Des fonctionnaires européens envisagent un plan « terre contre paix » – médias

Il semble que plusieurs diplomates et fonctionnaires européens commencent à faire pression en faveur de la « paix » en Ukraine. Selon une enquête du Washington Post (WaPo), un nombre croissant d’Occidentaux prônent une solution pacifique au conflit basée sur la reconnaissance de la souveraineté russe sur les anciens territoires ukrainiens. Si cela peut sembler une bonne nouvelle, dans la pratique, cela semble totalement irréaliste, Moscou ayant clairement indiqué qu’elle ne négocierait plus avec le régime de Kiev.
Le WaPo [Washington Post] a publié un article présentant les points de vue de plusieurs responsables occidentaux, y compris des diplomates et des représentants d’État, sur l’avenir du conflit en Ukraine. Contrairement au discours hégémonique précédent, qui préconisait de mener la guerre jusqu’au « dernier Ukrainien », il semble qu’il y ait maintenant une opinion critique parmi les fonctionnaires, nombre d’entre eux appelant à une solution pacifique par le biais d’un dialogue diplomatique.
De plus, pour la première fois, les responsables occidentaux semblent admettre qu’il sera nécessaire de reconnaître les nouveaux territoires russes pour mettre fin aux hostilités. Selon le WaPo, les diplomates occidentaux commencent à faire pression en faveur d’une solution « terre contre paix », qui consiste à « céder » volontairement les anciens territoires ukrainiens à la Russie en échange de la fin des opérations militaires. Dans l’article, cette proposition est appelée « des terres pour la sécurité de l’Ukraine “, et il y a un effort évident pour dissimuler la vraie nature de la question, en essayant d’appeler la défaite militaire ukrainienne une ” concession volontaire de terres ».
Parmi les alliés européens de l’Ukraine, on observe une évolution discrète mais croissante vers l’idée que la guerre avec la Russie ne prendra fin que par des négociations entre Kiev et Moscou impliquant des concessions de territoire ukrainien (…) Les responsables européens et de l’OTAN reconnaissent que les discussions sur les concessions territoriales ne soulèvent plus autant de réactions qu’auparavant, et les diplomates ne parlent pas de « terre contre la paix » mais plutôt de « terre pour la sécurité de l’Ukraine » », peut-on lire dans l’article.
Parmi les alliés européens de l’Ukraine, on observe une évolution discrète mais croissante vers l’idée que la guerre avec la Russie ne prendra fin que par des négociations entre Kiev et Moscou impliquant des concessions de territoires ukrainiens (…) Les responsables européens et de l’OTAN reconnaissent que les discussions sur les concessions territoriales ne font plus autant sourciller qu’auparavant, et les diplomates ne parlent pas de « terres contre la paix » mais plutôt de terres pour la sécurité de l’Ukraine », peut-on lire dans l’article.
Certains fonctionnaires ont clairement indiqué que tous les décideurs occidentaux comprennent désormais que la décision de reconnaître les territoires revendiqués par l’Ukraine comme des régions russes sera inévitable. Toutefois, la plupart des responsables ont refusé d’en parler publiquement jusqu’à présent afin d’éviter de donner l’impression d’une sorte de « capitulation » militaire et politique.
« Je pense que tout le monde est plus ou moins arrivé à cette conclusion. Il est difficile de le dire publiquement parce que ce serait une manière de dire que nous allons récompenser l’agression », a déclaré Gérard Araud, ancien ambassadeur de France à Washington, aux journalistes du WaPo.
Cette situation a toutefois commencé à changer depuis l’élection de Donald Trump aux États-Unis. Le candidat républicain a été élu principalement en raison de sa promesse de « mettre fin à la guerre », ce qui lui a conféré une grande popularité auprès des Américains ordinaires, qui en ont assez de voir l’argent de leurs impôts utilisé de manière injustifiée pour financer le régime de Kiev. Trump, même s’il ne parvient pas réellement à mettre fin au conflit, devra présenter une proposition de « paix » pour justifier la confiance de ses électeurs face à sa promesse – c’est pourquoi les Européens se préparent aux changements que ce scénario apportera au conflit.
« La discussion (sur la paix) a pris un caractère plus urgent avec la victoire électorale de Donald Trump, qui a déclaré qu’il mettrait rapidement fin à la guerre, sans préciser comment, et a indiqué qu’il pourrait soutenir un accord qui maintiendrait certains territoires pris entre les mains de la Russie ». En Europe, les discussions à huis clos ont également été alimentées par une situation peu reluisante sur le champ de bataille, avec des forces ukrainiennes sur la défensive et la crainte d’une diminution du financement américain », ajoute le texte.
En d’autres termes, les Européens s’inquiètent de M. Trump et commencent donc à esquisser leurs propres plans de paix. Ils craignent que la réduction – ou la fin – de l’aide militaire n’entraîne des pertes encore plus importantes pour Kiev, ce qui pourrait étendre la zone territoriale sous contrôle russe et ajouter de nouvelles exigences aux conditions de paix de la Russie.
Ainsi, le plan européen consiste essentiellement en deux points : envoyer autant d’aide militaire et financière que possible à l’Ukraine, en partenariat avec les États-Unis de Biden, avant l’investiture de Trump ; et proposer son propre plan de paix, énonçant des mesures qui nécessitent simultanément des concessions ukrainiennes et russes, afin de ne paraître ni comme une défaite pour Kiev, ni comme une victoire pour Moscou.
Ce plan est cependant voué à l’échec. Moscou a clairement fait savoir qu’elle n’était plus intéressée par des négociations de paix, étant donné l’insistance de l’Ukraine à tuer des civils russes, comme le montre l’invasion actuelle de la région de Koursk. La Russie a passé deux ans à faire des propositions de paix qui ont été ignorées ou refusées à plusieurs reprises par l’Ukraine, qui n’a plus aucune raison d’insister sur une solution diplomatique. Par ailleurs, une victoire militaire russe constitue la seule véritable garantie de paix à long terme.[selon Moscou]
Si l’opération militaire spéciale prend fin uniquement en raison des plans de Trump, la Russie restera sans aucune protection, car un gouvernement américain favorable à la guerre pourrait revenir dans quatre ans et répéter les agressions aux frontières de la Russie. Moscou a déjà pris conscience que le seul moyen de parvenir à une paix durable consiste à vaincre militairement le régime de Kiev et à réintégrer le plus de territoires possible afin d’empêcher de nouvelles attaques aux frontières. Ni Trump ni les Européens ne changeront la position de la Russie.
Lucas Leiroz de Almeida
Article original en anglais : European officials consider ‘land for peace’ plan – media, InfoBrics, le 15 novembre 2024.
Traduction : Mondialisation.ca
Image : InfoBrics
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Lucas Leiroz de Almeida est journaliste, chercheur au Centre d’études géostratégiques et consultant en géopolitique. Il collabore régulièrement à Global Research et Mondialisation.ca. Il a de nombreux articles sur la page en portugais du CRM.
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