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Crise humanitaire pour plus de 1,8 millions de Gazaouis : Trois mois après l’agression israélienne, rien n’a changé à Gaza
Par Ziad Medoukh
Mondialisation.ca, 27 novembre 2014

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Trois  mois après la fin de  la nouvelle agression israélienne contre la bande de Gaza en juillet-août 2014, agression qui a fait plus de 2200 morts et 11000 blessés, civils et enfants en majorité, sans oublier la destruction massive de l’infrastructure civile, des maisons, des écoles, des universités, voire des usines et des bâtiments, la situation reste très grave à tous les niveaux, surtout sur le  plan humanitaire, pour plus de 1,8 millions de Gazaouis  toujours enfermés, malgré, partout dans le monde, la mobilisation internationale contre les crimes israéliens  et malgré les promesses internationales de reconstruction rapide

La vie reprend lentement dans les rues de Gaza, qui témoignent de la barbarie de l’armée israélienne pendant les 50 jours de la dernière offensive militaire contre la population civile. Partout à Gaza, on trouve les ruines des maisons, des immeubles, des mosquées, des écoles, des stades, des usines, ou des bâtiments détruits et visés par les bombardements israéliens.

Les habitants de Gaza essayent de montrer leur capacité à dépasser cette période difficile à travers une vie plus ou moins normale, mais sur leurs visages on voit la tristesse, voire l’inquiétude d’une population qui vit toujours sous blocus et qui est toujours enfermée dans une prison à ciel ouvert. Les écoles, les universités, les commerces, les institutions et les marchés reprennent leurs activités, mais avec les souvenirs et les images de la dernière attaque israélienne. C’est très difficile pour ces gens d’oublier leurs morts, leurs blessés, leurs maisons et leurs écoles détruites. Les images des bombes, missiles et chars israéliens reviennent toujours dans la mémoire.

Actuellement, parmi les 100.000 personnes qui ont perdu tous leurs biens, plus de 70.000 vivent loin de leurs maisons, résident dans 18 écoles de l’UNRWA et plusieurs centres d’accueil provisoires, en attendant l’entrée des matériaux de reconstruction. 10.000 personnes ont loué des appartements et plus de 20.000 ont décidé de vivre au milieu même de leurs ruines : soit, ils en ont réparé quelques pièces , soit ils habitent dans des tentes, à proximité,  dans des conditions très difficiles, notamment à l’approche de l’hiver.

Trois mois, après, rien ne semble différent pour les Palestiniens de Gaza, toujours à la recherche d’une solution politique et pas seulement humanitaire, suite à leur résistance remarquable contre les armes de l’aviation, de la marine et la force terrestre israéliennes. Le blocus dure depuis plus de sept ans, les passages et les frontières avec l’extérieur sont souvent fermés par ordre militaire israélien et les produits alimentaires et autres qui entrent à Gaza sont rares. Les autorités israéliennes ouvrent le seul passage commercial  qui relie la bande de Gaza à l’extérieur deux ou trois fois par semaine pour permettre l’entrée de 200 camions et  quelques convois humanitaires. Parmi ces camions,  5 à 6  seulement  contiennent des matériaux de construction, souvent destinés aux projets internationaux. Ce passage se ferme sous n’importe quel prétexte, par décision israélienne, sans prendre en considération les besoins énormes de la population civile.

Chaque foyer à Gaza a  droit à  seulement 6 heures d’électricité par jour, car la seule centrale électrique, qui a été détruite en juillet dernier, ne fonctionne pas, par manque de fioul et de carburant, avec en particulier des conséquences dramatiques sur les hôpitaux et les centres médicaux.

L’armée israélienne viole presque tous les jours l’accord du cessez le feu, et ne respecte pas la trêve. Souvent, les chars israéliens mènent des incursions dans la bande de Gaza, les soldats  contrôlent toujours les zones tampons sur les zones frontalières et tirent sur les paysans. La marine israélienne empêche l’extension de la zone de pêche et tire sur les pêcheurs palestiniens et leurs bateaux. Malgré la retenue des factions de Gaza, l’armée d’occupation israélienne poursuit ses provocations, pas seulement dans la bande de Gaza, mais encore en Cisjordanie, où des dizaines de palestiniens ont été tués ou blessés par  balle,  notamment à Jérusalem.

Les Palestiniens de Gaza craignent la reprise des attaques israéliennes à n’importe quel moment et sous n’importe quel prétexte, car  la communauté internationale officielle qui a gardé un silence complice durant l’offensive israélienne en été dernier, n’exerce  pas de pressions sur le gouvernement israélien afin qu’il lève le blocus imposé à la population depuis plus de 7 ans. Sans oublier qu’Israël reste toujours impuni, malgré les trois attaques sanglantes des cinq dernières années.

