Algérie. Révision de la Constitution: 2014-2020 et aggravation de la soumission à l’ultralibéralisme.

Pour un hymne national bilingue arabe-amazigh salvateur.

Immédiatement après sa désignation, le nouveau chef de l’État a été fait le porte-parole d’une énième et prétendue amélioration de la constitution alors qu’il s’agit uniquement de la confirmation de la vente de l’Algérie.

Prise entre un groupe de décideurs dépourvus de tout sens de l’État et de patriotisme d’un côté et de défilés bihebdomadaires d’Algériens qui expriment des revendications légitimes alors qu’ils ignorent qu’ils sont victimes d’une gigantesque et horrible manipulation qui vise la mise à feu de leur patrie ; l’Algérie continue à être torturée par le Fonds monétaire international.

Récemment, le factice premier ministre de l’Algérie prétend qu’il a présenté ses projets d’actions économiques au nouveau délégué du FMI alors que sans avoir aucun diplôme en économique, il est aisé de déduire que leurs désastres attendus s’ajouteront à ceux des ajustements structurels du FMI et de la Banque mondiale.

L’Algérie a atteint le niveau adéquat pour son écrasement et trois très simples indicateurs pour le prouver. Le premier est dans le ‘soutien’ aux ‘revendications’ exprimé par le pouvoir alors qu’il s’agit d’un message qui dit aux USA que nous acceptons vos ordres ; le deuxième est dans le qualificatif de Issaba (groupe ou gang criminel) du pouvoir algérien par son peuple. De l’extérieur, interprété, ce slogan dit que les Algériens qui osent cette infamie sont prêts et murs pour le massacre ; le troisième est dans l’incapacité de l’occupant de la présidence de la république et du chef d’État-major de faire un tour dans la capitale de la patrie des Amazighes qu’ont été ses révolutionnaires.

Pour appuyer la solidarité avec les soldats algériens, exiger la dissolution du Congrès qui brade légalement la patrie et ainsi faire passer la constitution par référendum et aller vers le solide qu’est la paix avec un hymne national bilingue pour récupérer la fraternité des compatriotes du Sud, nous sollicitons le CRM pour la republication en l’état de notre papier de 2014 sur cette fumisterie.

Le projet de révision de la Constitution algérienne fait débat. Avant d’entamer notre présente contribution, il est indispensable d’énumérer les matériaux [1] utilisés et qui sont : 1) La présentation générale des propositions d’amendements qui sera désigné par présentation générale dans le texte, 2) Propositions d’amendements, 3) Lettre adressée aux invités à la concertation sur la révision constitutionnelle, 4) Constitution de 1996 [2] modifiée en 2008.

Un rappel : en 2007, dans le cadre de l’Initiative civique contre la révision de la constitution, un groupe de 13 Algériens s’est opposé sans succès à ce projet. Non soutenu, les effets sont visibles 7 ans après.

Dans la Présentation générale, il  est écrit :

Il est d’une extrême importance de rappeler, que le Président de la République n’a posé aucune limite préalable au projet de révision constitutionnelle, hormis celles relatives aux constantes nationales et aux valeurs et principes fondateurs de la société algérienne qui incarnent sa longue histoire, sa civilisation millénaire et une vision d’avenir portée par des valeurs et principes partagés par l’ensemble des citoyens algériens.

Tout en étant possible, aborder l’analyse des amendements proposés séquentiellement revient à faire un travail fragmentaire de critique.

Notre approche analytique sera basée sur la définition de blocs qui caractérisent les attributs d’une Nation et d’un État, et pour chaque bloc seront identifiés les amendements proposés.

Pour l’analyse de ces blocs, nous délinéons, dans nos mots, la constitution par une définition élémentaire, ses attributs et ses caractéristiques.

Une constitution est un blindage juridique garantissant le fonctionnement harmonieux d’un État constitué d’une nation interagissant au moyen de structures sociales formelles et informelles et de structures administratives légalement constituées qui protègent les droits individuels. Elle œuvre à la maximisation du bien-être social de tous les résidents. Tous, et absolument tous, ses symboles régaliens, essentiellement la monnaie, et affectifs tels les armoiries et l’hymne nationaux, peuvent être redéfinis par la Nation.

Ses attributs sont :

1) norme juridique fondamentale opposable à l’État.

2) à la nation sont opposables les lois qu’elle s’est décidée en respect de la Constitution,

3) aucun traité ou accord international ne peut être ratifié s’il s’oppose aux fondements constitutionnalisés de le Nation et de l’État,

4) la constitution doit jouir de l’immunité populaire. Son immunité est obtenue par référendum populaire.

