« #EleNao » (Non, pas lui): les Brésiliennes se mobilisent contre le candidat d’extrême-droite Bolsonaro

Le samedi 29 septembre 2018, soit une semaine avant les élections du Brésil le 7 octobre, des milliers de femmes ont manifesté dans environ soixante villes.
Ces manifestations étaient organisées par le mouvement #EleNão, #EleNunca, #EleJamais. (LuiNon, Non, pas lui, LuiJamais) parce qu’elles sont « fatiguée d’être soumises parce qu’elles sont des femmes »…
Lui (Ele), c’est Jair Bolsonaro, député fédéral et candidat à la présidence du pays (PSL). Militaire de formation, son discours est considéré haineux envers plusieurs groupes de la société brésilienne.
Elles (Elas) sont les femmes du mouvement né à travers les réseaux sociaux de Facebook et Twitter. Celles-ci se sont fait connaître comme le groupe des « Femmes unies contre Bolsonaro » (grupo ‘Mulheres Unidas Contra Bolsonaro’). Elles considèrent Bolsonaro comme un danger pour la démocratie et le respect des droits humains au Brésil.
Le candidat d’extrême-droite, Jair Bolsonaro, réputé pour sa misogynie a déclaré que les femmes devraient gagner moins d’argent puisqu’elles tombent enceintes et prennent six mois de vacances et justifier l’écart des salaires tout en minimisant le viol.
« Tout sauf Bolsonaro », c’est ce que les femmes affirment fermement alors que Bolsonaro se trouvent en tête des sondages pour la présidence du Brésil (28%). Il est cependant suivi de prêt par le candidat du PT (Parti des Travailleurs), Fernando Haddad, avec 22% des intentions de vote. Ce dernier pourrait devenir le favori au deuxième tour.
Pendant que les femmes manifestaient dans la rue contre Lui (Bolsonaro), le candidat (PSL) à la présidence déclarait à sa sortie de l’hôpital «De ce que je vois dans la rue, je n’accepte(rai) pas un résultat aux élections qui soit différent de mon élection» ! (« Pelo o que eu vejo nas ruas, Eu não aceito um resultado diferente da minha eleição » (entrevue avec Radio-Bandeirante).
Le mouvement #EleNao se définit comme non partisan (non lié à un parti politique), englobant toutes les classes sociales, les cultures (« races »)…
» Nous, les femmes, sommes dans la rue contre un projet politique qui nous exclut. Nous ne pouvons pas laisser un candidat fasciste, homophobe, misogyne et raciste être élu président. C’est un recul dans nos réalisations. C’est pour cela que nous manifestons à travers le mouvement #EleNão #Elenunca# Elejamais (Non, pas lui, lui jamais). Nous devons compter sur la force des femmes dans ce processus démocratique brésilien.
Aujourd’hui, il devrait y avoir 300 000 personnes dans les rues de Rio. »
(Elke Medeiro, architecte, Rio de Janeiro, le 29 septembre 2018).
Lilas est la couleur qui représente le mouvement
Photos par Elke Medeiros, Rio de Janeiro.
Voir les autres photos de la manifestation à Rio de Janeiro à la fin de cet article.
Manifestation à la mégapole Sao Paulo, 83 milles femmes avaient confirmé leur présence. Il y aurait eu environ 200 mille personnes au rassemblement selon les médias sociaux.
» Aujourd’hui, des milliers de Brésiliennes et de Brésiliens et moi-même sommes allés dans la rue pour manifester notre indignation et protester contre un candidat à la présidence de notre pays qui prêche l’intolérance à tous les niveaux. Misogyne, homophobe, favorable au retour du régime militaire, contre l’école laïque, contre tout ce que nous avons acquis en tant que citoyens d’un régime démocratique au cours de la dernière décennie après une période sombre de régime militaire.
