Il se pourrait que l’information, datée siècle IX, sur le péril imminent d’une invasion en Sicile par les armées musulmanes, ne soit arrivée que maintenant sur le bureau de Georges Bush. Qui, pour ne pas se faire avoir sur les délais par les contractors normands, a immédiatement envoyé sur place un expert du secteur. Ladies and gentlemen, voici avec nous, arrivant directement de Guantanamo, le commandant Thomas J. Queen, le nouveau boss de la base de Sigonella (Sicile, NDT), qui depuis presque 50 ans est la reine des colonies armées Usa en Méditerranée. L’investissement le plus massif et rémunérateur dans la région, centre de gravité de la guerre permanente dans les Balkans, en Afrique et au Moyen-Orient. C’est à Sigonella que nous ramènent les tracés radar d’un long sillage de petites et grandes affaires incluant les coups de matraque à Kadhafi, les deux guerres du Golfe, les raids au Soudan et en Somalie, les bombes sur Belgrade et les allées venues organisées par les tour operators de la Cia pour transférer à Guantanamo des centaines de sujets capturés un peu partout dans le monde, et suspectés peut-être de vouloir envahir, un jour, la Sicile. Voilà, le commandant Queen a servi dans l’Administrative Review of the Detention of Ennemy Combatants, la commission qui, dans le lager extraterritorial de Guantanamo joue à pair et impair le destin de ces fantômes hors-la-loi en combinaison orange qui ont si peu fait battre le cœur des nations juridiquement évoluées, genre la notre (la notre aussi, NDT). Aujourd’hui, Sigonella aussi est en impétueuse expansion. D’espaces et de fonctions. Elle se présente déjà comme un énorme agglomérat de structures, hommes, armements nucléaires et éco-engins de guerre variés, en regard de quoi la base Dal Molin de Vicenza est une caserne de carabiniers de village. Et on en est maintenant à la phase d’achèvement de la quatrième tranche de travaux de centaines de millions d’euros qui vont servir à améliorer la capacité opérationnelle de la base et à accueillir des milliers de nouvelles recrues. Un plan baptisé très modestement « Mega », sur lequel ni les institutions, ni la mafia n’ont trouvé à redire.
La base est grande, et Thomas J. Queen est depuis aujourd’hui son prophète.
Edition de samedi 19 mai 2007 de il manifesto
Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio
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