20 ans après Brundtland: Un bilan alarmant de l’état de santé de l’environnement mondial
La planète est dans un état critique. L’espèce humaine est menacée.
Le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) lançait le 25 octobre dernier GEO-4, une synthèse sur l’état de l’environnement mondial. Un ouvrage de 540 pages subdivisé en six sections principales correspondant à dix chapitres: 1) L’environnement pour le développement; 2) Le bilan et les grandes tendances de l’état de l’environnement 1987-2007; 3) Les perspectives régionales 1987-2007; 4) Les dimensions humaines des changements environnementaux; 5) Un regard vers 2015 et au-delà et 6) Soutenir notre avenir à tous. Au début de chaque chapitre deux pages rassemblent les principaux messages adressés aux gouvernements du monde sur les politiques à promouvoir en vue de restaurer l’environnement et sauver la Planète et l’Humanité.
GEO. Le contrôle de l’environnement
GEO-4 est le dernier d’une série de rapports intitulés : «L`avenir de l`environnement mondial (GEO)» «et institués en 1995 par le conseil d`administration du PNUE, pour réaliser l`une des missions du Programme, à savoir suivre l`état de l`environnement mondial. GEO, qui a`appuie sur de larges consultations mondiales, fournit des informations pour la prise de décisions, contribue au dispositif d`alerte rapide et renforce la capacité d`évaluation aux niveaux mondial et infrarégional. GEO est aussi un processus de communication qui vise à sensibiliser le public sur les questions d’environnement et à fournir des options de la prise de décision» (http://www.unep.org/GEO/french/ ).
GEO-4. Un bilan 20 ans après Brundtland
GEO-4 évalue l’état actuel de l’atmosphère de la terre, de l’eau et de la biodiversité, décrit les changements intervenus au cours des deux dernières décennies et identifie les actions à mener en priorité. GEO-4 est le rapport de l’ONU le plus complet sur l’environnement réalisé jusqu’à maintenant. Il a été préparé par 390 experts et révisé par plus de 1 000 en provenance de tous les horizons dans le monde.
Source : http://www.unep.org/geo/geo4/images/GEO4_cover_highres.jpg
GEO-4 propose, en effet, un bilan des progrès réalisés dans la lutte contre les processus de détérioration et de destruction des écosystèmes terrestres et marins depuis la présentation du Rapport Brundtland devant l’Assemblée générale des Nations Unies en octobre 1987. Quel est le sort maintenant réservé à la Planète Terre et à ses habitants depuis que ce rapport a prescrit le paradigme de la «durabilité» devant permettre de sauvegarder les fondements du renouvellement de la Vie?
Selon le communiqué de presse mondial délivré à cette occasion, les problèmes plus graves de la planète persistent, notamment le changement climatique, le taux d’extinction des espèces et le défi consistant à alimenter une population croissante. Ces menaces « figurent parmi les nombreux problèmes qui n’ont pas été résolus et qui mettent l’humanité en danger » (unep.org/).
«GEO-4 reprend la déclaration de la Commission Brundtland selon laquelle le monde n’affronte pas des crises séparées…la «crise environnementale». La «crise du développement«, et la «crise de l’énergie» ne font qu’une. Cette crise n’inclut pas uniquement le changement climatique, les taux d’extinction et la faim, mais d’autres problèmes liés à la croissance de la population, à la hausse de la consommation des riches et au désespoir des pauvres. Voici quelques exemples retenus dans le rapport:
• le déclin des stocks de poisson;
• la perte de terres fertiles par le biais de la dégradation;
• une pression non durable sur les ressources;
• la baisse de la quantité d’eau douce disponible à partager entre les humains et les autres créatures et
• le risque que la détérioration de l’environnement ne franchisse des points de non retour».
