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L’accord d’Alger de l’OPEP : Nécessité d’une stabilisation des prix avec les pays consommateurs
Par Chems Eddine Chitour
Mondialisation.ca, 30 septembre 2016

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«Si le pétrole est source de profit, il devient aussi matière à conflit.»

Serge Zeller

 

L’Algérie a accueilli avec  élégance et avec sa tradition hospitalière, le 15e FIE Forum international de l’énergie et le Sommet de l’Opep dans une conjoncture plus volatile que jamais. Quand on entend le secrétaire général de l’Opep déclarer que la réunion d’Alger ne décidera de rien,  on pensait que la réunion d’Alger était un non–évènement .  Rien ne présageait en fait  une réussite du Sommet informel de l’Opep  transformé dans l’euphorie en réunion extraordinaire par la magie d’une résilience à la fois du savoir faire technologique du staff  algérien et du savoir faire diplomatique  de l’Algérie qui est l’un des rares pays à  garder de bonnes relations avec l’Iran  mais aussi avec l’Arabie Saoudite qui respecte sans les approuver les positions iconoclastes de l’Algérie en politique notamment au sein de la Ligue Arabe .. Bref et pour être honnête  tout le monde comme nous allons le voir avait besoin de cet accord  L’objectif à tous prix de réconcilier des points de vue aux antipodes l’un de l’autre.

Une brève histoire de l’Opep

Pour rappel l’OPEP a été créée en 1960 par cinq pays, elle avait pour ambition légitime de défendre un prix juste pour le pétrole. En face il y avait des compagnies pétrolières les fameux « Le sette sorele » « Les sept sœurs »  pour reprendre l’expression d’Enrico Mattei le patron de l’ENI. Il s’agit des sept soeurs issues de l’empire Rockefeller (de la Standard Oil of Ohio à l’exception de Shell et de BP). Pendant 10 ans l’OPEP lutta pied à pied contre les multinationales. Deux évènements ont secoué l’Opep: l’entrée de l’Algérie au sein de l’OPEP en 1968 et la prise du pouvoir en septembre 1969 par El Gueddafi en Libye.

Le ton est donné, pourtant, différentes réunions internationales eurent lieu à Téhéran, Caracas, Alger, Tripoli et Riyad. En vain, les multinationales proposaient d’ajouter au prix du baril quelque cents aux deux dollars. 1971: un coup d’éclair que la nationalisation des pétroles en Algérie, le fameux «Kararna Taemime El Mahroukate»  «  Nous avons décidé de la nationalisation des hydrocarbures »,  lancé un certain 24 février par Boumediene indiquait à la face du monde que l’Algérie avait décidé de prendre en main son destin pétrolier. Ce ne fut pas simple, mais l’exemple de l’Algérie a fait tache d’huile. La Libye, l’Irak l’Iran imitèrent l’Algérie.

Pour la première fois des pays du Sud ont pu faire plier les multinationales et leurs pays. Deux pays étaient aux avant-postes de ce bras de fer. Le président Boumediene et le roi Fayçal, c’est-à-dire un petit producteur avec 1 million de barils/jour (50 millions de tonnes/ an) et le plus gros producteur, en l’occurrence l’Arabie saoudite qui produit dix fois plus. C’était l’époque où la diplomatie pétrolière algérienne était au firmament, Belaïd Abdesselam et Zaki Yamani, les deux ministres furent les représentants de l’OPEP dans une tournée européenne et américaine pour expliquer en octobre 1973 la justesse des revendications de l’OPEP.

Souvenons-nous ces trois années 1973 -1975 furent des années intenses. L’Algérie accueillait en septembre 1973 le premier Sommet des Non-Alignés, Avril 1974, l’Algérie était le porte-parole des Non-Alignés pour porter à la tribune des Nations unies le message des pays du tiers-monde qui revendiquaient un Nouvel ordre mondial plus juste. La standing ovation faite à Boumediene est restée dans l’histoire. Début 1975 l’Algérie sur sa lancée organisait au Club des Pins le Sommet des chefs d’Etat de l’Opep…le prix du baril est passé de moins de deux dollars à plus de 12 dollars.

