La diatribe fasciste de Trump aux Nations-Unies

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Lors de sa deuxième intervention devant l’assemblée générale des Nations Unies mardi, le président américain Donald Trump a prononcé une diatribe fasciste, brandissant la menace de l’agression militaire et de la guerre commerciale totale tout en invoquant le nationalisme rétrograde, la «souveraineté» et le «patriotisme» comme les seules solutions aux problèmes immenses auxquels l’humanité est confrontée.

Il y a un an, le président américain avait choqué l’ONU en annonçant qu’il était «prêt, disposé et capable» de «détruire totalement » la Corée du Nord et ses 25 millions d’habitants, tout en affublant le dirigeant du pays Kim Jong-un du sobriquet imbécile de « Rocket Man ».

Cette fois-ci, la réaction à ses remarques mégalomanes fut quelque peu différente, et elle exprimait, à sa manière, l’effondrement en profondeur de l’ordre capitaliste mondial.

Le discours de Trump a commencé par ce qui revenait à un discours électoral devant l’organisation mondiale, affirmant avoir fait des «progrès extraordinaires» dans l’année écoulée depuis sa dernière apparition. Lorsqu’il s’est vanté d’avoir accompli plus dans son mandat que «presque toute administration dans l’histoire de notre pays», cela provoqué un rire spontané de dérision chez les diplomates et chefs d’État réunis, l’obligeant à s’écarter du texte préparé et admettre qu’il « ne s’attendait pas à cette réaction ».

Cette «réaction» soulignait la reconnaissance quasi universelle que les États-Unis ne sont plus les garants d’un ordre capitaliste mondial, mais plutôt une sorte d’État voyou qui répand le chaos et la désorganisation dans le monde, tant militairement qu’économiquement. Trump n’est pas la cause de cette transformation, mais plutôt la personnification de la dégénérescence prolongée du capitalisme américain sur plusieurs décennies.

Dans son discours, Trump s’est réjoui de la répudiation par son gouvernement d’institutions internationales allant du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, que les États-Unis sont le premier pays à quitter, à la Cour pénale internationale que Washington a menacé de sanctions si elle tient responsables de crimes de guerre des responsables américains, en passant par une dénonciation du pacte mondial des Nations unies sur la migration, qui met en cause la persécution systématique des immigrants et des réfugiés par son administration.

Sans se laisser décourager par la dérision qui a salué l’ouverture de son discours, Trump a poursuivi en expliquant ses mesures de «progrès». Il souligna que « le marché boursier américain atteint son plus haut niveau », pointa « les plus grandes réductions d’impôts » dans l’histoire américaine, le début de la construction d’un mur frontalier et la promulgation d’une loi de 716 milliards de dollars de dépenses militaires – autant d’exemples de l’inégalité sociale massive, de la répression policière et du militarisme débridé qui caractérisent une société capitaliste américaine en crise.

Il affirma que ses négociations avec le dirigeant nord-coréen Kim avaient remplacé «le spectre de conflit par un nouvel élan audacieux pour la paix», rappelant que les sanctions américaines resteraient en vigueur jusqu’à ce que la dénucléarisation selon Washington soit achevée, un processus qui peut rapidement revenir à l’affrontement militaire sur la péninsule coréenne.

Trump a réservé ses menaces les plus belliqueuses pour l’Iran. Il s’est vanté de sa décision d’abroger unilatéralement l’accord nucléaire de 2015 entre l’Iran et le P5 + 1, les États-Unis et les autres membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies ainsi que l’Allemagne. Cette action, en violation directe du droit international, a entraîné la réimposition de sanctions unilatérales punitives revenant à un état de guerre entre Washington et Téhéran.

Des sanctions plus sévères devraient entrer en vigueur le 5 novembre, notamment la tentative d’imposer un embargo total sur les exportations de pétrole iranien et l’exclusion de l’Iran du système bancaire international dominé par les États-Unis, visant à paralyser l’économie du pays, renverser le régime existant et créer un État client qui assurerait un contrôle sans entrave de la richesse pétrolière du pays par les conglomérats énergétiques basés aux États-Unis.

Trump a fait une dénonciation virulente des dirigeants iraniens, déclarant qu’ils: «sèment le chaos, la mort et la destruction. Ils ne respectent pas leurs voisins ni leurs frontières, ni les droits souverains des nations. Au lieu de cela, les dirigeants iraniens pillent les ressources de la nation pour s’enrichir et répandre le chaos à travers le Moyen-Orient et bien au-delà.

«Le peuple iranien est à juste titre indigné que ses dirigeants aient détourné des milliards de dollars du trésor iranien, accaparé des parties précieuses de l’économie et pillé les dotations religieuses du peuple, le tout pour remplir leurs poches et envoyer leurs mandataires pour faire la guerre. Pas bon. »

Très peu de ces passages doivent être changés, à part substituer États-Unis à Iran, pour avoir une description exacte de la domination des États-Unis par un gouvernement représentant Wall Street et l’appareil militaire, qui a mené des guerres d’agression illégales au Moyen-Orient ayant tué et mutilé des millions de personnes et a armé et financé des milices liées à Al-Qaïda pour mener des opérations de changement de régime. À l’intérieur, l’oligarchie financière américaine a «pillé» la richesse sociale du pays pour compenser les pertes subies lors de la crise financière de 2008, à hauteur de dizaines de milliers de milliards de dollars.

