La continuité du gouvernement étasunien: L’état d’urgence supplante-t-il la Constitution ?
L’état d’urgence supplante-t-il la Constitution? Discours devant le Commonwealth Club, San Francisco, 23 novembre 2010
En juillet 1987, durant l’interrogatoire serré d’Oliver North lors les audiences de l’affaire Iran-Contra, le public étasunien a eu un aperçu du plan d’urgence « de nature hautement délicate » dans lequel North avait été impliqué. North avait apparemment géré des plans pour une intervention d’urgence advenant une attaque nucléaire (une préoccupation légitime). La presse alléguait cependant que la planification visait une suspension plus généralisée de la Constitution, selon la décision du président.
Dans le cadre de sa couverture habituelle de l’affaire Iran-Contra, le New York Times a publié l’échange suivant, toutefois sans commentaire ni suivi :
[Député au Congrès Jack] Brooks: Colonel North, dans le cadre de votre travail à la N.S.C., ne vous a-t-on pas assigné à un moment donné à la planification de la continuité du gouvernement advenant un désastre majeur?
La façon dont l’avocat de North et le sénateur Daniel Inouye, président du comité, ont tous deux répondu démontrait qu’ils étaient au courant de l’affaire :
Brendan Sullivan [le conseiller de North, nerveusement]: Mr. le président?
[Sénateur Daniel] Inouye: Je crois que cette question touche à un domaine hautement délicat et classifié, donc puis-je demander que nous n’y touchions pas?
Brooks: J’étais particulièrement préoccupé M. le président, car j’ai lu dans des journaux de Miami et dans plusieurs autres qu’un plan avait été élaboré, par cette même agence, un plan de contingence en cas d’urgence, lequel suspendrait la Constitution étasunienne. J’en ai été profondément troublé et je me suis demandé si c’était un domaine sur lequel il avait travaillé. Je crois que c’est le cas et je voulais avoir cette confirmation.
Inouye: Avec tout le respect que je vous dois, puis-je vous demander de ne pas toucher à ce sujet à ce stade-ci? Si nous désirons l’aborder, je suis certain que des arrangements peuvent être pris pour une réunion directive [1].
Brooks répondait à un article d’Alfonzo Chardy dans le Miami Herald à propos de l’implication d’Oliver North au sein de la Federal Emergency Management Agency (FEMA) pour la planification de « Continuité du gouvernement » (Continuity of Government” (COG)). Selon Chardy, les plans envisageaient la « suspension de la Constitution, la remise du contrôle du gouvernement à la FEMA, la nomination d’urgence de commandants de l’armée pour diriger les gouvernements fédéral et étatiques et la déclaration de la loi martiale durant une crise nationale [2] ».
Reagan avait placé à la FEMA une équipe de contre-insurrection qu’il avait créée en tant que gouverneur de la Californie. L’équipe était dirigée par le colonel de l’armée Louis Giuffrida, qui avait attiré l’attention de Reagan par un article qu’il avait écrit alors qu’il était à l’US Army War College et dans lequel il préconisait la détention par la force et sans mandat de millions d’Étasuniens noirs dans des camps de concentration. « Reagan a d’abord placé Giuffrida à la tête de la Garde nationale de la Californie et lui avait demandé de « concevoir l’opération Cable Splicer […], des plans de loi martiale pour légitimer l’arrestation et la détention d’activistes contre la guerre du Vietnam et d’autres dissidents politiques [3]. » Ces plans ont été peaufinés avec l’aide de l’expert britannique en contre-insurrection Sir Robert Thompson, lequel avait utilisé les détentions massives et les déportations pour faire face à l’insurrection communiste dans les années 1950 sur le territoire qui constitue aujourd’hui la Malaisie.
À l’époque, peu de gens (y compris moi) ont attaché de l’importance à l’histoire de Chardy concernant le plan COG. Chardy avait lui-même suggéré que le secrétaire à la Justice de Reagan, William French Smith, était intervenu pour empêcher que le COG soit présenté au président et, en 1985, Giuffrida a été forcé de quitter son poste pour avoir dépensé l’argent du gouvernement pour construire une résidence privée. Mais la planification de COG s’est non seulement poursuivie, elle s’est élargie.
Sept ans plus tard, en 1994, Tim Weiner rapportait dans le New York Times que ce qu’il appelait « Le projet fin du monde » — à la recherche de « façons de continuer à faire fonctionner le gouvernement après une attaque nucléaire soutenue à Washington – avait « moins de six mois à vivre [4] ».
Le langage de Weiner était techniquement correct, mais également très trompeur. En réalité, la planification de COG se poursuivait simplement, désormais avec une nouvelle cible, le terrorisme. Les deux premiers livres à traiter de la planification de COG en se basant sur l’article de Weiner, écrits par James Bamford et James Mann, rapportaient tous deux que la planification de COG avait été abandonnée [5]. Récemment, Tim Shorrock a répété en 2008 que « le programme COG a été abandonné pendant l’administration Clinton » et en 2009, Shirley Anne Warshaw a écrit que « l’administration Clinton […] a mis un terme au projet ultra secret [6] ». Sur ce point précis toutefois, ces auteurs, par ailleurs excellents et bien informés, avaient tort.
Weiner et ces auteurs n’ont pas rapporté que dans les derniers mois de la présidence Reagan, le but du plan COG avait officiellement changé : il ne s’agissait plus de mesures à prendre « après une guerre nucléaire », mais pour toute « urgence concernant la sécurité nationale ». Cela a été défini comme suit dans le décret 12656 de 1988 : « tout événement, incluant un désastre naturel, une attaque militaire, une urgence technologique ou toute autre urgence qui compromettrait ou menacerait sérieusement la sécurité nationale des États-Unis [7]. » De cette manière, un programme totalement légitime datant d’Eisenhower, consistant à planifier des mesures d’urgence extraordinaires pour des États-Unis dévastés par une attaque nucléaire, était alors converti pour conférer des pouvoirs secrets équivalents à la Maison-Blanche, pour tout ce qu’elle considérait comme une urgence.