 

Naissance de l’AIE et déclin de l’OPEP

Novembre 1975: Henry Kissinger secrétaire d’Etat américain annonce à la face du monde la création de l’AIE (Agence, internationale de l’énergie) dont le but était la défense des intérêts des pays occidentaux consommateurs, en clair; la destruction de l’Opep. Ce fut le début des ennuis de l’OPEP. Alors que la doctrine néolibérale est de laisser les forces du marché (offre et demande s’équilibrer toutes seules sans manipulation externe) l’AIE donne instruction à la trentaine de pays de constituer des stocks de sécurité de un à trois mois, dont le but est de parer à des chocs pétroliers, en clair, en cas de problème d’approvisionnement (embargo; guerre..) les pays déstockeront. Ce que font les pays chaque fois que les prix augmentent. De ce fait, en provoquant une abondance artificielle, ils perturbent le marché et les fondamentaux du pétrole sont faussés.

La main invisible d’Adam Smith ne travaille pas pour la régulation du marché, mais pour manipuler les marchés au strict profit des pays producteurs. C’est d’ailleurs ce qui se passe depuis deux ans, le prix du pétrole a été divisé par 2,5, tous les pays et surtout les Etats-Unis et la Chine ont constitué d’énormes stocks à des prix de pétrole bradé 1979: il y eut la révolution iranienne, les prix du pétrole atteignirent 30 dollars. L’avènement des producteurs hors OPEP telle que la Norvège et surtout la Grande-Bretagne contraint les pays de l’OPEP à agir en cartel et surtout l’indiscipline commença à régner. L’Arabie saoudite voulant garantir ses parts de marché entama une guerre des prix avec la Grande-Bretagne de Thatcher qui produisit à outrance. Conséquence: les prix chutent en 1984 à moins de 10 dollars.

Les petits producteurs comme l’Algérie perdirent de l’argent; Nicolas Sarkis avance que les pertes de l’Algérie en 1985-1989 furent de 16 milliards de dollars. Les évènements d’octobre 1988 ont été catalysés en partie par la situation économique de l’Algérie. Graduellement, l’OPEP fut dépossédée de son marker crude l’Arabian light au profit du Brent de la mer du Nord, un pétrole qui est de loin sur le déclin, mais qui sert toujours comme référence. Les années 1990 virent d’autres mécanismes de fixation avec l’apparition des marchés spots et la spéculation. On arrive à juin 2008, le pétrole grimpe à 140 dollars? Ce qu’on ne dit pas c’est que ces 140 dollars sont inférieurs en dollars constants aux 30 dollars de 1980! Dans le même ordre, les 46 dollars du 24 septembre 2016 représentent en pouvoir d’achat 10 dollars de 1980.

Etat des lieux  actuel du marché pétrolier

La situation actuelle se caractérise par «la guerre de tous contre tous» au sein de l’OPEP; envolée la solidarité et les décisions par consensus. Les pays du Golfe menés de main de maître par l’Arabie saoudite sont indifférents au sort des petits pays; Ils travaillent globalement malgré la situation actuelle pour le compte des pays occidentaux. Reste l’Iran dont la guerre de leadership avec l’Arabie saoudite déteint sur la politique pétrolière. Elle produit à plein régime et atteint les 3, 6 millions de barils avec comme objectif 4 millions de barils, l’Irak produit de plus en plus et dépasse les 2 millions de barils, le Venezuela traverse une crise profonde et lui aussi est dépendant du pétrole. Il reste la Libye, pays dévasté où chaque seigneur de la guerre vend à partir des puits qu’il a accaparés et naturellement il y a toujours des acheteurs occidentaux comme pour le pétrole de Daech qui transitait par la Turquie. Reste un producteur hors OPEP, la Russie qui produit autant que l’Arabie saoudite et dont la situation financière est délicate. Autant de contraintes pour l’OPEP Si on y ajoute la déprime de l’économie mondiale, l’avènement perturbateur, mais éphémère des pétroles de schiste, le ralentissement de la Chine et le recours massif au renouvelable, on comprend que les prix du pétrole soient orientés à la baisse. Mais cela ne va pas durer car on ne découvre plus autant de pétrole et que la production est le fait de gisements anciens. A peine 5 milliards de barils découverts en 2015 d’après le bureau d’Etudes Blomberg. La production de 96 milliards de barils ne pourra pas aller loin et ce serait difficile de se maintenir à 100 millions de barils/jour.

