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Nomination de Rahm Israel Emanuel : Obama arnaque-t-il sa base ?
Par Prof. Stephen Zunes
Mondialisation.ca, 10 novembre 2008
Alternet..org 10 novembre 2008
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« Obama a demandé au vétéran conservateur de Clinton, Rahm Emanuel, d’être son secrétaire général (il a accepté ndlt) – – Ce n’est pas un bon signe pour les progressistes ». Rahmbo comme il est surnommé, soutient Wall Street, les Israéliens, et la Mondialisation.

Nomination De Rahm Israel Emanuel : Obama Arnaque-T-Il Sa Base ?

J’aurai aimé célébrer la victoire remarquable d’Obama pendant un jour ou deux avant de redevenir cynique. J’aurai vraiment voulu.

Et pourtant, moins de 24 heures après que les premiers bureaux de vote aient fermés, le président élu a choisi son secrétaire général – – peut être la position la plus puissante dans l’administration – – Rahm Emanuel, le Démocrate le plus conservateur du Congrés.

Le secrétaire général agit principalement comme le gardien du bureau du président, determinant qui le président peut voir pour lui fournir conseils et analyses. Obama est connu pour avoir une bonne écoute et être ouvert aux idées de la gauche de même qu’ aux idées plus centristes. Avec cette nomination l’accés de ces voix auprès du Président est remis en question.

Le représentant au Congrés de l’Illinois, Rahm Emanuel, est membre d’un groupe de Démocrates de centre droit pro bizness, le New Democrat Coalition (NDC), qui a pour mission d’écarter le parti Democrate de sa base plus libérale et progressiste (équivalent centre gauche en politique française = PS ndlt). Au nombre de 58 dans l’actuelle Chambre des Représentants, le NDC a travaillé en rapproché aves des collègues Républicains pour faire avancer et faire voter des lois telles que celles fournissant au Président G.W. Bush une autorité en matière commerciale courcircuitant les efforts des syndicats, des environnementalistes et d’autres groupes d’interêt public qui défendent une politique commerciale équitable.

Emanuel a commencé sa carrière politique comme conseiller experimenté et collecteur de fonds en chef pour la campagne à succés du candidat à la mairie de Chicago, Richard M. Daley, pour qu’il reprenne la mairie des mains des reformistes qui avaient défié la machine politique corrompue de son père, Richard J. Daley. Plus tard, Emanuel est devenu haut conseiller de Bill Clinton à la Maison Blanche de 1993 à 1998, travaillant comme Assistant du président aux Affaires Politiques et puis comme haut conseiller du président pour la Politique et la Stratégie, et on lui a attribué un rôle majeur dans la droitisation de la politique étrangère et intérieure de l’Administration Clinton. Emanuel a été le seul fonctionnaire le plus important impliqué pour faire voter le NAFTA, North American Free Trade Agreement, la loi qui a mis fin aux aides pour les familles ayant des enfants dependants (AFDC) et la loi draconienne de Clinton contre les actes criminels, entre autres lois.

Emanuel a quitté l’Administration en 1998, et a travaillé comme banquier d’investissement à Chicago, où il a amassé une fortune de 18 millions de dollars en mois de trois ans avant d’être élu au Congrès.

A la tête du Comité de Campagne Démocrate du Congres depuis 2004, Emanuel a fait la promotion des candidats pro guerre et pro bizness de centre droit contre les candidats anti guerre et pro travailleurs lors des primaires, deversant des millions de dollars en donations de Démocrates de tous le pays dans les campagnes pour favoriser les sous fifres conservateurs qui ont ses faveurs, pour battre les candidats plus progressistes.

Emanuel a été un important supporter de la résolution sur la guerre en Irak qui a autorisé l’invasion de l’Irak. C’est efffectivement le seul des 9 membres Démocrates représentant l’Illinois au Congrés qui a accepté d’accorder à Bush cette autorité sans précédent d’envahir un pays de l’autre côté du globe qui ne constituait pas une menace à l’époque pour les Etats Unis. Encore plus troublant, quand Tim Russert de « Meet The Press » lui a demandé s’il aurait voté pour autoriser l’invasion  » sachant qu’il n’y avait pas d’ ADM », Emanuel a répondu qu’effectivement il aurait voté en faveur, reconnaissant ainsi que son soutien à la guerre n’était pas un problème de sécurité nationale, mais une histoire de pétrole et d’Empire. Il a aussi voté, sans surprise, avec les Républicains pour continuer le financement sans condition de la guerre en Irak, et s’est opposé en permanence à d’autres Démocrates voulant fixer un agenda de retrait des troupes d’occupations US de ce pays, et à d’autres efforts du Congrès pour mettre fin à cette guerre.