«GEO-4 avertit aussi que nous vivons au-dessus de nos moyens. La population humaine est désormais si importante que «la quantité de ressources nécessaires pour la faire vivre dépasse les ressources disponibles…L’empreinte de l’humanité est de 21,9 hectares/personne, alors que la capacité biologique de la Terre est, en moyenne, seulement de 15,7 ha/personne…»
Le bilan 1987-2007
Depuis 1987, la population mondiale a augmenté de 34%. Plus de la moitié vit maintenant dans les milieux urbanisés, ce qui la soustrait de plus en plus du monde réel de la production alimentaire de base et de l’environnement naturel. Le commerce mondial a triplé et le revenu moyen par habitant a augmenté de 40%. En 2007, les disparités économiques et sociales sont de plus en plus prononcées; le revenu annuel d’un milliard de personnes vivant dans les pays riches dépasse 15 fois le revenu global des 2,3 milliards les moins riches de la planète. Les approvisionnements en énergie s’étiolent; les dégâts causés par une consommation excessive s’aggravent; un fleuve sur dix n’atteint plus la mer plusieurs mois par année; le bassin amazonien deviendrait plus sec; il abrite la moitié de la biodiversité de la planète.
L’atmosphère. Réchauffement global. Fonte des glaciers et des banquises. Hausse du niveau moyen des océans. Perte de productivité des écosystèmes
La température moyenne du globe a augmenté de 0,7 degrés Celsius depuis 1850 et de 1,4 degrés en Europe et on s’attend à une hausse de 1,8 à 4 degrés d’ici 2100. Cette augmentation des températures moyennes entraîne ainsi la fonte des glaciers et des banquises continentaux et locaux et on évalue que le relèvement du niveau moyen de la mer sera alors de l’ordre de un mètre d’ici 2100. La fonte de la banquise arctique s’est accélérée au cours des dernières années avec une diminution de un million de kilomètres carrés, soit près de 23% de sa superficie totale. En septembre dernier, en effet, les glaces ne recouvraient plus que quatre millions de km2 de l’océan Arctique, soit une diminution de 23 % par rapport au précédent record de 5,3 millions km2 qui avait été enregistré en 2005, selon Environnement Canada. La surface de glace qui a fondu correspond en gros à la taille de la province de l’Ontario ou d’un pays comme l’Afrique du Sud. (http://www.ledevoir.com/2007/12/28/170095.html).
La fonte complète de l’inlandsis du Groenland provoquerait une hausse de sept mètres du niveau moyen des océans, ce qui aurait des conséquences dramatiques pour plus de 60% de la population mondiale qui vit à moins de 100 kilomètres des littoraux et des estuaires (UNEP, 2007, p.63).
Même avec l’application du Protocole de Montréal depuis 1988 le trou de la couche de l’ozone au-dessus de l’Antarctique est plus grand que jamais. Les niveaux d’ozone au sol augmentent dans tout l’hémisphère boréal. L’hyper-concentration de la population dans des mégalopoles telles que Mexico, Sao Paulo, Le Caire et Jakarta, à l’instar des conditions qui prévalent dans la mégalopolis du Nord-est des USA, avec l’utilisation croissante de l’automobile, contribue à la détérioration de la qualité de l’air. Ainsi, deux millions de personnes meurent prématurément chaque année des pollutions de l’air intérieur et extérieur.
Le réchauffement global entraîne une augmentation des températures de l’eau de surface des océans, ce qui exerce également des conséquences néfastes sur les écosystèmes marins et, notamment, sur les récifs coralliens. Selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC)), cité par enviro2B, «avec une élévation de la température des océans de 2 à 3 degrés par rapport à 1990, les coraux seront exposés à une «mortalité de grande échelle». Essentiellement due à un phénomène naturel, cette dégradation est accélérée par les activités humaines qui peuvent également fragiliser les récifs, les rendant ainsi plus sensibles aux phénomènes naturels. Selon Bernard Salvat, professeur à l’université de Perpignan, spécialiste de l’écologie tropicale, «sur une surface totale de 600 000 kilomètres carrés de récifs et lagons, on estime que 20 % des récifs coralliens ont été irrémédiablement détruits ou présentent peu de chances de récupération, 25 % sont dans un état critique, 25 % sont menacés, 30 % seulement sont dans un état satisfaisant» (enviro2b.com).
