueillir sur la grande et majestueuse place Bellecour.

« Tout cela est magique » s’enthousiasmait une Malaisienne, 47 ans, très vive, très déterminée, toute fraîche, pimpante et rayonnante, toute impatiente et confiante de pouvoir atteindre Gaza pour y remettre les six ambulances flambantes neuves conduites par sa délégation de dix membres venus de Malaisie [3].

N’avez-vous pas peur, avons-nous demandé à Kevin Ovenden, coordinateur de ce convoi ? « Nous n’avons pas peur. Mais nous sommes aussi conscients des difficultés, qui sont de deux sortes. Il y a d’une part les difficultés logistiques, les imprévus du voyage, l’organisation de l’aide, l’organisation du transport, car une partie de notre voyage doit se faire par mer. Et il y a d’autre part les difficultés politiques parce que, bien sûr, certains s’opposent politiquement à ce que nous apportions une aide à Gaza. C’est en particulier le cas d’Israël, et de ceux qui collaborent au siège israélien illégal et immoral contre Gaza. Nous sommes donc conscients des difficultés, mais nous n’avons pas peur. D’abord parce que nous ne sommes pas seuls, parce que nous avons des millions de gens qui nous soutiennent. Quand nous sommes arrivés en France samedi, nous avons reçu un soutien extraordinaire. Nous savons que nous sommes massivement soutenus » [4], a-t-il répondu fermement.

La même expression de gentillesse, de calme et de sérénité se lisait dans les yeux bleus et doux de ce chrétien new-yorkais, Ralph, employé de banque à la retraite, qui participait là à son troisième convoi et semblait incarner toute la bonté du monde.

Ces gens, pensions-nous à leur contact, ont la grâce de ceux qui savent la valeur de leur engagement au sein de Viva Palestina. Sous l’égide de Georges Galloway – une grande figure du mouvement anti-guerre qui se consacre depuis 35 ans à la cause palestinienne – Viva Palestina est capable de mobiliser des foules sur des actions concrètes, et de toucher le cœur de ceux qui se désespèrent de voir leurs frères et sœurs palestiniens massacrés. Viva Palestina incarne désormais, aux yeux des gens qui connaissent son histoire, détermination et persévérance [5].

Jérôme Faynel, président du Collectif 69 de Soutien au Peuple Palestinien, a rappelé avec force que ces convois, « ce sont des actes concrets » qui permettent à tout un chacun de « faire quelque chose…Nous sommes extrêmement fiers de les accueillir parce qu’ils proposent des actes concrets… ce convoi pour Gaza est extrêmement important …Nos amis qui viennent de Grande Bretagne nous montrent, encore une fois, ce qu’est la solidarité… »

Et c’est bien pourquoi, dans leurs tentatives répétées pour briser le siège de Gaza, les divers convois et flottilles, organisés par des groupes soucieux d’obtenir des résultats rapides, concrets, sont si violemment combattus par les autorités israéliennes, et leurs participants si sauvagement frappés, blessés, voire assassinés (Egypte en janvier, Mavi Marmara en mai).

Jérôme Faynel – également militant du parti Vert – ne pouvait pas mieux dire. En effet, c’est en partie grâce à ce soutien continu que la population de Gaza, cruellement assiégée, menacée d’asphyxie, a pu, et peut tenir – certes au prix de grands sacrifices – a pu, et peut continuer de ne pas céder au chantage de la faim exercé par Israël.

Ces actes politiques concrets ont été marqués, en région lyonnaise, par la présence de la députée européenne Malika Benarab-Attou et – comme l’a souligné Lila Mami [6] – par l’hospitalité offerte par M. Bernard Genin, maire de Vaulx-en-Velin, « la seule municipalité en région lyonnaise qui a participé à l’accueil du convoi, qui a osé hisser le drapeau palestinien sur sa mairie. Sommé par le préfet du Rhône de le retirer, le maire a répondu qu’il ne l’enlèverait que le jour où le drapeau palestinien pourra flotter sur son État ».