Cette application élargie de COG a été semble-t-il envisagée dès 1984, alors que, selon le reporter du Boston Globe Ross Gelbspan :
Le lieutenant-colonel Oliver North travaillait avec des représentants de la FEMA […] pour dresser un plan de contingence secret visant à surveiller les dissidents politiques et à prendre des dispositions pour la détention de centaines de milliers d’étrangers sans papiers advenant une urgence nationale non spécifiée. Le plan, dont une partie portait le nom de code Rex 84, appelait à la suspension de la Constitution dans un certain nombre de scénarios, incluant une invasion étasunienne du Nicaragua [8].
Autrement dit, des mesures extrêmes, conçues à l’origine pour faire face à une attaque nucléaire dévastatrice venue de l’extérieur, étaient modifiées en secret par un groupe non gouvernemental pour faire face aux dissidents nationaux, une situation qui s’applique encore aujourd’hui [9].
L’implantation de COG le 11-Septembre
Manifestement, le 11-Septembre réunissait les conditions pour l’implantation des mesures de COG et nous savons que les plans de COG ont été mis en œuvre ce jour-là en 2001 avant que le dernier avion ne s’écrase en Pennsylvanie. Le rapport d’enquête sur le 11-Septembre le confirme à deux reprises aux pages 38 et 326 [10]. C’est sous les auspices de COG que Bush est demeuré hors de Washington ce jour-là et que d’autres leaders du gouvernement comme Paul Wolfowitz ont rapidement été évacués au site R, situé dans une montagne évidée près de Camp David [11]
Toutefois, l’implantation de COG est allée plus loin que les interventions à court-terme et jusqu’à l’installation de ce que la professeure Shirley Anne Warshaw appelle un « gouvernement fantôme » de substitution de 90 jours à l’extérieur de Washington.
Cheney s’est lancé dans l’action dans son bunker sous l’aile Est pour assurer la continuité du gouvernement. Il a aussitôt commencé à créer son gouvernement fantôme en ordonnant à cent fonctionnaires d’autorité de rang moyen de se rendre à des bunkers souterrains spécialement désignés et d’y rester 24 heures sur 24. Il les a informés qu’ils ne se feraient pas remplacer pendant 90 jours puisqu’il existait des preuves, a-t-il indiqué, que l’organisation terroriste Al-Qaïda, qui avait ourdi les attaques, possédait des armes nucléaires. Par conséquent, le gouvernement fantôme devait être prêt à prendre le contrôle du gouvernement à partir des bunkers [12].
Ces 90 jours on vu l’implantation rapide des caractéristiques clés que Gelbspan et Chardy ont attribuées à la planification de COG dans les années 1980 : les détentions sans mandat, les expulsions sans mandat et, leur complément logique, l’écoute clandestine sans mandat. L’exemple le plus évident fut le projet Endgame : un plan de 10 ans initié en septembre 2001 pour l’expansion des camps de détention au coût de 400 millions de dollars uniquement pour l’exercice financier de 2007 [13]. Cela a mis en œuvre le principal aspect de l’exercice de détention massive, Rex 84, mené par Louis Giuffrida et Oliver North en 1984.[14]
Il y a également eu une vague d’actions hâtives pour restructurer les États-Unis aux niveaux national et international et elles sont si nombreuses que je ne peux qu’en nommer que quelques-unes aujourd’hui. Avant tout je dois reconnaître l’évidence : des mesures accrues sont nécessaires pour faire face au terrorisme et nous devons tous être reconnaissants pour certaines d’entre elles. Toutefois nous devons également reconnaître que les réussites les plus significatives contre le terrorisme ont été réalisées par le renseignement traditionnel et le travail de la police. Pour ce qui est de la guerre au terrorisme, le plus important succès des 90 jours de Cheney, de nombreux experts ont soutenu qu’elle a créé bien plus de terroristes qu’elle n’en a éliminés.
Le 20 septembre 2001 Bush a lancé la guerre au terrorisme lors d’un discours télévisé à une session conjointe du Congrès en disant « notre « guerre au terrorisme » commence avec Al-Qaïda, mais elle ne s’arrête pas là. Elle ne s’arrêtera pas tant que tous les groupes terroristes d’ampleur mondiale aient été trouvés, arrêtés et vaincus ». Aujourd’hui, nous avons environ 100 000 troupes étasuniennes en Afghanistan pour faire face à 60 membres d’Al-Qaïda, selon une estimation officielle. Les résultats prévisibles ont été l’augmentation des activités terroristes en Somalie, au Yémen et surtout au Pakistan
La guerre au terrorisme a été mise en œuvre sur le plan administratif dans trois directives présidentielles en matière de sécurité nationale, NSPD 7, 8 et 9. Les trois sont classifiées et les sujets de deux d’entre elles sont inconnus. La troisième, NSPD 9, datée du 25 octobre 2001, ordonnait au secrétaire à la Défense de planifier des options militaires à la fois contre les talibans et contre des cibles en Afghanistan [15].
La date d’octobre est trompeuse. Une version de la directive appelant à une action clandestine en Afghanistan avait été approuvée par des directeurs le 4 septembre 2001, une semaine avant le 11-Septembre [16]. Un plan rehaussé pour une action militaire en Afghanistan avait été approuvée par Bush le 17 septembre et le même document « ordonnait au Pentagone de commencer à planifier des options militaires pour une invasion de l’Irak [17] ».
Le produit national probablement le plus significatif du trimester mirabilis de Cheney fut le Patriot Act du 25 octobre 2001. Le Congrès a eu une semaine pour adopter ce projet de loi de 340 pages, lequel, selon des chercheurs, « était déjà écrit et prêt bien avant le 11 septembre [18] ». En 2007, le département de la Justice a reconnu que des agents du FBI avait abusé du Patriot Act plus de 1000 fois.
Nous ne devons pas oublier que le Patriot Act a été adopté seulement après que des lettres d’anthrax, des armes fatales utilisables à des fins militaires, ont été postées à deux sénateurs démocrates cruciaux, les sénateurs Daschle et Leahy, qui avaient à l’origine remis le projet de loi en question. Cependant, après les lettres d’anthrax, ils ont retiré leur objection initiale [19]. Quelqu’un, on ne sait toujours pas qui, a dû planifier ces lettres d’anthrax très à l’avance [20]. Il s’agit d’un fait auquel la plupart des Étasuniens ne veulent pas penser.
