L’économie israélienne : mondialisation libérale et colonisation

Il y a plus de 60 ans Israël se donnait l’image d’un pays pionnier, d’agriculteurs organisés dans des kibboutz, structures collectivistes modèles du sionisme « socialiste » des Ben Gourion et travaillistes de l’époque. Les tomates poussaient dans le désert et les agrumes de Jaffa inondaient les marchés. Des photos de cette « épopée » empruntaient à l’imagerie du réalisme socialiste. Bien entendu, nul Palestinien ne venait troubler le paysage. Un peuple sans terre pour une terre sans peuple … entouré par une marée hostile. David contre Goliath … Depuis les choses ont bien changé. Les masques sont tombés.

Si l’image politique d’Israël a changé, il n’en va pas toujours de même de la représentation que l’on se fait de son économie. La production d’agrumes avec l’orange « Jaffa » qui en était autrefois le symbole, est en net recul, leur commercialisation passant entre 1990 et 2002 de 1,46 à 0,4 million de tonnes. En 2008 le poids de l’agriculture dans l’économie est faible : 2,6% du PIB ; 2,5%.des exportations nettes (1,3 Mds$) et 4,1% si on intègre les industries agroalimentaires. La proportion d’agriculteurs est tombée à 3,5 % contre un tiers de la population active en 1948.

De l’industrie traditionnelle à la haute technologie

Confrontée à une absence de ressources naturelles et de matières premières – hormis les minéraux de la Mer Morte et du Néguev – l’industrie israélienne s’articulait essentiellement sur l’agriculture (agroalimentaire, engrais, pesticides, textile, outillages et équipements …) et sur le développement d’infrastructures. Avec de plus un savoir-faire pour le travail du diamant, taille et polissage.

La nécessité d’assurer l’intégration immédiate – et donc l’emploi – à des contingents d’immigrés juifs en provenance des pays arabes, souvent peu qualifiés dans le domaine industriel, confortait le développement d’industries traditionnelles.

Les choses commencèrent à changer à la fin des années 60 après la guerre des Six Jours qui aboutit à l’occupation de Gaza et de la Cisjordanie, Jérusalem-Est incluse, offrant à l’économie israélienne une main d’œuvre à bon marché, un marché captif, des terres et de l’eau. Dès 1968 fut créée la première colonie israélienne dans la vallée du Jourdain, Argaman, affirmant une volonté expansionniste.

Il fallait développer les exportations qui ne couvraient qu’à moitié les importations ce qui inévitablement gonflait la dette extérieure. L’élément le plus important sinon décisif dans l’accélération de cette évolution, et plus tard dans son orientation vers les industries à haute valeur ajoutée, fut la décision politique de développer une industrie d’armement, en réponse à l’embargo décrété par le Général de Gaulle après la Guerre des Six Jours en 1967. Avec l’option stratégique, vitale aux yeux des dirigeants israéliens, de conquérir le plus haut degré d’indépendance dans ce domaine. Ce qui fournit à l’industrie surtout à partir des années 90 la base du développement d’une industrie hi-tech.

Les choses se sont faites progressivement. Dans un premier temps les sites de maintenance de l’aviation commencèrent à développer des appareils (Kfir) copiés sur le Mirage ou plus exactement visant à « améliorer » les Mirages dont disposait Israël. Le remplacement de la France par les Etats-Unis comme fournisseur s’est accompagné d’accords de partenariats avec les industriels de la défense de ce pays. Fort de ces relations et du savoir-faire industriel acquis, les autorités israéliennes par l’IAI (Israeli Aerospace Industries, compagnie gouvernementale) poursuivirent l’ambition d’un avion entièrement israélien (le Lavi) avec son propre système d’armement, d’électronique etc. Ce vieux rêve n’aboutit pas du fait de l’exiguïté du marché israélien et du coût de l’opération [1]. L’industrie aéronautique états-unienne n’allait pas non plus aider à transformer un important client en concurrent. L’aventure, très coûteuse, s’arrêtât au milieu des années 80. Elle eut tout de même des retombées technologiques importantes. Des techniciens et ingénieurs retournés sur le marché du travail s’orientèrent par la force des choses hors de la sphère exclusivement militaire.