Ses caractéristiques : le texte est de type soutenu, accessible, marqué de solennité. Elle est susceptible de déclencher un sentiment de fierté par les protections qu’elle garantit à tous les résidents sur le territoire ou expatriés. Dans le cas de l’Algérie, la Constitution présentée dans les trois langues : arabe, tamazight et français serait (aurait été) appréciée. Ignorant l’existence d’une version amazighe, c’est le rôle du Haut commissariat à l’amazighité (HCA) qui est sous-entendu.

Après lecture des amendements proposés dans les documents cités-supra, ci-après une définition discrétionnaire des blocs-unités d’analyse : 1) identité, 2) droits civils, politiques qui sont une partie des Droits humains, 3) protection sociale, une autre partie des Droits humains, distinguée pour mettre en relief la maximisation du bien-être social, 4) les richesses nationales en ce sens qu’elles sont un moyen de développement et présentement un enjeu mondial objet de bellicisme, 5) les comportements délictueux et enfin le bloc 6) pour les artefacts juridiques repérés dans tous les blocs prédéfinis.

Pour lire cette catégorisation, en italique et abrégé,  « Art-xx » sur « Art-yy » renvoie à l’amendement proposé et à l’article correspondant dans la Constitution de 2008. Il est suivi de notre commentaire dans la forme droite de la police de caractère.

Les amendements par bloc

  1. Identité : Art-10 sur Art-42: les partis politiques ne peuvent être fondés sur une base religieuse, linguistique, raciale, de sexe, corporatiste ou régionale. C’est la fermeture de la constitution à la formation d’organisations politiques au niveau local et régional. Il est la négation même de la structure sociologique et populaire de la nation algérienne. À lire les restrictions, c’est à en croire que les partis politiques ne doivent être mus que par un discours sur l’herbe (lahchiche en arabe dialectal ou rviâ en kabyle) et l’économique.
  2. Droits civils et politiques : Art-7 sur Art-36: liberté de conscience et d’opinion. L’objection de conscience n’est pas incluse; Art-9 sur Art 41 bis portant sur la liberté de la presse. Elle est garantie mais bridée; Art-19 sur Art-73: quarante (40) ans révolus au jour de l’élection; par tout ce qu’il charrie, cet amendement sera traité juste après cette lecture rapide. Art. 28.- Un article 100 bis est ajouté et rédigé comme suit : Art.100 bis.- Est déchu de plein droit de son mandat électif, l’élu à l’APN ou au Conseil de la Nation affilié à un parti politique, qui aura, durant son mandat, changé l’appartenance sous l’égide de laquelle il a été élu par les citoyens. L’élu souhaitant s’affranchir de son parti politique pour cause de reniement par ce dernier de ses engagements politiques et électoraux est condamné à le suivre. Rien n’est dit sur l’élu indépendant qui veut intégrer un parti. Art. 33 sur Art 119 – L’initiative des lois appartient concurremment au Premier ministre, aux députés et aux membres du Conseil de la Nation. L’initiative populaire par pétition, par une série de référendums locaux est bannie; Art. 43 sur Art 164 bis.- Les membres du Conseil constitutionnel, élus  doivent : –  être âgés de quarante cinq (45) ans révolus au jour de leur élection…être titulaires d’un diplôme universitaire. L’exigence d’un diplôme universitaire est une incongruité démesurée. Elle exclut tous les « illettrés » et « analphabètes » doués de sagesse et de génie comme les paysans, les fellahs, les bergers et les artistes qui n’ont pas fait d’études supérieures. Les rédacteurs de ces amendements ont-ils oublié qu’il n’y avait ni théoriciens en sciences politiques, ni informaticien, ni expert en management, ni économiste chez les libérateurs de l’Algérie. Ils avaient de l’amour pour la liberté et pour la patrie. Ils étaient conscients que leur cout était la vie  Art. 40 sur Art 148 de la Constitution est amendé et reformulé comme suit : Le juge est protégé contre toute forme de pression, intervention, ou manœuvre de nature à nuire à l’accomplissement de sa mission ou au respect de son libre arbitre. Pour garantir son indépendance, aucune forme d’élection des procureurs généraux par exemple n’a été avancée.
  3. Protection sociale : Art-14 sur Art-48 portant sur la visite médicale des personnes gardées à vue. Les personnes majeures comptent moins que les mineurs. Art-16 sur Art-58 portant sur la protection des enfants et de la famille. L’Etat protège les enfants abandonnés et assiste les handicapés et les personnes âgées sans ressources. C’est la dialectique de la garantie et assurance de cette protection qui sera traitée après cette section.
  4. Richesses naturelles : aucun amendement n’a été proposé et pourtant elles constituent le moyen de survie des populations actuelles et futures de l’Algérie.
  5. Comportements délictueux : Art-3 sur Art-8: ajout de corruption, trafic et abus. Trivialement formulé, une sempiternelle rengaine, tellement entendue qu’elle est devenue une pollution sonore.
  6. Artefact juridique: les modalités d’application…sont fixées par une loi organique; cette formule est lue dans les Art-4 sur Art-21; Art-6 sur Art-31 bis;  Art-9 sur Art 41; Art-10 sur Art 42 bis; Art. 27 sur Art-100; Art. 28 sur Art-100.

