Les gouvernements britannique et suédois continuent leur persécution de Julian Assange

Le 5 février, l’Organisation des Nations Unies a publié une déclaration constatant que le fondateur de WikiLeaks Julian Assange avait été soumis à une «détention arbitraire» par la collusion des gouvernements britannique et suédois.

Le Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire (UNWGAD) est un groupe d’experts, fondé en 1991 avec pour mandat d’«enquêter sur les allégations d’individus privés de leur liberté de manière arbitraire ou incompatible avec les normes internationales des droits de l’homme, et de recommander des remèdes tels que la libération de la détention et l’indemnisation, le cas échéant. ».

Suite à la publication de l’avis de l’ONU, Assange a fait une déclaration à la presse via une vidéo en direct de l’ambassade équatorienne, où il est réfugié depuis plus de trois ans et demi. Il a dit qu’il avait été détenu au total pendant cinq ans et demi: «Aujourd’hui cette détention sans inculpation a été jugée illégale. Je considère que le résultat est une justification. » La question est « maintenant une question de jurisprudence réglée », a-t-il ajouté.

En publiant ses conclusions, UNWGAD a expliqué qu’elles étaient « juridiquement contraignantes dans la mesure où elles sont basées sur le droit international contraignant des droits de l’homme, comme le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) ». Il a ajouté: «Les avis de l’UNWGAD sont également considérés comme faisant autorité par les institutions judiciaires internationales et régionales de premier plan, y compris la Cour européenne des droits de l’homme. »

Dans la ligne de leurs actions depuis le début de leur chasse aux sorcières contre Assange, les gouvernements britannique et suédois ont refusé de respecter le droit international et ont rejeté le verdict de l’ONU. Le ministère des Affaires étrangères britannique a déclaré: «Cela ne change rien. Nous rejetons complètement toute affirmation selon laquelle Julian Assange est victime de détention arbitraire ».

L’opinion des cinq membres de la commission UNWGAD ne contient que cinq paragraphes, mais c’est un réquisitoire dévastateur contre la détention illégale d’Assange, imposée par le Royaume-Uni et la Suède, en alliance avec le gouvernement des États-Unis.

« Assange a été soumis à différentes formes de privation de liberté: la détention initiale dans la prison de Wandsworth suivie de l’assignation à résidence et son internement à l’ambassade équatorienne », déclare la commission. « Ayant conclu qu’il y avait une privation continue de liberté, le Groupe de travail a également constaté que la détention était arbitraire parce qu’il avait été maintenu à l’isolement au premier stade de la détention et à cause du manque de diligence du Procureur suédois dans ses enquêtes, ce qui a abouti à la longue détention de M. Assange ».

Assange est détenu en violation de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP). UNWGAD déclare constater que « la détention [d’Assange] est en violation des articles 9 et 10 de la DUDH et des articles 7, 9 (1), 9 (3), 9 (4), 10 et 14 du PIDCP. »

Le Groupe de travail appelle la Suède et le Royaume-Uni à assurer « la sécurité et l’intégrité physique » d’Assange et « à faciliter l’exercice de son droit à la liberté de mouvement d’une manière opportune et de veiller à la pleine jouissance de ses droits garantis par les normes internationales de la détention ».

La déclaration est basée sur le « Working Group’s Opinion on Julian Assange’s case (Avis du Groupe de travail sur le cas de Julian Assange », adopté le 4 décembre, 2015. Les 18 pages de documents représentent les conclusions sur la demande soumise en septembre 2014 par l’équipe juridique d’Assange. Les gouvernements britannique et suédois ont également présenté leur dossier à UNWGAD. Les conclusions du Groupe de travail sont une réfutation écrasante de toute les affirmations des autorités britanniques et suédoises que l’arrestation et la détention d’Assange ont été menées conformément au droit international.

L’avis de décembre déclare: «On n’a pas garanti à Assange les normes internationales de procédure en bonne et due forme et les garanties d’un procès équitable au cours de ces trois moments différents: la détention à l’isolement dans la prison de Wandsworth, les 550 jours d’assignation à domicile, et la poursuite de la privation de liberté à l’ambassade de la République de l’Equateur à Londres, Royaume-Uni ».