Pour faire en sorte de diminuer les impacts dus aux changements climatiques GEO-4 affirme qu’il est nécessaire de réduire les émissions de gaz en provenance de la consommation d’énergie, dans les transports et dans les secteurs de la production agricole et forestière. Il indique que peu d’efforts ont été déployés en ce sens depuis 1987 de sorte que les émissions ont augmenté à un rythme continu illustrant une réponse très timide aux engagements contractés dans le cadre du Protocole de Kyoto. Le rapport conclut que la consommation de l’énergie produite à partir des gisements de pétrole, de gaz et de charbon augmente sans cesse en raison de la croissance de la population mondiale qui consomme davantage de biens et de produits, voyage de plus et plus loin et tend à utiliser davantage l’automobile individuelle. En effet, «le parc automobile mondial a presque doublé au cours des deux dernières décennies. Il a dépassé en 2005 les 800 millions d’unités, soit une automobile pour huit habitants du globe (china.org)», le nombre de kilomètres parcouru par l’aviation civile a augmenté de 76% entre 1990 et 2000 alors que le tonnage maritime est passé de quatre à sept milliards de tonnes entre 1990 et 2005 selon le rapport. Il serait approprié d’ajouter à ces données celles de l’aviation militaire très grande consommatrice de pétrole.
Selon le rapport, les mesures visant à minimiser l’impact des émissions de gaz à effet de serre sont connues et rentables, mais elle exigent un réel leadership et de la coopération :
« Pour les changements climatiques des approches plus novatrices et équitables d’atténuation et d’adaptation sont requises et demandent des changements systémiques dans les patterns de consommation et de production. Tandis que les recherches et les efforts d’évaluation doivent se poursuivre, du leadership et de la collaboration internationale y compris les transferts technologiques et des mécanismes de financement efficaces sont nécessaires pour accélérer la mise en oeuvre des mesures à travers le monde. Le risque à long terme que font courir les émissions de substances persistantes dans le temps, surtout celles qui correspondent à des gaz à effet de serre (CHGs), devrait nous inciter fortement à appliquer, dès maintenant, le principe de précaution » (UNEP, 2007, p.41).
L’eau. Les stress s’intensifient.
Dans son rapport de 1992, le PNUE, à la fin de son analyse de l’état des ressources hydriques dans le monde, soulignait le fait que la question de l’eau, comme le fut celle de l’énergie dans les années 1970, allait être au cœur des préoccupations de la population mondiale au cours des premières décennies du 21ième siècle (Tolba, M.K. et al., 1992).
Selon GEO-4, en effet, «2,6 milliards de personnes n’ont toujours pas, en 2007, d’installations d’assainissement appropriées. De plus, le rapport note que d’ici 2025, 1,8 milliard de personnes feront face à des pénuries d’eau même si l’accès à un meilleur approvisionnement en eau est passé de 78 à 82% de la population mondiale entre 1990 et 2000 et que le niveau d’accès à l’assainissement passait de 51 à 61%…La consommation d’eau va continuer d’augmenter entraînant, d’ici 2025, une augmentation des prélèvements de 50% dans le monde en développement et de 18% dans le monde développé».
Certaines régions sont fortement affectées par le manque d’eau et c’est, notamment, le cas du bassin méditerranéen, celui du sud de l’Afrique et celui de l’Asie du Sud-est qui assistent à des périodes de sécheresse plus longues. Dans l’ensemble du monde en développement, trois millions de personnes meurent à chaque année en raison de l’utilisation d’une eau polluée.
Selon un rapport de l’Université des Nations Unies rendu public en juin dernier « la désertification, exacerbée par les changements climatiques, représente « le plus grand défi environnemental de notre époque…Ce rapport prévient que sans des politiques pour la combattre, les gouvernements devront faire face à des migrations de populations en masse».
« La perte de productivité des sols et la dégradation de l’environnement pose une menace imminente à la sécurité internationale…Un tiers de la population de la planète, soit environ deux milliards de personnes, sont des victimes potentielles des effets de la désertification, affirme ce rapport». Ce dernier prévient qu’en conséquence ce sont près de 50 millions de personnes qui pourraient être déplacées dans les 10 prochaines années ».