C’est grâce à la vaste mobilisation internationale entraînée par ces convois et flottilles à répétition, que la population exsangue de Gaza, pourra continuer de tenir et de résister.

L’aide matérielle que peuvent apporter ces convois, est bien sûr dérisoire, une goutte d’eau au regard de l’ampleur des besoins. Mais, et cela est le plus important, par ces entreprises qui nécessitent des efforts gigantesques de la part de milliers de citoyens prêts à sacrifier leur confort et à s’engager avec leur cœur, les participants adressent un message politique à leurs gouvernements pour qu’ils se conforment enfin au droit international et mettent un terme aux persécutions d’Israël contre le peuple palestinien.

Les Palestiniens qui vivent dans la foi à Gaza savent cela ; savent quel investissement personnel impliquent de tels gestes, savent ce qu’est la valeur de cet engagement politique lié à leur engagement religieux.

Ces défis d’un genre nouveau, lancés par terre et par mer, ont eu le mérite de mettre à nu les mensonges d’Israël. Ils ont également réussi à mettre sur la sellette nos autorités politiques, si complaisantes vis-à-vis des crimes d’Israël, si soucieuses de lui éviter d’être condamné comme État voyou, si empressées à dévier l’attention sur une prétendue menace nucléaire de l’Iran pour liquider toute résistance régionale à la politique israélienne.

Le temps presse…il faut agir vite. L’adversaire israélien et ses alliés sont lancés dans une vaste offensive diplomatique trompeuse…

Si ces convois et ces flottilles n’ont pas, jusqu’ici, réussi à briser le siège, ils sont déjà parvenus à renverser ces mythes « d’unique démocratie en terre Arabe », de « Tsahal l’armée la plus morale du monde », qu’Israël cherche tant à entretenir.

Raison pour laquelle l’Etat juif d’Israël voit d’un très mauvais œil l’extension de cette fraternité entre Occidentaux et le monde arabe et musulman. Il craint l’action concrète de ces gens de convictions unis contre lui, portés par leur foi et leur conscience politique.

L’élargissement de cette mobilisation internationale pour libérer Gaza dérange beaucoup de monde. À commencer par les puissances alliées à Tel Aviv qui voient un danger dans le développement de ces liens de fraternité entre les peuples occidentaux et des Arabes et des musulmans, entre les peuples du Moyen-Orient, de l’Europe, et du reste du monde.

Last but not least, ces convois et flottilles ont mis le doigt sur les dérives de certains responsables du mouvement de solidarité qui ont choisi en catimini le camp de ces forces politiques corrompues qui, à Ramallah, collaborent avec l’occupant, et qui ont comme objectif prioritaire de liquider les autorités du Hamas [7].

Après la France [8], après leur traversée italienne qui a duré trois jours et leur a permis, à Turin, Milan, Parme, de fraterniser avec la population, les participants au convoi Viva Palestina, rejoints par quinze militants de Palestina Italia et leur sept véhicules, ont pris la mer à Ancône qui leur a réservé un accueil mémorable, pour atteindre la Grèce et continuer leur route vers Thessalonique, d’où ils vont partir vers la Turquie, la Syrie, vers l’inconu…

Ce qui les attend en mer, à leur arrivée au port d’El-Arich en Egypte, n’est peut être pas de tout repos. Le gouvernement Moubarak, compromis avec l’occupant colonial israélien, a d’avance averti qu’il interdisait l’entrée à Georges Galloway. Et que, seuls, le tiers du convoi et 100 personnes seraient autorisés à se rendre à Gaza en passant par la frontière de Rafah.

De nombreux participants au convoi Viva Palestina savent, pour l’avoir subie en janvier 2010, de quelle violence le pouvoir égyptien est capable. C’est pourquoi ils appellent d’ores et déjà les défenseurs des droits humains à alerter les médias [9] et surtout à intervenir auprès des autorités égyptiennes pour exiger de celles-ci une attitude responsable.

