A Malabo, les pauvres bâtissent leur maison dans des cimetières


A côté des pierres tombales, une femme lave son linge et non loin un jeune homme bâtit sa maison, rez-de-chaussée et un étage en dur. En raison de la crise du logement des habitants de Malabo ont élu domicile jusque dans le cimetière municipal de la capitale de Guinée équatoriale.
 
La crise, persistante depuis de longues années, s’est accentuée depuis le boom pétrolier entamé en 1992, qui a récemment fait du pays le troisième producteur de brut d’Afrique subsaharienne et a attiré de nombreux et riches étrangers.
 
Résultat, les loyers ont explosé. Dans les nouvelles zones résidentielles, construites à l’intention des expatriés ou cadres du secteur pétrolier, le loyer est inaccessible à la grande majorité des Equato-guinéens.
Eux s’entassent dans les quartiers populaires. Dans le quartier de Los Angeles, jusqu’à vingt personnes se serrent dans des trois pièces théoriquement construits dans les années 60 pour une famille.
 
Mais ses loyers inférieurs restent néanmoins trop élevés pour les plus pauvres, même pour une maison ou une simple chambre en bois, la majorité de la population ne voyant pas la couleur des pétrodollars qui inondent le pays.
 
Les récentes expropriations forcées menées par l’Etat pour construire routes et bâtiments d’ »utilité publique » n’ont rien arrangé, multipliant le nombre de ceux contraints de se construire un abri dans des endroits insalubres ou dangereux, tel que le lit de la rivière Consul qui traverse les quartiers La Paz, New Building, Maycol ou Fiston et déborde lors des grosses pluies.
 
Ou dans des endroits inattendus comme le « Campo Santo » (nom donné au cimetière par les Equato-guinéens pieux) d’Ela Nguema, où à côté des logements, une vie s’est créée et bistrots et commerces se sont ouverts.

« C’est incroyable, la musique tonne tard dans la nuit, on a parfois l’impression qu’elle sort des tombes. Ces gens là ne respectent même plus le repos des habitants du Campo Santo », dénonce Virgilio, un vieil habitant du quartier.
 
La mairie de Malabo a récemment diligenté une inspection. « La situation était scandaleuse. Un haut responsable de la mairie figurait même parmi les personnes qui avaient construit des maisons et un bar. Nous avons fait raser toutes ces constructions », explique Orobiyi Bankole, adjoint au maire.
Mais depuis, certains sont revenus et ont reconstruit: « Nous avons été chassés injustement parce que nous n’avons personne pour nous défendre, ils s’en sont pris aux plus faibles », s’insurge Pedro, fonctionnaire d’une trentaine d’années.
 
Adela, mère de famille nombreuse, elle, se justifie: « C’est le cimetière qui est venu à nous. Lorsque nous avons construit ici, le cimetière était encore très loin. Mais aujourd’hui, il s’élargit de plus en plus ».
 
La mairie a donc commencé à ériger un mur de plus de deux mètres de haut autour du cimetière et a décidé d’obliger ceux de ses occupants qui sont bien vivants à en sortir.

« S’ils passent ici avec leur barrière, je reste derrière, c’est tout! », assure néanmoins Eduardo, un habitant qui dit ne pas craindre ces mesures. « Ceux qui me font peur se sont ces gens qui viennent traîner dans le cimetière la nuit », confie-t-il, décrivant une faune nocturne faite de « voleurs et fumeurs de chanvre indien ».
 
Plus largement, pour tenter de palier la crise du logement, le gouvernement a décidé la construction de plus de 10.000 logements sociaux dans le pays, dont plus de 2.000 à Malabo.

« Depuis quatre ans, dans chaque budget figurent des sommes importantes destinées aux logements sociaux. Jusqu’ici il n’y a aucun logement construit. C’est de la propagande électorale », rétorque Celestino Bacalé, un opposant.



Articles Par : Global Research

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