Un parcours des constitutions de la Tunisie (2014) [3], du Canada [4], des USA [5] et de France [6], point de ce genre  de formule. Sa fréquence élevée dans ces amendements est un signal sur la présence d’une asymétrie de l’information. Dans le cas de la constitution de la Tunisie, l’esprit et la plume américains portés par Noah Feldman sont signalés dans les médias. [7]

Tableau d’identification des amendements par bloc-caractéristique de la Nation et de l’État

Retour sur les amendements mentionnant l’âge  portés par les articles 19 sur 73 et 43 sur 164.

Le premier stipule qu’il faut avoir 40 ans révolus pour être éligible à l’exercice du mandat de Président pendant que le second dit qu’il faut être âgé 45 ans pour siéger au Conseil constitutionnel. Comme premier constat : il faut être un peu plus vieux pour être élu au Conseil constitutionnel que président de la République! N’y ressentez-vous pas une gêne dans le bricolage qui s’en dégage en constatant cette différence?

Par l’amendement sur l’âge d’éligibilité à la charge suprême, 40 ans, c’est une dévaluation de la valeur de l’Algérien qui peut-être estimée. En 1965, le chef de l’État, avait 33 ans. Entre 1965 et 2014, cette dévaluation peut être estimée comme suit : %[(40-33)/33] = 21,21%. À la même année (1965), l’actuel président était ministre. Il avait 28 ans. En la recalculant, la dévaluation est encore plus importante : %[(40-28)/28] = 42,85%.  Calculée avec 45 ans, cette dévaluation devient folle sachant que l’actuel chef du Gouvernement italien a commencé à diriger son pays à 39 ans!

En ajoutant le projet de loi qui veut porter la majorité à 19 ans, la dévaluation devient un puits. En portant la majorité à une telle limite, elle profitera aux délinquants en leur accordant une année de « grâce » supplémentaire et en réduisant le nombre d’électeurs, un joli coup de sabot pour la démocratie.

Si maintenus, ces deux amendements pilonnent tous les Indices de développement humain (IDH) du pays calculés par le PNUD [8].

En fixant les bornes inférieures (40 et 45 ans), ces deux amendements excluent les nouvelles générations. En maintenant ouvertes les bornes supérieures, c’est la voie pour les grabataires, apparatchiks actuels et futurs qui est préservée.

La révision constitutionnelle : un lemon market [b] avec stratégie dominante précaire

« Cette recapitalisation périodique place les banques publiques dans une situation de contrainte budgétaire faible, assortie de risques d’aléa moral» : Mission du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale en Algérie. [10]

Dans la citation ci-dessus de cette Mission des Institutions de Bretton Woods, c’est l’expression « aléa moral » ou moral hazard en anglais qui a attiré notre attention. Associée à la sélection adverse (adverse selection), c’est la théorie de l’asymétrie de l’information qui est mise en avant. Cette dernière couplée à la théorie du signal – comprendre information – ce sont les syncrétismes entre les Relations internationales, l’Économique et les relations contractuelles qui sont fusionnés. [a]

C’est cette méthodologie, sélection adverse et aléa moral, qui sera utilisée pour analyser les amendements proposés.

Ignoré, voire dédaigné, l’artefact juridique « les modalités d’application sont fixées par une loi organique »  est le porteur de toutes les dérives. C’est lui l’aléa moral.

Il est une antinomie juridique. Pour cause d’une définition floue dans les amendements proposés, renvoyer un droit constitutionnel à une loi organique ou ordinaire relève de la soumission de la loi fondamentale à un droit infra. À moins de produire un objet juridique difforme sans essence, il est impossible pour le législateur de codifier une loi ou légiférer s’il ne dispose pas de balises constitutionnelles. Au moyen de cet artifice, ce sont les futures ratifications de traités ou signature d’accords internationaux qui ne vont pas buter sur leur inconstitutionnalité. L’adhésion à l’Accord de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) est l’objectif. Les déclarations de certains ministres sur le parcours de l’Algérie pour  qu’elle soit admise dans cette organisation, sur la loi sur l’investissement 49/51% (quand on ne sait pas compter…), l’ouverture d‘autres pans de l’économie en sont la preuve.