Il est généralement admis que des trois hommes à l’autorité nationale de commandement le 11-Septembre, Cheney était l’idéologue le plus engagé à restaurer une présidence affaiblie par le Watergate [21]. Cheney avait déjà déclaré dans son rapport minoritaire de 1987 sur l’affaire Iran-Contra qu’il croyait que « le chef de l’exécutif se sent occasionnellement obligé de faire valoir des notions de prérogative monarchique qui lui permettront d’être au-dessus des lois [22]. En tant que vice-président, Cheney, avec son assistant David Addington et John Yoo, qu’il avait nommé, ont instauré l’appareil légal pour déclarer que le président avait, en vertu de la prérogative, le pouvoir de « déployer des forces militaires sur une base préemptive » et que « les Conventions de Genève et d’autres accords internationaux contre la torture » ne protègent pas les membres de l’organisation Al-Qaïda [23].
Avec le décret 13228 du 8 octobre 2001, le président a créé un Office of Homeland Security (bureau de la Sécurité intérieure) au sein du Bureau exécutif du président. Cela a engendré en retour le Department of Homeland Security (DHS) (département de la Sécurité intérieure), aujourd’hui le troisième département du Cabinet étasunien en termes de grandeur, ainsi qu’une série de directives présidentielles en matière de sécurité intérieure. Par exemple, la Homeland Security Presidential Directive-6 (directive présidentielle en matière de sécurité intérieure-6 ou HSPD-6) du 16 septembre 2003 a fondé un Terrorism Screening Center (TSC) (centre de détection du terrorisme), afin de « consolider l’approche gouvernementale de détection du terrorisme [24] ».
Depuis ce temps nous sommes devenus insensibles aux histoires répétées d’individus non violents que l’on empêche de monter à bord des avions parce que leurs noms sont dans des ordinateurs du TSC, sur la liste de personnes interdites de vol et la liste de surveillance du terrorisme. Le sénateur Ted Kennedy a témoigné devant le Congrès qu’il avait fréquemment été retardé dans des aéroports parce qu’un « T Kennedy » figurait sur la liste de personnes interdites de vol. Jusqu’en juillet 2008, Nelson Mandela était lui aussi sur cette liste. CBC News au Canada rapportait en 2008 qu’« un homme d’affaires québécois dont le nom […] figure sur la liste de surveillance des passagers d’avion a décidé de changer son nom pour éviter de longues complications dues à la sécurité dans les aéroports [25] ».
En plus de la liste de personnes interdites de vol, laquelle comptait 4000 noms en 2009 et en compte aujourd’hui 8000, on empêche certaines personnes de prendre l’avion parce qu’elles sont sur la liste de surveillance du terrorisme, une liste bien plus longue, qui contenait plus d’un million de noms à l’été 2010. C’est pour cette raison que Walter F. Murphy, un illustre professeur de droit constitutionnel, a été détenu en 2007 lors de son voyage pour donner une conférence portant ironiquement sur son livre « Constitutional Democracy » (La démocratie constitutionnelle). Selon le professeur Murphy, l’employé d’un transporteur aérien lui a demandé :
« Avez-vous participé à des manifestations pacifistes? Nous interdisons à bien des gens de prendre des vols pour cette raison » […] M. Murphy a dit : « J’ai expliqué que je n’avais pas vraiment manifesté, mais qu’en septembre 2006 j’avais donné une conférence à Princeton, télévisée et mise sur le web, et dans laquelle je critiquais sévèrement Georges Bush pour ses violations de la Constitution ». L’homme a répondu : « Ça fera l’affaire [26]. »
En bout de ligne, ces situations ont été réglées de façon satisfaisante, mais vous risquez l’expulsion permanente si vous avez un nom à consonance arabe. L’American Civil Liberties Union (ACLU) a intenté des poursuites au nom d’Ayman Latif, qui est non seulement citoyen étasunien, mais également vétéran de la Marine des États-Unis et qui, sous Obama, a été retenu en Égypte pendant des mois parce que, sur les ordres de l’ambassade étasunienne, il a été incapable de monter à bord d’un avion pour retourner à la maison.
Il s’agit d’une véritable situation difficile : M. Latif a déclaré à NPR : « [P]arce que j’ai raté un rendez-vous pour une évaluation [en tant qu’ancien combattant handicapé] aux États-Unis, le département des Anciens combattants (VA) affirme désormais qu’ils réduiront mes prestations à zéro. » À la même émission, Stewart Baker, ancien sous-secrétaire pour les politiques au département de la Sécurité intérieure a vigoureusement défendu la liste des personnes interdites de vol. Toutefois, lorsqu’on lui a demandé s’il existait « une autorité légale quelconque par laquelle les États-Unis peuvent dire à un citoyen à l’étranger qu’il ne peut pas revenir au pays », M. Baker a répondu : « Je n’en connais aucune [27]. » Cela n’avait pas l’air de le préoccuper.
Le cas d’Ayman Latif est loin d’être unique. Selon le New York Times :
Les groupes de revendication affirment qu’ils essaient d’aider les Étasuniens pris entre autres au Yémen, en Égypte, en Colombie et en Croatie. Selon ces groupes, au moins un Étasunien, Raymond Earl Knaeble IV, qui a étudié au Yémen et est maintenant en Colombie, a été renvoyé en Colombie par les autorités mexicaines après avoir tenté de traverser la frontière pour entrer aux États-Unis [28].