La chute des prix du pétrole depuis l’été 2014 a entraîné une forte baisse des investissements pétroliers en 2015 et en 2016. Moins d’investissements aujourd’hui, cela signifie moins de production à moyen terme. Et comme la consommation pétrolière mondiale continue à augmenter, il y a effectivement un risque de retournement du marché, avec une offre qui serait inférieure   à la demande. La consommation mondiale de pétrole augmentera plus que prévu

La consommation mondiale de pétrole augmentera plus que prévu en 2016 et conservera sa vigueur en 2017, tandis que la production d’or noir faiblit, permettant au marché de retrouver son équilibre au second semestre de cette année, a estimé mardi l’Agence internationale de l’énergie. La demande mondiale d’or noir devrait croître de 1,3 million de barils par jour (mbj) cette année, contre une anticipation précédente de 1,2 mbj, pour atteindre 96,1 mbj, a détaillé l’AIE dans son rapport mensuel sur le pétrole. La demande devrait progresser dans les mêmes proportions en 2017 et s’établir à 97,4 mbj, tirée essentiellement par les pays non membres de l’OCDE, qui devraient consommer 1,2 mbj sur la croissance de 1,3 mbj attendue l’an prochain. L’Inde, la Corée du Sud et la Chine figureront parmi les pays les plus gourmands.

Face à cet appétit plus marqué pour l’or noir, la production de pétrole faiblit, ce qui conduit l’AIE à anticiper «un marché pétrolier équilibré au second semestre 2016», alors qu’il est grevé depuis par une offre excédentaire depuis près de deux ans. L’impact sur les prix, qui ont remonté depuis le plancher de 27,10 dollars le baril en janvier et flirtent désormais avec la barre des 50 dollars, devrait toutefois rester limité, selon l’AIE, en raison des stocks excédentaires restant à écouler  Rien n’a réellement changé depuis 2014, quand l’OPEP avait, à la surprise générale, fermement refusé de jouer, cette fois, les ajusteurs de marché et lancé une politique de hausse de la production afin de conserver ses parts de marché face à des producteurs de schistes américains dont elle espérait que les coûts réfréneraient les velléités d’expansion. Las, les schistes ont bien résisté et ce sont les membres les plus fragiles de l’Opep qui ont le plus pâti de ce bras de fer.

Le cartel est à un moment historique de son existence. Soit il persiste dans cette stratégie attentiste, au risque de sa propre survie tant les intérêts de ses membres divergent. Soit il tente une dernière conciliation, réaffirmant son existence au risque de voir les autres producteurs combler le vide et mettre sur le marché les millions de barils qu’il n’aura pas extraits. Il n’aurait dans ce cas plus qu’à acter sa disparition, son rôle s’étant réduit comme peau de chagrin ces dernières années.

Pour rappel la chute du Brent est la conséquence du refus de l’Arabie Saoudite de fermer les vannes face à la surproduction issue du pétrole de schiste américain (4 millions de barils/jour contre zéro il y a cinq ans).   Comme il y a trente ans le bras de fer Arabie Saoudite contre Grande Bretagne a amené les prix à un niveau de 9 dollars. Il faut cependant rappeler que les 9 dollars de 1986 valent les 45 dollars actuels ! Pendant ce temps là, un flacon de Chanel n°5 coute 90 dollars  soit deux barils de pétrole. C’est cela le Nouvel Ordre imposé par le néo-libéralisme, acheter les matières premières à un prix qu’il veut grâce à ses places financières   bien fixer et vendre le  produit à un prix qu’il fixe lui-même comme il veut sans passer par les places financières

Le pétrole américain a plutôt bien résisté car les compagnies qui ont survécu ont réalisé d’importants gains de productivité. « L’an dernier, la production outre Atlantique s’élevait à 9,2 millions barils jours et aujourd’hui, elle atteint encore 8,5 millions de barils »,  . Comme dans le même temps, la Russie n’a jamais autant pompé et que l’Irak est à fond, on se retrouve aujourd’hui en surproduction. « Au premier trimestre, l’offre était de 96,5 millions de barils/jours pour une demande de « seulement » 95 millions.   A cela, il faut ajouter les stocks  américains chinois et européens qui atteignent des records.

L’accord d’Alger

On sait qu’il existe un espace de dialogue le FIE Forum international de l’énergie. Créé en 1991, il constitue un cadre informel d’échanges, de concertation et de dialogue entre les pays producteurs et consommateurs d’énergie. La 15e édition est l’occasion d’approfondir le dialogue et une initiative d’Alger en ce sens permettrait de lancer les termes d’un débat pour chercher les voies et moyens à mettre en oeuvre pour trouver des solutions aux problèmes auxquels est confronté le secteur de l’énergie au plan mondial.

Le ministre de l’Energie Nourredine Bouterfa a raison de dire que «L’Algérie est un pays conciliateur reconnu pour ses qualités de dialogue et qui a l’avantage d’être en très bonnes relations avec l’ensemble des membres de l’OPEP ceci constitue un facteur supplémentaire qui donne davantage de confiance aux autres pays.»

