Assassinat de l’ingénieur tunisien Mohamed Zouari : « Il s’agit bien du Mossad »

Le 15 décembre 2016, Mohamed Zouari, 49 ans, ingénieur en aéronautique tunisien, a été assassiné à Al Aïn (gouvernorat de Sfax – Tunisie). Ancien étudiant militant du mouvement tunisien de tendance islamique Ennahdha, il avait rejoint les Brigades Ezzedine al-Qassam, branche armée du mouvement de résistance palestinien Hamas. Ces dernières années, il supervisait son programme de drones, notamment le guidage d’Ababil 1 utilisé avec succès pendant l’agression israélienne de Gaza en juillet/août 2014.

Le pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme a arrêté une dizaine de Tunisiens ayant participé à son assassinat, semble-t-il à leur insu.

En décembre 2016, Hédi Majoub – alors ministre tunisien de l’Intérieur – a déclaré que le meurtre avait été planifié plusieurs mois plus tôt « par des parties étrangères et à l’étranger ».

Il a révélé qu’en juin 2016, une jeune journaliste tunisienne à la recherche d’un emploi, résidant à Budapest (Hongrie), avait été recrutée via Internet par une société de production prétendant travailler pour une chaîne de télévision malaisienne – en lui faisant croire qu’elle allait participer à la réalisation d’un documentaire sur six pays arabes, dont la Tunisie.

La Tunisienne a rencontré les dirigeants de la société à Vienne (Autriche), le 12 décembre suivant. Ils lui ont demandé de louer deux voitures à Tunis, de les garer près d’une mosquée et de cacher les clés afin qu’une autre personne les récupère. Ils lui ont dit de retourner ensuite en Hongrie pour prendre part à une réunion urgente, ce qu’elle a fait.

Selon le ministre tunisien, deux équipes étaient chargées de la logistique de l’opération, une autre de l’assassinat. Parmi ses membres : un belge d’origine marocaine, toujours recherché.

Huit balles de 9mm

Le ministre a précisé que la jeune fille était effectivement à Budapest le jour de l’assassinat et que les autorités tunisiennes lui avaient conseillé de revenir d’urgence car elles craignaient pour sa sécurité. Ce qu’elle a fait aussi ! Elle a été placée sous mandat de dépôt.

Hédi Majoub a également révélé qu’une autre équipe, sans lien avec la première, se préparait également pour assassiner Mohamed Zaouri. Deux Tunisiens résidant en Slovénie avaient été recrutés par la même société viennoise. Ils devaient louer un local à Sfax et acheter deux voitures, mais leurs commanditaires avaient annulé l’opération quand l’un des deux Tunisiens a émis des doutes sur l’objectif de leur mission.

La première équipe est aussitôt passée à l’action. Les tueurs, postés dans un camion non loin du domicile de l’ingénieur, ont foncé sur l’arrière de son véhicule pour l’immobiliser. Puis, ils l’ont tué de huit balles de 9mm (pour 20 tirées avec des silencieux). Des hackers auraient ensuite accédé au système de surveillance d’un restaurant situé près du lieu, et effacé l’enregistrement vidéo.

D’autres parties impliquées ?

De son côté,  le Hamas a constitué une Commission d’enquête. Mohamed Nazzal, membre du bureau politique du mouvement de résistance palestinien, en a présenté les conclusions lors d’une conférence de presse tenue le 16 octobre à Beyrouth. Il a affirmé détenir « des preuves irréfutables » permettant de désigner les commanditaires du meurtrede Mohamed Zouari.

L’opération était dirigée par deux agents se faisant appeler « Yohan et Fethi Midou » qui ont passé la frontière tunisienne grâce à des passeports bosniaques.

« Il s’agit bien du Mossad; et il n’y a aucun doute là-dessus.» a déclaréMohamed Nazzal, indiquant que des agents israéliens se faisant passer pour des journalistes étrangers avaient approché Mohamed Zouari. Méfiant, l’ingénieur les avait éconduits.

La veuve de la victime, Majda Saleh, de nationalité syrienne, craint que la justice tunisienne classe le dossier. Elle a déclaré sur Mosaïque FM : « Je veux que justice soit faite pour Mohamed Zouari. Le silence [de la part des autorités tunisiennes] est grand… Nous savons pertinemment qu’Israël a perpétré ce crime, mais il y a d’autres parties impliquées dans cet assassinat. Qui sont-elles? ». La réponse risque de tarder. Dans cette affaire, la justice tunisienne marche sur des œufs…

Gilles Munier

Sur le même sujet, lire aussi :

Attentats terroristes israéliens en Tunisie et en Angola

Mossad, permis de tuer

Mossad, permis de tuer (suite)

 



Articles Par : Gilles Munier

Avis de non-responsabilité : Les opinions exprimées dans cet article n'engagent que le ou les auteurs. Le Centre de recherche sur la mondialisation se dégage de toute responsabilité concernant le contenu de cet article et ne sera pas tenu responsable pour des erreurs ou informations incorrectes ou inexactes.

Le Centre de recherche sur la mondialisation (CRM) accorde la permission de reproduire la version intégrale ou des extraits d'articles du site Mondialisation.ca sur des sites de médias alternatifs. La source de l'article, l'adresse url ainsi qu'un hyperlien vers l'article original du CRM doivent être indiqués. Une note de droit d'auteur (copyright) doit également être indiquée.

Pour publier des articles de Mondialisation.ca en format papier ou autre, y compris les sites Internet commerciaux, contactez: [email protected]

Mondialisation.ca contient du matériel protégé par le droit d'auteur, dont le détenteur n'a pas toujours autorisé l’utilisation. Nous mettons ce matériel à la disposition de nos lecteurs en vertu du principe "d'utilisation équitable", dans le but d'améliorer la compréhension des enjeux politiques, économiques et sociaux. Tout le matériel mis en ligne sur ce site est à but non lucratif. Il est mis à la disposition de tous ceux qui s'y intéressent dans le but de faire de la recherche ainsi qu'à des fins éducatives. Si vous désirez utiliser du matériel protégé par le droit d'auteur pour des raisons autres que "l'utilisation équitable", vous devez demander la permission au détenteur du droit d'auteur.

Contact média: [email protected]