Démonstration de cette affirmation dans le bloc 6, « protection sociale ».

Deux amendements seulement aux contours flous sont proposés. Pour ce besoin, prenons comme exemple l’amendement suivant:

Art.58. – La famille bénéficie de la protection de l’Etat et de la société.

L’Etat protège les enfants abandonnés et assiste les handicapés et les personnes âgées sans ressources. Les conditions et modalités d’application des présentes dispositions sont fixées par la loi. »

Comme vous le lisez, la protection est partagée entre l’État et la société. Il faut être devin pour délimiter les quoteparts. De plus, aucun instrument d’assurance et de garantie d’un revenu minimal n’est défini et seuls les enfants abandonnés sont mentionnés, les handicapés avec ressources sont exclus.

Sachant que la disponibilité de ressources n’est pas synonyme de bien-être si l’État n’offre pas, sans rivalité, l’accès aux moyens publics. Cet amendement est comme le constatera le lecteur accompagné de l’artefact qui l’ouvre au marché et en particulier à ceux des assurances et des services.

Pour résumer, l’artefact « Les conditions et modalités d’application des présentes dispositions sont fixées par la loi » met un voile sur ce qui est appelé en droit, le principe de subsidiarité qui signifie la réduction au minimum l’intervention de l’État et la déléguer soit à une autorité internationale ou aux lois du marché. Il est la copie de celui qui est défini dans le Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE) et formulé dans la littérature comme suit :

Le niveau d’intervention le plus efficace dans un domaine porteur d’externalités n’est plus la nation mais le niveau supranational […] ce qui est l’essence même du principe de subsidiarité. [11]

Dans un autre registre de la protection sociale : le salaire

L’un des autres sujets chauds est le salaire minimum. Des voix demandent sa suppression. L’objectif est de confronter l’offre et la demande de travail aux lois du marché de l’emploi. Derrière ce vocable, se cache la flexisécurité et la mobilité de ce facteur de production, obsession et mur infranchissable de la compétitivité au sein de l’Union européenne.

Toujours, dans la même gamme, les pouvoirs publics et les syndicats en négociant les salaires, dans un cinéma de bras de force avec grèves, déploiements de police et coups de matraques, des augmentations sont accordées avec effet rétroactif. Quelques mois après, si l’augmentation en terme nominal est palpable, en terme réel, si elle n’est pas négative, elle n’est pas loin du nul à cause de l’inflation anticipée décrétée par les commerçants, changement de paliers d’imposition et de cotisations, réduction des allocations familiales, etc. Pis encore, avec ces gros pactoles de rappels rétroactifs, des travailleurs s’offrent des voitures auprès de concessionnaires, qui dans un montage de partenariats avec des agents internationaux, une partie de ces salaires est siphonnée par l’étranger.

Parcours des autres blocs.

Les droits civils et politiques : sous une apparence expansionniste, à lire toutes les conditionnalités qui les accompagnent, c’est leur récession qui est codifiée.

Identité : plus haut, la mention de l’aléa moral (moral hazard) est suivie de la sélection adverse (adverse selection). La première, parce qu’il y en a deux, sera identifiée dans ce bloc.

Pendant que des voix s’élèvent et que d’autres répètent que l’identité algérienne est une richesse;  dans son aspect politique, cet amendement la taille en pièces. À raison, les adeptes de Gene Sharp et Noam Chomsky diront que c’est de la diversion. Nous soutenons que ce bloc est un élément du menu séparateur nécessaire dans le processus des révélations des intentions de la partie adverse. C’est le modèle « Principal-Agent » qui est mis en œuvre. L’agent dans ce cas est l’État car c’est lui l’informé; le principal est le peuple qui est maintenu dans le flou, les pressions et les enchères verbeuses. Dans ce genre de problème, comme celui du lemon market, la sélection adverse est l’aspect ex-ante, l’aléa moral en est l’ex-post. Dans cette sélection adverse, il y a les deux composantes : l’autorité publique nationale et le peuple Algérien.