Les pays membres de l’OPEP ont signé  ce mercredi à Alger un accord sur la réduction de la production pétrolière, dans l’optique de faire remonter les cours du baril…  Personne ne l’avait vu venir à la surprise générale notamment des agences pays occidentaux qui misaient sur un échec, un coup d’épée dans l’eau connaissant les atermoiements des rentiers brdiés par l’intransigeance de l’Arabie Saoudite qui après  s’être battue en 1986 contre Margareth Tatcher et amené le contre choc ^pétrolier des 9 dollars , l’OPEP a perdu dans cette tragédie plus de 200 milliards de dollars, la même Arabie Saoudite jouant un bras de fer avec les producteurs de pétrole de schiste a amené le pétrole à 27 dollars  faisant perdre à l’OPEP près de 400 milliards de dollars

A la surprise générale, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) a annoncé mercredi soir la signature à Alger d’un accord sur la réduction de la production de pétrole. Et, fait inattendu, Ryad, dont l’économie dépend à 73 % des pétrodollars, a même accepté que son grand rival, l’Iran, en soit exempté.

Aussitôt, les marchés boursiers ont été dopés par cette annonce, mais qui dit baisse de la production dit baisse de l’offre, donc hausse du prix du brut. La réunion d’Alger a débouché sur un projet d’accord. L’accord final, lui, devra être conclu le 30 novembre prochain lors de la prochaine Conférence de l’OPEP à Vienne.   on ne connaît pas exactement le sort réservé à l’Iran. Mais il semble acquis que Téhéran aura un traitement particulier, le ministre iranien du Pétrole s’est d’ailleurs félicité de cet accord d’Alger, lui qui la veille condamnait pourtant cette initiative. Le succès de cet accord surprise, sous réserve des suites, s’explique par deux facteurs : tous les pays producteurs souffrent plus ou moins des bas prix du pétrole et cette situation dure depuis deux ans et les investissements ont chuté de près de 40% dans  la production amenant les multinationales à réduire la voilure et à attendre de meilleurs jours. Wait and  see. A Alger ils ont comme un seul homme appelé à une  « solution »

L’accord que chacun espérait était dans l’air qui était dans l’air car aussi bien les compagnies pétrolières que tous les pays producteurs OPEP et hors OPEP et même les petits producteurs de pétrole américains souhaitaient sortir de cette situation. Cependant les positions étaient plus dogmatiques que réalistes. Il a fallu plusieurs heures de négociation à huit clos pour qu’enfin l’Arabie Saoudite -qui faut il le rappeler avait  pris la part de l’Iran quand ce dernier était sous embargo-,accepte de réduire sa production en laissant l’Iran augmenter la sienne. Le retrait de 750.000 barils/jour est un premier pas, nous verrons d’ici fin novembre si ce signal est suffisant ^pour faire repartir les  prix à la hausse.

Par ailleurs, il est très possible que la Russie fasse un geste pour consolider l’accord, l’intention a été affirmée par le Ministre  russe du pétrole. Cela aussi le cas d’autres producteurs tels que le Mexique et la Norvège .

L’AIE : la grande muette

A Alger le docteur Fatih Birol  Directeur Général de l’Agence Internationale de l’Energie a fait une belle présentation sur le marché pétrolier qui nous a laissé sur la faim. Il parle de la nécessité de faire repartir les investissements sinon il y aura un problème d’approvisionnement. Selon Fatih Birol, l’effondrement des cours pétroliers à partir de juin 2014 a engendré un recul de 40% des investissements pétroliers

Indépendamment du « quasi-miracle » de l’accord d’Alger, si l’OPEP continue sur sa lancée à savoir des réunions sans lendemain, on peut comprendre que l’OPEP des pères fondateurs, des Boumediene et Fayçal est «idéologiquement morte». L’Opep n’a plus barre sur les évènements c’est le chacun pour soi et il est utile de remarquer que dans toutes les confrontations avec les pays producteurs, l’Opep est sortie perdante depuis 30 ans  L’Opep devrait faire sa mue si elle ne veut pas disparaître à jamais. Elle devrait sortir de son ronron actuel pour engager un dialogue constructif avec les pays consommateurs représentés par l’AIE (Agence internationale de l’énergie) et le hors Opep.

Une telle initiative serait une démarche originelle car un tel dialogue assurera une stabilité pérenne à la fois pour les producteurs et les consommateurs qui seront sûrs d’avoir un approvisionnement régulier en contrepartie de recettes régulières pour les pays de l’OPEP»,. Les pays de l’OPEP (35% de la production), la Russie (12%) détiennent une partie de la solution. Ils devraient engager un dialogue sans exclusive.

