Billet du NYT : l’OTAN et l’Europe se préparent à intervenir directement contre la Russie pour sauver le monde global

La militarisation du discours en Occident est un signe de mauvais augure. Alors que nos sociétés en Europe ont été objectivement affaiblies depuis la Seconde Guerre mondiale et boboïsées après la chute de l’Union soviétique, le nouveau pouvoir atlantiste tente de les relever au son du clairon en vue d’une agression de la Russie, par les pays de l’OTAN eux-mêmes, pour sauver le monde global d’un risque de résurgence des Etats et des Nations. Sommes-nous à ce point décérébrés, pour aller mourir la fleur au fusil afin de défendre la domination américaine sur nos terres ? Espérons que non, mais la réponse sera rapidement apportée.

N’en déplaise aux optimistes professionnels, qui nous répètent de part et d’autre que tout est plié – la Russie a déjà perdu, la Russie a déjà gagné, le véritable combat est encore à venir. Tout ce qui se passe aujourd’hui ressemble à s’y méprendre à la préparation, et militaire, et mentale, des populations à un véritable conflit généralisé sur le Continent européen. La montée en flèche de la militarisation du discours ces derniers mois et la tentative de correction du cours politique le confirment.

Ainsi, se déroule actuellement un exercice militaire d’une ampleur inédite sur le Continent européen depuis la fin de la Guerre froide, où justement l’OTAN joue le scénario d’une guerre contre la Russie, principalement dans la région balte et le front Est, l’Europe étant redevenue un « front » pour l’OTAN, n’ayez aucun doute en cela :

« A noter que depuis lundi 22 janvier, l’Otan organise actuellement un exercice militaire sans précédent depuis la guerre froide, pour lequel 90.000 soldats participent, dont 20.000 militaires du Royaume-Uni. Quelque 31 pays membres de l’organisation y sont représentés. L’exercice devrait durer plusieurs mois, et se fonde sur un scénario catastrophe comme justement une guerre ouverte avec la Russie. »

Parallèlement, le NYT sort un article nous annonçant froidement le caractère inéluctable d’une intervention directe de l’OTAN, et donc des pays européens, contre la Russie, dans un avenir proche :

« L’Europe et l’OTAN envisagent de s’attaquer seules à la Russie

Les nations européennes craignent de plus en plus que la Russie puisse envahir un pays de l’OTAN au cours de la décennie à venir et qu’elles soient confrontées à ses forces sans le soutien des États-Unis. »

La question pour cet organe de propagande atlantiste ne se pose pas sur le fait d’une attaque des pays de l’OTAN de la Russie, mais sur la date.

En effet, deux problèmes majeurs se posent à cela : 1) la désindustrialisation de masse, puisque l’on ne cessait de nous bercer avec le culte de l’ère post-industrielle, qui touche également la production d’armement ; 2) la décérébration des sociétés occidentales, bercées au culte de l’individualisme infantilisant – or, si l’on ne vit que pour son nombril, on se moque des guerres des autres, même dans l’intérêt supérieur atlantiste.

Dans les deux cas, les problèmes sont sérieux. La question de la désindustrialisation s’est accompagnée d’une perte, ou plutôt d’une destruction volontaire, des connaissances et des capacités intellectuelles. Il n’y a plus de spécialistes, ni d’établissement d’enseignement capables de les former. Le Processus de Bologne et l’OCDE y ont veillé depuis des dizaines d’années, nous pouvons les féliciter d’avoir transformé l’école et l’université en une usine à crétins. S’il reste des personnes capables de réfléchir, et il y en a toujours, cela n’est pas grâce au système d’enseignement et de recherche, mais malgré ce système.

Le travail en profondeur de la société, avec le délire des genres et l’émasculation de principe, a permis de produire, adossé à un processus d’éducation de plus en plus déstructurant, des personnes faibles, physiquement et mentalement, et parfaitement dressées. Comme l’épisode Covid l’a montré : vaccinés sur ordre, faisant des autorisations de sortie pour aller au resto, sortant son chien dans le périmètre autorisé, prenant son café assis, etc. L’effacement de l’humanité chez l’homme a finalement été d’une facilité inquiétante.

Aujourd’hui, le monde global a réussi à produire une société globale, écrasée et manipulable, compatible avec son mode pacifié et accepté d’existence uniquement pour soi, mais parfaitement incompatible avec son besoin de guerre. S’il est possible d’envoyer des abrutis jeter de la soupe sur la Joconde, il est plus difficile de les envoyer au combat sur un véritable front.

Or, le monde global a besoin d’une guerre, car ce modèle de société n’est pas viable, ni économiquement, ni socialement, ni politiquement. Il atteint les limites acceptables en temps de paix. Seul un choc fondamental permettrait de faire bouger les lignes suffisamment pour aboutir la déconstruction de « l’ancien monde ».

Et le monde global a besoin de gagner militairement la guerre enUkraine contre la Russie, car il a besoin de terminer le travail de 1991. L’écrasement politique de la Russie a montré ses limites, elle se relève à chaque fois de ses cendres. Il faut l’écraser militairement. Et chacun comprend parfaitement que l’Ukraine est une allumette, non un moyen direct d’y arriver.

La guerre commencée en Ukraine par l’OTAN ne permettra pas de vaincre la Russie militairement, par les seules mains des Ukrainiens. En revanche, cette guerre doit permettre de retravailler les sociétés occidentales, doit permettre de réintroduire le discours militaire, doit justifier certains ajustements dans l’idéologie globaliste … mais surtout sans aller jusqu’à la réhabilitation de la nation en Occident. Ce conflit est le détonateur.

Et c’est ici la faiblesse intrinsèque de cette démarche : l’Ukraine a vu pousser au paroxysme et réécrire sa nation, afin de lancer des Ukrainiens reprogrammés contre leur Mère-Patrie, la Russie. Même si ce discours ne prend toujours pas, d’ailleurs, dans une grande partie du territoire. Les pays occidentaux, eux, n’auront même pas le privilège de la Nation : ils devront envoyer leurs hommes mourir pour garantir la victoire du monde global, sur la Russie … et donc sur leur propre pays.

Car si l’OTAN prévoit et organise une guerre de grande ampleur (ce qui ne signifie pas qu’elle va y arriver), elle ne prépare pas une guerre mondiale, c’est-à-dire une guerre des Etats contre les Etats. Ce ne sera pas la guerre de la France, de l’Allemagne, de la Grande-Bretagne contre la Russie. Ni la France, ni l’Allemagne, ni aucun pays européen n’a le droit d’être un Etat, c’est-à-dire souverain. Ils ne sont que des ressources. L’OTAN prépare une guerre globale, autrement dit une guerre contre les Etats. Ces pays vont envoyer des hommes se battre pour que la Russie, comme Etat disparaisse, et avec elle les Etats en Europe, qui tomberont pour une grande période dans une dictature atlantiste globale.

Et cela doit être fait sans réellement remasculiniser les sociétés. Et cela prétend être fait sans légitimer la nation en Europe. Il y a peu de chances pour que cette fantasmagorie fonctionne, cette troisième voie semble assez peu réaliste, mais le risque existe bien et le résultat dépend de nous.

Karine Bechet-Golovko



Articles Par : Karine Bechet-Golovko

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