Quelques indicateurs sur la crucialité de ce bloc. Il a été lu dans les journaux algériens : « officialisation [de tamazight] sinon séparation » : c’est une alternative couteuse. Une telle déclaration non suivie de dénonciation est la preuve qu’elle a le caractère d’une enchère politicienne du type de deuxième prix. À cette alternative, avec un courage politique, il y a mieux d’autant plus qu’elle est gratuite: « hymne national bilingue et fortification de la nation » en prime la paix, l’économie du bonheur et l’affrontement, oui l’affrontement, solidaire de ce qui attend l’Algérie.

Comme autre signal révélateur sur les enjeux et enchères liés à l’identité, sous la plume de Nadia Mellal, le FLN, le thermomètre de la politique algérienne, le temps météorologique étant conçu et réfléchi ailleurs, est ouvert à l’officialisation de tamazight :

Les dangers externes qui guettent l’Algérie requièrent une prise en charge de la situation interne à travers le règlement de la problématique linguistique dans notre pays. [11].

Bon nombre d’autres signaux ont été envoyés par des personnalités politiques que ce soit par des déclarations allusives ou des silences. Le dernier signal est l’interdiction de la commémoration de l’assassinat de Lwenes Matoub à la salle Atlas à Alger pour chercher encore plus de radicalisation factice.  En fin une modeste présentation sur les impacts économiques de l’officialisation de tamazight a été faite par l’auteur de ces lignes à l’Université de Montréal [12].

D’autres actions en rapport avec l’identité amazighe ont été entreprises à Montréal, Paris, Ottawa et en Algérie. Elles ont été relayées par divers médias y compris une télévision. Pour demeurer dans une logique de paix, de construction, d’objectivité et ne s’agissant pas d’un travail sur tamazight, elles ne sont pas exposées dans ce texte. À ne pas entendre durant cette période de révision, certaines voix deviennent suspectes alors que durant la campagne électorale de la présidentielle, elles ont fait un boucan d’enfer.

Richesses naturelles : avec surprise, c’est le bloc pour lequel aucun amendement n’est proposé et pourtant il est bouillonnant. Elles ont été suffisamment traitées dans divers supports. Nous les résumons en insistant sur les monopoles publics supposés naturels.

  • L’énergie fossile : conventionnelle et non conventionnelle. Pour des causes hypothétiques de déplétion et risque d’effondrement des prix, les productions gazières et pétrolières sont brandies comme menace contre le pays. Les gaz de schiste [ma contribution] n’ont pas été en reste. C’est de l’intoxication massive des citoyens parce que les vrais enjeux que sont  les marges bénéficiaires, de nouvelles règles de répartition, les conditions liées aux investissements directs étrangers ne sont pas négociés. L’énergie nationale a été mise sous pression par les lobbyistes pour les gaz de schiste [13] et du secteur automobile.  Notre pays n’a fourni aucun effort pour l’exploitation des innovations technologiques algériennes. En arrière plan, l’exclusion des compagnies chinoises et russes du marché algérien en est l’objectif des pays de l’OTAN.
  • Les fréquences électromagnétiques (télécom) : la dernière arnaque porte sur l’acquisition par le Fonds national des investissements d’une filiale spécialisée en téléphonie mobile auprès d’un groupe « vampire » qui a introduit des hedge-funds (fonds de fonds – 2 fois fonds – spéculatifs communément appelés les noirs) en Algérie.  De plus, les pouvoirs publics se sont engagés à enrôler cette compagnie en bourse au détriment de l’opérateur historique Algérie-Télécom. C’est du cannibalisme économique, tel est le vocable utilisé en théorie pour ce genre de prédation.
  • L’eau : sans trop de…vagues ni écoulement…d’encre, sans reddition aucune de compte, deux compagnies internationales ont été exclues du marché. Et c’est toute la contradiction avec le secteur précédent.
  • L’infrastructure routière tous types rail, route, maritime et aériens: les investissements consentis et accompagnés de truculences financières ont livré quelques gros secrets mais pas tous.

Aucun amendement de cette révision ne concerne ces pans névralgiques de l’économie. Ainsi les prochains accords ne butteront pas sur une constitution qui devrait les bétonner. Et sans donner sa langue au chat pour dire le pourquoi : ils sont la visée des pays  qui ont la puissance de feu : les pays de l’OTAN, l’Angleterre, les USA en priorité et la France en accessoire.

Avec ce dernier, c’est la seconde partie de la sélection adverse qui est identifiée : FMI et OTAN, OMC. Ce dernier aspect a été traité par nos soins en vidéo sur Youtube et en texte [14-a] et [14-b].

Autres considérations d’ordre économique

Dans les médias algériens, des patrons demandent une amnistie fiscale. C’est une preuve suffisante de leurs malversations comptables. Que ce modèle de sélection adverse et aléa moral leur soit appliqué par la technique de saturation de leurs mensonges.

