Ernesto Cardenal, poète révolutionnaire – Hommage de Claude Lacaille

Ernesto Cardenal (1925-2020) nous a quittés. Claude Lacaille, auteur de En mission dans la tourmente des dictatures, Haïti, Équateur, Chili, qui l’a connu lui rend hommage.

Décrivant le parcours du combattant et du croyant (et de ministre de la Culture dans le gouvernement révolutionnaire sandiniste, il rappelle notamment son engagement pour les pauvres, son adhésion et sa contribution à ce qu’on appelle la Théologie de la libération et son exclusion de l’église par le Pape Jean-Paul II pendant 35 ans (jusqu’en 2019). Ce pape a donné l’ordre à lui et à d’autres prêtres engagés politiquement de cesser toute activité politique.

Claude Lacaille, qui était au Chili pendant la dictature de Pinochet, raconte comment les poèmes de Cardenal l’ont inspiré dans le combat qu’il menait avec d’autres pour la libération.

Il termine l’entrevue en lisant le poème Barricade qu’il venait de traduire de l’espagnol à l’annonce de la disparition de Ernesto Cardenal.

BARRICADE
Ce fut la tache de tout le monde.
De ceux qui sont partis sans embrasser leur mère
Pour qu’elle ne sache pas qu’ils s’en allaient.
Celui qui a embrassé pour la dernière fois sa fiancée.
Et celle qui est sortie des bras de son fiancé pour saisir un fusil.
Celui qui a embrassé la grand-mère qui lui servait de maman
Et lui a dit qu’il revenait, a pris sa casquette et n’est pas revenu.
Ceux qui demeurèrent des années dans la montagne.
Des années dans la clandestinité, dans des villes plus dangereuses que la montagne.
Ceux qui servaient de courriers dans les sombres sentiers du nord,
Ou chauffeurs à Managua, chauffeurs de guérilleros tous les soirs.
Ceux qui achetaient des armes à l’étranger en traitant avec des bandits.
Ceux qui organisaient des meetings à l’étranger avec drapeaux et consignes
Ou foulaient le tapis de la salle d’audience de quelque président.
Ceux qui attaquaient les casernes au cri de Patrie libre ou mourir!
Le garçon qui surveillait au coin d’une rue libérée, le visage couvert d’un mouchoir rouge et noir.
Les enfants transportant des pavés de rues – qui furent un négoce de Somoza – pour faire des barricades dans le village
Celles qui portaient du café aux muchachos qui étaient sur les barricades.
Ceux qui ont réalisé des taches importantes et ceux qui en faisaient de moins importantes.
Cela fut la tache de tous.
En fait, nous avons tous mis des pavés sur la grande barricade
Ce fut la tache de tout le monde. D’un peuple uni.
Et nous l’avons fait.

 



Articles Par : Claude Lacaille et Robin Philpot

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