Les préparatifs de guerre contre l’Iran s’accélèrent

Le 8 mars, le président de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) Mohamed Al-Baradeï annonce au terme de la Conférence des gouverneurs de Vienne la remise de son rapport sur l’Iran à l’ONU en vue d’une action du Conseil de sécurité. Ce rapport fait suite aux pressions des États-Unis et de l’Europe contre la reprise du programme nucléaire iranien à des fins civiles.

Dans une déclaration, il mentionne que le renvoi à l’ONU est « une nouvelle phase pour la diplomatie. Le Conseil de sécurité va joindre ses forces aux efforts de l’AIEA pour s’assurer que l’Iran travaille de pair avec nous. Il faut s’assurer que l’Iran prend les mesures nécessaires pour bâtir une relation de confiance. »

Les menaces américaines

Le point de vue de l’AIEA est conforme aux visée américaines. Le vice-président américain Dick Cheney a menacé l’Iran de « conséquences douloureuses » si elle ne se pliait pas aux exigences de la « communauté internationale ». Et ce, suite à une déclaration faite plus tôt cette semaine enjoignant l’Iran de mettre un terme à son programme nucléaire sous peine de « conséquences sérieuses. » Il affirme que « toutes les options » sont considérées pour résoudre la crise avec l’Iran.

John Bolton, ambassadeur des États-Unis à l’ONU, a exprimé devant la convention annuelle du Comité des affaires publiques américano-israélien, un lobby sioniste, un point de vue semblable en déclarant que les États-Unis doivent « être prêts à adopter des solutions globales et à utiliser tous les outils à notre disposition pour supprimer la menace que constitue le régime iranien. »

Les menaces des impérialistes américains font parties de leur projet hégémonique pour assurer leurs intérêts au Moyen-Orient. La perspective d’une attaque avec le concours d’Israël, seule puissance nucléaire de la région, est imminente. La saisie du dossier par le Conseil de sécurité de l’ONU, pour décider de sanctions, est le premier pas vers la constitution d’une « coalition » pour mener une guerre d’agression « préventive ». La justification de la « menace terroriste » et de la célèbre phrase de George W. Bush décrivant l’Irak, l’Iran et la République démocratique et populaire de Corée (RPDC) comme « l’axe du mal» sert ces desseins.

Le journal britannique The Daily Telegraph a révélé, en février dernier, que le Pentagone planifie de mettre fin au programme nucléaire iranien par des frappes aériennes en partance d’Israël. Il rapporte également que le secrétaire de la défense Donald Rumsfeld dirige la logistique des préparatifs du Central Command and Stategic Command. Si les « efforts diplomatiques » ne réussissent pas à amenuiser les « ambitions nucléaires » de l’Iran, ils séviront. Il est prévu que les frappes préventives feraient environ 10 000 victimes.

La menace plane réellement sur l’Iran puisque dès novembre des simulations de frappes à l’aide d’armes classiques et nucléaires se sont déroulées. Cet exercice baptisé « Global Lightning » contre un « ennemi fictif » suppose des préparatifs avancés contre l’Iran. Ces manœuvres de l’US Strategic Command s’inscrivent dans « une opération militaire de maintien de la paix qui consistera à bombarder les installations nucléaires iraniennes. »

Rapport de forces au Moyen-Orient

La propagande américaine d’une soi-disant menace nucléaire du programme civile de l’Iran masque la vraie menace au Moyen-Orient. En effet, à l’exception de la force d’occupation américaine, Israël est le seul pays possédant un arsenal nucléaire.

En 1979, Israël a effectué un premier essai nucléaire dans le Pacifique avec la collaboration de l’Afrique du Sud ségrégationniste sous la supervision des États-Unis. Elle aurait aujourd’hui, selon les États-Unis, un peu plus de 80 ogives en sa possession. Selon des experts, Israël possèderait entre 100 et 200 ogives.

L’alliance israélo-américaine sert de base aux intérêts impérialistes des États-Unis au Moyen-Orient. De plus, elle protége et encourage la politique criminelle d’Israël envers les Palestiniens. Par le passé, Israël avait déjà servi de base pour attaquer les installation nucléaire en Irak en 1981.

Depuis l’invasion de l’Irak, George W. Bush s’est lancé dans une escalade de menaces contre les pays qui refusent de se soumettre à sa politique. Ainsi, la Syrie et l’Iran ont été dénoncé comme États-voyous et une campagne de désinformation a été entreprise pour préparer l’opinion publique à des actions militaires contre ces pays.

Malgré ces menaces de représailles, l’Iran persiste à développer son programme nucléaire civile et à maintenir une politique indépendante. Le docteur Gholam Ali Addad Adel, président du Parlement iranien, en visite à La Havane, a démoli les arguments américains en précisant que les États-Unis « veulent sanctionner l’Iran parce qu’il développe l’énergie nucléaire à des fins pacifiques et ils soutiennent le gouvernement d’Israël qui possède plus de 200 ogives nucléaires, n’est pas membre de la AIEA (Agence internationale de l’énergie atomique), et n’a pas signé le Traité de non prolifération. »

