Crise des transmigrations du Nouvel ordre mondial provoquée par le désordre international du néolibéralisme et les guerres Otan

« Qui sème le vent récolte la tempête. » Proverbe
« Si un État connaît une expansion stratégique trop rapide, disons, par la conquête de vastes territoires ou par la conduite de guerres coûteuses, —il court le risque que les avantages potentiels de son expansion extérieure soient neutralisés par les dépenses accrues qu’elle exige. » Paul Kennedy, Naissance et déclin des grandes puissances, (‘The Rise and Fall of the Great Powers’, 1987)
« Les ventres de nos femmes nous permettront de conquérir l’Europe et le monde. » Houari Boumedienne (1932-1978), président algérien, en 1974
Le chaos provoqué par des gouvernements malavisés dans certaines régions du monde est en train de se transformer en une tragédie globale. En effet, la déstabilisation et la destruction voulues de pays entiers et leur transformation en ‘no-man-lands’ anarchiques et sans frontières avec des moyens militaires sophistiqués ont pour conséquence à terme de provoquer des déplacements massifs de populations, du jamais vu depuis la Deuxième Guerre mondiale. Les transmigrations de populations sont le résultant du désordre qui règne au Moyen-Orient et en Afrique du Nord et elles ne font sans doute que commencer. Il ne faut pas se leurrer. Elles ne toucheront pas seulement l’Europe, mais aussi d’autres régions du monde, dont l’Amérique du Nord.
C’est bien connu que les guerres et les destructions qui en résultent font des ravages humains incalculables. Et il est donc tout à fait prévisible que les populations, hommes, femmes et enfants, essaient de fuir ces zones de désolation et de misère et que des exodes de populations en résultent. Or, les guerres d’agression et les attaques armées que la Charte des Nations Unies était censée avoir abolies, en 1945, sont devenues aujourd’hui monnaie courante depuis que des pays puissants comme les États Unis ont décidé de faire à leur guise en reniant les principes des Nations Unies et en agissant militairement en dehors du cadre légal international.
Cela a coïncidé avec la montée en influence des néoconservateurs à l’intérieur du gouvernement étasunien mais aussi à l’intérieur d’un certain nombre de gouvernements européens. Leur idéologie politique consiste à renverser par la force les gouvernements jugés ‘peu coopératifs à la cause’. Cela a coïncidé aussi avec la transformation de l’OTAN d’une alliance militaire défensive qu’elle était avant 1991, en une alliance militaire offensive, sous l’égide des États Unis, afin de tirer profit du démantèlement de l’URSS. En effet, l’OTAN sert aujourd’hui de couverture à de multiples guerres d’agression contre de nombreux pays, allant de l’Iraq à l’Ukraine, afin de renverser leur gouvernement par la force, ce qui va carrément à l’encontre de la Charte des Nations Unies.
C’est ainsi que sous l’égide des États Unis et de leurs vassaux de l’OTAN, de nombreux pays et leurs économies ont été détruits depuis quinze ans. Le désordre international actuel a vraiment commencé quand Bill Clinton a prétexté des arguments humanitaires pour bombarder la Serbie au printemps de 1999, sans aucun mandat des Nations Unies et en dehors de toute loi internationale, détruisant villes et villages de ce pays. Les conséquences de ces destructions ont été nombreuses, dont des milliers de morts, et celle de créer des centaines de milliers de réfugiés et de provoquer des exodes massifs de populations.
George W. Bush n’allait pas être en laisse, et il entreprit lui aussi de détruire un autre pays, cette fois-ci l’Iraq, en mars 2003, à partir de mensonges et de fausses allégations, et cela une fois de plus sans aucun mandat des Nations Unies et en dehors du cadre de toute loi internationale. Cette politique d’agression s’est poursuivie en Libye avec Barack H. Obama quand le gouvernement de Moammar Ghadafi fut renversé par la force en 2011. Et la Libye sans lois et sans frontières est devenue, avec la Serbie et la Macédoine, une des principales portes de transit de milliers de migrants africains et moyen-orientaux, en route vers l’Europe occidentale.
Et cela continue. Le politique d’agression de certains gouvernements occidentaux se poursuit ouvertement aujourd’hui en Syrie avec la volonté des États Unis et de leurs alliés européens (Royaume Uni et France) et au Moyen-Orient (Arabie saoudite, Turquie, Israël, etc.) de renverser le gouvernement syrien de Bashar Assad, sous couvert d’une campagne tiède, non prioritaire et en grande partie hypocrite contre le monstre moyenâgeux du groupe terroriste État Islamique (EI), monstre qu’ils ont eux-mêmes contribué à créer en l’armant et en facilitant son recrutement de djihadistes étrangers.
Toutes ces incursions armées et ces bombardements étaient illégaux mais leurs dégâts sont réels et dévastateurs. En plus de tuer des milliers de civils, ils ont chassé de leurs villages des centaines de milliers de personnes. Et, ce sont ces personnes désespérées qui tentent aujourd’hui de s’enfuir par tous les moyens des enfers que de telles interventions ont produits.
Les transmigrations vers l’Europe et ailleurs que l’on observe présentement sont la conséquence directe des guerres illégales menées par des gouvernements irresponsables depuis presque deux décennies. Il s’agit d’un effet de boomerang susceptible de déstabiliser les pays qui ont voulu en déstabiliser d’autres. Dans ce drame, les politiciens européens qui sont à la remorque des politiciens étasuniens deviennent en quelque sorte des arroseurs arrosés.
Ainsi, pour l’Europe qui peine à intégrer les immigrations massives du passé et dont l’économie est stagnante, cette invasion transmigratoire, dont l’ampleur va en grandissant, arrive à un bien mauvais moment. Elle annonce des troubles sociaux et économiques majeurs.
Seulement au cours des sept premiers mois de l’année, on recense pas moins de 340 000 migrants africains et moyen-orientaux qui ont forcé les frontières de l’Union Européenne (UE), tandis que quelques milliers de personnes ont péri en mer en tentant de gagner les côtes européennes sur les bateaux de fortune des trafiquants et des passeurs. L’an dernier, ils étaient 280 000 à le faire, soit une indication que le problème va en s’intensifiant. En Allemagne, on anticipe un nombre record de 800 000 demandes d’asile seulement pour l’année 2015. La transmigration illégale implique donc des millions de personnes et la source est loin de se tarir.
Il s’agit bien sur d’un problème humain difficile à gérer et à régler. La première démarche ne serait-elle pas pour les gouvernements européens de cesser de jouer à l’apprenti sorcier au Moyen-Orient en attisant les conflits et de persuader leur allié étasunien de faire de même ? Deuxièmement, pour le plus long terme, le temps ne serait-il pas venu pour les dirigeants africains de se pencher sur le problème chronique de surpeuplement, source d’une migration à sens unique ?
Rodrigue Tremblay
Rodrigue Tremblay est professeur émérite d’économie à l’Université de Montréal et on peut le contacter à l’adresse suivante : [email protected]
Il est l’auteur du livre du livre « Le nouvel empire américain » et du livre « Le Code pour une éthique globale ».
Prière de visiter son blogue à l’adresse suivante : http://www.thenewamericanempire.com/blog.htm.
Site Internet de l’auteur : http://www.thenewamericanempire.com/
Pour plus d’informations concernant le dernier livre du professeur Tremblay intitulé : « Le Code pour une éthique globale », voir : http://www.lecodepouruneethiqueglobale.com/