Des troupes de combat dans les rues des grandes villes des États-Unis ? 

Dans son livre intitulé « The Psychology Science (1966) », le psychologue Abraham Maslow a dit ce qui suit :

« Je suppose qu’il est tentant, si le seul outil dont vous disposez est un marteau, de tout traiter comme si c’était un clou. »

D’autres ont fait des commentaires similaires. Cela reflète la façon dont les États-Unis fonctionnent sur le plan intérieur et à l’étranger, ce qui s’est passé tout au long de leur histoire – notamment après la Seconde Guerre mondiale, en menant des guerres sans fin contre l’humanité pour le contrôle de la planète Terre, de ses ressources et de ses populations.

Les États-Unis sont accros à la guerre et aux horreurs qu’elle perpétue, ce sont les gens ordinaires qui en souffrent le plus – y compris dans les rues militarisées des États-Unis, les flics armés d’armes de type champ de bataille pour défendre leurs privilèges contre les changements populaires.

Dans son livre intitulé « Terrorisme et guerre », l’historien et militant anti-guerre Howard Zinn a déclaré que la guerre est la forme la plus extrême de terrorisme.

Dans ses commentaires publics, il a déclaré que « le sentiment que j’ai quand je me réveille le matin (c’est que) je vis dans un pays occupé ».

« Un petit groupe d’étrangers a pris le contrôle du pays et essaie d’en faire ce qu’il veut » – en référence à la classe dirigeante américaine.

Soulignant qu' »aucun humain n’est un étranger », il a déclaré « c’est vrai, sauf pour les gens à Washington ».

« Ils ont pris le contrôle du pays… nous ont entraînés dans des guerres désastreuses… ont aspiré la richesse de ce pays et l’ont donnée aux riches… ruinant ainsi l’environnement » en même temps.

Ses « armes nucléaires » peuvent tous nous tuer. « Comment cela a-t-il pu se produire ? Comment ont-ils pu s’en tirer ? Ils ne suivent pas la volonté du peuple. »

« Si le peuple américain connaissait vraiment l’histoire, s’il apprenait l’histoire, si les institutions éducatives faisaient leur travail, si la presse faisait son travail en donnant aux gens une perspective historique, alors un peuple comprendrait » qu’on lui ment, qu’il est manipulé, exploité, et que la politique intéressée de la classe dirigeante américaine lui nuit grandement aux dépens de la plupart des autres.

Les Américains sont gouvernés par le canon d’une arme. Le baseball n’est pas le passe-temps national.

C’est une guerre préventive sans fin des États-Unis contre des ennemis inventés. Au niveau national et international, la politique américaine reflète la « vision dystopique de l’avenir » d’Orwell…

Ce n’est plus un jour. C’est maintenant : « une empreinte de botte sur un visage humain – pour toujours. »

La cause profonde de la colère dans les rues étasuniennes est le racisme institutionnalisé, l’inégalité et l’injustice.

Les intérêts des privilégiés sont protégés exclusivement au détriment de changements sociaux vitaux qui se font attendre.

Au moment de l’effondrement économique, de l’aggravation des conditions de pauvreté dans les rues, du chômage de masse, de l’absence de couverture médicale pour des millions de personnes et de l’indifférence de la classe dirigeante à l’égard de la santé publique, du bien-être et de la création d’emplois pour remettre les gens au travail, les conditions de précarité ont explosé dans tout le pays.

Le meurtre de l’Afro-Américain George Floyd par quatre policiers de Minneapolis – pas un seul, trois autres personnes impliquées n’ont pas été inculpées ou arrêtées – a déclenché ce qui se passe présentement.

Si ce n’était pas le cas, cela aurait été autre chose, à cause de la rage accumulée contre un système extrêmement injuste.

Aux États-Unis, la situation s’aggrave, elle ne s’améliore pas: des intérêts particuliers sont protégés au détriment de la grande majorité – exploitée, non desservie, pour une minorité privilégiée.

Lundi, M. Trump a jeté de l’huile sur le feu, de la colère des citoyens,  au lieu de faire preuve de leadership pour calmer les choses en promettant un changement fondamental et équitable pour tous les Étasuniens.

La semaine dernière, il a enflammé les choses en tweetant : « Quand le pillage commence, les tirs commencent. »

Donald J. Trump ✔ @realDonaldTrump – 29 mai 2020

Je ne peux pas rester en retrait et regarder cela arriver dans une grande ville américaine, Minneapolis. Un manque total de leadership. Soit le très faible maire de la gauche radicale, Jacob Frey, se ressaisit et met la ville sous contrôle, soit j’envoie la Garde nationale et je fais bien le travail…

(Ce deuxième gazouillis de Trump a été enlevé de Tweeter )

…Ces VOYOUS déshonorent la mémoire de George Floyd, et je ne laisserai pas cela se produire. Je viens de parler au gouverneur Tim Walz et de lui dire que les militaires sont avec lui tout le temps. Toute difficulté et nous prendrons le contrôle mais, quand les pillages commencent, les tirs commencent. Merci !

