L’art de la guerre: Au Bourget le Salon Libye

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Un record historique. Il est battu par le Salon aéronautique international du Bourget, en cours à Paris du 20 au 26 juin : plus de 2.100 exposants, qui exhibent des appareils volants de 140 types. Compris les militaires dont la vente, dans une période ce crise comme celle actuelle, devient plus décisive encore pour les plus grandes industries aéronautiques.

Pour les acquéreurs – c’est-à-dire les gouvernements, présents au Bourget avec plus de 200 délégations de 88 pays- il n’y a que l’embarras du choix. Mais comment savoir quel est le meilleur chasseur-bombardier ou hélicoptère de combat ? Il suffit de regarder s’il a son petit carton « combat proven » (essayé au combat). Une véritable marque de qualité.

Cette année aussi les produits « combat proven » abondent parce que, heureusement, il y a une nouvelle guerre : celle qui a lieu en Libye, qui s’est ajoutée à la guerre en Afghanistan et à d’autres. Pour l’industrie aéronautique Dassault, le Salon s’est ouvert non pas le 20 juin en France, mais le 19 mars en Libye, quand son avion de chasse Rafale, déjà utilisé en Afghanistan, a été le premier à bombarder. Le gouvernement français a investi (avec l’argent public) l’équivalent de 55 milliards de dollars pour en acheter plus de 300. Jusqu’ici cependant aucun autre gouvernement  ne l’a acheté. Il est important de le présenter maintenant au Bourget lui aussi avec son petit carton « combat proven in Libya ». 

Il semble que soit en train de se conclure, pour une valeur de 10 milliards de dollars, la vente de 60 Rafale aux Emirats arabes unis, où le voyageur de commerce Nicolas Sarkozy s’est rendu il y a deux ans, mais en revenant sans la signature sur le contrat. La guerre en Libye a été plus décisive encore pour la promotion de l’Eurofighter Typhoon du consortium européen formé par le britannique Bae Systems, l’italien Finmeccanica et Eads (né de la fusion de sociétés d’Allemagne, France et Espagne, ayant son siège aux Pays-Bas). Ce chasseur-bombardier, qui coûte 120 millions de dollars, a reçu sa première estampille  « combat proven » le 21 mars, deux jours après que la France ait utilisé le Rafale, quand l’aéronautique britannique l’a utilisé dans l’attaque de la Libye depuis la base (italienne) de Gioia del Colle.

L’obtention de la marque de qualité a convaincu l’Arabie saoudite de considérer l’acquisition de 24 autres Eurofighter, à ajouter aux 72 déjà achetés pour une valeur de plus de 7 milliards de dollars. Mais la concurrence demeure avec les F-15 de l’étasunien Boeing, eux aussi « combat proven », dont l’Arabie saoudite a acheté 82 exemplaires dans le cadre d’un contrat, conclu à Washington, de 60 milliards de dollars.

La compétition est très serrée. Aux avions de chasse actuels s’ajoutera un outsider, l’étasunien F-35 Lightning II, dont l’Italie achètera 131 exemplaires. Etant donnés les retards et la lévitation de son prix (de 50 à 113 millions de dollars par avion), à peine entré en fonction le F-35 aura besoin de faire la démonstration de ses qualités dans une guerre. Pas de problème.  En octobre 2009, le Rafale et l’Eurofighter Typhoon étaient exhibés sur l’aéroport de Mitiga, à côté de Tripoli, où se déroulait la Quatrième exposition aéronauitique arabo-africaine. Moins d’un an et demi plus tard, ils ont été utilisés pour bombarder la Libye, avec une valeur accrue grâce à l’estampille « combat proven ».

Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio



Articles Par : Manlio Dinucci

A propos :

Manlio Dinucci est géographe et journaliste. Il a une chronique hebdomadaire “L’art de la guerre” au quotidien italien il manifesto. Parmi ses derniers livres: Geocommunity (en trois tomes) Ed. Zanichelli 2013; Geolaboratorio, Ed. Zanichelli 2014;Se dici guerra…, Ed. Kappa Vu 2014.

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