Ce que veut l’Aipac, il l’obtient.

Les vendus démocrates et le lobby israélien

[Encore un universitaire qui élève la voix pour exprimer une vérité fondamentale concernant l’Aipac et, de manière générale, le lobby sioniste. Pas étonnant que le lobby, et son ‘Campus Watch’ [organisme de flicage anti-antisioniste sévissant dans les universités américaines, ndt] soient inquiets. Ils perpétuent ce qui est décrit dans cet article depuis des décennies, sans la moindre réaction de gens qui prétendent défendre la cause palestinienne (et il n’y a toujours pas le moindre frémissement de prise de conscience à ce sujet dans les organisations bidons du mouvement anti-guerre. Etonnant, non ?) Jeff Blankfort.]

En novembre, l’électorat américain a rejeté la débâcle de Bush en Irak, installant des majorités démocrates tant à la Chambre qu’au Sénat, en se jurant de mettre un terme définitif à cette « politique tordue, enveloppée dans l’illusion ». Bush a mis son véto à leur calendrier de retrait (d’Irak), mais les électeurs ont exhorté leurs leaders à tenir bon et à ne pas se laisser avoir. Finalement, toutefois, ce sont non moins de 37 sénateurs démocrates qui ont capitulé et qui ont donné gratuitement (et sans aucune condition) au président Bush son chèque en blanc de 100 milliards de dollars, soit assez d’argent pour financer les études d’un million trois cents mille étudiants du secondaire, durant quatre années complètes !

Profonde déception. Cindy Sheehan, l’icône progressiste, fut tellement démoralisée qu’elle a démissionné et qu’elle est retournée à la vie civile. En juin, un sondage réalisé par CNN indiquant que le « respect envers le Congrès » avait chuté vertigineusement, atteignant le plus bas niveau « jamais encore enregistré ».

Certains bloggers [il s’agit de personnes qui échangent librement leurs opinions et commentaires politiques sur des sites ouèbes personnels, ndt] les ont traîté de « démocrates traîtres », et ce qualificatif est approprié. Au moment du vote, 62 % des Américains étaient favorable à un calendrier de retrait (d’Irak), mais, plus significatif encore, ce sont 70 % des démocrates qui étaient de cet avis. Aussi, le vote parlementaire contre cette vague de colère grossissante a trahi la volonté des citoyens et du parti qui, précisément, avaient désigné ces (parlementaires) démocrates.

Curieusement, la totalité des démocrates traîtres s’avèrent de gros détenteurs de fonds provenant du lobby israélien. Si nous prenons dix de ces Démocrates apostats et si nous les comparons à dix Démocrates n’ayant pas trahi leurs électeurs, les contributions versées par les lobbys locaux pro-israéliens [les ‘pro-Israeli PAC, ndt] à ceux qui ont retourné leur veste sont dix fois plus importantes que celles perçues par les édiles demeurés fidèles à leur électorat (en moyenne : 322 000 dollars, contre 34 000 dollars).

Rentrons dans le détail : Carl Levin, détracteur déclaré de la guerre, et, pensions-nous, soutien loyal du nouveau régime (démocrate, ndt) pour qu’il y mette fin, a fait défection et a effrontément tourné le dos à sa base électorale dans l’Etat du Michigan. En dépit de sa rhétorique anti-guerre stridente, le quotidien Grand Rapids Independent écrit que Levin a soutenu Bush sur toute la ligne, « votant avec constance le financement de la guerre et n’introduisant aucun texte législatif significatif susceptible d’en avancer la fin ». Pratiquement inconnu de ses électeurs, Levin est un des principaux bénéficiaires des largesses des « Pro-Israeli PAC » : il a reçu 600 000 dollars en « contributions à sa carrière (politique) », indique le Washington Report on Mideast Affairs.