Lundi, il a appelé les gouverneurs des États à se montrer plus sévères envers les manifestants, ignorant par ailleurs le sang dans les rues.

La grande majorité des manifestants sont pacifiques et exercent leurs droits constitutionnels de libre expression et de réunion, tout en adressant des pétitions au gouvernement dans les rues de la ville pour obtenir la réparation de leurs griefs légitimes.

Un petit nombre d’entre eux sont impliqués dans des actes de violence et de vandalisme inacceptables.

Dimanche et lundi, j’ai vu les résultats de ce qui se passe sur la North Michigan Ave. de Chicago, son Magnificent Mile – un spectacle que je n’aurais jamais pu imaginer pendant tout le demi-siècle où j’ai vécu dans le quartier de Streeterville de la ville.

L’entrée de mon propre immeuble résidentiel situé dans une rue latérale est barricadée, personne n’est autorisé à y entrer sauf les résidents, un garde de sécurité du comté a été déployé dans le hall pendant la nuit pour protéger la propriété contre les vandales.

Les magasins haut de gamme situés le long de l’avenue des deux côtés de la rue sont bloqués, y compris la pharmacie phare de Walgreens, temporairement fermée, ce qui pose un problème aux résidents du quartier qui doivent faire remplir des ordonnances.

La scène surréaliste ressemble à celle d’un film d’horreur hollywoodien, avec des rues pour la plupart vides qui débordent de gens et de véhicules en temps normal – les flics y patrouillent maintenant.

Malgré l’opposition des gouverneurs démocrates à la menace de Trump d’envoyer des troupes de combat pour rétablir l’ordre dans les rues étasuniennes par le canon d’un fusil, il peut quand même choisir cette option, dit-il :

« Si la ville ou l’État refuse de prendre les mesures nécessaires pour défendre les vies et les biens de leur résidence, alors je déploierai l’armée américaine et je résoudrai rapidement le problème à leur place ».

Selon USA Today, « des hélicoptères, des véhicules et du personnel (m)ilitaires ont commencé à descendre dans les rues de Washington, DC, lundi soir, quelques heures après…Trump a promis de « dominer les rues ». ”

La directrice du projet de sécurité nationale de l’ACLU, Hina Shamsi, a qualifié sa menace de déploiement de troupes fédérales dans les rues des villes américaines d' »irresponsable et dangereuse », ajoutant :

« Aucun gouverneur équilibré ne demande une réponse encore plus militarisée aux protestations civiles contre la brutalité policière et le racisme systémique – pour de bonnes raisons. »

« Il y a déjà de nombreux rapports de police civile et de certaines forces de la Garde nationale de l’État qui se livrent à de graves abus, et le déploiement de personnel militaire, qui n’est généralement pas formé pour l’application de la loi civile, ne fait qu’aggraver les risques ».

« Ce président ne doit pas causer encore plus de tort au pays et à son peuple. »

Malgré le risque d’aggraver une mauvaise situation en prenant cette mesure, il peut le faire conformément à la loi fédérale du 19e siècle – en fédérant les forces de la Garde nationale et/ou en déployant des troupes de combat du Pentagone dans les rues des villes étasuniennes.

Selon le Posse Comitatus Act de 1978, il ne peut pas déployer de troupes fédérales pour « exécuter les lois… sauf dans les cas et les circonstances expressément autorisés par la Constitution ou la loi du Congrès ».

En vertu de la loi de 1807 sur l’insurrection, il peut ordonner ce que le Posse Comitatus interdit.

Il peut agir seul « pour réprimer une insurrection, des violences domestiques, (une) combinaison illégale ou une conspiration » – avec ou sans demande des autorités de l’État ou municipales.

Il peut également déployer des troupes fédérales sur le territoire national pour rétablir l’ordre si les lois fédérales, étatiques ou municipales sont violées dans les rues.

Neuf présidents américains précédents ont invoqué la loi sur l’insurrection, déployant des forces fédérales dans les communautés locales pour rétablir l’ordre.

Parmi eux, Thomas Jefferson en 1808, Rutherford Hayes (1878), Grover Cleveland (1894), Woodrow Wilson (1914), FDR (1943), Dwight Eisenhower (1957), JFK (1962 et 1963), LBJ (trois fois en 1968) et GHW Bush (1989 et 1992).

Selon la loi fédérale et les précédents, Trump peut déployer des troupes fédérales dans les villes étasuniennes en tant que président et commandant en chef.