La militarisation de l’application de la loi
La militarisation de l’application de la loi des États-Unis au niveau national en 2002 sous un nouveau commandement militaire, NORTHCOM, constitue une autre innovation post-11-Septembre issue des plans de COG de Giuffrida et Oliver North [29]. Par le biais de NORTHCOM, l’Armée étasunienne se livre désormais à la surveillance et à la planification du contre-terrorisme des États-Unis, auprès des organismes locaux d’exécution de la loi, tout comme elle le fait à travers CENTCOM auprès des organismes locaux d’exécution de la loi pour maintenir l’ordre en Irak. Certes, les pelotons de l’armée ne patrouillent pas dans les rues et ne brisent pas les portes des maisons, comme ils le font en Irak et en Afghanistan. Mais dans les coulisses, dans les soi-disant centres de fusion, l’armée, le FBI, la police d’État, avec des entreprises privées de renseignements comme SAIC, entretiennent et analysent des données pour identifier les menaces potentielles pour les gens au pouvoir [30].
Ces centres de fusion « ont été encouragés à l’interne par l’armée étasunienne comme moyen d’éviter les restrictions empêchant l’armée d’espionner la population des États-Unis [31] ». Autrement dit, des arrangements administratifs ont été utilisés pour mener à bien les plans de Giuffrida visant à contourner les Posse Comitatus Acts dans les recueils de lois sans les abroger.
La proclamation d’urgences permanentes
Finalement, toujours durant le trimestre du « gouvernement fantôme » post-11-Septembre, le président Bush a proclamé deux urgences permanentes toujours en vigueur.
1) Le 14 septembre 2001, Bush a émis la Proclamation 7463 « Declaration of National Emergency by Reason of Certain Terrorist Attacks » (Déclaration d’urgence nationale en raison de certaines attaques terroristes), ainsi que le décret 13223 Ordering the Ready Reserve of the Armed Forces To Active Duty (Ordre de service actif aux forces opérationnelles d’appoint des Forces armées). Comme nous le verrons plus loin, les conditions de cette proclamation ont été significativement élargies lors de son renouvellement en 2007.
2) « Le 23 septembre 2001, par le décret 13224, le président a déclaré une urgence nationale en ce qui concerne les personnes qui commettent, menacent de commettre ou soutiennent des actes terroristes en vertu de l’International Emergency Economic Powers Act (50 U.S.C. 1701-1706) [32]. Cela a conféré au président le pouvoir de confisquer, sans procès ni avertissement, les biens d’individus fournissant des fonds à des organismes, comme des organisations caritatives, accusés de soutenir le terrorisme. Le décret a initialement gelé les avoirs de 27 terroristes désignés, mais la liste est devenue immense. La dernière fois que je l’ai regardée, le 18 novembre 2010, la liste comprenait 87 pages uniquement pour la lettre A.
Une poursuite a été intentée, soutenant que la désignation de terroriste présumé était arbitraire, et un tribunal inférieur a convenu que l’autorité de désignation du président est inconstitutionnellement vague [33]. L’affaire est en appel.
Cheney et Rumsfeld au comité secret pour planifier le COG
Depuis ses débuts en 1982, Dick Cheney et Donald Rumsfeld ont été deux des planificateurs clés au comité secret de planification de COG, les deux mêmes hommes qui ont implanté le COG le 11-Septembre [34]. Le comité avait été formé par Reagan en vertu d’un décret secret (NSDD 55, du 14 septembre 1982). Malgré ce que Weiner laissait entendre, le comité a continué à se réunir sans interruption jusqu’à la présidence de George W. Bush en 2001 [35].
Ainsi, Cheney et Rumsfeld ont poursuivi leur planification secrète lorsque Clinton était président, même lorsque les deux hommes, tous deux républicains, étaient à la tête de grandes entreprises à l’époque, non pas au sein du gouvernement. En outre, Andrew Cockburn affirme que l’administration Clinton, selon une source du Pentagone, n’avait « aucune idée de ce qui se passait ».
Néanmoins, les exercices se sont poursuivis, avec des dépenses budgétaires toujours au-delà de 200 millions de dollars par an à l’époque de Clinton et les Soviétiques disparus ont alors été remplacés par des terroristes. Il y a eu aussi d’autres changements. Au début, les spécialistes sélectionnés pour diriger le « gouvernement fantôme » avait été choisis parmi l’éventail politique, chez les républicains comme chez les démocrates. Mais à cette époque-ci, dans les bunkers, Rumsfeld s’est retrouvé en compagnie politiquement agréable, la liste des joueurs étant remplie presque exclusivement de faucons républicains. « On pourrait dire qu’il s’agissait d’un gouvernement secret en attente. L’administration Clinton était extraordinairement inattentive, [ses représentants n’avaient] aucune idée de ce qui se passait [36]. »
Le compte-rendu de Cockburn exige certaines réserves. Richard Clarke, un démocrate de l’équipe Clinton, fait comprendre clairement qu’il a participé au programme COG dans les années 1990 et a effectivement fait l’ébauche de la Presidential Decision Directive 67 (directive présidentielle ou PDD 67) concernant « Enduring Constitutional Government and Continuity of Government » (Stabilité du gouvernement constitutionnel et continuité du gouvernement) [37]. Mais la planification de COG impliquait différentes équipes pour divers objectifs. Il est fort probable que l’officiel du Pentagone décrivait l’équipe du département de la Défense chargée des mesures de rétorsion.
Il est important de comprendre que le « Projet fin du monde » dans les années 1980 impliquait plus que de la planification et des exercices. Il supervisait le « Projet 908 », soit la construction d’une infrastructure de plusieurs milliards de dollars pour un gouvernement de substitution. L’élément central de ce projet était un programme de communications et logistiques de 8 milliards de dollars basé à Fort Huachuca en Arizona, le quartier général du service de renseignements de l’armée [38].
Le Projet 908 a attiré l’attention de Steve Emerson et d’autres journalistes en 1989, lorsque l’on a dévoilé d’énormes surcharges, de la double facturation pour le même travail et la destruction par la suite de bien des dossiers contractuels clés au cours d’un enquête de l’armée. Le fils du général qui supervisait le projet, l’ancien député au Congrès Rick Renzi a finalement été formellement accusé en 2008 d’extorsion, de fraude, de blanchiment d’argent et d’autres crimes [39].