Barbara Boxer, Denis Kucinich et Earl Blaumenauer, tous opposants à la guerre, ont reçu tous les trois ensemble 37 000 dollars ; mais ces démocrates ayant retourné leur veste que sont Dan Durbin, Max Baucus et Frank Lautenberg ont raflé plus d’un million de dollars, auquel il convient d’ajouter des gratifications occultes, tels des voyages à l’œil…

Ce qui part au lavage, c’est le meilleur que puisse acheter le fric de l’Aipac : trois mois avant que nous n’envahissions l’Irak, un sondage du New York Times montrait que seulement 30 % des Américains étaient favorables à une invasion totale ; mais le lobby israélien [Aipac] y était favorable, et il a emporté le morceau. Seule, une petite pincée d’Américains était en faveur de l’ « insurrection » – à peine 14 % – mais l’Aipac y était favorable, et l’insurrection, on la voit se produire en ce moment même ! Moins de 30 % des Démocrates étaient favorables à voter des budgets non conditionnés, mais l’Aipac y était favorable. En conclusion s’élève le chœur rebattu : « Ce que veut l’Aipac, l’Aipac l’obtient »… 

En 1992, le directeur du lobby israélien, David Steiner, a été enregistré à son insu en train de se vanter d’avoir joué un rôle dans le choix du Secrétaire d’Etat et de tout ce qu’il avait obtenu en faveur d’Israël : « En plus des 10 milliards de prêts garantis – ce qui était déjà fabuleux -, (j’ai décroché) 3 milliards en aide militaire à l’étranger, et j’ai eu presque un milliards de dollars, sous forme d’autres friandises dont personne n’a la moindre idée ! ». L’enregistrement ayant été rendu public, Steiner démissionna. Mais cette histoire n’a fait que souligner l’incroyable pouvoir, le formidable entrisme et l’inimaginable influence qui sont ceux du Lobby.

Deux universitaires, Mearsheimer et Walt, ont insinué, récemment, que la démocratie américaine a été subornée par le lobby israélien – faisant, en cela, écho à l’accusation formulée en 1989 par le Sénateur Fulbright contre l’Aipac, d’avoir usurpé le processus électoral et d’être capable de « faire élire ou faire battre n’importe quel sénateur ou n’importe quel membre du Congrès qu’il voudrait éliminer ». Ces observations ne sont pas tombées dans l’oreille de sourds. Plus de la moitié du Sénat et un tiers du Congrès ont assisté au congrès annuel de l’Aipac, où ils ont été bien sages (à opposer à moins d’une douzaine venus participer à l’événement organisé par la NAACP [il s’agit de la National Association for the Advancement of Colored People – une sorte de Mrap américain, ndt). Le fait de ne pas assister au congrès de l’Aipac risque de suggérer l’idée que le législateur non assidu pourrait être faible face au terrorisme, voire pire – ce qu’à Dieu ne plaise – être antisémite !

Les idéalistes anti-guerre peuvent penser que le crime de guerre en cours, le carnage « choc et tremblement », les tortures et les enlèvements suivis d’internements touchent à leur fin, mais l’agenda de l’Aipac semble fermement axé sur le maintien de troupes américaines au Moyen-Orient, en tant que première ligne israélienne de défense et, ce, jusqu’à un horizon indéfini. Leur principal doberman d’attaque, Joe Lieberman, a récemment donné un avant-goût, à l’émission télévisée Face the Nation, de ce qui risque de nous attendre : des « frappes militaires » contre l’Iran… apparemment, pour s’assurer qu’Israël restera bien l’unique puissance nucléaire au Moyen-Orient.

Aussi, si vous pensez que vous avez voté, ou que vous allez voter, afin de ramener les soldats à la maison et de mettre un point final à ce marasme national, sachez qu’à l’extrémité de cet arc-en-ciel, le paxon qui a servi à acheter un parlementaire marron vous attend…

Aricle original en anglais, Counter Punch, 10 juillet 2007.

Traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier.

Jerry Kroth
, Ph. D., enseigne la psychologie en Californie. Il est l’auteur de Conspiracy in Camelot : the complete history of the assassination of John Fitzgerald Kennedy. On peut le joindre par mél à l’adresse suivante : [email protected]



Articles Par : Jerry Kroth

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