Orwell se fait l’Amérique


Bienvenue dans le plaisant abysse d’un vortex orwellien.

2013 ressemble de plus en plus à 1984. Dans deux articles précédents pour RT et Asia Times Online, j’ai observé les niveaux superposés de conséquences qu’impliquent les attentats de Boston.

Devant tant de questions demeurant sans réponses concernant les événements ayant suivi les explosions, il est temps d’examiner une autre liste comprenant possiblement les 10 absurdités les plus persistantes dans cette affaire, sans toutefois esquiver d’autres questions cruciales : pourquoi un exercice d’alerte à la bombe, organisé par Craft, avait lieu durant le marathon et pourquoi l’a-t-on nié avec véhémence? Pour cette liste de question, je remercie grandement le lectorat bostonien d’Asia Times Online.

Choisissez votre Mercedes 

1. Le FBI fera-t-il amende honorable et admettra-t-il qu’il savait tout ce qu’il y avait à savoir sur Tamerlan Tsarnaev, après cinq années de suivi et de contrôle, et a pourtant menti à l’opinion publique en jurant qu’il ignorait l’identité des deux frères, publiant leurs photos et demandant au public d’agir comme les « yeux et les oreilles » du FBI pour identifier ces « suspects »?

2. Depuis le 11-Septembre 2001, le modus operandi préféré du FBI est d’utiliser des « informateurs », pour leurrer de « potentiels » terra-ristes (sic) et les persuader d’agir. Prenons par exemple l’opération Fast & Furious, complot impliquant les cartels mexicains à la manière de l’affaire Iran-Contra. Il est fort probable que les frères Tsarnaev aient été piégés. Dans ce cas, y a-t-il quelqu’un, quelque part dans ce vaste appareil de renseignement étasunien qui enquête sur les enquêteurs du FBI?

3. Le FBI expliquera-t-il le tsunami de fausses informations provenant des habituels « officiels américains » anonymes et concernant des explosions ou des « bombes non explosées » dans deux hôtels de Boston, un palais de justice et à la bibliothèque JFK?

4. Un étudiant saoudien, blessé lors de l’attentat, entré aux États-Unis avec un visa étudiant légal, est soudainement déporté pour des « raisons de sécurité nationale », alors même que les enquêteurs avaient trouvé des « brûlures inhabituelles » sur ses mains, lesquelles ne concordaient pas avec les blessures des autres victimes. Il pourrait faire partie d’un clan saoudien notoire pour ses connexions avec Al-Qaïda. Le FBI abandonne soudainement son « enquête » après un rendez-vous non planifié de l’ambassadeur saoudien aux États-Unis avec le président Barack Obama. Ajoutez à cela, le fait qu’avant même que la fumée ne se dissipe, le lobby israélien et son notoire site de désinformation DEBKA montraient du doigt des « terroristes nationaux » ayant des connexions aux au Moyen-Orient ».

5. La description de la voiture détournée par les deux frères, un VUS Mercedes E350, correspond à la description de leur véhicule laissé dans une station service à Cambridge pendant deux semaines avant l’attentat. Un mécanicien de Cambridge a déclaré que Dzhokhar, le frère de Tamerlan, est venu chercher son VUS Mercedes noir le mardi, le lendemain du marathon. Les deux véhicules pourraient bien être le même, ce qui anéantirait le discours officiel du véhicule volé.

6. De plus, il y a une censure totale des médias sur le propriétaire du soi-disant véhicule volé, qui, en théorie, s’est échappé, a appelé la police et maintient que les deux frères ont retiré 800 dollars de son compte dans trois distributeurs automatiques de billets en lui disant auparavant qu’ils étaient « les poseurs de bombes du marathon et qu’ils avaient tué un policier du MIT ». Le chauffeur a dit qu’on l’a laissé à la station service sur Memorial Drive à Cambridge. Mais des témoins ont vu Dzohkhar dans le magasin de la station service, sans aucun chauffeur. Puis, l’histoire des deux frères dévalisant un commerce s’est révélée être fausse. Les radios de police ont fait référence à une personne « portant un haut noir ». Pourtant, le discours officiel demeure que les frères Tsarnaev étaient sur les lieux du braquage au moment où il s’est produit.