Dans son propre discours à l’assemblée des Nations Unies, le président iranien Hassan Rouhani a accusé Washington de mener «une forme de terrorisme économique» contre l’Iran et de mener une politique étrangère fondée sur le principe de ‘la loi du plus fort’ conduisant à une pratique d’intimidation et d’imposition »

Rouhani a rejeté les ouvertures de Washington pour des négociations visant à renégocier l’accord nucléaire iranien. «Il est ironique que le gouvernement américain ne cache même pas son plan de renversement du même gouvernement qu’il invite à des pourparlers! », a-t-il dit Trump a également dénoncé la Syrie, réitérant les menaces américaines d’intervention militaire en réponse à une utilisation d’armes chimiques – une invitation aux milices islamistes soutenues par l’Occident à organiser un tel incident – tout en réitérant l’exigence de changement de régime de Washington.

Le président américain a réaffirmé la doctrine de Monroe, utilisée depuis des siècles pour affirmer l’hégémonie américaine sur l’Amérique latine, déclarant «nous rejetons l’ingérence des nations étrangères dans notre hémisphère et dans nos propres affaires». La référence pointait clairement l’investissement chinois croissant dans la région. Il a également réaffirmé l’objectif de Washington d’un changement de régime au Venezuela, qui, comme l’a clairement indiqué son administration, n’exclut pas une intervention militaire directe des États-Unis.

Le discours de Trump comprenait une dénonciation belliqueuse de la Chine et un éloge des 250 milliards de dollars de tarifs imposés par son administration contre les produits chinois, déclenchant ainsi une guerre commerciale dangereuse.

Il s’est de façon démagogique donné l’air d’un défenseur des travailleurs américains, affirmant que les Etats-Unis avaient «perdu plus de 3 millions d’emplois dans le secteur manufacturier» depuis l’adhésion de la Chine à l’Organisation mondiale du commerce. Il déclara, « les Etats-Unis ne le toléreront plus et nous ne permettrons pas la victimisation de nos travailleurs ». La perspective qu’une guerre commerciale totale entre les deux premières économies du monde créerait plus d’emplois pour les travailleurs américains est, au mieux, délirante.

Il y avait un élément omniprésent dans le discours de Trump qui décrivait les États-Unis comme un pays assiégé, avec ses «travailleurs victimes, nos entreprises trompées et nos richesses à piller».

L’OPEP, a-t-il dit, «arnaquait» les États-Unis avec des prix du pétrole élevés, ce qui « ne lui plaîsait pas ».

Les Etats-Unis, a-t-il dit, étaient le plus grand donateur d’aide étrangère, mais « peu de pays nous donnent quelque chose ». Dorénavant, Washington fournirait de l’aide uniquement aux pays qui défendent les intérêts américains.

Cette représentation des États-Unis en tant que victime du monde était mêlée à la promotion d’une sorte de nationalisme völkisch au travers de son discours, rappelant essentiellement la rhétorique d’Hitler et de Mussolini dans les années 1930 :

«À l’intérieur de chacun des membres de cette grande chambre d’aujourd’hui, et de tous ceux qui écoutent dans le monde entier, il y a le cœur d’un patriote qui ressent le même amour puissant pour son pays, la même loyauté intense envers sa patrie. La passion qui brûle dans le cœur des patriotes et les âmes des nations a inspiré la réforme et la révolution, le sacrifice et l’altruisme, les percées scientifiques et les magnifiques œuvres d’art. »

«Notre tâche n’est pas de l’effacer, mais de l’embrasser, de nous en inspirer, de tirer parti de sa sagesse ancestrale et de trouver en elle la volonté de rendre nos nations plus grandes…» La tâche, a-t-il dit était de « protéger notre souveraineté » et « défendre nos peuples et leurs nations ».

Nations, patrie, patriotisme, «sagesse ancienne», souveraineté: tous les ingrédients qui accompagnèrnt la montée du fascisme et l’éruption des guerres mondiales à deux reprises au XXe siècle.

Une partie importante du discours de Trump fut consacrée à la dénonciation du socialisme. En utilisant le Venezuela comme un faux argument – un pays où la domination du capital financier est plus grande aujourd’hui qu’il y a trois décennies – Trump a déclaré que, «la soif du socialisme pour le pouvoir mène à l’expansion, à l’incursion et à l’oppression. Toutes les nations du monde doivent résister au socialisme et à la misère qu’il apporte à tous ».

Le fait que le président américain considère la menace du socialisme comme une préoccupation majeure dans sa diatribe réactionnaire devant les Nations Unies est une indication indiscutable de l’état avancé des tensions politiques et sociales aux États-Unis. Cela exprime la crainte au sein de l’oligarchie financière et de la grande entreprise de se voir confrontée à une révolte d’en bas par des masses de travailleurs et de jeunes devenus extrêmement hostiles au système capitaliste existant.

Bill Van Auken

 

Article paru en anglais, WSWS, le 26 septembre 2018



Articles Par : Bill Van Auken

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