Les stratégies d’intimidation des États-Unis envers l’Iran s’inscrivent dans la même veine que la politique hégémonique appliquée à l’ensemble du monde. Leurs violations des droits de la personne, de la souveraineté des nations et des décisions prises par l’ONU placent cette puissance au-dessus des lois internationales. Par conséquent, toutes les nations sont soumises à une logique de deux poids, deux mesures. Le président du Parlement iranien a d’ailleurs « fait remarquer que tandis que Cuba et l’Iran sont accusés par Washington de violer les droits humains, le monde est témoin de faits tels que ceux qui se passent avec les prisonniers dans les prisons de Guantanamo, Abu Ghraib et dans d’autres où l’on torture et l’on humilie les prisonniers. »

Le TNP et la vraie menace nucléaire

Lors de la Conférence de l’ONU sur la non-prolifération des armes nucléaires de mai 2005,les cinq États nucléaires déclarés en l’occurrence les États-Unis, la Russie, la Chine, la France et la Grande-Bretagne ont refusé de s’engager à éliminer les armes nucléaires. Ce refus des membres du Conseil de sécurité a semé une vague d’inquiétude chez tous les peuples du monde. Par ce geste, ils montrent un désir de conserver une emprise sur les nations qui ne possèdent pas cette technologie.

Le Traité de non-prolifération des armes nucléaires est entré en vigueur en juillet 1970. « Le traité favorise les usages pacifiques de l’atome, en affirmant le droit inaliénable de toutes les parties au traité à développer la recherche, la production et l’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques. Tous les pays signataires, et notamment les États les plus avancés dans le domaine nucléaire civil, s’engagent ainsi à faciliter un échange aussi large que possible d’informations, d’équipements et de matières nucléaires pour les utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire.1»

Ainsi, en vertu du TNP, l’Iran est en droit de développer un programme nucléaire à des fins civiles. L’obstacle principal de l’application juste et responsable du traité est les visées hégémoniques anglo-saxonnes au Moyen-Orient et ailleurs dans le monde.

Les États-Unis ont transformé le TNP en coquille vide par ses nombreuses violations. Les discussions de la conférence de 2005 ont clairement démontré ce fait. Par exemple, l’appui matériel aux programmes nucléaires de l’Inde et d’Israël contreviennent au traité de non-prolifération. En plus, depuis 2005 les États-Unis ont intensifié leur programme de recherche en vue de fabriquer des armes atomiques encore plus destructrices.

Depuis la décision du Sénat américain en 2003, les armes nucléaires tactiques (mini-bombes nucléaires de faible puissance) de nouvelle génération dont la puissance explosive est égale à 6 fois celle de la bombe d’Hiroshima sont considérées comme « sans danger pour les populations civiles » parce qu’elles explosent sous terre.

Le secrétaire à la défense Donald Rumsfeld déclarait à l’époque qu’il « y a quelque 70 pays qui poursuivent des programmes clandestins. En ce moment, nous n’avons pas la capacité de traiter avec cela. La seule chose que nous avons, ce sont de très grosses et très sales armes nucléaires.» L’aveu est clair. Les États-Unis mènent soi des programmes nucléaires clandestins ou bien l’AIEA ferme les yeux et accepte la prolifération nucléaire pour certains États seulement.

En ce qui concerne le secret entourant le programme nucléaire américain, 280 millions de pages de documents sont tenues secrètes par le Département de l’énergie2.

Pourtant, historiquement, le gouvernement américain a été le seul à utiliser l’arme nucléaire à des fins offensives. En 1945, il a littéralement rasé les villes japonaises d’Hiroshima et de Nagasaki simplement pour observer les effets de la nouvelle arme.

L’AIEA, elle-même gardienne du TNP, se comporte en officine de la politique américaine dans le monde. Elle refuse de sanctionner les États-Unis pour ses nombreuses violations et refuse d’accepter des inspections de ses installations nucléaires.

Donc, l’Iran a bien le droit de mener son programme civil tout comme la République populaire et démocratique de Corée (RPDC). La campagne de désinformation sur ces programmes se basent uniquement sur des motifs politiques pour mettre au pas tout pays ne suivant pas la politique américaine.

Ces faits démontrent la vraie menace nucléaire : les États-Unis, son armée au Moyen-Orient et dans le monde. La politique nucléaire agressive et la course aux armements répondent à une nécessité guerrière et non à une politique de paix.

Franc-Parler condamne la logique impérialiste des « deux poids, deux mesures » et les menaces d’une attaque préventive contre l’Iran. Chaque nation a le droit de développer les programmes qu’elle veut en conformité au droit international. À l’époque actuelle, les confrontations entre les pays au passé et au présent colonial ainsi que les peuples qui refusent l’hégémonie et les menaces s’intensifient. La souveraineté et le droit à l’autodétermination doivent être absolument affirmées et prises en considération dans le développement des relations internationales. C’est la voie des peuples pour développer un système politique et économique basé sur la culture et l’histoire nationale. L’eurocentrisme, la théorie de « la guerre des civilisations », et la mission civilisatrice de l’homme blanc sont les obstacles idéologiques au rayonnement et à la fraternité des peuples. Nous faisons nôtre l’appel lancé par le président du Parlement iranien. «La résistance est notre responsabilité et notre seul choix. »

1-http://fr.wikipedia.org/wiki/Trait%C3%A9_de_non-prolif%C3%A9ration_nucl%C3%A9aire
2-Données de 1995 ( U.S. Nuclear Weapons Cost Study Project) http://www.brook.edu/fp/projects/nucwcost/weapons.htm

(Franc-Parler, Vol.1, No.2 – 21 mars 2006)



Articles Par : Franc-Parler

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