Exclues de l’ordre du jour à Copenhague, les techniques de modification de l’environnement et d’altération du climat

La manipulation du climat à usage militaire

L’expression « techniques de modification environnementale » s’applique à toute méthode visant à modifier, par manipulation délibérée des processus naturels, la dynamique, la composition ou la structure de la Terre, notamment ses biotopes, sa lithosphère, son hydrosphère et son atmosphère ou l’espace extra-atmosphérique. (Convention on the Prohibition of Military or Any Other Hostile Use of Environmental Modification Techniques, Nations Unis, Genève, 18 mai 1977) 
 

« La guerre environnementale est définie comme la modification intentionnelle ou la manipulation de l’écologie naturelle, tel que le climat et la météo, les systèmes terrestres comme l’ionosphère, la magnétosphère, le système des plaques tectoniques, et/ou le déclenchement d’événements sismiques (tremblements de terre) afin de provoquer intentionnellement la destruction physique, économique et psychosociale d’un objectif géophysique ou d’un site habité, dans le cadre de la guerre stratégique ou tactique. » (Eco News)

« [La modification de la météo] offre aux belligérants d’une guerre un large éventail d’options possibles pour vaincre ou contraindre l’adversaire… La modification du temps fera partie intégrante de la sécurité nationale et internationale, et pourrait se faire de manière unilatérale… Elle pourrait avoir des applications offensives et défensives, et même être utilisée à des fins de dissuasion. La capacité de créer des précipitations, du brouillard et des tempêtes sur terre ou de modifier la météo spatiale… et de produire des conditions météorologiques artificielles, fait partie d’un ensemble de techniques [militaires] intégrées. » (US Air Force document AF 2025 Final Report)

Les dirigeants du monde se réunissent à Copenhague en décembre 2009, dans le but de parvenir à un accord sur le réchauffement mondial. Le débat sur le changement climatique se concentre sur l’impact des émissions de gaz à effet de serre et les mesures visant à réduire les émissions de CO2 d’origine humaine, en vertu du Protocole de Kyoto.

Le consensus implicite est que les émissions de gaz à effet de serre sont la seule cause de l’instabilité climatique. Ni les gouvernements, ni les groupes d’action écologique, n’ont évoqué la question de la « guerre météorologique » ou « techniques de modification environnementale (ENMOD) » à usage militaire. Malgré le vaste corpus de connaissances scientifiques, la question de la manipulation du climat à des fins militaires a été exclue de l’ordre du jour des Nations Unies sur le changement climatique.

Avec une extraordinaire prévoyance, John von Neumann avait constaté ceci à l’apogée de la guerre froide (en 1955) :

« L’intervention dans le domaine atmosphérique et climatique… se déploiera à une échelle aujourd’hui difficile à imaginer… Cela interférera dans chaque relation de pays avec tous les autres, plus fortement que la menace de l’arme nucléaire ou que toute autre guerre pourrait le faire. » (Cité par Spencer Weart dans, Environmental Warfare: Climate Modification Schemes, Global Research, 5 décembre 2009)

En 1977, une Convention internationale, ratifiée par l’Assemblée générale des Nations Unies, a interdit « les techniques de modification  de l’environnement, militaires ou à d’autres fins hostiles, ayant des effets étendus, durables ou graves. » (AP, 18 mai 1977). Les États-Unis et l’Union Soviétique étaient tous deux signataires de la Convention.

Guidé par le désir de consolider la paix,… et de préserver l’humanité du danger de l’usage de nouveaux moyens de guerre, (…) Considérant que l’usage militaire… de ces techniques [de modification environnementale] pourraient avoir des effets extrêmement préjudiciables au bien-être de l’homme, désireux d’interdire réellement l’usage militaire… des techniques de modification environnementale afin d’éliminer des menaces pour l’humanité… et affirmant leur volonté d’œuvrer à la réalisation de cet objectif, (…) Chaque État partie à la présente convention assume de ne pas s’engager dans le recours militaire… aux techniques de modification environnementale ayant des effets étendus, durables ou graves, comme moyen de destruction, de faire du tort ou des préjudices à tout autre État partie. (Convention on the Prohibition of Military or Any Other Hostile Use of Environmental Modification Techniques, Nations Unies, Genève, 18 mai 1977. Entrée en vigueur le 5 octobre 1978)

