Est-ce que le projet SCAF a trouvé un accord?

Une chose est certaine. Les lignes bougent fortement au sein du projet global de la défense européenne. L’Allemagne est en train de prendre l’initiative de la défense européenne sur les autres pays européens. Berlin annonce avoir avalisé sa participation à la création du SCAF ce qui fait grincer des dents chez Dassault Aviation.

Il y a quelques mois Observateur Continental s’interrogeait sur l’élaboration de ce projet militaire européen: Le projet SCAF déjà en train de sombrer? Finalement, le tournant dans la défense européenne a bien lieu avec le conflit en Ukraine, mais, une chose est certaine, sous le commandement allemand avec la supervision des Etats-Unis et la soumission de la France. Mais, le projet SCAF serait validé politiquement mais pas industriellement. Et, si l’accord industriel a lieu, SCAF verra le jour dans 30 ans ou plus. Pourtant politiquement, c’est Berlin qui mène. L’affaire du SCAF continue d’alimenter un imbroglio entre Paris et Berlin.

SCAF n’est pas mort? La France, l’Allemagne et l’Espagne conviennent de poursuivre le développement de l’avion de combat SCAF, a rapidement rapporté Reuters. «Ainsi, la France, l’Allemagne et l’Espagne sont parvenues à un accord sur le démarrage de la prochaine phase de développement d’un nouvel avion de chasse baptisé SCAF, le plus grand projet de défense d’Europe d’un coût estimé à plus de 100 milliards d’euros (103,4 milliards de dollars), a annoncé vendredi le gouvernement allemand», a précisé l’agence de presse anglophone.

30 ans ou 40 ans? Reuters, encore, revient sur son annonce rapide de vendredi dernier en laissant parler Eric Trappier, le PDG de Dassault Aviation qui vient de relativiser l’annonce ce lundi. «Il y a une pseudo-annonce politique qui a été faite. Je pense que les autorisations allemandes – qui étaient difficiles à obtenir – sont sorties et ça a donné lieu à des fuites. Ce n’est pas encore tout à fait fait», a-t-il déclaré sur RTL en citant la question du lancement de la prochaine phase de développement du futur avion de combat SCAF (système de combat aérien du futur).

Sur la question de savoir s’il faudrait 20 ans ou 30 ans pour la réalisation du SCAF, il fait la déclaration suivante: «Le Rafale va avoir une longue vie devant lui»; «On est à un tout début de processus». Il affirme: «Rien n’a été signé entre Dassault et Airbus à l’heure où on se parle. Le projet a progressé. On signe pour faire des études. Il y a d’autres étapes derrière qui devront venir, faire voler un démonstrateur, lancer un programme de développement».

Les Etats-Unis profitent du conflit en Ukraine. «La guerre en Ukraine est plutôt une mauvaise nouvelle pour nous», martèle Eric Trappier. «Tout d’abord, toute guerre en Europe est mauvaise et deuxièmement, elle bénéficie beaucoup plus aux Américains qu’à nous», dénonce-t-il. «Regardez, les Allemands achètent du F35, un bouclier israélo-américain, et d’autres pays achètent beaucoup le matériel américain. Donc, pour l’Europe ce n’est pas une bonne nouvelle. Je préférerais avoir une préférence européenne d’achats d’armements comme pour l’industrie. Si, il pouvait y avoir une préférence industrielle en Europe pour l’industrie, ça permettrait de préparer les grands projets», fait-il savoir.

Il appelle à défendre l’industrie de la France contre les Etats-Unis: «Le bon sens, c’est de défendre son industrie qui est un pilier de souveraineté et c’est pour ça que je me suis engagé et que je me bats pour l’industrie en France. Il faut absolument défendre l’industrie. Et, si on doit prendre des mesures qui ne sont pas totalement en ligne avec un ensemble de choses, il faut le faire car les autres le font». Il a, d’ailleurs, rajouté qu’ «Emmanuel Macron essaie» car «il a dénoncé ce qu’il se faisait en ce moment chez les Américains».  Le PDG de Dassault Aviation propose d’adopter la politique des Etats-Unis pour l’industrie, et cite Elisabeth Borne qui a dit «avoir une préférence européenne pour l’industrie».

«Sur le chemin vers les forces aériennes du futur en Europe, il est à nouveau démontré que nous ne pouvons relever les énormes défis qu’ensemble». «SCAF renforcera durablement la Bundeswehr ainsi que nos partenaires», a tweeté la ministre allemande de la Défense, Christine Lambrecht. «Après d’intenses négociations, des accords industriels pour la prochaine phase du programme ont maintenant été conclus pour l’Avion de Combat du Furur (SCAF)», affirme le communiqué de presse de la Bundewehr, rajoutant: «Parallèlement à ces négociations industrielles, il a également été confirmé au plus haut niveau gouvernemental qu’une approche coopérative sur un pied d’égalité est poursuivie dans le projet, qui est sous la responsabilité globale de la France».  La Bundeswehr annonce que le projet SCAF est «sous la responsabilité globale de la France».

«L’accord politique sur le SCAF est un grand pas en avant et – surtout en ces temps – un signe important de l’excellente coopération germano-française-espagnole», a rajouté Christine Lambrecht. L’annonce de Berlin détonne par rapport à la déclaration d’Eric Trappier. Die Welt a publié un article ce dimanche pour faire savoir l’objectif militaire de Berlin: «La Bundeswehr devient la plus grande force militaire d’Europe».

Selon l’Opinion, un accord devrait voir le jour cette semaine. Quoi qu’il en soit, c’est Berlin qui a pris l’initiative d’annoncer l’accord industriel et politique.

Olivier Renault



Articles Par : Olivier Renault

A propos :

Olivier Renault, journaliste. Il travaillé, entre autres, pour RUE89, Die Junge Freiheit, des sociétés de production à Berlin et Hambourg pour la télévision allemande...

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