Eisenhower l’a fait pour protéger les droits de neuf étudiants noirs de l’Arkansas à être éduqués au lycée de Little Rock – en appliquant l’arrêt historique de la Cour suprême de 1954 dans l’affaire Brown contre Board of Education.

Jack Kennedy a fait la même chose, en appliquant les ordres de déségrégation dans le Mississippi et l’Alabama.

Une différence majeure entre les déploiements antérieurs de troupes fédérales dans les communautés étasuniennes et ce que Trump peut ordonner est l’étendue de ce qu’il peut faire – affectant potentiellement de nombreux territoires des États-Unis par rapport à d’autres localités, spécifiques et ce à court terme.

Une autre différence majeure est que cette mesure remettra en cause le droit de milliers d’Étasuniens lésés – exigeant l’équité et la justice auxquels ils ont droit, et que les autorités du pays leur refusent.

Lundi, le président de Public Citizen, Robert Weissman, a déclaré

« en ce moment… on a l’impression que le pays est en train de plonger dans une sorte de chaos total » – notant les « inégalités » inacceptables dans le pays, ajoutant :

Les « appels de Trump à la violence contre les manifestants, en utilisant des prétextes racistes, rendent notre pays bien plus dangereux » .

Sa dénonciation des manifestants comme étant des »terroristes » ne menace pas seulement les libertés civiles, elle encourage la violence non seulement de la part des forces de l’ordre, mais aussi des groupes de droite – une violence qui sera certainement dirigée en premier lieu contre les personnes de couleur.

« Et sa menace de déployer l’armée dans nos villes est un avertissement effrayant de la menace existentielle qu’il fait peser sur » les libertés fondamentales.

« Avec en toile de fond le bilan quotidien (COVID-19) des morts et le pire chômage depuis la Grande Dépression, Trump est prêt à nous diviser et à semer le chaos. »

« Il pourrait bien croire, avec raison, que le chaos est son meilleur espoir de survie politique. »

Les protestations qui se poursuivent dans les villes étasuniennes depuis une semaine ont pour objet la colère contre le système.

La brutalité policière symbolise une gouvernance extrêmement injuste et inéquitable au niveau fédéral, étatique et local.

La rage dans les rues se produit en période d’effondrement économique, avec un nombre sans précédent d’Étasuniens en âge de travailler qui sont sans emploi, d’étudiants qui ne vont pas à l’école à cause des fermetures liées à la COVID-19, et d’une vie plus normale dans tout le pays, fortement perturbée et mise à mal par les autorités au pouvoir.

La pauvreté des personnes, le désespoir et la colère face au mépris du gouvernement pour la santé publique, le bien-être et les droits fondamentaux expliquent ce qui se passe dans les villes étasuniennes à l’échelle nationale.

Si l’ordre est violemment réprimé et rétabli sans s’attaquer à la cause profonde de la colère des citoyens, ce n’est qu’une question de temps avant que les choses n’explosent à nouveau.

Lorsque les gens perdent espoir, ils perdent cet espoir parce qu’il n’y a plus rien à perdre.

La question posée plus tôt par Psychology Today est la suivante : « Que se passe-t-il lorsque il n’y a plus d’espoir ?

« Lire nos journaux récemment, c’est comme se réveiller dans une sorte de cauchemar orwellien », selon le rapport, une situation intenable.

« Un homme est fier de répandre le mensonge, la haine et la peur par-delà les frontières », c’est le président des États-Unis, entouré d’un cadre de bellicistes militants, indifférents aux droits et au bien-être des gens ordinaires partout dans le monde.

Au lieu de transformer l’espoir en changement positif, les politiques de la classe dirigeante de la nation l’ont écrasé.

Lorsque le désespoir transformé en rage remplace l’espoir, la situation actuelle aux États-Unis, les rêves d’une vie meilleure deviennent des cauchemars.

Cela se voit alors que des milliers de personnes descendent dans la rue pour exprimer leur colère contre le système.

Un petit nombre de personnes impliquées dans des actes de violence et de vandalisme sont à l’écart de la grande majorité des manifestants pacifiques dans le monde.

Ils expriment une colère justifiée contre une nation qui ne sert que quelques privilégiés aux dépens de la majorité – y compris pendant un état d’effondrement économique où l’aide fédérale vitale est absente.

C’est de cela que sont issues les révolutions. Si on ne supprime pas les grandes inégalités maintenant, c’est ce qui passera dans l’avenir.

Stephen Lendman

 

Article original en anglais :

Combat Troops Coming to US Streets?

Traduit par Maya pour Mondialisation

L’imageen vedette est de Fibonacci Blue/Flickr

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L’auteur primé Stephen Lendman vit à Chicago. Il peut être joint à l’adresse [email protected]. Il est associé de recherche au Centre de recherche sur la mondialisation (CRG)

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