Alors que les déficits budgétaires battaient tous les records, Emanuel a été un supporter passionné de l’augmentation du budget du Pentagone et a resisté aux efforts de ses collègues Démocrates de réduire les excés de l’opulent budget militaire de l’Administration Bush. Par exemple, il a voté de façon répétée contre des amendements pour réduire les financements des systèmes de defense anti missiles destabilisants et dangereux de Bush, et a même voté contre un amendement pour identifier les dépenses superfues du Pentagone en examinant les besoins, l’opportunité et les coûts des systèmes de defense de la Guerre Froide conçus pour lutter contre l’ex Union Soviétique.

Un important faucon en ce qui concerne l’Iran, Emanuel a voté contre les efforts des Démocrates pour empêcher l’Administration Bush de lancer une action militaire contre ce pays et s’est joint aux affirmations exagérées de l’Administration Bush concernant la soit disante menace nucléaire posée par l’Iran.Cependant, il ne s’oppose pas à la prolifération nucléaire si cela implique des alliés des US. Emanuel a constamment voté contre toute une série d’amendements Démocrates qui auraient renforcé les gardes fous dans l’accord de coopération nucléaire entre l’Inde et l’Administration Bush, pour empêcher que l’assistance US ne soit utilisée en soutien au programme d’armes nucléaires de l’Inde.

Emanuel est aussi un faucon proéminent en ce qui concerne Israël, attaquant l’Administration Bush lorsqu’elle s’est permise de critiquer les politiques d’assassinats et de violations des droits humains par Israël. Il a aussi été un défenseur proéminent des attaques d’Israël contre le Liban, allant même jusquà remettre en cause la crédibilité d’Amnesty International et d’autres organisations de défense des droits de l’homme qui ont rapporté les violations israéliennes du droit international humanitaire. Le père d’Emanuel a émigré d’Israël dans les années 50, il y avait été membre d’un groupe terroriste, l’Irgoun, qui a été responsable de toute une série d’attaques terroristes contre des civils palestiniens et britanniques dans la Palestine mandataire pendant les années 40. Emanuel lui même a servi comme volontaire civil dans l’armée israélienne au début des années 90.

Ce n’est pas clair à quel point la selection d’Emanuel par Obama sera un coup sérieux porté à l’encontre de tous ceux qui avaient espéré qu’Obama oriente le pays dans une direction plus progressiste. C’est facile de voir que c’est taloche donnée aux éléments anti guerre progressistes du parti à qui Obama doit son election, particulièrement suite à sa selection de Joe Biden comme vice président ( voir mes articles « Biden’s Foreign Policy Experience  » http://fpif.org/fpiftxt/5549  et « Biden, Irak, and Obama’s Betrayal » http://fpif.org/fpiftxt/5492 ).

Cependant, cela ne veut pas dire nécessairement qu’Obama comme président poursuivra rien de mieux qu’une politique clintonesque avec un agenda de centre droit. Quelqu’un avec l’intelligence d’Obama, le savoir, et les qualités de dirigeant ne peut être excessivement limité par l’influence de son secrétaire général comme d’autres présidents moins capables ont pu l’être. En même temps, cette nomination choquante d’Emanuel illustre bien le besoin pour la base progressiste qui l’a amené au pouvoir de ne pas célébrer trop longtemps et de reconcentrer nos energies pour faire fortement pression pour s’assurer que le changement qu’Obama a promis est quelque chose en quoi nous pouvons réellement croire. 

Article original en anglais,  www.alternet.org, 7 novembre 2008. 

Traduction Mireille Delamarre pour www.planetenonviolence.org

Stephen Zunes est professeur de science politique, occupe une chaire d’etudes du Moyen Orient à l’Université de San Francisco et sert d’analyste politique experimenté pour Foreign Policy In Focus www.fpif.org

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