L’arrivée massive dans les années 90 de plus d’un million d’immigrés de l’ex-URSS, souvent hautement qualifiés en physique, électronique, informatique, mathématiques fournit les ressources humaines pour booster le développement dans les nouvelles technologies. Israël est devenu un centre de recherche et développement dans ces domaines. L’exiguïté du marché militaire israélien et même plus généralement du marché intérieur a poussé les entreprises high-tech à s’ouvrir largement sur l’ensemble du marché intérieur et surtout sur le marché international.

Après un recul dû à l’éclatement de la bulle internet au début du millénaire, le développement reprit son cours. Aujourd’hui plus d’une centaine d’entreprises israéliennes sont cotées sur les bourses états-uniennes, surtout au Nasdaq. C’est le 2ème plus gros contingent étranger après le Canada.

Profitant d’un environnement favorable – ressources humaines qualifiées disponibles, coûts salariaux inférieurs, subventions [2], réseaux de recherche et développement, programmes de soutien aux projets innovants –des multinationales importantes se sont implantées en Israël notamment dans le domaine des semi-conducteurs : Intel, Vishay, Texas Instruments exportent la quasi-totalité de leur production [3]… Motorola dispose d’une filiale en Israël qui exporte « seulement » un tiers de sa production : cela tient à sa position de fournisseur de l’armée israélienne notamment dans les systèmes de mises à feu. Cette compagnie est active également dans le secteur de la surveillance automatisée de zones et installations stratégiques. La présence sur le marché israélien permet aussi d’assurer une « veille » des start-up israéliennes. Les multinationales US y ont investi des milliards de dollars. Intel par exemple est présent dans 11 entreprises israéliennes (plus qu’au Royaume-Uni, Taiwan, Japon ou Corée du Sud).

Dès 1977 une fondation (BIRD) était créée avec des fonds gouvernementaux états-uniens et israéliens pour aider les entreprises innovantes. D’autres fonds et mécanismes d’aide étaient créés par la suite dans le même but. Plus généralement le financement du développement des start-up israéliennes se fait au moyen de capitaux levés essentiellement aux Etats-Unis par des fonds d’investissement. Pour le capitalisme financier à son stade actuel les entreprises sont d’abord des marchandises qu’on achète et revend en les introduisant en bourse ou en en cédant le contrôle total. Tant qu’on en tire un bénéfice les investisseurs se précipitent, les créateurs d’entreprise se demandant s’ils seront dans le prochain tirage du gros lot …

Ainsi les relations entre Israël et les Etats-Unis ne se bornent pas à une aide annuelle de 3 Mds$ et plus. Elles s’accompagnent de relations commerciales et d’un partenariat technologique ou capitalistique entre les industries militaires et hi-tech des deux pays. Sachant que les plus importantes entreprises hi-tech travaillent aussi pour le secteur militaire, ou ont utilisé des techniques issues de ce secteur. Les articles de presse sur l’armée israélienne mettent souvent en valeur son côté hi-tech, sa capacité à promouvoir les jeunes dans ce domaine avec un message du type « enrôlez-vous pour rencontrer vos futurs associés dans votre future start-up ». Evidemment rien sur les exactions de cette armée et encore moins sur les crimes d’une guerre « propre » hi-tech où on voit le moins possible son ennemi.

La place de l’armée est considérable en Israël. Son poids dans le budget de l’Etat est de 18% en 1995 et de 18,5% en 2000 et 2005. Selon le « Central Bureau of Statistics » israélien (CBS) ces dépenses seraient même supérieures de 20% à ces chiffres si l’on prend en compte celles réalisées au titre de la « défense » dans les budgets des autres ministères et cela sans compter celles générées par l’occupation militaire pas toutes prises en compte dans cette approche (par exemple les exonérations fiscales, aides diverses, coûts d’infrastructures des colonies …). Rapportées au PIB ces dépenses sont très supérieures à celles des pays industrialisés (2 à 4% du PIB Etats-Unis y compris) : entre 8 et 8,5% du PIB sur la période 1995-2005 ou environ 10% du PIB en intégrant les dépenses d’autres ministères. A certaines périodes le poids de ces dépenses était bien plus considérable : près du tiers du PIB dans la période 73-75 (effet de la guerre de 73) puis près du quart entre 76 et 85, ne commençant vraiment à baisser que dans les années 90 avec le processus d’Oslo.

