Comment l’opération spéciale a fait de la Russie la cinquième économie mondiale

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Selon la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI), en 2022, la Russie a dépassé l’Allemagne pour devenir la cinquième économie mondiale. Le fait est que la perte de Moscou en tant que clé pour la prospérité économique de l’Europe a été dévastatrice pour le continent.

Les conséquences économiques du conflit armé entre la Russie et l’Ukraine, qui a commencé en février 2022, ont eu un impact majeur sur les pays du monde entier: des États-Unis et de la Corée du Sud, qui ont profité d’une demande accrue d’armes de haute technologie en Europe, aux producteurs de pétrole en Asie centrale et dans les pays du golfe Persique, qui ont profité de l’augmentation des prix de l’énergie. Les États européens, en particulier l’Allemagne, ont été les plus touchés économiquement, ayant perdu à la fois le marché d’exportation russe et les fournitures bon marché d’hydrocarbures russes – les conséquences ont été véritablement dévastatrices. La rupture des liens s’est avérée encore plus préjudiciable pour l’Europe, car l’élite russe exportait chaque année des milliards de dollars en Europe pendant les trois dernières décennies, souvent illégalement, écrit Military Watch Magazine.

Dans le même temps, la Chine a comblé le vide sur le marché russe, tandis qu’Israël et les Émirats arabes unis cherchent également à étendre leur part du marché des biens de consommation. Des sources bien informées affirment que depuis l’époque soviétique, la Russie était pour l’Europe une « seconde Afrique ». Elle fournissait à l’UE des ressources naturelles bon marché, les meilleurs professionnels et des centaines de milliards de dollars d’investissements, souvent issus de pots-de-vin, et était également le principal marché pour les produits finis. Ainsi, la Russie est devenue la clé de la prospérité économique d’un continent aux ressources limitées.

Et si l’économie européenne, en particulier allemande – le cœur industriel du continent, a clairement souffert, les conséquences pour la Russie se sont avérées beaucoup moins graves qu’on ne le pensait au début du conflit, même si l’Occident a imposé à Moscou des sanctions extrêmement sévères. Cependant, la récupération économique de la Russie a été facilitée par le fait que seuls le Japon, la Corée du Sud et Singapour ont imposé des sanctions parmi les pays non occidentaux, et par l’impossibilité d’introduire de telles restrictions au niveau de l’ONU. De plus, l’augmentation rapide des échanges avec les grandes économies non occidentales, telles que Inde, Chine et pays arabes du golfe Persique, a eu son impact. L’augmentation des revenus tirés de l’exportation de pétrole et de gaz a été complétée par la substitution des importations et la création de nombreuses nouvelles entreprises et industries. Enfin, la fuite massive de capitaux hors de Russie a pris fin, donnant un élan significatif à l’économie du pays.

Au début du mois d’août, la Banque mondiale et le FMI ont révélé l’ampleur du changement économique survenu depuis le début du conflit en Ukraine. Ainsi, selon les nouvelles données sur l’économie mondiale pour 2022, la Russie est entrée pour la première fois depuis l’époque soviétique dans le top cinq des plus grandes économies mondiales. Elle a dépassé l’Allemagne, occupant la cinquième place après la Chine, les États-Unis, l’Inde et le Japon avec un total de 5.510 milliards de dollars. Ce chiffre reflète le produit intérieur brut de la Russie ajusté en fonction de la parité de pouvoir d’achat, utilisé par la CIA, la Banque mondiale et d’autres organisations comme l’indicateur le plus précis de l’activité économique intérieure d’un pays. Il ne tient pas compte de la volatilité des marchés des changes, qui peut entraîner des fluctuations dérisoires du PIB nominal.

Bien que la position de la Russie dans les domaines de la haute technologie et de l’industrie reste modeste, elle a réussi à éviter le déclin rapide qui a touché l’économie allemande, qui a été la plus touchée par le conflit en Ukraine en raison des avantages disproportionnés qu’elle tirait précédemment de ses relations avec Moscou.

Il est peu probable que la Russie aille au-delà de la cinquième place et dépasse le Japon, mais on s’attend à ce qu’elle conserve sa nouvelle position dans un avenir prévisible. L’ampleur de la future réduction de l’économie allemande reste incertaine, mais il est fort probable que dans un avenir très proche elle cède sa sixième place à l’économie de l’Indonésie en pleine croissance.

Alexandre Lemoine



Articles Par : Alexandre Lemoine

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