« Geste humanitaire » ou opération « entièrement médiatique » ?
« Répondant à un appel du ministre Frattini (affaires étrangères, NdT) … l’Union des Communautés juives italiennes (Ucei, équivalent de ce que vous pouvez imaginer en France, NdT) et la Communauté juive de Rome – lit-on dans un communiqué – mettent à disposition 300 mille euros de médicaments ». 200 mille destinés « aux enfants et aux gens de Gaza », 100 mille « aux enfants et aux civils des petites villes israéliennes du sud d’Israël (israéliennes du sud d’Israël par rapport aux « non israéliennes » du sud d’Israël ? NdT) touchés par les missiles du Hamas ». Demain (lundi 5 janvier 2009, NdT) les médicaments seront mis à disposition de Frattini (à qui va un forte « appréciation » pour la position qu’il a prise). Beau geste, humanitaire. « Pour nous c’est un geste d’humanité », dit Renzo Gattegna, président de l’Ucei. Et comme pour tout geste humanitaire digne de ce nom « nous n’avons pas l’intention d’émettre un jugement politique sur les torts ou les raisons de l’une ou l’autre partie » reprend en écho Riccardo Pacifici, le président de la Communauté romaine qui venait pourtant tout juste de faire connaître son plein appui aux bombardements sur Gaza.
Et c’est par contre sur cette phrase qu’un enfer s’est déchaîné entre la communauté juive de Rome et les milieux italo-juifs d’Israël. Un certain Shimon Fargion, citoyen juif italien émigré à Jérusalem, a attaqué violemment Pacifici à la fois pour ces mots qui sonnent de façon trop équidistante et pour avoir dépensé des sous de la communauté juive au secours de civils palestiniens de Gaza. Pacifici, fondateur et leader de la liste ultra- majoritaire « Per Israele » (Pour Israël, NdT…), n’a pas l’habitude d’être attaqué sur sa droite et a vu rouge (façon de dire, NdT). Du coup, il s’est assis à son ordinateur et a fait circuler un email furibond pour clarifier sa position (« Soutien total de cette guerre à Gaza ») et le véritable sens du « geste d’humanité ». Une initiative « en accord préalable avec les plus hauts responsables du côté israélien (et permettez-moi de ne pas ajouter plus de détails pour des raisons évidentes) », assure Faelino Luzon en intervenant lui aussi dans le débat. Poudre aux yeux, un truc juste bon pour les médias « de même qu’a été décidé avec l’ambassadeur d’Israël le fait de garder profil bas dans cette première phase», garantit, pour les siens, Pacifici : « Je peux vous garantir –écrit-il- que le choix entièrement médiatique de faire parvenir des médicaments aux enfants palestiniens et israéliens n’était et n’est utilisé que pour quand commencera, à partir de lundi, notre bataille sur les médias en soutien d’Israël ». Et il annonce pour le 10 janvier « un méga événement » de 1500 personnes sélectionnées avec l’ambassadeur d’Israël « pour expliquer les raisons d’Israël et son droit de faire cette guerre ». Pacifici jure que la Communauté romaine n’a pas sorti « un seul euro » pour ces médicaments, donnés « par une organisation juive internationale » et garantit « que de toutes façons pas un seul médicament n’arrivera à Gaza sans avoir l’autorisation du Gouvernement d’Israël ». Le communiqué est le côté officiel, l’email est le côté intercommunautaire. Et puis il y a le côté personnel, à savoir l’autre email avec lequel Pacifici répond à son critique Fargion, avec une rudesse toute virile mais efficace : « Cher tête de nœud… donne moi ton adresse que je vienne te prendre à coups de pied au cul… moi ici, pour Israël, je me lève un cul comme ça et je vis sous escorte… CONNARD… Sache que j’ai tout fait avec l’ambassade d’Israël… Putain qu’est-ce que tu en sais de ce qu’on est en train de faire ? CONNAAAAAAAARD ».
Cet article non signé est publié dans la rubrique Internazionale de l’édition de dimanche 4 janvier de il manifesto.
http://abbonati.ilmanifesto.it/Quotidiano-archivio/04-Gennaio-2009/art12.php3
Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio
La traductrice s’est efforcée de rester au plus près du sens et du détail (nombre de caractères) de la graphie utilisée en particulier dans les citations.