Toutefois, en dépit des échecs initiaux dans le réseau de communications, le projet était prêt à être mis en opération et utilisé le 11 septembre 2001 par le vice-président Cheney [40]. Des ordres cruciaux semblent avoir été donnés sur ce réseau de sécurité de classification supérieure, comprenant l’implantation même du COG [41]. Cela pourrait expliquer pourquoi un Boeing E-4B Advanced Airborne Command Post (Poste de commandement aérien avancé) ou l’« avion de fin du monde », le centre de communications mobile du gouvernement fantôme du COG, a été vu vers 10h du matin dans l’espace aérien interdit au dessus de la Maison-Blanche [42].
Il n’existe aucun moyen de déterminer combien de changements constitutionnels depuis le 11-Septembre peuvent remonter jusqu’à la planification de COG. Nous savons cependant que de nouvelles mesures [43]de planification de COG étaient encore instaurées en 2007 lorsque le président Bush a émis la National Security Presidential Directive 51 (directive présidentielle ou NSPD-51/HSPD-20). Cette directive a formulé ce que FEMA a appelé ultérieurement « une nouvelle vision pour assurer la continuité de notre gouvernement » et a été suivie en août par un nouveau National Continuity Policy Implementation Plan (Plan d’implantation de la politique de continuité nationale) [44]. NSPD-51 a également invalidé PDD 67, la directive de COG de la décennie précédente élaborée par Richard Clark, et faisait référence à de nouvelles « annexes classifiées sur la continuité », lesquelles doivent « être protégées contre toute divulgation non autorisée ».
Sous la pression de ses constituants pour la vérité sur le 11 septembre, le député au Congrès Peter DeFazio du Homeland Security Committee (Comité de la Sécurité intérieure) a demandé à voir ces annexes à deux reprises. Sa demande a été rejetée la première fois. DeFazio a alors fait une deuxième requête, dans une lettre signée par le président de son comité. La demande a été à nouveau rejetée [45].
COG, l’urgence nationale et le National Emergencies Act
J’ai mentionné plus tôt que la Proclamation d’une urgence nationale, émise par Bush le 14 septembre 2001 et renouvelée annuellement depuis, a significativement changé en 2007. Tous les renouvellements annuels énuméraient les mesures d’urgence renouvelées, par exemple, « les mesures prises le 14 septembre 2001, le 16 novembre 2001 et le 16 janvier 2002 ». Après que Bush ait émis la directive NSPD-51 en 2007, avec sa « nouvelle vision » et ses nouvelles annexes classifiées sur le COG, dans le renouvellement suivant de la Proclamation d’urgence les énumérations spécifiques précédentes ont été remplacées par une phrase plus générale et d’une portée considérable :
Puisque la menace terroriste persiste, l’urgence nationale déclarée le 14 septembre 2001, prolongée pour la dernière fois le 5 septembre 2006, ainsi que les pouvoirs adoptés pour faire face à cette urgence doivent demeurer en vigueur après le 14 septembre 2007 [46].
« Les pouvoirs adoptés pour faire face à cette urgence » : ce langage est si vague, il est difficile de voir comment il ne pourrait pas également englober les « annexes classifiées sur la continuité » de la NSPD-51. Si c’est le cas, la proclamation publique proclamait alors la continuité d’un secret. (Les deux renouvellements de l’urgence par Barack Obama ne répètent pas ce langage de 2007, mais omettent de la même manière d’énumérer précisément quels pouvoirs sont accrus [47]).
Le National Emergencies Act, l’une des réformes post-Watergate que le vice-président Cheney abhorrait tant, spécifie : « Dans les six mois suivant la déclaration d’une urgence nationale et au plus tard à la fin de la période de six mois durant laquelle une telle urgence demeure, chaque chambre du Congrès doit se réunir pour envisager un vote sur une résolution conjointe afin de déterminer si l’on doit mettre un terme à cette urgence » (50 U.S.C. 1622, 2002) [48]. La loi ne permet pas au Congrès de réexaminer une urgence : il exige que le Congrès la réexamine.
Pourtant, en neuf ans, le Congrès ne s’est pas réuni une seule fois pour discuter de l’état d’urgence déclaré par George W. Bush en réaction au 11-Septembre, un état d’urgence qui demeure en vigueur aujourd’hui. Les appels au Congrès pour qu’il assume ses responsabilités de réexaminer le COG n’ont pas trouvé d’écho, même si le Congrès est maintenant dominé par des démocrates [49].
En 2009, l’ancien député au Congrès Dan Hamburg et moi avons fait appel publiquement à la fois au président Obama pour qu’il mette un terme à cette urgence et au Congrès pour qu’il tienne les audiences que le statut attend d’eux [50]. Mais Obama, sans discuter, a prolongé à nouveau l’urgence du 11-Septembre le 10 septembre 2009 [51] et une fois encore l’année suivante [52]. Entre-temps, le Congrès a continué d’ignorer ses obligations statutaires.
Un député du Congrès a expliqué à un constituant que les provisions du National Emergencies Act ont maintenant été rendues inopérantes par le COG. Si c’est vrai, cela indiquerait que le système constitutionnel de freins et contrepoids ne s’applique plus et que les décrets secrets priment dorénavant sur la législation publique.
Naturellement, bien des gens on tendance à réprimer les faits extraordinaires que Cheney et Rumsfeld ont pu :
1) aider à planifier avec succès des modifications constitutionnelles alors qu’ils n’étaient pas membres du gouvernement et;
2) implanter eux-mêmes ces changements lorsqu’ils étaient de retour au pouvoir.
Le premier de ces faits nous donne un aperçu d’une sphère de pouvoir perpétuelle et indépendante de l’État reconnu publiquement. Dans les termes de James Mann, « dans un sens, Cheney et Rumsfeld faisaient partie de l’appareil de sécurité nationale permanent, quoique caché, des États-Unis et étaient des habitants d’un monde dans lequel les président vont et viennent, mais où les États-Unis continuent de se battre [53] ». Une évaluation des planificateurs de COG par une affectation spéciale de CNN était encore plus dramatique : « Aux États-Unis d’Amérique, il existe un gouvernement caché à propos duquel vous ne savez rien [54]. »
Quelle est la première étape pour sortir de l’état actuel des choses, où la Constitution semble avoir été supplantée par une autorité supérieure, bien que moins légitime? Je suggère qu’elle amène le Congrès à faire ce que la loi exige et déterminer si l’on « doit mettre un terme » à notre actuelle proclamation d’urgence (50 U.S.C. 1622, 2002).
