Enjeux de la Guerre au Moyen Orient: Des personnalités appellent à «se préparer au pire»
Compte rendu de la réunion organisée par le Centre de recherche sur la mondialisation (CRM)
«Le monde vit sa plus grave crise des temps modernes», selon un universitaire. «Le plan d’un nouveau Moyen-Orient, c’est le retour aux guerres coloniales, et il faut se préparer au pire», a estimé un ancien ministre péquiste. «Le Canada a opté pour l’OTAN contre l’ONU et s’est mis à la remorque de l’empire américain», a lancé un militant antiguerre.
Ces propos ont été tenus jeudi à Montréal, lors d’une réunion du réseau antiguerre à laquelle participaient des représentants de partis politiques, des syndicats, des membres des milieux universitaire et estudiantin, et des organismes de la société civile.
Durant le débat qui a suivi, le diagnostic des présentateurs, Michel Chossudovsky, de l’Université d’Ottawa, Rodrigue Tremblay, ancien ministre revenu à l’Université de Montréal, et Raymond Legault, d’Échec à la guerre, a été proposé comme base d’une mobilisation locale et mondiale.
M. Tremblay, auteur du livre Le nouvel empire américain, a estimé que le bellicisme actuel des États-Unis est lié à «des carences économiques majeures». Quant à M. Chossudovsky, il a affirmé que «80% des réserves mondiales de pétrole se trouvent en pays musulmans, dont le Nigeria et l’Indonésie, d’où la guerre contre les musulmans».
«Cet événement vise à développer une prise de position de la société québécoise face au projet militaire de Washington», disait l’invitation du Centre de recherche sur la mondialisation (CRM), dont l’économiste Chossudovsky est aussi le directeur.
Évoquant la Charte mondiale des femmes adoptée au Rwanda en 2004, Michèle Asselin, de la Fédération des femmes du Québec, a affirmé que le réseautage mondial était en marche «contre le patriarcat et le capitalisme».
«Les femmes sont les premières victimes des guerres, soit parce qu’elles sont ciblées, soit parce que les armes l’emportent sur l’éducation et la santé», a-t-elle affirmé.
Pour Francine Némeh, de la Ligue des droits et libertés, «les guerres portent atteinte à tous les droits» et «la guerre au terrorisme» sert de «prétexte à toutes les violations».
L’avocate Tiphaine Dickson, qui présidait la rencontre, a d’ailleurs souligné qu’au même moment, «le Congrès états-unien s’apprête à suspendre l’habeas corpus». Pierre angulaire de la common law britannique, l’habeas corpus, («vous avez le corps», en latin) permet à un condamné de demander de comparaître devant un tribunal pour savoir pourquoi il est détenu. La nouvelle loi antiterroriste du Congrès permet la détention secrète de suspects, et même le recours à la torture. «Toute guerre illégale est une guerre d’agression, et l’agression est le crime suprême, duquel découlent tous les autres crimes», a rappelé Me Dickson, en citant les jugements de Nuremberg.
«Les jeunes sont touchés par toutes les guerres, et les étudiants sont à l’avant-garde de la mobilisation contre la guerre au Québec», a indiqué François Laliberté-Auger, de la Fédération étudiante collégiale du Québec. Pour René Charest, du Conseil central de la CSN à Montréal, la Palestine, même éclipsée par la nouvelle «guerre permanente» au Moyen-Orient – Irak, Liban, Afghanistan, peut-être l’Iran – «reste centrale» à tout retour à la paix.
Bruce Katz, de Palestiniens et Juifs unis (PAJU), a estimé qu’«un vide juridique comme celui des années 20 menace le monde, où les puissants veulent imposer leur volonté comme ils le firent au Proche-Orient avec l’accord Sykes-Picot».
«Le Canada est en guerre», ont convenu Pierre Ducasse, du NPD, et Amir Khadir, de Québec solidaire. «Pour chaque dollar consacré à la reconstruction en Afghanistan, neuf dollars vont à la guerre», a dit M. Ducasse, qui a appelé au retrait du Canada de ce pays, suscitant de vifs applaudissements de la salle bondée du Centre Saint-Pierre.