Exportations et importations de matériel militaire tiennent un rôle important. D’autant que les exportations permettent d’alléger le poids économique des dépenses militaires de manière non négligeable. Important pour Israël qui non seulement perfectionne son équipement mais a obtenu de son allié les Etats-Unis d’avoir une supériorité militaire qualitative dans la région en étant doté des armements les plus modernes, les plus sophistiqués [4]. Avoir quelques longueurs d’avance fait partie de cette volonté de dominer la région. Selon le CBS, les importations au titre de la « défense » sont de 2,5 Mds$ en 2008, à peu près constant depuis 3 ans. Les exportations militaires israéliennes sont par contre en augmentation régulière : 6,3 Mds$ en 2008, 5,6 en 2007, 4,8 en 2006. Israël est maintenant le 5ème exportateur de matériel militaire derrière les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la Russie et la France. Avec des clients importants en Asie, l’Inde avec dernièrement un contrat de plus d’un milliard de dollars et la Chine, client très important pour Israël ce qui ne va pas sans problème avec les Etats-Unis qui se sont opposés à des ventes de matériel sensible à la Chine. On comprend qu’Israël et la Chine soient discrets sur ces échanges.

L’intégration de l’économie israélienne dans la mondialisation

L’industrie manufacturière, composante la plus dynamique de l’économie israélienne, voit ses exportations passer de 6,2 Mds$ (hors diamants) en 1988 à 40,4 Mds$ en 2008 : une croissance de 552% en 20 ans. Plus de 80% de la croissance (non déflatée) des exportations a pour origine l’industrie manufacturière.

En 2008 l’industrie chimique et pharmaceutique constitue de très loin le premier poste dans les exportations israéliennes (34,2% des exportations hors diamants, particulièrement des produits pharmaceutiques et des engrais). Vient ensuite l’industrie électrique et électronique (27,4%), l’optique et instruments médicaux (7,8%), le plastique et assimilés (6,7%) et la métallurgie (6,7%). A eux quatre ces industries fournissent plus de 80% (82,9%) des exportations israéliennes.

Un nombre restreint de multinationales israéliennes assure une grande part des exportations : 32% des exportations manufacturières en 2008, tous secteurs confondus, sont réalisées par 10 entreprises.

Les privatisations, commencées à la fin des années 70, ont grandement contribué à ce processus de concentration [5] baignant dans les thèses reaganiennes et néo conservatrices des Chicago boys. Des économistes israéliens [6] considèrent que les privatisations réalisées ont favorisé le développement de la corruption, par le bradage des entreprises publiques et de celles appartenant à la Histadrouth. Cinq conglomérats principaux se sont dégagés dans ce processus contrôlant à la fin des années 90 une part importante de l’activité avec parfois des participations croisées complexes : Israel Corporation (Ofer), IDB, Koor, Dankner, et Arison. A quoi s’ajoutait un important secteur d’Etat. Sans pour autant que ces conglomérats disparaissent, les choses ont évolué avec des recompositions, de nouveaux arrivants Kardan N.V., Africa Israel de Lev Leviev (construit dans les colonies israéliennes, en difficulté depuis la crise financière et immobilière), Delek Group … L’Etat a réduit son périmètre mais reste encore très présent dans l’économie avec une participation encore maintenue dans la Banque Leumi (l’Etat vient de céder en janvier 2010 sa participation de 25% dans la Banque Discount à la Deutsche Bank), la propriété des plus grandes entreprises d’armement, Mekorot (la compagnie de l’eau), la Compagnie d’Electricité…

