Exigeons la fin des droits de veto à l’Organisation des Nations-Unies
Une mainmise sur l’Ukraine, des interventions en Syrie, les conflits israélo-palestiniens, l’arraisonnement de bâtiments en eaux internationales – et même la gestion de la Covid –, tous ces fléaux proviennent de l’appropriation d’un statut d’exceptionnalisme par certains États. Et, bien entendu, l’exigence de droits supranationaux par des entreprises privées.
Un passé toujours présent
La Charte de la Société des Nations est issue des Traités de paix qui suivirent la fin de la Première Guerre Mondiale. Elle y est même incluse, ce qui menaçait d’emblée ses possibilités de durer. Elle servait donc, avant tout, les intérêts des vainqueurs européens. Cependant, elle instituait de principe de l’égalité de représentation de chaque État, quel que soit le nombre de ses habitants et la dimension de son territoire. Tout pays membre obtenait un droit de vote lors des assemblées. ¹
Comme les États-Unis ne ratifièrent pas le Traité de Versailles, ils ne pouvaient adhérer à la Société des Nations. C’est à leur initiative qu’on doit la création de l’Organisation des Nations-Unies, officialisée par la Charte de San Francisco, en 1945. Quoique la clause « d’un État, une voix », y subsiste, elle est irrémédiablement entaché par les droits de veto attribués à cinq pays. France, Angleterre, États-Unis, Russie et Chine. Les quatre premiers se répartirent des portions de l’Europe, suite à la Seconde Guerre Mondiale. Ce que rien ne justifie. Ils ne sont pas les seuls pays dont la population fut soumise à des invasions, bombardements, vols, tuerie, destruction et disettes. Leur passé de colonisateurs s’apparente peu à la démocratie. Quelle est donc cette égalité de droit et « d’un État, une voix », dans les faits? N’importe lequel des cinq peut empêcher une résolution d’être adoptée, par au moins neuf des quinze représentants du Conseil de Sécurité. ²
Et lorsqu’il s’agit de voter pour mettre fin à un embargo, par exemple, ce sont immanquablement Israël et les États-Unis qui s’y opposent, comme le démontre, entre autres, leur refus d’accepter la 29e demande d’annulation des sanctions contre Cuba. Et ces votes prévalent sur ceux émis par plus de 190 autres nations.
Les bases militaires dans le monde
Qu’en est-il de la prétention à assurer la paix, en installant des forces armées, hors des frontières d’une dizaine de pays prétendus démocratiques? La France, si on excepte ses possessions outremer, telle la Guyane, contrôle six bases militaires hors de son territoire. En Allemagne, en Côte d’Ivoire, au Sénégal, au Gabon, à Djibouti et aux Émirats Arabes Unis. En 1967-68, en Angleterre, le Premier ministre Harold Wilson voulu fermer la plupart des bases. En particulier, celles situées « à l’est de Suez ». En 2020, on répertoriait 145 sites anglais dans 42 pays. Le Ministre de la Défense, Gavin Williamson, lui, désire en aménager de nouvelles, en Asie du Sud-Est et dans les Caraïbes. La Chine déclare officiellement une base externe à son territoire, à Djibouti, sans exclure la possibilité d’en ériger ailleurs. Elle possède cependant treize groupes armés réparties dans cinq régions. La Russie voulu un temps clore plusieurs sites. Si on en juge par le numéro de la base du Tadjikistan, dite 201e, ce nombre aurait été un minimum de possessions. Elles sont toutes érigées dans les anciennes républiques soviétiques, c’est-à-dire près des frontières russes, et en Syrie. Le gouvernement des États-Unis, lui, entretient environ 800 bases militaires déclarées, dans 177 pays… Les engagés seraient au nombre de 200,000, soit 10% des effectifs du pays (et si l’on fait une moyenne, cela représenterait une possibilité de mobiliser 25,000 soldats dans chaque base). Ce pays est donc le plus belliqueux. Et solliciteur d’un statut d’exceptionnalisme que rien dans son histoire ne justifie. ³
La clause démocratique
L’ancien Premier ministre Jean Chrétien, au Canada, proposa aux participants à des négociations de libre-échange, de n’accepter que des pays au gouvernement démocratique. Et lorsqu’il reçut le Président Suharto, accusé du massacre de 200,000 personnes au Timor-Oriental, entre 1976 et 1980, les manifestants, outrés par cette visite, furent harcelés par la police et aspergés de poivre de cayenne… alors que l’invité aurait dû, lui, se retrouver dans la prison de l’île qui porte ce nom. 4
Le 4 juillet, fête des experts en installation de dictatures mondiales
Les États-Unis ne devraient obtenir aucun droit de s’ériger en défenseur de la démocratie mondiale. Les colons de ce pays se l’approprièrent en assassinant des autochtones. Leur prospérité s’est établie sur le trafic humain, au bénéfice des propriétaires de plantations employant des esclaves. Les usines s’y sont multipliées, en embauchant des immigrants, à peu de frais et dans des conditions sordides. Les dirigeants n’ont cessé d’envahir des États pour y destituer les gouvernements qui s’opposaient à l’exploitation de leurs ressources. Au XIXe siècle, Haïti, Nicaragua, Porto Rico, Cuba, Venezuela, la République dominicaine, le Guatemala, Honduras, Chili, Mexique, et les Philippines furent envahis.