Les habitants de Gaza, épuisés à la fin de cette  nouvelle agression, ont peur pour leurs enfants et leur avenir. Ils espèrent le début rapide des projets de reconstruction, notamment après les promesses internationales tenues lors de la conférence internationale sur la reconstruction de la bande de Gaza au Caire, en octobre dernier.

S’ajoute à tout cela, la tension entre les différents partis et mouvements palestiniens qui  pourraient amorcer le début de la reconstruction de la bande de Gaza.  Malgré la création du gouvernement d’union nationale dans les territoires,  en mai dernier, et malgré la solidarité interne et les signes d’union lors de la dernière offensive israélienne,  les points de divergence prédominent actuellement entre ces partis et pourraient  toucher la réconciliation palestinienne et retarder les projets de reconstruction.

Le seul signe d’espoir pour les Palestiniens de Gaza, comme pour tous les Palestiniens de Palestine et de l’extérieur, c’est l’éducation. Malgré la destruction de plus de 32 établissements et tandis que plus de 120 écoles et  cinq universités ont été bombardées, les élèves, les étudiants et leurs professeurs continuent de participer à la vie scolaire, en dépit de toutes les pertes et de toutes les conséquences économiques, sociales et psychologiques. Plusieurs cours se font sous les ruines des écoles touchées par les bombardements israéliens, ou dans des tentes. Les élèves qui viennent en classe rendent hommage à leurs amis morts et blessés lors de cette offensive israélienne, mais ils continuent à lire et à écrire l’espoir, l’amour et l’avenir. Ils montrent leur capacité à construire cet avenir avant de reconstruire leurs écoles et leurs classes.

A l’université, les jeunes étudiants continuent à venir étudier, même dans des classes touchées et visées par les bombardements israéliens. L’éducation est un élément sacré en Palestine. Les familles encouragent leurs enfants à avoir des diplômes supérieurs. Même si, avec le chômage et les difficultés économiques, il est difficile de trouver un travail à la fin des études. L’éducation fait partie de la résistance par la non violence, une résistance populaire, qui montre la capacité de notre peuple à défier la situation actuelle et à affronter toutes les mesures de l’occupation qui essaient de priver les Palestiniens de leurs droits fondamentaux.

Les habitants de Gaza espéraient que leur sacrifice pendant la dernière agression israélienne,  leur  patience exemplaire, leur volonté remarquable,  leur résistance acharnée contre la barbarie de l’armée israélienne, ainsi que, et surtout, la mobilisation internationale et les manifestations populaires, partout dans le monde ,changeraient  quelque chose pour eux :  levée du blocus, ouverture des passages et des frontières qui relient la bande de Gaza à l’extérieur, jugement des criminels israéliens. Malheureusement, rien n’a changé, ils sont toujours enfermés, ils vivent sous un blocus aveugle qui continue de faire de nombreuses victimes.

Pour les Palestiniens de Gaza confiants et déterminés, il ne reste qu’une  alternative : résister sur leur terre, rester à côté des ruines de leurs maisons détruites, avec leur seule arme, le courage, et surtout espérer  un changement radical, une solution politique qui leur permettrait de vivre libres à Gaza, de vivre libres en Palestine.

Ziad Medouk

La sortie en France du livre de Ziad Medoukh sur Gaza

Ziad Medoukh, directeur du département de français de l’université Al-Aqsa de Gaza en Palestine,  poète et écrivain d’expression française, vient de sortir en France son nouveau livre  sur les derniers événements dramatiques vécus par la population civile de la bande de Gaza suite à la nouvelle offensive israélienne de juillet-août 2014.

Ce livre  intitulé «  Chroniques d’un été meurtrier à Gaza, récit d’un génocide répété » est publié  aux éditions  Kairos-Nancy, il regroupe les témoignages quotidiens  de l’écrivain palestinien durant les 50 jours de l’agression israélienne  de l’été dernier.

C’est le premier livre sorti en France sur cette dernière agression, deux mois après l’arrêt de cette nouvelle attaque sanglante contre les civils de Gaza.

Dans cet ouvrage, le citoyen de Gaza présente ses chroniques quotidiennes ainsi que ses articles et quelques poèmes écrits pendant les 50 jours de 7 juillet au 26 août 2014, dans des conditions très difficiles,  sous les bombardements et les pluies de missiles tombant partout, à chaque minute.

Ces chroniques sont qualifiées par l’éditeur d’appel déchirant, un cri légitime contre l’injustice, mais surtout une espérance, celle de la vie qui continue, qui résiste et qui reste digne.

Ziad Medoukh devait se rendre à Nancy  cette semaine pour assister à la sortie de son livre, mais en raison du blocus israélien et de la fermeture des passages qui relient la bande de Gaza à l’extérieur, il est resté bloqué dans sa prison à ciel ouvert.

Il a déjà publié 4 livres en français, trois recueils de poésie sur Gaza et la Palestine, deux en France et un au Québec, ainsi qu’un livre de pédagogie.

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