Jamais auparavant dans l’histoire du Brésil, il n’y a eu un tel mouvement, désapprouvant un candidat avant les élections, mobilisé par des femmes, des millions de femmes, d’un commun accord. Ce qui a commencé dans les réseaux sociaux et qui a connu une croissance exponentielle au fil des jours a abouti à un acte public où les femmes ont exprimé leurs indignation. C’était émouvant de voir nos amis, nos compagnons, nos enfants, nos familles, nos LBTG, nos Juifs, nos Noirs, nos professionnels, nos étudiants, et beaucoup d’autres, protester pacifiquement. »
(Irene Uehara, chef cuisinière, Sao Paulo, le 29 septembre 2018)
« Nous étions des milliers de femmes de tous les âges, de niveau social et de scolarisation différents, avec un objectif commun. Le but était de montrer notre dégoût face à la possibilité de voir Jair Bolsonaro élu président du Brésil. “Ele não” (Non, pas lui) est le cri qui exprime notre indignation. Contrairement à celui qui prêche la haine et la violence, nous nous unissons en paix avec des dizaines de bébés sur les genoux, des enfants, des vieillards et des fauteuils roulants. Je crois que nous pouvons transmettre le message et, espérons le faire entendre parce que Bolsonaro met la démocratie en danger. »
(Rita Tavares, journaliste, Sao Paulo, le 29 septembre 2018)
Le groupe #EleNao a pris une ampleur internationale alors que les icônes comme Madona, Cher, Dua Lipa et Dan Reynolds ont incorporé le mouvement. Des manifestations anti-Bolsonaro ont eu lieu à Berlin, Buenos Aires, Paris, Londres, Lisbonne, New-York, Barcelone et Washington. Bien que les Femme Unies contre Bolsonaro affirment qu’il s’agit d’un mouvement spontané, on pourrait penser que ce groupe a été appuyé par les mêmes organisations internationales qu’aux États-Unis contre le candidat, devenu président, Donald Trump. Ironiquement il semble plus facile organiser des manifestations à travers le monde contre un candidat à la présidence d’un pays, que de rassembler des gens contre les guerres qui concernent la Paix dans le Monde entier.
Des sources indiquent que ce mouvement aurait été financé à la base par la fameuse organisation non gouvernementale fondée par George Soros. Quel intérêt la Open Society, par exemple, aurait à financer un tel mouvement ? Il s’agirait non pas d’appuyer les femmes, dans leur indignation face à l’extrême-droite et le conservatisme, mais bien d’appuyer un candidat avec l’intention de l’influencer dans sa décision pour la nomination du prochain président de la Banque Centrale et /ou le prochain ministre des Finances. On se souviendra que l’économiste et associé-fondateur de Gávea Investimentos, Arminio Fraga a été nommé à la présidence de la banque centrale sous le président FHC (Fernando Henrique Cardoso) en 1999. Arminio Fragua avait travaillé aux Etats-Unis pour l’investisseur Georges Soros. L’ex-président du Brésil Itamar Franco (1992-1995) s’était moqué, avec ironie, de la nomination de monsieur Fraga.
Le gouverneur de Minas Gerais, Itamar Franco (PMDB), s’est moqué du changement de la banque centrale en suggérant que le remplacement de Francisco Lopes par Armínio Fraga Neto à la présidence de l’institution était déterminé par le FMI (Fonds monétaire international).
» Je suis très heureux. Le Brésil a un nouveau ministre des finances, M. Fischer, et un nouveau président de la Banque centrale, M. Soros. Donc, il sera plus facile de négocier. Nous allons devoir améliorer un peu l’anglais. «
(Itamar e Lula criticam mudança no BC, Folha, le 3 février 1999)
Il est encore trop tôt pour savoir si le mouvement #EleNao aura une influence clé dans l’élection du prochain président brésilien lors du premier tour le 7 octobre prochain. Par ailleurs, Washington et/ou les créanciers internationaux du Brésil ne souhaitent pas nécessairement un candidat comme Jair Bolsonaro. L’ombre de l’ex-président Lula, Haddad, représentant du PT (la « gauche néolibérale ») pourrait être le candidat idéal pour mettre sous tutelle économique le Brésil. En 2019, assisterons-nous au « néo-libéralisme d’extrême-droite » ou assisterons-nous au retour du « néoliberalisme à visage humain » de Lula ?
Micheline Ladouceur
Photo À la Une : Irene Uehara, Sao Paulo, Brésil.
Mot de remerciement :
Un grand merci à mes amies brésiliennes qui m’ont envoyé de l’information et des photos alors qu’elles étaient présentes aux manifestations (Rio de Janeiro et Sao Paulo). La lutte des femmes continuent au Brésil alors que leur voix s’élèvent contre l’extrême-droite et pour la démocratie au Brésil.
Photos de Francisco Proner, prises avec un drone de la manifestation à Rio de Janeiro :
Anexe : Les Pro-Bolsonaro manifestent
Ce dimanche, le 30 septembre 2018, un autre mouvement se rassemblait dans la capitale fédérale, Brasilia. Le groupe « Pro-Bolsonaro », moins bien organisé et structuré, ont déambulé dans plusieurs zones clés de la capitale. Des gens criaient des véhicules « Je suis venu gratuitement » (“eu vim de graça”), « dehors le PT » (“fora PT”)… 40% des Brésiliens à Brasilia aurait l’intention de voter pour Bolsonaro.
L’une des manifestations du groupe pro-Bolsonaro aujourd’hui à Brasilia traverse l’axe monumental de la capitale. La banderole : « Le Brésil exige à savoir #Qui a demandé de tuer Bolsonaro » (Le candidat avait été poignardé lors d’une campagne de Bolsonaro).