(*) Ancien député à la Chambre des communes du parti RESPECT The Unity Coalition.

(**) Voir : http://www.vivapalestina.org/
Ce cinquième convoi s’effectue en partenariat avec le Comité International pour rompre le Siège de Gaza, des associations d’Europe, de Turquie, du Moyen-Orient, d’Australie, d’Inde, d’Afrique du Sud, etc. Georges Galloway précisait récemment : « J’ai décidé le 10 janvier 2009 de lancer un convoi d’aide matérielle, appelé Viva Palestina. Je crois fortement en la tactique qui consiste à mettre en évidence le siège pour mieux le briser. Briser le blocus est un devoir pour le monde entier. Je me suis rendu trois fois en Palestine ces 12 derniers mois. En d’autres termes, l’action parle plus fort que les mots et il est temps de passer à l’action. Viva Palestina s’est propagé à travers le monde, maintenant nous avons Viva Palestina Malaisie, Etats-Unis, Australie, Afrique du Sud, Angleterre, Irlande et maintenant depuis la semaine dernière Viva palestina Arabie. »

Notes

[1] Nombre d’entre eux ont participé à d’autres convois par terre ou par mer et beaucoup restent marqués par les monstruosités commises par l’armée israélienne, à Gaza ou sur le navire Mavi Marmara.

[2] Collectif 69 Palestine. Voir :
http://collectif69palestine.free.fr/article.php3 ?id_article=266

[3] Voir : http://aqsasyarif.com/

[4] Extrait d’un entretien non publié avec Kevin Ovenden, 42 ans, britannique, de père iranien, qui a survécu au massacre perpétré le 31 mai 2010 par le commando militaire israélien contre le navire turc Mavi Marmara au cours duquel 9 ressortissants turcs ont été sommairement exécutés, d’autres grièvement blessés.

[5] Voir : « Viva Palestina », et maintenant ? », par Stuart Littlewood, 14 janvier 2010.
Voir également : « Tous unis avec les musulmans pour briser le siège de Gaza – Rencontre avec George Galloway », par Silvia Cattori, silviacattori.net, 28 janvier 2010.

[6] Lila Mami, vice présidente du Collectif 69 et membre d’Europalestine, a organisé, avec Jérôme Faynel, l’accueil du convoi Viva Palestina dans la région lyonnaise.

[7] Voir : 
 « A quoi sert Salam Fayyad ? », par Pierre-Yves Salingue, 27 août 2010. 
 « Les fantassins français de Salam Fayyad », par Pierre-Yves Salingue, 28 août 2010. 
 « Une autre voie est possible », par Pierre-Yves Salingue, 29 août2010.

[8] Avant de quitter la France, des membres du convoi ont été soumis à de longues interrogations par de nombreux policiers français, et leurs passeports photocopiés. Rien ne pouvant leur être reproché, ils ont été relâchés et ont pu passer en Italie, pour être accueillis, à la sortie du tunnel de Fréjus, par Diana Carminati et Alfredo Tradardi, responsables d’ ISM Italia ( Voir : http://www.ism-italia.org/2010/08/per-rompere-assedio-della-striscia-di-gaza/ ).
A noter qu’hormis des petits groupes de jeunes des centres sociaux et des simples citoyens, les grandes associations pro-palestiniennes en Italie ont boudé le convoi Viva Palestina et n’ont pas participé à son organisation.

[9] Tandis que nos médias continuent d’ignorer toute action, aussi massive soit-elle, en faveur de la population martyrisée de Gaza (ils n’ont montré aucune images du convoi), dans les pays arabes et musulmans les gens peuvent suivre le convoi Viva Palestina grâce aux reportages quotidiens d’Aljazzera et de Press TV.



Articles Par : Silvia Cattori

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