( http://www.un.org/apps/newsFr/storyF.asp?NewsID=14375&Cr=désertification&Cr1=UNU )
GEO-4 conclut que « Le bien-être de la population et la santé des écosystèmes, en plusieurs endroits, sont grandement affectés par les changements observés dans le cycle global de l’eau et ceci principalement en raison de la pression exercées par les activités humaines» (UNEP, 2007, p. 116) Il rappelle les éléments importants à considérer pour assurer le renouvellement des ressources hydriques : Le rôle fondamental des océans; la disponibilité en eau douce et son utilisation de même que la conservation des ressources aquatiques; l’application de pratiques d’aménagement du territoire qui respectent la dynamique des bassins versants; la dégradation de la qualité de l’eau continue de menacer la santé des humains et des écosystèmes; les écosystèmes aquatiques continuent d’être dégradés mettant en péril leur capacité à donner des services pour la production alimentaire ou pour le maintien de la biodiversité; enfin, le défi constant à relever dans la mise en valeur des ressources hydriques et des écosystèmes aquatiques visant à assurer un équilibre entre les besoins de l’environnement et les besoins pour le développement.
Les océans sont les grands régulateurs du climat global et un réservoir important de gaz à effet de serre. Le cycle de l’eau, selon le rapport, à l’échelle continentale, régionale ou océanique, est grandement affecté par les changements climatiques qui se produisent sur une longue période menaçant ainsi la sécurité humaine. Ces changements affectent les températures dans l’Arctique, les banquises et les glaces continentales y compris celles des glaciers locaux; ils affectent aussi le taux de salinité et d’acidification des eaux des océans, leur niveau moyen, les patterns de distribution des précipitations, les phénomènes climatiques de plus grande intensité et peut-être même la circulation océanique générale (UNEP, 2007, p. 116).
Aux phénomènes de raréfaction accentuée de l’eau dans certaines régions du globe mentionnées plus haut s’ajoutent ceux qui sont marqués par des événements climatiques extrêmes comme c’est le cas des ouragans tropicaux ou des tornades ou de tempêtes concentrant une grande quantité de précipitations dans un bassin, sur un versant montagneux ou dans une aire de faible extension non dotée par un couvert forestier protecteur. L’occurrence de ces événements est devenue maintenant la règle de sorte qu’il est bien difficile désormais d’établir des prévisions météorologiques fiables.
La biodiversité. Un taux d’extinction élevé
Bien que deux millions d’espèces aient été décrites jusqu’à maintenant, il existerait entre cinq et 30 millions d’espèces sur la surface terrestre. Les changements de la biodiversité actuelle sont les plus rapides dans l’histoire de l’humanité à cause de l’impact grandissant des activités humaines sur les zones de vie et, en particulier, sur les forêts humides tropicales, les autres espaces forestiers transformés en champs pour les cultures et sur les plaines littorales et les écosystèmes côtiers. Ce phénomène entraîne une augmentation rapide des taux d’extinction des espèces qui atteint aujourd’hui «une vitesse 100 fois supérieure à celle indiquée par les fossiles» (unep.org).
«Il est possible que les taux d’extinction atteignent la magnitude de 1000-10 000 fois ce que nous avons connu dans le passé. Plus de 16 000 espèces qui ont été identifiées sont considérées comme étant menacées. Parmi les différents groupes de vertébrés qui ont été évalués de façon exhaustive 30% des amphibiens, 23% des mammifères et 12% des oiseaux sont menacés d’extinction» (UNEP, 2007, p. 164).
Selon GEO-4, quelque 60% des «services biologiques» que les écosystèmes rendent à l’humanité sont dégradés ou utilisés de façon non viable. Cette conclusion corrobore celle du rapport sur l’évaluation des écosystèmes pour le Millénaire (PNUE, 2005). Les effectifs des vertébrés d’eau douce ont fondu de 50% entre 1987 et 2003, plus vite que les espèces terrestres ou marines (unep.org/Documents).