Les citoyens des États-Unis votent pour des maires et des députés, mais c’est une élite de quelques centaines de « grands électeurs » qui ont seuls le droit de vote touchant la présidence. Dès 1907, des lois eugénistes furent adoptées, pour stériliser les personnes jugées « inadéquates ». En quelques années, ce sont 33 États qui en instituèrent, inspirant le régime nazi. Texaco garantit à Hitler du pétrole à crédit, quelle que soit la durée de ses offensives! Suite à la défaite des troupes d’Hitler, ce sont au moins 1,600 scientifiques nazis qui bénéficièrent de sauf-conduits leur permettant de s’installer, sans représailles, aux États-Unis. Sans eux, ce pays n’aurait pas concurrencé aussi vite la technologie soviétique, ne serait-ce qu’au niveau spatial. Et depuis des années, leurs navettes sont retraitées. Tous les équipages s’encapsulent dans un Soyuz, pour atteindre la station spatiale internationale. 5
Quelque fut le dictateur en place, Westinghouse, Ford, General motor, Fire Stone n’ont cessé leur commerce, mais dès qu’un président nationalise des entreprises aux profits de son peuple, on s’empresse de décréter un embargo qui appauvrit son pays et finit par soulever la population contre lui. Les États-Unis ont formé militairement et soutenu la prise de pouvoir de dictateurs, tels que Trujillo, Batistas, Fujimori, Noriega, et ont formé jusqu’à Ben Laden. Le Plan Condor servit à perpétrer des assassinats contre des opposants. Ce pays fut le premier à utiliser des bombes atomiques comme moyen offensif et non de dissuasion. 6
C’est l’un des pays aux services sociaux les plus mesquins, où l’accès aux soins de santé n’est pas offert à tous. Même l’Irak, sous Saddam Hussein, s’avérait un régime plus généreux! Et, bien entendu, c’est l’un des dernier pays à maintenir la peine de mort, même pour des causes dont on ne peut garantir la culpabilité des condamnés.
Avant de créer la Société des Nations, vite remplacée par l’Organisation des Nations-Unies, le premier traité d’envergure international concernait la circulation fluviale… Et depuis des années, les États-Unis s’arrogent le droit d’arraisonner des bâtiments, tels les pétroliers de retour au Venezuela. Comment peuvent-ils faire fi des ententes internationales, selon qu’ils approuvent ou non les choix politiques de pays indépendants? 7
La fin du droit à l’exceptionnalisme
On parle du « monde libre » et de liberté d’expression, alors qu’on retire de l’Internet occidental des reportages et des entrevues. On diffame tous ceux qui émettent des objections ou dénoncent des mensonges. La politique de la Corée du Nord est critiquable, et Kim Jong II présenté comme un « dictateur cinglé », mais n’a jamais commis autant d’exactions, d’invasions, d’assassinats ou système d’apartheid que l’État d’Israël, dont on se préoccupe peu à savoir si on y possède des armes nucléaires et y utilise des armes chimiques, en territoires illégalement occupés. Et lorsqu’on en parle, presque tous les journaux nous censure… À l’ONU, on est loin du « une voix, un droit » tant vanté.