Cette Convention définit les « techniques de modification de l’environnement » comme celles s’appliquant à toute altération, par manipulation délibérée des processus naturels, de la dynamique, composition ou structure de la Terre, notamment de ses biotopes, sa lithosphère, son hydrosphère et son atmosphère ou de l’espace extra-atmosphérique. » (Environmental Modification Ban Faithfully Observed, Déclaration des États parties, Chronique des Nations Unies, juillet 1984, Vol. 21, p. 27)

La substance de la Convention de 1977 a été réaffirmée en termes très généraux dans la Convention-cadre sur le changement climatique (CCNUCC) signée au Sommet de la Terre en 1992 à Rio de Janeiro :

« Les États ont… conformément à la Charte des Nations Unies et aux principes du droit international, (…) la responsabilité de veiller à ce que les activités relevant de leur juridiction ou de leur contrôle ne créent pas des dommages dans l’environnement des autres États ou dans des régions au-delà des limites de leur juridiction nationale. » (UN Framework Convention on Climate Change, New York, 1992)

À la suite du Sommet de la Terre de 1992, la question de l’altération du climat à des fins militaires n’a jamais été soulevée lors des sommets ultérieurs sur le changement climatique et dans les réunions sous les auspices de la CCNUCC. Cette question a été effacée, oubliée. Elle ne fait plus partie du débat sur le changement climatique.

Pourtant, en février 1998, la Commission sur les affaires étrangères, la sécurité et la défense du Parlement européen a tenu des audiences publiques à Bruxelles à propos de l’installation de guerre météorologique développée aux États-Unis dans le cadre du programme HAARP.

La « Proposition de résolution » de la commission présentée au Parlement européen,

« considère que le projet HAARP (High Frequency Active Auroral Research Project), en raison de son impact général sur l’environnement, pose des problèmes globaux et demande que ses implications juridiques, écologiques et éthiques soient examinées par un organe international indépendant… ; [la commission] déplore que le gouvernement des États-Unis ait à maintes reprises refusé… pour apporter un témoignage sur les risques que comporte pour l’environnement et la population le projet HAARP… » (Parlement européen, Commission sur les affaires étrangères, la sécurité et la défense, Bruxelles, doc. N° A4-0005/99, 14 janvier 1999).

La demande de la commission, d’élaborer un « Livre blanc » sur l’incidence environnementale des activités militaires, a pourtant été rejetée avec désinvolture, au motif que la Commission européenne n’avait pas la compétence requise pour fouiller dans « les liens entre l’environnement et la défense. » Bruxelles se souciait d’éviter une confrontation avec Washington. (Voir le Rapport européen, 3 février 1999).

En 2007, à la suite de la publication et de la levée du sceau du secret de documents du gouvernement britannique aux Archives Nationales, le Daily Express a signalé que :

« Les documents [levés du sceau du secret] révèlent que les États-Unis, qui les ont menés sur le terrain, et l’Union Soviétique, ont des programmes militaires secrets dont l’objectif est la maîtrise du climat de la planète. Un scientifique se serait vanté du fait que, ‘’D’ici à 2025, les États-Unis disposeront de la météo’’.

Ces allégations sont traitées par les sceptiques comme de la théorie de conspiration délirante et des balivernes pour films de James Bond, mais toujours plus d’indices montrent que la frontière entre la science-fiction et la réalité est de plus en plus floue. Les Étasuniens admettent à présent que, pendant la guerre du Viêt-nam, dans une opération appelée Projet Popeye, ils ont investi 12 millions en cinq ans dans « l’ensemencement des nuages, » afin de créer délibérément de fortes pluies pour inonder les cultures de l’ennemi et détruire ses routes de logistique sur la piste Ho Chi Minh.