D’autres menacent de délocaliser leur production. En plus des subventions et autres facilités d’investissements dont ils bénéficient, ils réexportent la main d’œuvre algérienne sous-payée utilisée dans la fabrication de produits semi knocked-down (SKD). Pour le rapatriement des recettes en devises qui transitent par les paradis fiscaux, Dieu avisera!

Une opération sans lendemain a été lancée : éradication de l’économie informelle qui doit être différenciée de l’économie souterraine. Des fanfares ont joué sauf dans un marché informel: celui de la devise-monnaie internationale. Aucune autorité n’a osé au moins les chatouiller avec une section des forces d’élite munie – légalité oblige, de mandats judiciaires en bonne et due forme. L’État en est capable. S’il ne l’a pas fait c’est pour éviter une dévaluation de jure (politique ou par décret) du dinar algérien et le laisser glisser pour qu’elle le devienne de facto (s’impose d’elle-même).

L’indifférence et les habitudes des Algériens à parler avec le cours de l’Euro ne leur font pas réaliser la tragédie monétaire nationale. Ils ne sont pas habitués à le faire avec le cours du dinar. Le voici.

Si un euro vaut sur le marché parallèle 165 Da, cela veut dire qu’un dinar vaut 1/165 et ca donne 0,0060  euro pour un dinar.  Sur le triste site internet de la Banque d’Algérie, en cours commercial à l’achat, en date du 25 juin 2014, il est de 1/108.08 = 0.0092 euro pour un dinar.

Pour l’écart entre les deux cours, il est de %[(0,0060-0,0092)/0,0060] = – 53,33%. Dans une parité croisée avec l’euro, le dinar du marché parallèle est dévalué de 53,33% par rapport au dinar officiel (bancaire).

Toute dépréciation additionnelle de la monnaie nationale ne ferait qu’aggraver la situation. La convertibilité du dinar partielle ou totale sera un crime comme l’Algérie car en change fixe, une première attaque spéculative causera la ruine de l’Algérie.

La sécurité de l’État est menacée. Le changement des billets de banque pour reprendre le contrôle de la masse monétaire (M1 en partie) est une voie pour éviter la tragédie. Profiter de cette opération pour lancer des effigies amazighes sur la monnaie fiduciaire sera un motif de joie nationale supplémentaire.

Les chiffres officiels de l’Algérie : une bombe thermonucléaire

Depuis quatre années environ, sous la pression des institutions et organisations internationales, des chiffres concernant notre pays sont relayés avec plus ou moins de bonheur dans leur manipulation et interprétation. Ces chiffres portent sur des classements et performances dites de gouvernance qui est la symétrique négative de la légitimité populaire.

En plus des autres, les chiffres nationaux qui concernent le chômage, l’inflation et la masse monétaire ne sont ni justes ni erronés. Ils constituent une bombe thermonucléaire. Si non désamorcée, son explosion fera couler beaucoup de sang.  Le défilé des « experts » du FMI et de la Banque mondiale à Alger sont un mauvais signe. Avec le redémarrage de la dette souveraine, le solde de la balance de paiements, de  l’inflation criée par les consommateurs, le traitement que subira notre patrie sera douloureux et sans anesthésie. Il sera double : traitement par l’absorption (Keynes) et l’inflation (Friedman). Ce double traitement est justifié par la non-validité des deux théories, et du préjugé négatif, péjoratif du FMI qui va considérer l’Algérie comme insolvable et non souffrant d’une crise d’illiquidités.

Pour les lecteurs non initiés, une balance est un terme tautologique. Si une balance, (de paiement) ne balance pas (principe de la partie double) ce n’est plus une balance. C’est le montant, solde, par lequel elle balance qui est important. S’il est négatif, les capacités de financement du pays sont bonnes; s’il est positif, c’est le contraire.

Les menaces qui pèsent sur l’Algérie.

Elles ressemblent à celles qui ont prévalu sur le Soudan, la Tunisie, l’Égypte, la Syrie, la Libye. Elles concernent « l’obligation » de vivre son Printemps, sa partition. Des ONG occidentales avec des sections pilotées par des Algériens comme l’Algerian Solidarity Compaign (à partir de Londres) qui dénonce la violation des Droits de l’homme et British Petroleum. Pour démêler ces enchevêtrements, la lecture des analyses factuelles de notre compatriote Ahmed Bensaada  sont vivement recommandées.

Les foyers que sont la Kabylie, le M’Zab et potentiellement la région de Tindouf sont une menace de très haut degré.

