La guerre du Yémen, la plus idiote guerre de l’histoire

Le directeur éditorial du site madaniya.info René Naba revient pour RT France sur la situation au Yémen.

Les belligérants yéménites ont pris rendez-vous à Genève le 10 juin 2015 pour tenter de mettre un terme à la guerre qui ensanglante le pays depuis huit semaines. Retour sur le bilan de ce conflit déclenché par les pétromonarchies sous l’égide de l’Arabie saoudite contre le pays le plus pauvre du monde arabe.

Certes, toute l’infrastructure du Yémen a été détruite en vue de faire plier les rebelles et plus d’un millier de morts ont été dénombrés au sein de la population sans la moindre protestation du monde occidental. Mais sur le terrain, la première guerre du nouveau Roi Salmane, à la tête d’une coalition de sept pays (150 000 soldats, 1 500 avions) s’est révélée catastrophique. Le président yéménite Hadi, homme lige des Saoudiens, n’a toujours pas réussi à reprendre pied sur le sol national qu’il avait déserté, malgré le puissant coup de main de la France à un mini-débarquement de troupes loyalistes à Aden, depuis la base militaire française de Djibouti. Malgré l’encadrement français des troupes saoudiennes assuré par le contingent de la Légion Etrangère stationné sur la base française d’Abou Dhabi, «Zayed Military City», les troupes saoudiennes ont déserté leurs postes face aux rebelles leur laissant près de 30 blindés en guise de prises de guerre. Au total 400 soldats saoudiens ont été tués. La coalition sunnite, elle-même, s’est lézardée. Le Pakistan a refusé d’y participer de crainte d’être instrumentalisé. L’Egypte a pris ses distances face à la montée en puissance d’Al Qaïda, l’allié tacite des wahhabites, sur une base sunnite, face aux rebelles houthistes (chiites).

Un désastre absolu en dépit de la présence de pilotes mercenaires français et américains, opérant dans les rangs saoudiens, alléchés par des primes de l’ordre de 7 500 dollars par sortie aérienne. Avec en surprime, une Bentley offerte par le prince Walid Bin Talal pour chacun des 100 pilotes saoudiens participant au bombardement du Yémen. Sans doute une façon très personnelle de développer le patriotisme, le sens du devoir et le goût du sacrifice au sein des forces armées saoudiennes.

Daesh opère au coeur de l’Arabie saoudite

Mais le pire est le fait que l’Etat islamique (EI) opère désormais au coeur du Royaume. L’Etat islamique a officiellement revendiqué fin mai 2015 deux attentats en Arabie saoudite, tous les deux commis un vendredi, (22 et 29 mai) avec une cible identique des mosquées chiites du Royaume le jour de la prière.

Son premier attentat-suicide, dans la province de Qatif, dans l’est du pays a fait 21 morts et 81 blessés. Le deuxième, une semaine plus tard, le 29 mai, dirigé contre une mosquée chiite de la région pétrolière de Dammam, a fait trois morts et 4 blessés.

En plus de s’attribuer la paternité de l’opération, l’EI a déclaré la création d’une nouvelle province, dans le Najd, la région de Riyad, qui est le berceau du wahhabisme, la version ultra rigoriste de l’islam, en vigueur en Arabie saoudite.

Depuis le lancement de l’offensive saoudienne, quatre attentats se sont produits à Ryad même, dont deux attribués à Daesh, tuant 4 policiers. Un attentat contre l’ambassade américaine dans la capitale saoudienne a été déjoué, le 28 avril 2015, entraînant l’arrestation de 93 personnes, dont 81 membres du groupe djihadiste Daesh (Etat islamique).

Ce qui fait dire au Général Hussein Salami, adjoint au commandant en chef des gardiens de la révolution iranienne, que «la guerre du Yémen est la plus idiote guerre de l’histoire».

René Naba



Articles Par : René Naba

A propos :

Journaliste-écrivain, ancien responsable du Monde arabo musulman au service diplomatique de l’AFP, puis conseiller du directeur général de RMC Moyen-Orient, responsable de l’information, membre du groupe consultatif de l’Institut Scandinave des Droits de l’Homme et de l’Association d’amitié euro-arabe. Auteur de “L’Arabie saoudite, un royaume des ténèbres” (Golias), “Du Bougnoule au sauvageon, voyage dans l’imaginaire français” (Harmattan), “Hariri, de père en fils, hommes d’affaires, premiers ministres (Harmattan), “Les révolutions arabes et la malédiction de Camp David” (Bachari), “Média et Démocratie, la captation de l’imaginaire un enjeu du XXIme siècle (Golias). Depuis 2013, il est membre du groupe consultatif de l’Institut Scandinave des Droits de l’Homme (SIHR), dont le siège est à Genève et de l’Association d’amitié euro-arabe. Depuis 2014, il est consultant à l’Institut International pour la Paix, la Justice et les Droits de l’Homme (IIPJDH) dont le siège est à Genève. Depuis le 1er septembre 2014, il est Directeur du site Madaniya.

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