On prétend que les précipitations ont été augmentées d’un tiers dans les régions ciblées, faisant de l’arme de manipulation météorologique un triomphe. À l’époque, des fonctionnaires du gouvernement ont dit que la région était sujette à de fortes pluies. » (Weather War? Daily Express, 16 juillet 2007)

Tout en étant formellement confirmée par des documents officiels du gouvernement et de l’armée étasunienne, l’éventualité de la manipulation du climat ou de l’environnement dans le cadre d’un projet militaire n’a jamais été considérée comme pertinente dans le débat sur le climat. Les analystes militaires sont muets sur ce sujet. Les météorologistes n’enquêtent pas sur la question et les écologistes sont alignés sur le réchauffement climatique et le protocole de Kyoto.

 

Le Projet HAARP

Le High-Frequency Active Auroral Research Program (HAARP), sis à Gokona en Alaska, existe depuis 1992. Il fait partie d’une nouvelle génération d’armes sophistiquées, dépendantes de l’US Strategic Defense Initiative (SDI). Exploité par la société Space Vehicles Directorate de l’Air Force Research Laboratory, HAARP consiste en un système de puissantes antennes, capable de créer des « modifications locales contrôlées dans l’ionosphère [couche supérieure de l’atmosphère] :

HAARP a été présenté à l’opinion publique comme un programme de recherche scientifique et universitaire. Des documents militaires étasuniens semblent pourtant suggérer que l’objectif principal de HAARP est d’« exploiter l’ionosphère aux fins du ministère de la Défense. » (Voir Michel Chossudovsky,  The Ultimate Weapon of Mass Destruction: « Owning the Weather » for Military Use, Global Research, 27 septembre 2004)

Sans se référer explicitement au projet HAARP, une étude de l’US Air Force oriente sur l’utilisation des « modifications ionosphériques induites » comme un moyen pour modifier les conditions météorologiques et perturber les communications ennemies et les radars. (Ibid)

HAARP a aussi la possibilité de déclencher des pannes d’électricité et de perturber le réseau électrique de régions entières :

« Mais Rosalie Bertell, la présidente de l’International Institute of Concern for Public Health, affirme que HAARP fonctionne comme ‘’un gigantesque appareil qui peut provoquer d’importantes perturbations dans l’ionosphère, ce qui crée non seulement des trous, mais de longues brèches dans la couche protectrice qui empêche les radiations mortelles [en provenance de l’espace sidéral] de bombarder la planète’’.

Le Docteur en physique Bernard Eastlund l’a appelé «le plus grand appareil de chauffage de l’ionosphère jamais construit». HAARP est présenté comme un programme de recherche par l’US Air Force, mais des documents militaires confirment que son objectif principal est «d’induire des modifications ionosphériques» en vue de modifier les conditions météorologiques et de perturber les communications et les radars.

Selon un rapport de la Douma d’État russe : «Les États-Unis projettent d’effectuer des expériences à grande échelle dans le cadre du Projet HAARP et de créer des armes capables de rompre les lignes de communication radio et les équipements installés sur les engins spatiaux et les fusées, de provoquer de graves incidents dans les réseaux électriques et dans les oléoducs et les gazoducs et d’avoir un impact négatif sur la santé mentale dans des régions entières».

L’analyse des déclarations émanant de l’US Air Force évoque en nous l’impensable : la manipulation clandestine des phénomènes météorologiques, des communications et des réseaux d’électricité comme arme de guerre mondiale, permet aux États-Unis de perturber et de dominer des régions entières. La manipulation météorologique est l’arme préventive par excellence. Elle peut être dirigée contre des pays ennemis ou des «pays amis» à leur insu et être utilisée pour déstabiliser les économies, les écosystèmes et l’agriculture. Elle peut également déclencher des ravages sur les marchés financiers et les marchés de produits. La perturbation dans l’agriculture créée une plus grande dépendance envers l’aide alimentaire et l’importation de grains de céréales de base des États-Unis et d’autres pays occidentaux. (Michel Chossudovsky, HAARP : La guerre climatique : Il faut se méfier des expérimentations de guerre climatique réalisées par le Pentagone, Mondialisation.ca, 4 juin 2008)

 

HAARP antenna array.
Les antennes du programme HAARP

L’analyse des déclarations émanant de l’US Air Force évoque l’impensable : comme arme de guerre mondiale, la manipulation secrète des phénomènes météo, des systèmes de communications et de distribution électrique, permet aux États-Unis de perturber et de dominer des régions entières du monde. Selon un rapport officiel de l’US Air Force :