«Un signe de progrès est la hausse constante de zones protégées. Mais elles doivent être efficacement mises en place et gérées. Et la biodiversité (de toutes sortes, et pas seulement la «mégafaune charismatique» telle que les tigres et les éléphants) devra être conservée de plus en plus en dehors des zones de protection» (unep.org)..
Les stocks de poisson à la baisse
«La consommation a plus que triplé entre 1961 et 2001. Les prises ont stagné ou légèrement décliné depuis les années 1980. Les subventions ont créé des capacités de pêche excessives, selon les estimations supérieures de 250% à la capacité nécessaire pour capturer la production durable des océans (unep.org/Documents)».
Conclusion
Depuis la conférence sur l’environnement humain tenue à Stockholm en 1972 s’est développé un mouvement mondial en vue de freiner le processus de dégradation, de détérioration et de destruction des zones de vie et des communautés humaines qui en dépendent pour assurer leur survie. Presque quatre décennies pour une prise de conscience de plus en plus vive concernant les menaces posées par l’industrie et le mode de vie énergivore imposé par les pays riches sur les capacités intrinsèques de renouvellement des ressources vivantes. Près de 40 ans pour définir des stratégies, des plans d’actions et conclure et entreprendre l’application d’ententes globales et nous avons encore l’impression que l’on ne saisit pas encore très bien l’ampleur des menaces qui pèsent sur l’avenir de la Biosphère et de l’Humanité.
Les Sommets mondiaux qui se sont succédés pendant ces années, Nairobi en 1982, Rio en 1992, New York en 2000, Johannesburg et Monterrey en 2002 ont lancé, à chaque occasion, un appel aux gouvernements du monde pour qu’ils accordent désormais la priorité à la restauration de l’environnement, à la conservation des ressources vivante in situ, à la protection des écosystèmes les plus productifs et pour qu’ils conçoivent et appliquent des politiques qui puissent répartir de façon équitable les revenus tirés de la mise en valeur des ressources naturelles alimentaires, minérales, énergétiques, hydriques et aquatiques et ce en donnant suite aux engagements formulés dans les grandes conventions mondiales sur le changement climatique, sur la diversité biologique et sur la lutte contre la désertification.
À mi-chemin entre 2000 et 2015, date cible pour atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) le PNUE dépose son quatrième rapport sur la situation actuelle de l’environnement mondial et les perspectives de son avenir. Comme dans GEO-3, on retrouve dans la présente synthèse une esquisse des quatre futurs possibles de développement pour la Planète et l’Humanité d’ici 2050. Leur état va s’améliorer ou se détériorer en fonction du choix qui sera préconisé par les forces politiques et économiques dominantes qui contrôlent les gouvernements du monde. Ces quatre choix fondamentaux, scénarios ou futurs possibles sont les suivants.
1) L’adoption d’un modèle de société libéralisée, fondée sur le marché d’abord (Market First); avec ce scénario nombreux sont ceux «qui estiment que les dysfonctionnements déjà observés dans les systèmes sociaux, environnementaux et écologiques annoncent, pour l’avenir, des effondrements plus massifs et plus généralisés»; 2) La seconde alternative (Policy First) est l’application d’un modèle de gouvernance responsable des États dotés d’institutions imputables et propres à prendre en compte, à long terme, les coûts environnementaux et sociaux dans la définition des politiques de développement économique; 3) La troisième voie, celle de la conception du monde privilégiant les principes du marché et de la sécurité (Security First), semble celle qui régit présentement l’ensemble des activités humaines. Comme le premier scénario cette avenue est celle d’un ordre autoritaire établi à l’échelle mondiale par la force et la violence armée dans le but de protéger les marchés des plus puissants et des mieux nantis tout en maintenant l’Apartheid Nord-Sud; 4) La quatrième est celle de la durabilité (Sustainability First). Ce paradigme esquissé dans la stratégie mondiale de la conservation en 1980, puis dans le Rapport Brundtland rn 1987 et, ensuite, lors des Sommets mondiaux des vingt dernières années «est soutenu par des valeurs et institutions nouvelles et plus équitables. Une conception plus visionnaire de l’avenir s’impose, où les changements radicaux dans la façon dont les gens communiquent les uns avec les autres et avec le monde qui les entoure (plus de convivialité et plus de solidarité) encouragent l’adoption de politiques de développement durable et un comportement responsable des grandes entreprises. Il existe une collaboration beaucoup plus riche entre les gouvernements, les citoyens et les autres parties intéressées, dans les décisions prises sur les questions d’intérêt commun. Un consensus se dégage sur ce qu’il convient de faire pour satisfaire les besoins fondamentaux et réaliser les objectifs individuels sans compromettre le sort d’autrui ni les perspectives de la postérité» (PNUE, GEO-3, 2002, pp. 328-349).
