Des armes canadiennes destinées à la répression en Arabie Saoudite?

Le caractère répressif du régime saoudien semble remettre en question la légalité et la légitimité de la lucrative entente.

Le gouvernement fédéral a facilité une transaction d’armes entre la compagnie General Dynamics Land Systems Canada (GDLS) et le gouvernement d’Arabie Saoudite dans un geste qui transgresse tant les règles canadiennes en matière de ventes d’armes que les barèmes éthiques les plus simples.

Le 14 février dernier, General Dynamics et le royaume saoudien annoncaient une entente de 10 milliards de dollars canadiens pour l’achat de véhicules blindés sur une période de 14 ans.

Les véhicules en question servent au transport de soldats et sont semblables aux VBL-III (véhicules blindés légers) utilisés par l’infanterie canadienne en Afghanistan et fabriqués par General Dynamics. Ils peuvent être équipés de mitrailleuses lourdes et de canons anti-char montés sur des systèmes de tourelles à la fine pointe de la technologie militaire moderne.

« La quasi totalité des véhicules militaires vendus par le Canada à l’Arabie Saoudite sont destinés à sa Garde nationale, impliquée dans la répression de la dissidence à ce régime politique totalitaire. »

Un étrange valentin offert par le gouvernement d’un pays autrefois considéré comme une référence mondiale de la promotion des droits de la personne alors que la monarchie théocratique de la famille al-Saoud possède un des pires historiques en la matière à l’échelle planétaire. Répression de la dissidence

Le caractère répressif du régime saoudien semble remettre en question la légalité et la légitimité de la lucrative entente selon les règles établies par le ministère canadien des Affaires étrangères et du Commerce international (MAECI). « Le Canada contrôle rigoureusement les exportations de matériel et de technologies militaires vers les pays […] où les droits humains de leurs citoyens font l’objet de violations graves et répétées de la part du gouvernement, à moins qu’il puisse être démontré qu’il n’existe aucun risque raisonnable que les marchandises puissent être utilisées contre la population civile », peut-on lire dans un document obtenu via les archives numériques du MAECI.

Or, selon le registre des transactions d’armes du Stockholm International Peace Research Institute, spécialisé dans la recherche sur le contrôle des armes et les conflits, la quasi- totalité des véhicules militaires vendus par le Canada à l’Arabie Saoudite est destinée à sa Garde nationale, impliquée dans la répression de la dissidence à ce régime politique totalitaire. Ce corps d’élite a notamment été appelé en renfort par le royaume du Bahreïn afin d’écraser les manifestations qui ont secoué le pays lors du Printemps arabe de 2011, alors qu’un bataillon de 1200 soldats de La Garde nationale a été consenti par le régime saoudien pour soutenir son voisin, également considéré comme répressif et totalitaire par des organisations telles qu’Amnistie Internationale et Human Rights Watch.

D’après le même registre, cette transaction entre le Canada et l’Arabie Saoudite n’est pas la première du genre. Depuis 1990, plus d’un millier de véhicules blindés y ont été vendus, presque tous destinées à la Garde nationale. Certaines de ces transactions furent facilitées par le gouvernement américain, qui a agi en intermédiaire.

La compagnie General Dynamics, basée à London en Ontario, livrera les premiers véhicules de cette commande en 2016. Leur nombre n’a toujours pas été dévoilé.

Au moment de publier, il fut impossible de contacter General Dynamics et le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international.

Martin Forgues

19 juin 2014



Articles Par : Martin Forgues

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