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Jeux de guerre
Par Mario Roy
Mondialisation.ca, 26 mai 2008
La presse 26 mai 2008
Url de l'article:
https://www.mondialisation.ca/jeux-de-guerre/9070

Ici, le cas le plus connu d’un enfant utilisé au combat est certainement celui d’Omar Kadr, capturé en Afghanistan en 2002, alors qu’il n’avait que 15 ans. On sait vaguement aussi que, au Pakistan, les islamistes forment des enfants pour des attentats-suicide, ce qui se produit bel et bien, notamment en Irak et en Afghanistan. À ce dernier endroit, il y a quelques jours, c’est un garçon de 13 ans qui aurait ainsi attaqué deux soldats canadiens.
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En 2007, des enfants servaient sous les armes dans 17 conflits. C’est 10 de moins qu’en 2004, mais la Coalition pour mettre fin à l’utilisation d’enfants soldats signale que cette baisse est davantage imputable à la fin de plusieurs conflits plutôt qu’à une prise de conscience réelle de cette horreur. En fait, le nombre de ces enfants atteint tout de même plusieurs dizaines de milliers aujourd’hui (l’ONU a déjà lancé le chiffre de 300 000, mais il est impossible à vérifier).

Les cadres légaux mis en place au cours des dernières années au niveau international ont permis des progrès, certes. En Sierra Leone, quatre personnes ont ainsi été l’objet de condamnations. Mais le phénomène est très ardu à enrayer, parce que les principaux acteurs sont souvent des groupes rebelles non étatiques (on en retrouve dans 24 pays) ou des milices plus ou moins clandestines, pour qui le droit est un concept sans signification. Notons tout de même que neuf gouvernements ont eu recours aux enfants dans leurs forces combattantes et que huit autres les ont utilisés comme espions, informateurs ou messagers.

Même le Canada est montré du doigt pour maintenir le recrutement dans les réserves ainsi que dans les programmes de formation de ses Forces armées de jeunes de 16 et 17 ans. Ils ne sont cependant pas envoyés au combat.

On voit bien que, du Canada (!) au Soudan en passant par le Yémen ou le Tchad, la situationdes enfants soldats diffère radicalement. Et on peut supposer que la plupart vivent l’horreur. Ces enfants sont enrôlés alors qu’ils sont pauvres, non scolarisés, souvent abandonnés ou même vendus par leurs parents. Dans et autour des forces combattantes, ils se révèlent redoutablement efficaces. D’autant plus que et cela fait partie de l’horreur les jeunes garçons en particulier peuvent développer un goût pour la chose militaire. Ou pire encore. En 2001, dans Réflexions sur la Guerre, le Mal et la fin de l’Histoire , le philosophe Bernard-Henri Lévy notait qu’ il existe une telle chose que des enfants qui «sont, bien souvent, les plus durs, les plus brutaux, les plus déchaînés, les plus enthousiastes, les plus cinglés, des combattants».

Le rapport de la Coalition note d’ailleurs que l’école ou son absence est un carrefour stratégique à ce point de vue: il remarque précisément que les madrasas pakistanaises sont des lieux particulièrement indiqués pour le recrutement. Il est donc clair qu’un système scolaire public, correctement supervisé par l’État, sera à long terme le meilleur rempart contre la prolifération des enfants soldats.

À la condition de disposer d’un État capable de fonctionner, évidemment, ce qui n’est pas le cas de bon nombre de pays touchés par ce fléau.

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