L’application des scénarios deux et quatre permettrait de freiner les processus de destruction accéléré et d’envisager des solutions propres à neutraliser à long terme les activités ou projets de développement qui ne vont pas dans l’intérêt de la collectivité humaine considérée dans son ensemble. Le défi du 21ième siècle est de mettre fin à l’Apartheid Nord-Sud et, ainsi, au processus de concentration excessive de la richesse collective entre quelques mains. Si rien n’est fait pour aller en ce sens il est difficile d’envisager l’avènement d’un ordre économique mondial juste, une plus grande sécurité collective, la construction de la paix entre les nations et de voir l’ensemble du politique désormais voué au développement économique et social.
À titre indicatif, le rapport indique qu’avec le scénario Market First, 13% de toutes les espèces originelles disparaîtront entre 2000 et 2050 alors que le scénario Sustainability First assistera à une extinction moindre de l’ordre de 8%. La concentration des émissions de CO2 dans l’atmosphère atteindra 560 ppm en 2050 sous le scénario Market First alors qu’avec celui de la durabilité cette concentration sera de 460 ppm. On s’attend que le risque de dépasser certains seuils critiques augmente avec l’occurrence de changements majeurs et que ces changements peuvent s’opérer de façon plus subite que graduelle. Par exemple, pour GEO-4, les scénarios montrant un taux de prélèvements très élevés des ressources ichtyologiques peut être accompagné par une baisse significative de la biodiversité marine nous conduisant ainsi vers un niveau de risque plus élevé dans l’effondrement des pêcheries vers 2050 (UNEP, 2007, p. 398).
Le rapport GEO-4 conclut que si “les gouvernements doivent être au premier plan, les autres acteurs sont tout aussi importants pour réussir à atteindre le développement durable. Nous comprenons mieux les défis actuels et le moment est venu d’agir rapidement afin de sauvegarder notre survie et celle des générations futures.” (unep.org/Documents).
Enfin, il importe de rappeler les conditions sine qua non pour assurer la sécurité de la Biosphère. Travailler sans relâche à l’entreprise du désarmement général et complet. Éduquer à l’environnement et à la résolution pacifique des conflits. Restaurer l’environnement et protéger la diversité biologique in situ. Éradiquer la pauvreté et, enfin, protéger les droits humains et les libertés fondamentales.
Selon le Directeur général du PNUE, A. Steiner, « Il y a eu assez d’avertissements depuis Brundtland. J’espère sincèrement que GEO-4 est le dernier. La destruction systématique des ressources naturelles a atteint un niveau auquel la viabilité économique des économies est en danger, et auquel la facture que nous passons à nos enfants peut se révéler impossible à payer », a-t-il déclaré lors du lancement du rapport.
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Jules Dufour, Ph.D., est Professeur émérite à l’Université du Québec à Chicoutimi, Président de l’Association canadienne pour les Nations Unies (ACNU) /Section Saguenay-Lac-Saint-Jean, Membre du cercle universel des Ambassadeurs de la Paix, Membre chevalier de l’Ordre national du Québec. Président du comité de coordination du Parc marin du Saguenay-Saint-Laurent et membre de la Commission des Aires protégées de l’Union mondiale de la nature (UICN).