La résolution 2131 (XX) de l’Assemblée générale de l’ONU
« Tout État a le droit inaliénable de choisir son système politique, économique, social et culturel sans aucune forme d’ingérence de la part de n’importe quel autre État. »
Certains jugent incohérent d’accorder autant de droits à des pays n’ayant que quelques millions d’habitants qu’à des États en abritant des centaines de millions. Et pourquoi, alors, concéder des privilèges à des zones minuscules telle que la principauté de Monaco ou Andorre? La richesse compte-t-elle plus que des droits équitables? La réalité est que nul peuple ou gouvernement ne devrait s’octroyer le privilège de contrôler la politique et l’économie mondiale. Les prétentions à l’exceptionnalisme ne devrait en aucun cas être acceptés par des instances représentant l’égalité de droits des États, telles la Cour Internationale de Justice et l’Organisation des Nations-Unies.
Que diriez-vous si nous demandions :
☼ La fin des droits de veto réservés à cinq pays dont le passé et le présent ne peuvent en aucun cas servir de modèles démocratiques;
☼ L’impossibilité que deux ou trois pays empêchent l’adoption d’une résolution alors que la majorité des États membres de l’ONU ou des Pays non-alignés l’acceptent;
☼ L’éradication de toutes les bases militaires permanentes à l’étranger. On ne peut préserver la paix en multipliant les caches d’armes n’ayant d’autres utilités que la destruction et la perte de vies;
☼ La possibilité pour un pays de ne pas posséder d’armée et de statuer internationalement que nul État ne puisse en prendre le contrôle, menacer sa population, les envahir militairement, sous peine immédiate de perdre ses représentants étrangers, subir un embargo et un isolement complet de la communauté internationale. Les dépenses militaires de petits pays appauvrissent des populations et ne peuvent leur permettre de vaincre un agresseur de grande envergure sans intervention internationale.
Si vous êtes d’accord, je vous convie donc à couvrir de lettres le bureau de M. António Guterres, Secrétaire général de l’ONU, et ceux des responsables de la Cour Internationale de Justice, soit Mme Joan Donoghue, Présidente, et M. Kirill Gevorian, Vice-président. Ce n’est que par la coopération et la réitération d’actions réellement pacifiques que l’on peut finir par être écoutés. Et instaurer des droits que nulle puissance autocratique ne pourra abolir.
Maryse Laurence Lewis
Notes et références :
1.La Société des Nations et le Traité de Versailles : https://fr.wikipedia.org/wiki/Trait%C3%A9_de_Versailles
https://www.chateauversailles.fr/decouvrir/histoire/grandes-dates/traite-versailles
2. Le Conseil de sécurité : https://www.un.org/securitycouncil/fr/content/voting-system
Les bases militaires à l’étranger :
3.https://fr.wikipedia.org/wiki/Bases_aériennes_de_l’Armée_de_l’air_et_de_l’espace_française
3.https://fr.wikipedia.org/wiki/Forces_armées_britanniques
https://www.cairn.info/revue-innovations-2013-3-page-147.htm (aux États-Unis)
4. La venue de Suharto: https://www.nytimes.com/1998/11/29/world/police-action-in-97-haunts-government-in-canada.html
5.L’eugénisme aux États-Unis : https://www.erudit.org › revues › 2005-v21-n3-ms875
https://historyofeugenics.truman.edu/exchanging-ideas/international-discourse/nazi-connection/
https://fr.wikipedia.org › wiki › Eugénisme_aux_États-Unis
Operation paperclip : the secret intelligence program thot brought scientist to America, par Annie Jacobsen, Éditions Little, Brown and company, 2014.
6. https://www.laculturegenerale.com/plan-condor-operation/
7. Le premier traité mondial fut celui des « Commissions fluviales internationales » :
Relations internationales, chapitre II, L’avènement des organisations internationales, p.171, par P-F Gonidec, aux Éditions Montchrestien, 1977.