Le gouvernement projette de démanteler-privatiser l’entreprise publique d’électricité, privatiser l’éducation (les soins en milieu scolaire étant déjà cédés au privé), subventionner le secteur associatif pour qu’il prenne en charge des services précédemment assurés par l’Etat … Dans le secteur de la chimie les 10 plus grandes entreprises assurent 82% des exportations. Israel Chemicals Ltd, quasi-monopole israélien privatisé en 1995 exploitant les ressources minérales de la Mer Morte et du Néguev, dispose de filiales et sites de production dans de nombreux pays. Il a réalisé 94% de son chiffre d’affaires à l’étranger dont plus de la moitié par ses filiales étrangères. C’est notamment un des principaux fournisseurs d’engrais en Europe.

Teva, classée dans les 20 premières entreprises pharmaceutiques mondiales, spécialisée dans les génériques, a réalisé 95% de son chiffre d’affaires hors d’Israël. Première entreprise israélienne par son chiffre d’affaires (en 2008 11,1 Mds$ dont 6,1 Mds$ aux Etats-Unis et 2,8 Mds$ en Europe), elle a 38.000 salariés.

Dans les composants électroniques les 10 plus grandes entreprises réalisent 84% des exportations, dont plus de 60% par des filiales de compagnies étrangères.

Dans le plastique, Keter, qui a acquis l’entreprise française Allibert en 2003, réalise 89% de son chiffre d’affaires à l’étranger. Dans l’industrie d’armement Elbit et Israeli Aerospace Industries plus de 80%, et Rafael plus de 50%. Ou encore Elron (holding dans l’électronique), Delek (pétrole, gaz), Iscar (métallurgie, entreprise rachetée par le financier Warren Buffet), …

Israël dispose aussi de quelques « success stories » dans l’industrie du logiciel : Check Point Software, Amdocs, Aladdin Knowledge Systems, Comverse … A noter que le plus souvent il s’agit de produits à destinations des entreprises (B2B) et non directement commercialisés à des particuliers.

Globalement l’économie israélienne a un degré d’ouverture [7] moyen de 62% entre 2005 et 2008. L’Union Européenne pèse un tiers des exportations israéliennes (chiffres 2008, hors diamants) et représente sensiblement le même poids dans les importations. Pris globalement c’est le premier partenaire économique d’Israël. Les pays de l’UE qui reçoivent le plus d’exportations israéliennes sont dans l’ordre d’importance : les Pays-Bas, l’Allemagne, le Royaume-Uni et l’Italie (entre 1,6 et 2 Mds$). Viennent ensuite la Belgique, la France et l’Espagne (entre 1,1 et 1,2 Mds$).

Les Etats-Unis reçoivent 28% des exportations israéliennes mais pèsent beaucoup moins dans les importations : la balance commerciale avec les Etats-Unis est largement positive pour Israël. A noter la montée de l’Asie, l’Inde et surtout la Chine qui devient deuxième fournisseur d’Israël passant devant l’Allemagne [8], et le Brésil en Amérique du Sud.

Les territoires palestiniens occupés

Les échanges avec les territoires « sous contrôle » virtuel palestinien ne sont pas inclus dans les statistiques douanières. Le traitement spécifique de ces données exprime de facto leur statut de « marché déversoir » pour les produits israéliens. Des échanges extrêmement profitables pour l’économie israélienne : en 2002 l’excédent au profit d’Israël était de 811 M$ ; en 2008 il passait à 2,6 Mds$ ! Une manière de réduire les déficits commerciaux israéliens. Tout en empêchant, de mille et une manières, les productions palestiniennes de concurrencer les produits israéliens. Israël a investi dans les colonies installées, toutes illégalement, dans les territoires palestiniens occupés en 1967 mais pas en dehors de ces colonies. En effet le but poursuivi était et est toujours de s’accaparer la terre et les ressources, particulièrement l’eau, sans annexer la population. Pour encourager le peuplement de ces colonies des aides importantes ont été dégagées par l’Etat pour financer les infrastructures, les habitations, des aides aux familles, des incitations fiscales [9] très importantes pour les entreprises notamment dans la vallée du Jourdain etc.