Représentation à main levée de la sélection adverse et de l’aléa moral face à l’OTAN au FMI

Les causes qui ont engendré cette situation

Un soutien occidental (OTAN), le Pacte de Varsovie n’existant plus, n’est jamais gratuit. C’est la facture de son soutien durant les années noires qu’il nous présente. À cette facture, il faut ajouter la montée en puissance de la Chine, avec ses réserves de 3200 milliards de dollars et ses 1200 milliards de bons de trésor qui dérange sérieusement les USA, que ce dernier essaie de contenir en la chassant d’Afrique; ajoutez-y le bide potentiel des assouplissements financiers (quantitative easings) de la FED et vous avez la totale. Le remplacement de Ben Bernanke par Janet Yellen est l’archétype de l’aléa moral agité par le FMI mais s’agissant des USA avec le dollar comme monnaie internationale, il n’y peut rien!

Si les Libyens savaient qu’ils ont perdu le contrôle de leur Banque centrale, leurs instruments financiers internationaux, la bande d’Aouzou avec une partition en cours, ils ne feraient pas les marioles.

Synthèse

Le Gouverneur de la Banque d’Algérie est le personnage, au sens décisionnel, clé. Il ne peut s’opposer ni aux dépenses de l’État, ni aux instructions du FMI et de la Banque mondiale. Ses actions impacteront directement le peuple. Les deux autres ministres dont les décisions sont à suivre sont celui du Commerce (OMC)  et  du Budget. Sans tabou ni passion, la participation de l’armée algérienne aux cotés des armées étrangères doit être discutée.

Le projet de révision constitutionnelle n’est pas de la poudre aux yeux. Il est d’une très grande intelligence, Jean Ferrat aurait ajouté bête. Si ce projet aboutit tel qu’il est présenté, c’est l’Algérie qui sera offerte à l’ultralibéralisme et au fouet de Bildeberg. Elle ne mérite pas ce châtiment.

L’Algérie est capable de proposer un autre menu séparateur à cette théorie de la sélection adverse et alea moral : celui de l’amazighité avec un hymne national bilingue et du courage patriotique, le risque est sa déstabilisation par les forces étrangères et vivra son « printemps » arabe à celui du trio FMI, Banque mondiale et OTAN qui est austérité et soumission et le risque est une période sanglante entre Algériens avec risque de perte du Sud.  .

Une Algérie, telle une jarre pleine de générosité et de richesse mérite un sort meilleur. Ne la cassez pas s’il vous plait.

Cherif Assait

Notes :

[a] L’asymétrie de l’information est le travail qui a permis à George A. Akerlof, A. Michael Spence, Joseph E. Stiglitz d’obtenir le prix Nobel en économie en 2001.

George Akerlof est l’époux de Janet Yellen, présidente de la FED. Sa nomination à ce poste est elle-même une réponse à un aléa moral, celui de la confiance des marchés dans les QE mis en œuvre par Ben Bernanke. Dans le cas où ce plan échoue, la nomination de Yellen aurait été la réponse anticipée à cet aléa.

[b] Lemon market est un article académique écrit par G. Akerlof. Il est parmi les papiers les plus célèbres et utilisés dans les universités. Dans son acception américaine Lemon market signifie marché des citrons et en argot ce sont les produits d’occasion. Dans le cas d’Akerlof, il s’agit du marché des voitures d’occasion généralisé aux assurances, négociations internationales.

The Market for « Lemons »: Quality Uncertainty and the Market Mechanism

George A. Akerlof
The Quarterly Journal of Economics, Vol. 84, No. 3. (Aug., 1970), pp. 488-500.

http://links.jstor.org/sici?sici=0033-5533%28197008%2984%3A3%3C488%3ATMF%22QU%3E2.0.CO%3B2-6

Références bibliographiques

[1] Présidence de la République. Présentation générale des propositions d’amendements pour la révision constitutionnelle.  http://www.el-mouradia.dz/francais/infos/actualite/archives/Consulatations/Propositions.htm. (Consulté juin 2014).

[2] Conseil constitutionnel. CONSTITUTION DE 1996 (modifiée par la loi n° 08-19 du 15 novembre 2008 portant révision constitutionnelle). http://www.conseil-constitutionnel.dz/indexFR.htm.  (Consulté juin 2014).

