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Offensive contre l’Iranophobie
Par Dr. Kaveh L. Afrasiabi
Mondialisation.ca, 10 novembre 2008
Asia Time 10 novembre 2008
Url de l'article:
https://www.mondialisation.ca/offensive-contre-l-iranophobie/10888

A la veille de l’election présidentielle américaine, le dirigeant du Conseil de Coopération du Golfe ( GCC) s’est rendu à Téhéran, une importante visite considérée dans la région du Golfe Persique comme une ouverture diplomatique majeure envers Téhéran par les Emirats pétroliers qui ont le soutien des US.

 

Offensive Contre l'Iranophobie

Presque une année après l’importante participation du président Mahmud Ahmadinejad au sommet du GCC à Doha en decembre 2007, où il a proposé un « nouveau chapitre de coopération » entre l’Iran et les états du GCC – Bahrain, Koweit, Oman, Qatar, Arabie Saoudite, Emirats Arabes Unis – ces derniers ont finalement mis de côté leurs differentes craintes et décidé de considérer les propositions economiques politiques et sécuritaires d’Ahmadinejad.

« Nous proposons la conclusion d’un accord de sécurité » avait annoncé Ahmadinejad à Doha et maintenant le secrétaire genéral du GCC, Abdurrahman bn Hammad al Attivah s’en est fait l’écho, en disant aux journalistes à Téhéran  » les propositions d’ Ahmadinejad sur les problèmes de sécurité sont également concrètes et plusieurs comités travaillent dessus. »

Pour l’Iran c’est un avantage diplomatique qui tombe à pic, et la visite d’al-Attiyah est aussi un bon présage pour le régime irakien soutenu par l’Iran face à ses difficultés, car jusqu’à présent ce dernier avait été boudé par le bloc commercial du GCC, position qui n’est plus de mise compte tenu de la stabilité politique croissante du gouvernement du premier ministre Nuri al-Maliki, qui a maintenant mis l’accent sur le départ des troupes étrangères d’Irak comme précondition pour signer un pacte de sécurité US-Irak. Maliki a également annoncé qu’il enverrait l’ébauche de l’accord sur ce pacte aux voisins de l’Irak pour qu’ils en prennent connaissance, confirmant ce qu’avait envisagé cet auteur plus tôt à savoir que le sujet n’est pas simplement une affaire interieure à l’Irak mais plutôt un problème régional. (1)

Juste après le raid américain mal venu à l’intérieur de la Syrie le mois dernier qui a provoqué de sérieuses tensions dans les relations Syrie Irak , le monde Arabe, dont les états du GCC, est dans un nouvel état d’esprit plus sûr pour affronter les actions US perçues comme arrogantes et destabilisatrices, inclus à l’égard de l’Iran.

Ainsi donc, alors que jusqu’à présent le GCC avait exprimé des inquiétudes sur la nature du programme nucléaire iranien, résultat de la transparence du nucléaire iranien et d’efforts diplomatiques, les états du GCC se sentent actuellement rassurés en ce qui concerne le programme nucléaire de l’Iran et ne sont plus sous l’emprise de « l’iranophobie » dirigée par Washington et Tel Aviv.

« Nous soutenons le programme nucléaire de l’Iran,qui est entièrement pacifique » a déclaré catégoriquement al-Attiyah, ajoutant qu’il était « surpris » que le monde ferme les yeux sur la posséssion par Israël d’Armes de Destruction Massive.

C’est un revers pour la stratégie de l’Administration Bush d’alliances politiques au Moyen Orient entre les « modérés » versus les « états voyous » conduits par l’Iran et la Syrie, et celle d’éloigner la Syrie de l’Iran. Aucune de ces stratégies n’a fonctionné, et résultat, cela appelle une véritable nouvelle stratégie au Moyen Orient de la part du prochain président des US.