Dans le cadre de cette procédure, le Congrès doit savoir si des pouvoirs secrets du COG, jamais présentés au Congrès, ni vus par ce dernier, se trouvent parmi « les pouvoirs » que Bush a inclus en 2007 dans sa prolongation de l’urgence de 2001.
Il ne s’agit pas d’un détail technique ou de procédure. Il s’agit d’un test visant à savoir si les États-Unis sont un pays toujours gouverné par ses lois et sa Constitution ou, comme cela a été allégué, si les lois et la Constitution ont été par endroits supplantées par le COG.
Et espérons que le Congrès observerait les activités des 90 jours du gouvernement fantôme de Cheney en 2001 ainsi que leurs liens avec la genèse du Patriot Act, le programme de dix ans des camps de détention et la militarisation permanente des lois nationales d’exécution de la loi.
Texte original en anglais, Continuity of Government: Is the State of Emergency Superseding our Constitution? Beyond COG: The Implementation of a Shadow Government on 9/11, publié le 24 novembre 2010.
Traduit par Julie Lévesque pour Mondialisation.ca.
Peter Dale Scott est docteur en sciences politiques et ancien diplomate canadien. American War Machine : Deep Politics, the CIA Global Drug Connection, and the Road to Afghanistan est le dernier livre de Peter Dale Scott récemment publié chez Rowman & Littlefield. On compte parmi ses livres précédents, Drugs Oil and War, The Road to 9/11, and The War Conspiracy: JFK, 9/11, and the Deep Politics of War. Son site web est http://www.peterdalescott.net. En français : La Route vers le Nouveau Désordre Mondial, 50 ans d’ambitions secrètes des États-Unis, éditions Demi Lune.
Notes (en anglais)
[1] New York Times, July 14, 1987. We have never heard if there was or was not an executive session, or if the rest of Congress was ever aware of the matter. According to James Bamford, “The existence of the secret government was so closely held that Congress was completely bypassed. Rather than through legislation, it was created by Top Secret presidential fiat. In fact, Congress would have no role in the new wartime administration. ‘One of the awkward questions we faced,’ said one of the participants, ‘was whether to reconstitute Congress after a nuclear attack. It was decided that no, it would be easier to operate without them.’” (James Bamford, A Pretext for War: 9/11, Iraq, and the Abuse of America’s Intelligence Agencies [New York: Doubleday, 2004], 74); cf. James Mann, The Rise of the Vulcans: The History of Bush’s War Cabinet [New York: Viking, 2004], 145). But key individuals in Congress were, such as Sen. Inouye of the Senate Intelligence Committee, were certainly aware of something.
[2] Miami Herald, July 5, 1987. In October 1984 Jack Anderson reported that FEMA’s plans would “suspend the Constitution and the Bill of Rights, effectively eliminate private property, abolish free enterprise, and generally clamp Americans in a totalitarian vise.”
[3] Diana Reynolds, The Rise of the National Security State: FEMA and the NSC, Political Research Associates, http://www.publiceye.org/liberty/fema/Fema_2.html, Covert Action Information Bulletin, #33 (Winter 1990). “Earlier, Governor Reagan in California had authorized the development of a counterinsurgency plan (known as Cable Splicer) and exercises to deal with such crises, in conjunction with the U.S. Sixth Army and the Pentagon (Operation Garden Plot). The cadres developing Cable Splicer (headed by Louis Giuffrida), were with Reagan’s elevation to the presidency transferred into FEMA. As head of FEMA, Giuffrida pursued plans for massive detention of dissidents; these became so extreme that even Reagan’s attorney general, William French Smith, raised objections” (Scott, The Road to 9/11, 184; citing Gelbspan,Break-ins, 184).
[4] Tim Weiner, New York Times, April 17, 1994.
[5] Bamford, A Pretext for War, 74; cf. James Mann, The Rise of the Vulcans: The History of Bush’s War Cabinet (New York: Viking, 2004), 138-45.
[6] Tim Shorrock, Spies for hire: the secret world of intelligence outsourcing (New York : Simon & Schuster, 2008)., 78; Shirley Anne Warshaw, The co-presidency of Bush and Cheney (Stanford, Calif. : Stanford Politics and Policy, 2009), 162
[7] The provisions of Executive Order 12656 of Nov. 18, 1988, appear at 53 FR 47491, 3 CFR, 1988 Comp., p. 585, http://www.archives.gov/federal-register/codification/executive-order/12656.html. The Washington Post (March 1, 2002) later claimed, falsely, that Executive Order 12656 dealt only with “a nuclear attack.” Earlier there was a similar misrepresentation in the New York Times (November 18, 1991).
[8] Ross Gelbspan, Break-ins, Death Threats, and the FBI (Boston: South End Press, 1991), 184; cf. New York Times, November 18, 1991. REX 84 (short for Readiness Exercise 84) turned out to be part of a series of such exercises (now known as Continuity of Operations Exercises) that have continued under FEMA down into the Obama era. See for example the Department of Homeland Press Release, “DHS Conducts Continuity of Operations Exercise,” June 17, 2009, http://www.dhs.gov/ynews/releases/pr_1245258718688.shtm .
[9] In stressing the alteration to our present political milieu by an extra-governmental group, I do not intend to exonerate Congress. In 1981 Congress passed the Military Cooperation with Civilian Law Enforcement Agencies Act. According to a brilliant and prescient essay written by an Air Force Colonel at the National War College, the Act “was specifically intended to force reluctant military commanders to actively collaborate in police work” (Air Force Lt. Col. Charles E. Dunlap, “The Origins of the American Military Coup of 2012;” quoted in Harry G. Summers, The new world strategy : a military policy for America’s future (New York: Simon & Schuster, 1995), 195.
[10] 9/11 Commission Report, 38, 326; Peter Dale Scott, The Road to 9/11: Wealth, Empire, and the Future of America (Berkeley and Los Angeles: University of California Press, 2007), 228-29.
