Incapable de renoncer aux hydrocarbures russes, la Moldavie garde la neutralité

Seulement quelques pays européens ont publiquement refusé de se joindre aux sanctions contre la Russie. Le refus de la Moldavie a été assez surprenant, alors qu’elle se positionnait jusque-là comme complètement pro-européenne et disposée à intégrer l’UE.
Le 2 avril, la présidente moldave Maia Sandu a déclaré que Chisinau n’avait pas voulu décréter (et ne décrétera pas) des sanctions contre la Russie parce que le pays était entièrement dépendant de la Russie en matière d’énergie. D’autant que, selon la cheffe de l’État, les activités militaires en Ukraine ont déjà significativement affecté l’économie de la république.
Puis elle a rappelé la dépendance énergétique de la Moldavie de la Russie, tout en reconnaissant qu’il n’y avait pas encore de solution à ce problème: « Pouvons-nous laisser aujourd’hui le pays sans gaz ni électricité? Non, nous ne pouvons pas. Ni pour nos citoyens ni pour les 100.000 réfugiés ukrainiens, dont 50.000 enfants. »
Sans oublier de mentionner l’Europe. D’après la présidente moldave, son pays est « pleinement soutenu par les partenaires occidentaux », qui s’efforceront de trouver pour Chisinau des options alternatives pour l’approvisionner en hydrocarbures. Cependant, il est clair (même si cela n’a pas été dit directement) que l’organisation de l’approvisionnement énergétique alternatif de la Moldavie ne serait pas une priorité pour les Européens.
« Mais il existe certaines choses que nous devons garantir à nos citoyens. Nous n’aiderons personne en laissant le pays sans hydrocarbures et en déstabilisant la situation ici: ni la Moldavie, ni l’Ukraine, ni nos partenaires occidentaux », a conclu Maia Sandu.
À noter que l’Ukraine a réagi très calmement à cette position de Chisinau. Alors qu’elle critique activement la Hongrie voisine pour le même comportement.
Kiev sait parfaitement que même en refusant de se joindre aux sanctions, Maia Sandu et son parti restent des alliés idéologiques de l’Ukraine et de l’UE sur le plan stratégique. Ce qui est bien mieux pour Kiev que la présence au pouvoir des socialistes locaux qui soutiennent ouvertement la Russie.
La Transnistrie constitue un sujet à part, où se trouvent des militaires russes et d’où une projection en direction d’Odessa est théoriquement possible. Kiev déclare qu’une frappe ukrainienne préventive contre la Transnistrie n’est possible qu’en cas d’activités intensives du contingent russe et/ou des unités transnistriennes. Et l’Ukraine appelle immédiatement au droit international. Dans le cas contraire, il s’agirait d’une attaque contre le territoire de la Moldavie souveraine. Car de ce point de vue, la Transnistrie fait partie de la Moldavie. Surtout en sachant qu’une grande partie des militaires de l’armée de la république de Transnistrie non reconnue possède la citoyenneté moldave.
Néanmoins, la probabilité d’une attaque éventuelle en provenance de Transnistrie est constamment débattue en Ukraine depuis le 24 février comme un élément d’une offensive combinée contre Odessa par la terre et la mer. Même si d’un point de vue purement technique il est difficile d’attaquer à partir de cet endroit. Autant qu’on puisse en juger, le pont ferroviaire à la frontière entre l’Ukraine et la Moldavie a été détruit.
Il convient de noter que ces derniers jours les médias ukrainiens mènent un jeu étrange. Ils insinuent de plus en plus qu’après la « défaite en Ukraine » le contingent russe en Transnistrie pourrait recevoir l’ordre de prendre rapidement Chisinau. Les voisins entendent-ils ces « avertissements » et sont-ils vraiment effrayés?
Alexandre Lemoine