La dette extérieure : de débiteur à créditeur

Malgré l’orientation résolument exportatrice des grands groupes industriels israéliens, les importations de biens [10] (hors services) ne sont couvertes qu’à 80% environ par les exportations (après 67% en moyenne au début des années 90), le déficit de la balance commerciale augmentait régulièrement dépassant 13 Mds$ en 2008.

Le solde positif des échanges sur les services a permis de réduire le déficit sur les échanges de biens. Le montant total d’exportation de services s’élevait à 24,1 Mds$ en 2008 contre 13,2 Mds$ en 2003 : plus de 80% en 5 ans. Tous les secteurs ont enregistré une forte progression : Tourisme, Transports, Logiciels, Recherche & Développement … L’excédent dégagé sur les services (4,2 Mds$) s’avérait insuffisant pour couvrir le déficit sur les échanges de biens. En 60 ans environ 180 Mds$ [11] ont été consacrés à la couverture des déficits extérieurs, les 2/3 étant des dons et transferts en devises étrangères provenant des Etats [12], de fonds de soutien de la diaspora, d’apports des immigrants, d’investissements dans des entreprises … Ces mouvements de fonds se maintenant jusques aujourd’hui ont permis de limiter la dette extérieure.

Malgré ces apports importants de devises la dette extérieure a tout de même augmenté jusqu’en 2002 : 356 M$ en 1954, 6,3 Mds$ en 1975 jusqu’à 20,8 Mds$ en 1995. Puis avec la progression régulière des exportations de biens et surtout des services (particulièrement pour les logiciels et la recherche-développement) la décrue commençait au début du nouveau millénaire.

En 2002 la dette extérieure devenait nulle puis, de débitrice la position s’inversait pour devenir créditrice : +23,2 Mds$ en 2005 et +44,1 Mds$ en 2008. Cette situation laisse à Israël des marges de manœuvres financières autrefois inexistantes. L’année 2009, selon les premières estimations du CBS, a vu une amélioration sensible de la balance des transactions courantes avec, pour la première fois si les chiffres le confirment, un excédent de la balance des échanges des biens et services, le très fort recul des exportations étant largement compensé par une baisse plus importante des importations notamment du fait de la diminution du coût de l’énergie.

Mais l’amélioration de la situation économique de ces dernières années n’a pas profité à l’ensemble de la population israélienne. Loin de là. La pauvreté touche le quart des israéliens et tout particulièrement la population palestinienne qui subit de plus une discrimination raciale, une absence d’investissement criante, délibérée, d’infrastructures publiques. Le retrait de plus en plus marqué des services publics accroit la paupérisation et la précarité de couches plus larges de la société. Le CBS estime que 30% de la société peut tomber dans la pauvreté. Derrière les appels à l’union nationale sacrée s’exprime une politique ouvertement néo-conservatrice accompagnée de budgets militaires faramineux qui pèsent toujours plus, imposant restrictions et privations aux couches les plus faibles. La crise sévit aussi en Israël.

La très grande ouverture d’Israël en direction des marchés extérieurs a rendu ce pays particulièrement vulnérable aux pressions économiques provenant de l’extérieur tant pour ses importations de matières premières que pour les exportations de ses multinationales. Les autorités israéliennes accordent une grande d’importance à la signature de traités de libre échange, tant sur le plan diplomatique qu’économique. Des documents produits par des ministères ou institutions israéliennes ne manquent pas d’en faire la liste régulièrement. Dans une même logique elles combattent farouchement toutes les actions susceptibles d’entraver ces liens, en particulier les appels à sanctions qui se sont multipliés depuis les crimes de guerre, voire crimes contre l’humanité, commis à Gaza par Israël.