Si c’est le sénateur Démocrate, Barak Obama, avec les vieux soutiens à Israël, tel le vétéran diplomate Dennis Ross, qui conseille Obama sur le Moyen Orient, et a conçu une politique à l’égard de l’Iran qui manque absolument de nouveauté, cela ne sera pas un signe de véritable changement en ce qui concerne la politique US au Moyen Orient. Ross et pratiquement tous les autres conseillers en matière de politique etrangére qui entourent Obama sont unanimement sous l’emprise de la « menace grave » d’un « Iran possédant l’arme nucléaire » et par conséquent, cela doit être une surprise choquante pour eux que les voisins arabes de l’Iran dans le Golfe Persique ne partagent pas cette perception d’une menace.

En ce qui concerne les relations futures Iran -GCC, à l’instar de la visite précédente de l’Emir du Qatar, le Sheikh Hamad bin Khalifa al- Thani, en août, al-Attiyah s’est principalement concentré sur l’expansion de la cooperation économique avec l’Iran, comme précondition à une coopération plus vaste. Le libre échange entre l’Iran et certains des états du GCC, tel que les Emirats Arabes Unis, est en plein essort et maintenant les efforts se concentrent sur l’étape suivante qui est la mise en place des fondations pour un libre marché régional.

En fait, les états du GCC sont impressionnés par les autres efforts régionaux de l’Iran, tels que la coopération avec les états membres de l’Organisation de Shangai, qui a intégré l’Iran comme observateur, alors même que la semaine dernière le premier ministre russe Vladimir Poutine a dit au premier vice président iranien, Parviz Dawoodi, que la Russie soutenait l’idée que l’Iran puisse avoir le statut de membre, de même pour l’Organisation de Coopération Economique (2)

Les effets d’une telle démonstration d’efforts accomplis pour la stabilité régionale ne pouvaient qu’avoir un impact positif sur le comportement du GCC à l’égard de l’Iran, ce plus ou moins rapidement. Maintenant, après des hauts et des bas, les états du GCC ont abouti à une nouvelle conclusion solide à savoir le besoin d’établir des relations intégrales avec leur voisin iranien sûr, la plupart, sinon tous les dirigeants du GCC, se ralliant, prudemment peut être, à la déclaration de Poutine qu’  » un Iran puissant est bénéfique pour la région ».

Pas étonnant que d’autres dirigeants sûrs de nations en développement aient soutenu Ahmadinejad et cela inclut le dirigeant populiste du Brésil, Luda de Silva, qui doit se rendre à Téhéran peu de temps après un sommet Iran Brésil très attendu.

De toute façon, l’économie reste la préoccupation N° 1 des electeurs iraniens de même que celle des électeurs américains actuellement et la grande question c’est de savoir si Ahmadinejad pourra transformer les progrés diplomatiques réalisés avec les états du GCC en bénéfices économiques conséquents, étant donné les intentions des US de resserrer les sanctions contre l’Iran ?

Heureusement pour l’Iran, la légitimité des sanctions imposées a été érodée par le fait que l’Iran coopére avec l’AIEA, et l’importante visite du secrétaire général du GCC est en soit une indication que le régime des sanctions a échoué. 

Article original en anglais, www.atimes.com, 4 novembre 2008.  

Traduction Mireille Delamarre pour www.planetenonviolence.org  

Notes

1. Voir l’interview avec Kaveh L Afrasiabi, ancien conseiller de l’équipe de négociation su rle nucléaire iranien Cross-Border Attack on Syria Raises Iranian Eyebrows – http://www.cfr.org/publication/17648/  – Council on Foreign Relations, 30 Octobre 2008.

2. Pour plus d’information sur ECO, consulter le site : www.ecosecretariat.org.

Kaveh L Afrasiabi, PhD, est l’auteur de After Khomeini: New Directions in Iran’s Foreign Policy (Westview Press) et co auteur de « Negotiating Iran’s Nuclear Populism », Brown Journal of World Affairs, Volume XII, Issue 2, été 2005, avec Mustafa Kibaroglu. Il a également écrit « Keeping Iran’s nuclear potential latent », Harvard International Review, et est l’auteur de Iran’s Nuclear Program: Debating Facts Versus Fiction. Son dernier livre Reading In Iran Foreign Policy After September 11 (BookSurge Publishing , 23 Octobre 2008) is maintenan tdisponible.

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