L’Union Européenne aussi va à la chasse aux pirates, avec l’OTAN.


Standing Nato Maritime Group 2

L’Union européenne enverra en décembre une force navale le long des côtes somaliennes pour une « opération contre la piraterie » : c’est Javier Solana, le haut représentant pour la politique étrangère et la sécurité commune, qui l’a annoncé.

Elle sera composée de navires de guerre de neuf pays – France, Allemagne, Grande-Bretagne, Espagne, Belgique, Suède, Chypre et Lituanie. Elle sera commandée, depuis le quartier général de Northwood (GB) par le vice-amiral Philip Jones. Objectif officiel de l’opération : défendre des attaques des pirates les navires du World Food Programme, qui apportent des aides humanitaires dans la Corne d’Afrique.

C’est pour ce même noble motif que vient tout juste d’entrer dans l’Océan Indien un groupe naval de l’OTAN, le Standing Nato Maritime Group 2 (Snmg2). Sept navires de guerre en font partie, appartenant à : Italie, Etats-Unis, Allemagne, Grande-Bretagne, Grèce et Turquie. Commandés par un contre-amiral italien, Giovanni Gumiero, à bord du chasseur de mines Durand de la Penne, navire amiral du groupe. Le Snmg2, dont le commandement est assuré par rotation des pays membres, dépend de l’Allied Joint Force Command Naples, qui est en permanence aux ordres d’un amiral étasunien (aujourd’hui Mark P. Fitzgerald), celui-là même qui commande les Forces navales Usa en Europe.

Mais, d’après ce qu’a déclaré hier l’amiral Fitzgerald, « nous ne pouvons faire que peu de choses pour arrêter les pirates, car les règles d’engagement doivent encore être définies ». L’OTAN a cependant annoncé que, dans cet « effort humanitaire », « elle continuera à coordonner son assistance avec l’opération Enduring Freedom sous commandement étasunien ».

Ainsi ressort le but réel de l’opération. En Somalie, la politique étasunienne est en train de subir un nouvel échec : les troupes éthiopiennes, envoyées là en 2006 après l’échec de la tentative par la Cia de renverser les Cours islamiques en soutenant la coalition « anti-terroriste » des seigneurs de la guerre, sont sous attaque, et sont en train de se retirer. Washington prépare donc d’autres opérations militaires pour étendre son contrôle à la Somalie, pays important et stratégique par sa position géographique sur les côtes de l’Océan Indien. Pour contrôler cette zone, une task force étasunienne  a été basée à Djibouti, à l’embouchure de la Mer Rouge. L’intervention militaire s’intensifie à présent avec la création du Commandement Africain des Etats-Unis (AfriCom), dans la « zone de responsabilité » duquel a été envoyé le groupe naval OTAN.

Cette intervention militaire croissante provoquera en Somalie d’autres désastreuses conséquences sociales, en alimentant le phénomène de la piraterie. Celui-ci est né à la suite du saccage des zones de pêche somaliennes par des flottes étrangères, et par la décharge de substances toxiques qui ont ruiné les petits pêcheurs ; certains d’entre eux ont ensuite eu recours à la piraterie.

Que la chasse aux pirates soit un paravent est bien démontré par l’autre tâche officielle confiée au Snmg2 : visiter certains pays du Golfe persique (Koweït, Bahreïn, Qatar et Emirats arabes unis), partenaires de l’OTAN dans le cadre de l’initiative de coopération d’Istambul.

Les navires de guerre OTAN iront ainsi s’ajouter aux porte-avions et nombreuses autres unités (parmi lesquelles le groupe d’expédition d’attaque Iwo Jima, qui est passé de la Sixième à la Cinquième flotte), que les Etats-Unis ont déployés dans le Golfe persique et dans l’Océan Indien, pour contrôler les routes du pétrole, assiéger l’Iran et bombarder l’Afghanistan avec l’aviation navale.

Toujours, officiellement, pour protéger les navires marchands des attaques des pirates, sont arrivés dans l’Océan Indien des navires de guerre britanniques, russes et indiens. La marine militaire italienne ne pouvait être en reste, ayant l’honneur de commander le groupe naval de l’OTAN, avec force déploiement de drapeaux tricolores sur le navire amiral. Comme toujours, cependant, aux ordres d’un amiral étasunien.

Edition de jeudi 23 octobre 2008 de il manifesto
http://www.ilmanifesto.it/oggi/art43.html

Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio



Articles Par : Manlio Dinucci

A propos :

Manlio Dinucci est géographe et journaliste. Il a une chronique hebdomadaire “L’art de la guerre” au quotidien italien il manifesto. Parmi ses derniers livres: Geocommunity (en trois tomes) Ed. Zanichelli 2013; Geolaboratorio, Ed. Zanichelli 2014;Se dici guerra…, Ed. Kappa Vu 2014.

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