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Usa, où le bourreau n’a d’égard pour personne
Par Gabrielle Carchella
Mondialisation.ca, 09 février 2006
Il Manifesto et BellaCiao (traduction en français) 9 février 2006
Url de l'article:
https://www.mondialisation.ca/usa-o-le-bourreau-n-a-d-gard-pour-personne/1927

Amnesty dénonce : 10% des exécutions concernent des malades mentaux. Le non de la Cour Suprême. Cent cas depuis 1977. Le cas le plus éclatant est celui de Scott Panetti, qui allait aux procès en complet de cow-boy et attend depuis 50 ans d’être tué.

Incapables d’entendre et de vouloir, mais pas de mourir. Aux Usa il ne suffit pas d’être des malades mentaux pour échapper à la peine capitale. Amnesty International le dénonce dans un rapport qui examine les cas de cent prisonniers atteints de graves infirmités mentales mis à mort depuis 1977, l’année de la reprise des exécutions aux Etats-Unis. L’étude dévoile que 10% des plus de mille exécutions qui ont eu lieu depuis ont concerné des malades mentaux.

Le pourcentage n’est qu’indicatif. En effet, on ne peut pas savoir combien, parmi les autres condamnés, souffraient de pathologies semblables. Pour nombre d’entre eux, l’hypothèse a été soulevée au cours des procès, mais l’insuffisance de fonds n’a pas permis un examen psychologique approfondi. De plus, il y a à dire que même ceux qui sont sains, quand ils se retouvent derrière les barreaux, peuvent perdre la raison après des années passées dans le couloir de la mort.

En outre il est significatif qu’il n’existe pas non plus de chiffre certain pour les condamnées encore vivants : selon l’Association américaine de la santé mentale, les malades mentaux représentent aujourd’hui de 5 à 10% des détenus en attente d’exécution. Il ne s’agit pas, en somme, d’épisodes isolés, mais de cas si fréquents qu’ils méritent d’être examinés à la loupe. Le système sanitaire et judiciaire américain ne semble pas en mesure de s’attaquer de la meilleure façon à la question. Les problèmes commencent déjà durant la phase du procès.

Souvent les « fous » ne sont pas défendus de façon adéquate et le jury ne se rend pas compte de la portée de leur infirmité. Des attitudes effrontées ou masochistes pendant le jugement sont favorisées par les traitements à base de médicaments administrés aux inculpés. Il arrive ainsi qu’on échange les bizarreries des malades mentaux avec le manque de remords vis-à-vis des crimes contestés, un fait qui aggrave leur position.

La condamnation d’Amnesty est nette : « Aux Etats-Unis d’Amérique, des centaines de personnes atteintes de graves formes de maladie mentale sont endommagées par un système sanitaire trop lent à les aider et par un système judiciaire trop rapide à les envoyer à la mort ». L’exécution des malades mentaux s’avère encore plus difficile à accepter après qu’en juin 2002 la Cour Suprême Usa a mis au ban la peine de mort pour les retardés mentaux sur la base de l’interdiction contenue dans le huitième amendement pour les punitions cruelles et inhabituelles. Selon l’avis de la Cour, le trouble mental atténue la responsabilité personnelle. Mais entre retard et maladie mentale la limite est très subtile, à tel point que les effets sur le comportement peuvent être très semblables, voire identiques. Et pourtant la distinction demeure et la mort d’état continue à frapper aussi ceux qui, pour la médecine, n’ont pas toutes les cases à leur place.

Le rapport rappelle le cas de Scott Panetti, schizophrène sujet à des hallucinations et hospitalisé plusieurs fois, qui dans le lointain 1955 fut condamné à mort au Texas pour avoir tué ses parents adoptifs. Son histoire rappelle la trame d’un film noir made in Hollywood : Panetti se présentait au procès en complet de cow-boy, se défendait tout seul et parlait de démons apparus après son crime pour se moquer de lui. Selon un médecin présent au procès, l’inculpé « était complètement ignare de l’effet de ses paroles et de ses actions ». Malgré ses clairs symptômes de folie, Panetti attend depuis cinquante ans le jour de l’exécution, enfermé dans sa cellule. La justice Usa ne s’arrête pas. Même si les condamnés souffrent à cause de graves pathologies mentales ou physiques, comme le démontre aussi l’histoire de Clarence Ray Allen « Ours qui court », l’Indien aveugle, cardiaque et paralysé tué par le bourreau il y a quinze jours.

Traduit de l’italien par karl&rosa

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