« La modification de la météo offre aux belligérants d’une guerre un large éventail d’options possibles pour vaincre ou contraindre l’adversaire… Aux États-Unis, la modification de la météo fera probablement partie de la politique de sécurité nationale, avec des applications à la fois intérieures et internationales. Notre gouvernement mènera ce genre de politique en fonction de ses intérêts, à différents niveaux. » (emphase rajoutée, Air University of the US Air Force, AF 2025 Final Report :

csat.au.af.mil/2025/volume3/vol3ch15.pdf)

La COP15 de Copenhague

La manipulation du climat à des fins militaires est une menace potentiellement plus grande pour l’humanité que les émissions de CO2.

Pourquoi a-t-elle été exclue du débat à la 15ème Conférence sur le changement climatique de l’ONU (COP15), alors que la Convention des Nations Unies de 1977 précise très explicitement que « l’usage militaire ou à toutes autres fins hostiles de ces techniques peut avoir un effet extrêmement préjudiciable au bien-être de l’homme » ? (Convention on the Prohibition of Military or Any Other Hostile Use of Environmental Modification Techniques United Nations, Genève, 1977)

Pourquoi ce camouflage ?

Pourquoi les techniques de modification environnementale (ENMOD) ne sont pas débattues par la société civile et les organisations écologistes sous les auspices du KlimaForum09 du Forum Alternatif ?

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Articles apparentés (en anglais)

Spencer Weart, Environmental Warfare: Modification du climat Schemes, Global Research, 5 décembre 2009

Weather War?, Daily Express, 16 juillet 2007.

Michel Chossudovsky, Weather Warfare: Beware the US military’s experiments with climatic warfare, The Ecologist, décembre 2007.

Michel Chossudovsky, The Ultimate Weapon of Mass Destruction: « Owning the Weather » for Military Use, Global Research, 27 septembre 2004.

Voir en PDF : Assemblée générale de l’ONU, Convention sur l’interdiction d’utiliser des techniques de modifications de l’environnement à des fins militaires ou toutes autres fins hostiles (10 décembre 1976):

http://www.un.org/french/documents/view_doc.asp?symbol=A/RES/31/72
 

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Article original en anglais:  Excluded from the Copenhagen Agenda: Environmental Modification Techniques (ENMOD) and Climate Change, The manipulation of climate for military use, publié le  5 décembre 2009.

Traduction : Pétrus Lombard

Michel Chossudovsky est directeur du Centre de recherche sur la mondialisation et professeur d’économie à l’Université d’Ottawa. Il est l’auteur de Guerre et mondialisation, La vérité derrière le 11 septembre et de la Mondialisation de la pauvreté et nouvel ordre mondial (best-seller international publié en 12 langues).    


Guerre et mondialisation



Articles Par : Prof Michel Chossudovsky

A propos :

Michel Chossudovsky is an award-winning author, Professor of Economics (emeritus) at the University of Ottawa, Founder and Director of the Centre for Research on Globalization (CRG), Montreal, Editor of Global Research.  He has taught as visiting professor in Western Europe, Southeast Asia, the Pacific and Latin America. He has served as economic adviser to governments of developing countries and has acted as a consultant for several international organizations. He is the author of eleven books including The Globalization of Poverty and The New World Order (2003), America’s “War on Terrorism” (2005), The Global Economic Crisis, The Great Depression of the Twenty-first Century (2009) (Editor), Towards a World War III Scenario: The Dangers of Nuclear War (2011), The Globalization of War, America's Long War against Humanity (2015). He is a contributor to the Encyclopaedia Britannica.  His writings have been published in more than twenty languages. In 2014, he was awarded the Gold Medal for Merit of the Republic of Serbia for his writings on NATO's war of aggression against Yugoslavia. He can be reached at [email protected] Michel Chossudovsky est un auteur primé, professeur d’économie (émérite) à l’Université d’Ottawa, fondateur et directeur du Centre de recherche sur la mondialisation (CRM) de Montréal, rédacteur en chef de Global Research.

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