[3] Constitution de la République tunisienne : http://www.businessnews.com.tn/bnpdf/Constitutionfrancais.pdf

[4] Constitution des États-Unis d’Amérique : http://www.usconstitution.net/const.pdf

[5] Constitution du Canada. http://laws-lois.justice.gc.ca/fra/Const/TexteComplet.html

[6] Constitution française. http://www.assemblee-nationale.fr/connaissance/constitution_11-2011.pdf

[7] Tunisie-Secret. Explosif : Noah Feldman est le père spirituel de la constitution tunisienne. http://www.tunisie-secret.com/Explosif-Noah-Feldman-est-le-pere-spirituel-de-la-constitution-tunisienne_a781.html

[8] Smail Goumeziane. Pnud 2013: une lecture critique de l’indice de développement humain de l’Algérie.  http://www.maghrebemergent.info/component/k2/item/22421-pnud-2013-une-lecture-critique-de-l-indice-de-developpement-humain-de-l-algerie/22421-pnud-2013-une-lecture-critique-de-l-indice-de-developpement-humain-de-l-algerie.html

[9] IRIB. Le système bancaire algérien sous le feu des critiques de la Banque mondiale et du FMI. http://french.irib.ir/afrique/actualit%C3%A9s/economie-finance-afrique/item/330019-le-syst%C3%A8me-bancaire-alg%C3%A9rien-sous-le-feu-des-critiques-de-la-banque-mondiale-et-du-fmi
[10]. Marie-Annick Barthe. Économie de l’Union européenne. 4 éd. 2011. P. 285.

[11] Quotidien Liberté. Nadia Mellal. Tout en appelant à la prise en charge de ses “problèmes techniques” FLN : “Tamazight doit être officielle”. http://www.liberte-algerie.com/actualite/fln-tamazight-doit-etre-officielle-tout-en-appelant-a-la-prise-en-charge-de-ses-problemes-techniques-222769

[12]. Cherif AISSAT. Algérie. Impacts économiques de tamazight. Dans le cadre du respect des droits de l’Homme et des principes du développement durable. Perspective de calcul du bonheur national brut. https://www.youtube.com/watch?v=tJqxVt1Xrt0. Université de Montréal. Avril 2104.

[13]. Cherif AISSAT. Centre de recherche en mondialisation. Exploitation des gaz de schiste en Algérie ou la destruction de son avenir social et économique. http://www.mondialisation.ca/exploitation-des-gaz-de-schiste-en-algerie-ou-la-destruction-de-son-avenir-social-et-economique/5383829. Mai 2014.

[14-a]. Cherif AISSAT. Centre de recherche en mondialisation.  L’Adhésion de l’Algérie à l’OMC. Descente dans l’enfer du droit et de la concurrence ou catapulte vers la jungle du commerce mondial. http://www.mondialisation.ca/ladhesion-de-lalgerie-a-lomc-descente-dans-lenfer-du-droit-et-de-la-concurrence-ou-catapulte-vers-la-jungle-du-commerce-mondial/5313851

[14-b]. Cherif AISSAT. Association des Amis de l’Algérie plurielle. Accession de l’Algérie à l’OMC. http://www.youtube.com/watch?v=fRFbjd93DKo

Cherif Aissat est étudiant en économie à l’Université de Montréal



Articles Par : Cherif Aissat

Avis de non-responsabilité : Les opinions exprimées dans cet article n'engagent que le ou les auteurs. Le Centre de recherche sur la mondialisation se dégage de toute responsabilité concernant le contenu de cet article et ne sera pas tenu responsable pour des erreurs ou informations incorrectes ou inexactes.

Le Centre de recherche sur la mondialisation (CRM) accorde la permission de reproduire la version intégrale ou des extraits d'articles du site Mondialisation.ca sur des sites de médias alternatifs. La source de l'article, l'adresse url ainsi qu'un hyperlien vers l'article original du CRM doivent être indiqués. Une note de droit d'auteur (copyright) doit également être indiquée.

Pour publier des articles de Mondialisation.ca en format papier ou autre, y compris les sites Internet commerciaux, contactez: [email protected]

Mondialisation.ca contient du matériel protégé par le droit d'auteur, dont le détenteur n'a pas toujours autorisé l’utilisation. Nous mettons ce matériel à la disposition de nos lecteurs en vertu du principe "d'utilisation équitable", dans le but d'améliorer la compréhension des enjeux politiques, économiques et sociaux. Tout le matériel mis en ligne sur ce site est à but non lucratif. Il est mis à la disposition de tous ceux qui s'y intéressent dans le but de faire de la recherche ainsi qu'à des fins éducatives. Si vous désirez utiliser du matériel protégé par le droit d'auteur pour des raisons autres que "l'utilisation équitable", vous devez demander la permission au détenteur du droit d'auteur.

Contact média: [email protected]