Il fait remarquer: «Le Groupe de travail constate avec préoccupation que le seul fondement de la privation de liberté de M. Assange semble être le Mandat d’Arrêt européen émis par le procureur public suédois basé sur une allégation de crime. Jusqu’à la date de l’adoption de cet avis, M. Assange n’a jamais été officiellement inculpé en Suède « . [Italiques ajoutés]

L’avis conclut: « Assange a été privé de la possibilité de fournir une déclaration, qui est un aspect fondamental du principe de l’audi alteram partem, l’accès aux éléments à décharge, et donc la possibilité de se défendre contre les allégations; (2) la durée de cette détention est ipso factoincompatible avec la présomption d’innocence ».

La déclaration d’UNWGAD du 5 février déclare: «Dans cet avis [de décembre], le Groupe de travail a reconnu que M. Assange a droit à sa liberté de mouvement et au dédommagement ».

L’UNWGAD est parvenu à son verdict par un vote de 3 contre 1. Il a fait savoir que, «Étant donné que M. Assange est un citoyen australien, l’une des membres [Mme Leigh Toomey] du Groupe de travail qui partage sa nationalité s’est exclue volontairement de participer aux délibérations. » Ce fut conformément à l’article 5 de ses Méthodes de Travail, a dit UNWGAD.

L’unique opinion dissidente a été rendue par Vladimir Tochilovsky, un procureur ukrainien. Tochilovsky a affirmé qu’Assange n’avait pas été détenu, de sorte que UNWGAD n’avait même pas de mandat pour entendre son cas. Le gouvernement suédois a soutenu l’opinion fallacieuse de Tochilovsky.

Il ne fait aucun doute que le verdict du Groupe de travail a été rendu en dépit de l’opposition acharnée des gouvernements américain, britannique et suédois.

L’ancien président du comité UNWGAD, le professeur Mads Andenas, un avocat norvégien, a déclaré vendredi au Guardian, « Je suis absolument convaincu que [le Groupe] a subi une très forte pression politique. » Andenas a terminé son mandat l’été dernier et a participé aux premières étapes de l’élaboration du rapport sur la détention d’Assange.

Andenas a soutenu les conclusions de la commission favorables à Assange, ajoutant: «Ceci est une décision courageuse qui est importante pour la primauté du droit international »

L’hypocrisie des puissances impérialistes qui ont souvent utilisé les conclusions de la commission de l’ONU sur les détentions arbitraires à leurs propres fins prédatrices est stupéfiante. Andenas a correctement observé que, « si cette conclusion avait été rendue contre tout autre pays avec un bilan droits de l’homme auquel on ne souhaiterait pas se comparer, ces Etats [la Suède et du Royaume-Uni], auraient dit nettement que le pays [fautif] devrait se conformer à la décision du Groupe de travail ».

L’hostilité acharnée des gouvernements du Royaume-Uni et de la Suède, en collaboration avec le gouvernement Obama, à l’égard du droit international va de pair avec leur assaut sur les droits fondamentaux démocratiques et sociaux de la classe ouvrière, rendu nécessaire par la poursuite de l’austérité brutale à l’intérieur et de la guerre impérialiste à l’extérieur.

Le rapport UNWGAD démolit l’assertion que la vendetta judiciaire contre Assange aurait à voir avec une poursuite de la «justice» de la part de ses accusateurs suédois. Les procureurs suédois auraient pu facilement, avec le plein acquiescement d’Assange, l’avoir interrogé à tout moment depuis son arrestation en décembre 2010 à Londres. Que ceci n’ait pas été fait tient au fait qu’ils voulaient assurer l’extradition d’Assange vers la Suède, afin de l’expédier aux États-Unis où il risquait de payer, peut-être avec sa vie, ce qu’ils considèrent être son vrai «crime» — la révélation par WikiLeaks des actes odieux commis par les Etats-Unis et leurs alliés en Irak, en Syrie, en Libye, en Afghanistan et ailleurs dans le monde.

Les travailleurs et les jeunes du Royaume-Uni, des États-Unis, de la Suède et du monde entier doivent tout faire pour empêcher les efforts de réduire Assange au silence et exiger sa liberté immédiate.

Robert Stevens

L’auteur recommande aussi : Arrêtez la persécution de Julian Assange!

Article paru en anglais, WSWS, le 6 février 2016



Articles Par : Robert Stevens

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