L’Equateur expulse la Banque mondiale : Ultralibéralisme non grata !

30 avril 2007. Le courant grandissant en faveur d’une annulation effective de la dette du tiers-monde, dette odieuse, inique et jeu d’écriture cynique enregistre avec satisfaction le divorce de la république d’Equateur avec la Banque mondiale. Le cheval de Troie d’une mondialisation uni-libérale et prédatrice, s’est vu signifié le rejet par un pays du Sud, engagé dans des réformes alternatives, des programmes de privatisation du monde au profit de quelques groupes influents et de la Triade. Le Comité d’Annulation de la Dette du Tiers-Monde, CADT réagit [27.04.07] à cette prise de position de l’Equateur.
Le président équatorien Rafael Correa vient d’annoncer l’expulsion du représentant permanent de la Banque mondiale en Équateur, Eduardo Somensatto, montrant ainsi son refus d’appliquer les remèdes frelatés de la Banque mondiale et des grandes puissances qui la dirigent.
Selon le Ministère des Affaires étrangères équatorien, le président Correa « a décidé de déclarer M. Somensatto, persona non grata, conformément à l’article 9 de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques et en a averti immédiatement la banque concernée ». Pour le CADTM, il s’agit là d’un beau pavé jeté dans la mare néolibérale, et ce de manière parfaitement justifiée puisque les mesures d’ajustement structurel imposées par la Banque mondiale, le FMI et les dirigeants des pays riches vont à l’encontre d’un principe non négociable : la pleine souveraineté politique et économique d’un pays en développement.
Rappelons qu’en 2000, l’Équateur avait abandonné sa monnaie, le « sucre », pour adopter le dollar des États-Unis, subissant totalement la politique monétaire décidée par Washington. Par ailleurs, en juillet 2005, le gouvernement équatorien, dont Rafael Correa était ministre de l’Économie, avait décidé de réformer l’utilisation des ressources pétrolières : au lieu de servir au remboursement de la dette, une partie devait servir aux dépenses sociales, notamment pour les populations indiennes. En représailles, la Banque mondiale avait alors bloqué un prêt de 100 millions de dollars promis à l’Équateur. A l’époque, les pressions de Washington avaient eu raison de Rafael Correa qui avait dû démissionner. Il s’était estimé offensé par la Banque mondiale, déclarant que « personne n’avait le droit de punir un pays s’il changeait ses lois ».
Élu président en novembre 2006, Rafael Correa s’applique aujourd’hui à rendre au peuple équatorien le contrôle sur ses richesses naturelles et à prendre réellement en compte les intérêts et les aspirations populaires.
Le 15 avril dernier, environ 80% des électeurs se sont prononcés par référendum en faveur de la création d’une assemblée constituante chargée de renforcer les pouvoirs de l’État sur l’économie, spécialement dans les secteurs pétroliers, gaziers et financiers. Alors que l’Équateur est écrasé par une dette extérieure publique de 10,5 milliards de dollars, Rafael Correa vient de décider que la part du budget dédiée au remboursement de cette dette passera de 38% en 2006 à 11,8 % en 2010. Au contraire, la part dédiée à l’investissement humain passera de 22% à 38,4% et celle liée à l’investissement productif de 6,4% à 11%.
On espère, en emboîtant le pas au CADT, que d’autres pays et initiatives à l’instar de la création d’une Banque du Sud, prendront progressivement d’assaut le terrain du développement économique qui aura été, au final, un extraordinaire gisement de profits astronomiques pour le Nord. La pauvreté, le bien le mieux et le plus produit, réparti dans le Tiers-Monde, sera enfin décryptée comme un objectif en soi du néolibéralisme et de ses colonialités, en tant qu’irremplaçable générateur de profits pour lesquels le système financier international est un accélérateur phénoménal.