[11] Alfred Goldberg et al., Pentagon 9/11 (Washington: Department of Defense, 2007), 132.
[12] Warshaw, The co-presidency of Bush and Cheney, 164-65; cf. Washington Post, March 1, 2002; Scott, Road to 9/11, 237. Warshaw took the characterization of “shadow government” from earlier reports by U.S. News and World Report in 1989, and CNN in 1991 (Warshaw, 162).
[13] Scott, Road to 9/11, 238, 240-41.
[14] “The exercise anticipated civil disturbances, major demonstrations and strikes that would affect continuity of government and/or resource mobilization. To fight subversive activities, there was authorization for the military to implement government ordered movements of civilian populations at state and regional levels, the arrest of certain unidentified segments of the population, and the imposition of martial rule” (Diana Reynolds, “The Rise of the National Security State: FEMA and the NSC,” Political Research Associates, http://www.publiceye.org/liberty/fema/Fema_3.html,Covert Action Information Bulletin, #33 (Winter 1990).
[15] “NSPD-9: Combating Terrorism,” Federation of American Scientists,” http://www.fas.org/irp/offdocs/nspd/nspd-9.htm: “On April 1, 2004, the White House released the following characterization of this otherwise classified document: “The NSPD called on the Secretary of Defense to plan for military options ‘against Taliban targets in Afghanistan, including leadership, command-control, air and air defense, ground forces, and logistics.’ The NSPD also called for plans ‘against al Qaeda and associated terrorist facilities in Afghanistan, including leadership, command-control-communications, training, and logistics facilities.’ »
[16] “NSPD-9: Combating Terrorism,” Federation of American Scientists,” http://www.fas.org/irp/offdocs/nspd/nspd-9.htm; citing testimony of Donald Rumsfeld before 9/11 Commission, March 23, 2304. Cf. Richard Clarke, Against All Enemies, 237-38; Steve Coll, Ghost Wars (New York: Penguin, 2004), 574-76; 9/11 Commission Report, 212-14. A draft of the presidential directive had originally been circulated in June 2001 (9/11 Commission Report, 208). But the directive approved on September 4 was for covert action only (9/11 Commission Report, 213).
[17] James Bamford, A Pretext for War, 287.
[18] Jennifer Van Bergen, “The USA PATRIOT Act Was Planned Before 9/11,”Truthout.org, May 20, 2002, http://www.globalissues.org/article/342/the-usa-patriot-act-was-planned-before-911. Van Bergen notes a parallel with the Patriot Act’s predecessor, the Antiterrorism Act of 1996: “James X. Dempsey and David Cole state in their book, ‘Terrorism & the Constitution: Sacrificing Civil Liberties in the Name of National Security,’ that the most troubling provisions of the pre-USAPA anti-terrorism laws, enacted in 1996 and expanded now by the USAPA, ‘were developed long before the bombings [i.e. the Oklahoma bombing of 1995] that triggered their final enactment.’ »
[19] Cf. Time, Nov. 26, 2001: « While Daschle, the Senate majority leader, could have been chosen as a representative of all Democrats or of the entire Senate, Leahy is a less obvious choice, most likely targeted for a specific reason. He is head of the Senate Judiciary Committee, which is involved in issues ranging from antitrust action to antiterror legislation” [emphasis added]. See also Anthony York, “Why Daschle and Leahy?” Salon, November 21, 2001, http://dir.salon.com/story/politics/feature/2001/11/21/anthrax/index.html.
[20] We should not forget either that some government experts initially blamed the attacks on Iraq. Much later, referring to Fort Detrick, Salon reporter Glenn Greenwald pointed out that “the same Government lab where the anthrax attacks themselves came from was the same place where the false reports originated that blamed those attacks on Iraq.”
[21] Lew Dubose and Jake Bernstein, Vice: Dick Cheney and the Hijacking of the American Presidency (New York: Random House, 2006), 28: “Dick Cheney…would spend the rest of his career working to restore the Nixon vision of an all-powerful executive, by undoing the Watergate reforms that came out of the early seventies.”
[22] Schwarz and Huq, Unchecked and Unbalanced, 174; emphasis added.
[23] Lew Dubose and Jake Bernstein, Vice: Dick Cheney and the Hijacking of the American Presidency (New York: Random House, 2006), 187-90; citing John Yoo memos of September 25, 2001 (“deploy”) and January 2002 (“do not protect”).
[24] Department of Justice, “Review of the Terrorist Screening Center,” www.justice.gov/oig/reports/FBI/a0527/final.pdf.
[25] “Quebec man changes name to dodge relentless airport screening,” CBC News, September 11, 2008.
[26] Naomi Wolf, “Fascist America,” Guardian (London), April 24, 2007, http://www.guardian.co.uk/world/2007/apr/24/usa.comment.
[27] “Former U.S. Marine Placed On ‘No Fly’ List, Sues FBI,” NPR, August 5, 2010, http://www.npr.org/templates/story/story.php?storyId=129002767. Even my two-year old grandson and his family were taken aside for special questioning at the airport, because of0 his middle name, Yusuf.
[28] Scott Shane, “American Man in Limbo on No-Fly List,” New York Times, June 16, 2010, http://www.nytimes.com/2010/06/16/world/middleeast/16yemen.html .
[29] U.S. Department of Defense, “U.S. Northern Command,”http://www.globalsecurity.org/military/agency/dod/northcom.htm. Cf. John R. Brinkerhoff, PBS, Online Newshour, 9/27/02: “The United States itself is now for the first time since the War of 1812 a theater of war. That means that we should apply, in my view, the same kind of command structure in the United States that we apply in other theaters of war.” Brinkerhoff had earlier developed the martial law provisions of REX 84 in the Reagan era.
[30] Shorrock, Spies for Hire, 344.
[31] Julian Assange, “The spy who billed me twice,” Wikileaks, http://wikileaks.org/wiki/The_spy_who_billed_me_twice. The March 2009 Army manual “US Army Concept of Operations for Police Intelligence Operations” contains phrases such as « It [fusion] does not have constraints that are emplaced on MI [Military Intelligence] activities within the US, because it operates under the auspice and oversight of the police discipline and standards. »
[32] “Notice-Continuation of the National Emergency With Respect to Persons Who Commit, Threaten To Commit, or Support Terrorism,” Daily Compilation Of Presidential Documents” (“Author: Obama, Barack H”), September 16, 2010, http://www.faqs.org/periodicals/201009/2184118701.html.