7. En ce qui concerne la tuerie du policier du MIT, dans le rapport radio initial de la police le suspect est décrit comme un « Hispanique avec un chapeau ». Cela s’est passé sur le campus universitaire du MIT, dans une rue adjacente, après que le policier ait répondu à un appel pour « nuisance ». Maintenant, sans qu’aucune enquête n’ait eu lieu, tout le corps policier est certain que le policier en question a été tué par les frères Tsarnaev.

8. Il y a une sombre histoire au sujet d’un « VUS de police volé contenant des explosifs et des armes d’épaules », sans aucun autre détail. Tout le monde assume que le véhicule a été volé par les deux frères, mais personne ne peut dire où, quand, ni comment. La version officielle conserve cet élément afin de justifier la partie de l’histoire voulant que les frères aient utilisé des armes dans une fusillade avec la police à Watertown. De plus, le chef de la police de Watertown maintient que les frères sont entrés dans la ville dans des voitures séparées. Le FBI et le procureur de Boston affirment au contraire que les frères étaient à bord de la Mercedes volée.

9. Tout le corps policier a insisté sur le fait qu’il y a eu un violent échange de tirs avec Dzohkhar lorsqu’il se cachait dans un bateau avant son arrestation. C’est faux. Il n’était pas armé, bougeait à peine et la rafale de balles en direction du bateau venait de la police.

10. Comment se fait-il que des légions de police et des équipes d’intervention SWAT surarmées, fouillant une scène de crime d’un périmètre de 20 pâtés de maisons à Watertown, ont été  simplement incapables de localiser Dzohkhar se cachant dans une rue se trouvant à moins de deux pâtés de maisons de l’endroit où il avait abandonné sa voiture? Même une simple recherche sur Google Map contredit l’affirmation de la police, selon laquelle ils ne l’ont pas trouvé après l’avoir cherché durant toute une journée parce que la rue Franklin, où il se cachait, « était légèrement en dehors du périmètre ». Un nombre de résidents de la rue Franklin se sont même plaints d’avoir été perquisitionnés après la levée du couvre-feu et la découverte de Dzohkhar par le propriétaire du bateau, devenu un héros national.

Faites la danse martiale

La journée de délai dans la capture de Dzohkhar a permis en réalité de faire de Watertown la scène d’une gigantesque répétition pour la loi martiale urbaine, qualifiée euphémiquement de confinement, loi qui sera appliquée dans un avenir rapproché.

En ce qui concerne la militarisation complète de la vie civile, comprenant par exemple la folie furieuse du département de la Sécurité intérieure (Homeland Security) avec le déploiement de centaines de véhicules blindés, l’opération a été un succès magistral. Entre-temps, sur le front « légal », la Maison-Blanche et le département de la Justice sont sur le point d’éliminer la mise en garde Miranda. Cela est entré en vigueur il y a deux ans dans un décret secret d’Obama stipulant que la mise en garde Miranda ne s’appliquerait pas aux présumés terroristes.

Dzohkhar est un « présumé » terroriste, maintenant accusé d’avoir utilisé et comploté en vue d’utiliser une arme de destruction massive, et pourtant il a déjà été condamné par les médias dominants. Bienvenue dans l’État policier des États-Unis, où chacun a toujours le droit d’aller faire du shopping. Pour l’instant.

Pepe Escobar

Article original en anglais :

Orwell does America, Asia Times Online, le 23 avril 2013

Traduit par Mondialisation.ca
Pepe Escobar est l’auteur de Globalistan: How the Globalized World is Dissolving into Liquid War (Nimble Books, 2007), Red Zone Blues: a snapshot of Baghdad during the surge (Nimble Books, 2007), et Obama does Globalistan(Nimble Books, 2009).

Il est correspondant pour Asia Times et l’auteur de la truculente rubrique « The Roving Eye » 



Articles Par : Pepe Escobar

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