Comment Suez a financé l’équipe de transition de Donald Trump
L’équipe qui a géré la transition présidentielle aux États-Unis pour le compte de Donald Trump vient de rendre publique, comme la loi américaine le lui oblige, la liste des donateurs. On y retrouve une ribambelle de milliardaires et de multinationales comme Microsoft, ExxonMobil, Amazon ou Pepsi. Y figurent aussi, de manière plus inattendue, des entreprises françaises. Soit directement comme Suez, soit par le biais des associations professionnelles auxquelles elles appartiennent.
« Trump for America », l’organisation créée par Donald Trump pour gérer son arrivée à la présidence des États-Unis, a amassé un trésor de guerre de plus de 6 millions et demi de dollars, grâce aux dons de nombreux individus et entreprises. Elle vient de rendre publique, comme la loi américaine le lui oblige, la liste de ses donateurs. Une liste qui confirme, si besoin en était, la proximité de son administration avec les milieux économiques et les innombrables conflits d’intérêts qui la caractérisent (lire nos articles ici et là).
On y retrouve les noms de nombreux milliardaires qui avaient financé la campagne électorale de Trump, comme Sheldon Adelson, le magnat des casinos. Certains d’entre eux ont obtenu des postes dans la nouvelle administration, comme Betsy DeVos, secrétaire d’État à l’Éducation et grande promotrice des écoles privées, ou Wilbur Ross, Secrétaire au Commerce et administrateur d’ArcelorMittal. D’autres sont des lobbyistes éminents de Washington.
Les donateurs de « Trump for America » incluent aussi de nombreuses entreprises, petites et grandes. De grands noms comme ExxonMobil (dont le patron Rex Tillerson est devenu le Secrétaire d’État de Trump), JP Morgan, Microsoft, PepsiCo ou encore Amazon. Les dirigeants de certaines d’entre elles ont pourtant pris publiquement contre Trump ou certaines des mesures qu’il a annoncées. On y trouve aussi, de manière plus inattendue, une entreprise française : Suez, par le biais de sa filiale Suez Water New Jersey.
Soutien intéressé
Comment expliquer cet engagement d’une entreprise française aux côtés de Trump, malgré ses discours ouvertement racistes et sexistes et les mesures controversées qu’il a annoncées ? L’explication réside sans doute dans l’une des principales annonces faites par Trump au lendemain des élections : un plan d’investissements dans les « infrastructures » de plusieurs milliards de dollars, qui a largement été considéré comme une porte grande ouverte à la privatisation des services publics, y compris les réseaux d’eau et d’assainissement. Un domaine dont Suez s’est fait une spécialité. De fait, parmi les entreprises qui ont financé l’équipe de transition de Trump, on trouve de nombreux secteurs qui comptent bien profiter directement de ses politiques. Ainsi de la firme Geo Group, spécialiste des prisons privées.
Suez est-elle la seule multinationales française à afficher ainsi son engagement aux côtés de Trump ? Directement, peut-être. À travers les associations professionnelles dont elles sont membres, cependant, nombre d’entre elles sont indirectement impliquées, comme elles l’avaient été dans le cadre de la campagne présidentielle 2016 (lire notre enquête : Élections américaines : l’argent du CAC 40 irrigue toujours les candidats climato-sceptiques). Ainsi de l’American Petroleum Institute, dont sont membres plusieurs firmes françaises et au conseil d’administration duquel siège un cadre dirigeant de Total. Ou encore de la Financial Services Roundtable, dont sont membres Axa et BNP Paribas. Faut-i y voir un rapport avec le fait que le nouveau président Trump a annoncé le démantèlement des régulations bancaires et financières mises en place par Obama, ainsi que la remise en cause de ses engagements climatiques ?
Olivier Petitjean