[33] Humanitarian Law Project v. United States Department of Treasury.
[34] Scott, The Road to 9/11: Wealth, Empire, and the Future of America (Berkeley and Los Angeles: University of California Press, 2007), 183-87.
[35] Mann, Rise of the Vulcans, 142 (order); (Boulder, CO: Westview Press), pp. 59, 71, 102-104, and 158-178 (NSDD 55); Andrew Cockburn, Rumsfeld: His Rise, Fall, and Catastrophic Legacy (New York: Scribner, 2007), 88 (2001).
[36] Andrew Cockburn, Rumsfeld: His Rise, Fall, and Catastrophic Legacy (New York: Scribner, 2007), 88.
[37] Richard A. Clarke, Against All Enemies: Inside America’s War on Terrorism (New York: Simon & Schuster, 2004), 8, 165-75.
[38] Shorrock, Spies for hire,72-75. Warshaw and others have referred to the whole COG operation as “Project 908;” but on the basis of available evidence I believe that Project 908 was the construction program only, as opposed to the planning and exercises which also took place.
[39] Shorrock, Spies for hire, 292-96; Steven Emerson, “America’s Doomsday Project,” U.S. News & World Report, August 7, 1989, 26-31. As of this writing, Rick Renzi’s trial, which was scheduled to begin in March 2010, “has been postponed indefinitely” (Arizona Republic, March 16, 2010,http://www.azcentral.com/news/articles/2010/03/16/20100316renzi0316.html). Earlier secrecy had also led to scandalous budget abuses at FEMA, the COG support agency, leading to the forced resignation of FEMA director Louis Giuffrida in September 1985 [
Christopher Cooper and Robert Block. Disaster: Hurricane Katrina and the failure of Homeland Security (New York: Times Books, 2006], 54).
[40] See e.g. Richard A. Clarke, Against All Enemies, 91.
[41] See discussion in Scott, Road to 9/11, 223-36. There were reports that when Bush was airborne in Air force One on 9/11, there were connectivity problems forcing the president to use an ordinary cell phone (Paul Thompson, The Terror Timeline: Year by Year, Day by Day, Minute by Minute[NewYork: HarperCollins/Regan Books, 2004], 437). This may help explain why Air Force One eventually flew to Offutt Air Force Base near Omaha, where the E4-B “Doomsday Planes” are based.
[42] CNN, September 11, 2007, http://www.youtube.com/watch?v=UgF9Fd4UyMY. On the CNN show 9/11 Commission Co-chair Lee Hamilton said he had a vague memory of the mystery plane story, but that it was never discussed by the 9/11 Commission. CNN promptly withdrew its 9/11 E-4B story from its website (“CNN Pulls 9/11 E4B ‘Doomsday’ Plane Video Over White House,” digg, September 13, 2007,
[44] Federal Emergency Management Agency, Federal Continuity Directive 1, http://fema.gov/pdf/about/offices/fcd1.pdf .
[45] Dennis Kucinich, David Swanson, Elizabeth De La Vega, The 35 Articles of Impeachment and the Case for Prosecuting George W. Bush ([Port Townsend, Wash.] : Feral House, [2008]), 81; Peter Dale Scott, “Congress, the Bush Administration and Continuity of Government Planning: The Showdown,” CounterPunch, March 31, 2008, http://www.counterpunch.org/scott03312008.html.
[46]“Notice: Continuation of the National Emergency with Respect to Certain Terrorist Attacks,” Federal Register, September 12, 2007,www.uheaa.org/pdfs/PresidentialNotice091207.pdf, emphasis added.
[47] “Notice from the President on the Continuation of the National Emergency with Respect to Certain Terrorist Attacks:….Consistent with section 202(d) of the National Emergencies Act, 50 U.S.C. 1622(d), I am continuing for 1 year the national emergency previously declared on September 14, 2001, in Proclamation 7463, with respect to the terrorist attacks of September 11, 2001, and the continuing and immediate threat of further attacks on the United States. Because the terrorist threat continues, the national emergency declared on September 14, 2001, and the powers and authorities adopted to deal with that emergency must continue in effect beyond September 14, 2010. Therefore, I am continuing in effect for an additional year the national emergency that was declared on September 14, 2001, with respect to the terrorist threat.
This notice shall be published in the Federal Register and transmitted to the Congress.
BARACK OBAMA, THE WHITE HOUSE, September 10, 2010.” (http://www.whitehouse.gov/the-press-office/2010/09/10/notice-president-continuation-national-emergency-with-respect-certain-te )
[48] This language overruled the specification in President Ford’s Executive Order 11921 the same year, that, when a state of emergency was declared by the President, Congress could not review the matter for a period of six months.
[49] Cf. Peter Dale Scott and Dam Hamburg, “To All Readers: Help Force Congress To Observe the Law on National Emergencies!!!,” 911Truth.org, March 24, 2009, http://www.911truth.org/article.php?story=20090324183053848).
[50] Peter Dale Scott, « To All Readers: Help Force Congress To Observe the Law on National Emergencies!!! » (with Dan Hamburg), http://www.truth.org , March 24, 2009, http://www.911truth.org/article.php?story=20090324183053848#r7 .
[51] White House Press Release, September 10, 2009, http://www.whitehouse.gov/the_press_office/Notice-of-continuation-from-the-president-regarding-the-emergency-declared-with-respect-to-the-September-11-2001-terrorist-attacks/. A press briefing by Obama’s spokesman Robert Gibbs the same day did not mention the extension.
[52] White House Press Release, September 10, 2010, http://www.whitehouse.gov/the-press-office/2010/09/10/letter-president-continuation-national-emergency-with-respect-certain-terrorist-attacks.
[53] James Mann, Rise of the Vulcans, 145.
[54] CNN Special Assignment, November 17, 1991.