Les campagnes de boycott, désinvestissements, sanctions, se développent dans le monde entier avec des premiers succès (Dexia et les prêts à des colonies, Veolia-Alstom et le tramway de Jérusalem, fonds souverain Norvégien se désinvestissant de Elbit, Assa Abloy déménageant sa filiale Mul-T Lock de Barkan en Cisjordanie, …). Des campagnes auprès des consommateurs ciblent des entreprises ayant des sites de production dans des colonies (Soda Club, Ahava, Agrexco …), colonies, faut-il le rappeler, toutes illégales selon le droit international.

Ces mobilisations de consommateurs peuvent être un point de départ, un levier afin d’exiger des sanctions institutionnelles contre Israël notamment la suspension de l’accord d’association Union Européenne/Israël. Objectif que le boycott consommateur ne doit pas nous faire oublier, une telle sanction étant redoutablement efficace du fait même des structures de l’économie israélienne. Sinon la politique israélienne continuera à nier le droit en toute impunité. Comme l’indiquait le journaliste israélien Gideon Levy dans une interview au journal l’Humanité en janvier 2010 « Il n’y a aucune perspective parce qu’Israël n’a payé aucun prix pour l’occupation et la colonisation des territoires palestiniens. Donc, cela va continuer. »

Notes

[1] Le début des années 80 connut l’inflation galopante à 3 chiffres : 133% en 1980, 191% en 1983, 445% en 1984

[2] Intel a reçu 600 M$ sur un investissement global de 1,8 M$ pour le site de Kiryat Gat

[3] Site « Dun’s100 » de Dun & Bradstreet Israel http://duns100.dundb.co.il/ts.cgi?t…

[4] Voir l’article de Caroline Pailhe « Les transferts militaires américains vers Israël » dans l’ouvrage collectif « Qui arme Israël et le Hamas ? » dans la collection « les Livres du GRIP »

[5] Dans ce processus la « gauche travailliste » israélienne y a perdu une bonne part de sa puissance sociale avec le passage du secteur public au privé, de la fin de toute une série d’acquis sociaux et l’affaiblissement de la principale base socio-économique des travaillistes, la Histadrouth, syndicat unique possédant entreprises importantes et banque. Aujourd’hui seulement le quart des kibboutz fonctionne suivant le schéma d’origine des « coopératives égalitaires ».

[6] Shimshon Bichler et Jonathan Nitzan “New Economy or Transnational Ownership ? The Global Political Economy of Israel” 2002

[7] Degré d’ouverture = (importations + exportations)/PIB. A titre de comparaison, en 2004 : France, Italie 41-42%, Allemagne 60%, Royaume-Uni 38%, Etats-Unis 20%, Japon 22% et Chine 44%

[8] Interrogé sur les échanges économiques avec les pays arabes, le gouverneur de la Banque Centrale Stanley Fischer déclarait qu’il le souhaitait mais que « il ne s’agit pas d’une nécessité vitale ». La volonté d’intégration israélienne dans la région n’est pas pour demain ! Tel-Aviv, que les israéliens surnomment « The Bubble » – la bulle – regarde New York ou la Californie mais pas les territoires palestiniens occupés.

[9] Certaines entreprises ne déclaraient ni leur activité ni leurs bénéfices, l’Etat fermant les yeux.

[10] Les importations de biens, 64,5 Mds$ en 2008, sont pour la plus grande part des matières premières (37,6%) et du pétrole (19,9%). Viennent ensuite les biens d’équipement 15,7% et les diamants 13,8%. Les biens de consommation ne représentent que 12,8% du total.

[11] Ministry of Foreign Affairs, The National Economy, Balance of Payments, April 2008

[12] Etats-Unis environ 3 Mds$ par an (estimation courante à quoi il faudrait ajouter des dons de surplus militaires) couvrant l’achat de matériel militaire US, une partie pouvant être utilisée au profit de l’industrie israélienne (25%). Allemagne environ 750 M$ par an au titre de réparations.

Robert Kissous, Consultant, est membre du Conseil National de l’Association France Palestine Solidarité (AFPS : http://www.france-palestine.org/ ).



Articles Par : Robert Kissous

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