Bernard Kouchner menace l’Iran

Le médecin sans frontière devenu guerrier sans frontière

Bernard Kouchner dit devoir se préparer à bombarder l’Iran. ( Bernard Kouchner rencontrant Louis Michel en 2005). (Photo http://ec.europa.eu)

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« Il faut se préparer à la guerre contre l’Iran ». La phrase est du ministre Bernard Kouchner. Comment un homme qui portait des sacs de riz aux Somaliens en est-il arrivé là ?

C’est une étonnante incitation à la guerre de la part d’un médecin, co-fondateur de Médecins sans frontières (MSF), actuel ministre français des Affaires étrangères. Il s’agit en plus d’une violation flagrante de la Charte de l’ONU qui interdit les états de recourir à la menace contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance d’un autre état. Kouchner, le médecin engagé serait-il devenu aujourd’hui le porte-parole enragé des néo-conservateurs américains ?

Fin des années 1960, le Biafra, région riche en pétrole, essaie de se séparer du Nigeria. Bernard Kouchner, un jeune médecin français, choqué par la souffrance des enfants et les massacres de la guerre, se rend sur place pour sauver des vies. Il apprendra cependant rapidement que la mission humanitaire française fait partie d’une opération plus large de soutien à la sécession biafraise. La France livre des armes et des médecins au Biafra dans l’espoir d’obtenir un contrôle des ressources biafraises après l’indépendance. Kouchner et son engagement humanitaire sont dès le début des outils au service d’un objectif politique.

Son engagement lui vaudra néanmoins beaucoup de respect et d’attention médiatique. Il en profitera pour fonder MSF en 1971. Cependant quand en 1979 il n’arrive plus à imposer sa ligne, il abandonne l’organisation. C’est au cours des années 1990 que le « French Doctor » développe sa théorie du « devoir d’ingérence ». Le concept est simple : toute organisation doit avoir le droit d’intervenir dans n’importe quel pays pour des raisons humanitaires. Kouchner conçoit même l’utilisation du pouvoir militaire d’un état au service de « l’humanitaire ».

En 1988, il rentre au gouvernement socialiste où il deviendra ministre « de l’action humanitaire ». Très rapidement le devoir d’ingérence va se transformer de « l’Etat au service de l’humanitaire » à « l’humanitaire au service de l’Etat ». Au courant des années 1990 Kouchner justifiera ainsi toutes les interventions militaires occidentales.

« Les bombes humanitaires aux Balkans »

En 1999 Kouchner soutient l’attaque de l’OTAN au Kosovo et en Serbie. Le résultat est désastreux : pendant les bombardements de l’OTAN le nombre de réfugiés augmente exponentiellement. Plus de 15 000 civils sont tués dans la guerre. Kouchner deviendra Commissaire spécial de l’ONU au Kosovo après la guerre. Son parti pris pour les intérêts occidentaux le mène à introduire le Deutsch Mark comme monnaie du Kosovo !

En 2003, le groupe français Total fait l’objet de plusieurs plaintes pour la violation des droits de l’homme en Birmanie. Le groupe est accusé d’utiliser du travail forcé dans cette sanglante dictature. Total s’offre Kouchner et lui paye 25 000¤ pour rédiger un rapport. Le gentil docteur s’exécute, blanchit Total de toute responsabilité et prétend en outre que les Birmans sont absolument heureux de la présence de Total1.

La même année, notre docteur est parmi les quelques intellectuels français à défendre une intervention américaine contre le régime irakien. On en connaît aujourd’hui les conséquences humanitaires.

De la médecine et l’humanitaire à l’argent et l’ingérence militaire, les priorités de Kouchner ont bien évolué. Après l’élection du néo-conservateur Sarkozy à la présidence française, ce n’est pas par hasard qu’on lui offre un poste de ministre alors qu’il est un des membres en vue du PS et qu’il a fait campagne pour Ségolène Royal. Sa première grande déclaration comme ministre des affaires étrangères ne déçoit point les faucons de l’administration américaine. En ce qui concerne l’Iran il nous dit de « se préparer au pire ». Et ce serait quoi le pire Monsieur Kouchner ? « Le pire c’est la guerre monsieur ». Mais ne vous inquiétez pas ajoute-t-il, « aucun signe nous permet de penser, en dehors des préparations militaires » que le bombardement de l’Iran soit proche2. » Pardon ! En dehors des préparations militaires ?

On prépare la guerre. Les enfants iraniens attendent les bombes. Et en attendant Kouchner leur propose des sanctions. Des sanctions européennes, qui devraient s’ajouter aux sanctions de l’ONU, trop faibles à son goût. Le gentil médecin aurait-il oublié que des sanctions contre l’Irak ont tué plus de 500 000 enfants ? Selon Kouchner c’est au tour des enfants iraniens maintenant de subir des sanctions meurtrières et des tapis de bombes. Il est grand temps d’arrêter le docteur !

Solidaire, 26 septembre 2007

1 Le Monde 05/01/2004, Libération 10/12/2003 
2 Le Monde 16/09/07



Articles Par : Marc Botenga

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