Il s’agit donc de mobiliser autour d’un projet qui réponde aux préoccupations et craintes des producteurs et des consommateurs. Seul un retrait d’une partie de la production permettra de refaire les parties à la hausse vers un prix de 60 dollars qui est de fait attendu par tout le monde. Le gel de la production ne réglera pas fondamentalement le problème. L’accord de retrait de 750.000 barils ne règlera pas fondamentalement le problème de la volatilité des prix

La seule façon de faire repartir  durablement les prix à la hausse vers les 60 dollars est de réduire la production de l’Opep de 5% soit environ 2 millions de barils/jour, le gain est autrement plus important que la perte d’un volume avec un prix aussi bas. Cependant, même cette réduction ne pourrait être efficace que si elle implique à la fois les producteurs Opep et non Opep. Les 14 pays de l’Opep, en plus de la Russie et du Mexique, doivent réduire ensemble leur production.

Il faut ensuite discuter avec les pays consommateurs  représentés par l’AIE, pour qu’il n’y ait pas de perturbations et pour que tout le monde soit d’accord sur un prix moyen de pétrole autour de 60 dollars D’abord, les compagnies pétrolières qui pourraient ce faisant réenclencher les investissements dans l’industrie du pétrole et qui sont maintenant en berne. Ce prix de 60 dollars encouragerait le recours aux énergies renouvelables qui deviendraient encore plus compétitives et les stimulerait.

Ce prix de 60 dollars annulerait la spéculation en Bourse. Les pays consommateurs connaissant les recettes raisonnables peuvent enfin – après cet électrochoc de deux ans de vaches maigres- entamer un développement en connaissance de cause, notamment la nécessité d’aller à marche forcée vers les énergies renouvelables. Il ne grèverait pas beaucoup les pays consommateurs tels que les Etats-Unis ou l’Europe. On peut même faire preuve d’imagination pour concevoir un deuxième prix plus bas pour les faibles volumes nécessaires aux pays en développement qui ne disposent pas de moyens de paiement et qui consomment très peu. Ce prix de 60 dollars fixé à la fois comme prix plafond et prix plancher est une expérience à tenter. L’AIE devrait être consultée et apporter sa part à la stabilité du marché pétrolier

Le vrai défi de l’Algérie: réussir une vraie transition énergétique

En espérant que l’accord d’Alger puisse être suivi d’effet , ce n’est qu’un sursis pour les rentiers s’ils ne changent pas de fusil d’épaule et ne changent pas le paradigme de la croissance !  Jusqu’à présent, depuis les années 1980, l’Algérie et les petits pays producteurs sont considérés comme marginaux, c’est l’Arabie saoudite qui, pour le compte des pays occidentaux, dicte sa loi.  L’Algérie est astreinte à un quota qu’elle ne dépasse pas (discipline du cartel que d’autres pays ne respectent pas…). Plusieurs pays OPEP en sont sortis, c’est le cas de l’Indonésie, de l’Equateur… Nous sommes un très petit producteur, 12 milliards de barils de réserves, à peine 0,7% des réserves mondiales contre près de 20% pour l’Arabie saoudite, 10% pour l’Iran, 10% pour l’Irak. Nous produisons 3% de la production de l’OPEP et la règle actuelle est de un baril une voix alors qu’elle était dans les années 1970 de un pays, une voix.

Mais même avec cette conjoncture mondiale qui lui est défavorable, même si le prix du pétrole arrive à atteindre les 60 dollars le problème de la transition énergétique reste entier. Il ne faut surtout pas penser retrouver les années fastes dans l’immédiat à 120 dollars le barils . Cette rente potentielle doit servir si nous avons vraiment tirer la leçon de ces deux années prémonitoires de stress, à être injectées uniquement dans  l’investissement pour le développement Durable . Nous avons beaucoup de retard dans la mise en place  de ce modèle énergétique malgré les déclarations rassurantes .

L’Algérie «peut très bien s’en sortir» sans dépendre totalement du pétrole, en axant ses efforts sur le développement de ses énergies renouvelables et en économisant sa consommation énergétique. Il nous faut tenir bon. Il ne sert à rien de forcer nos puits -pour produire plus-  après les malheureuses expériences précédentes. Chaque calorie produite rationnellement devrait être convertie en une énergie renouvelable. Il nous faut mettre un frein vivement, de stopper l’hémorragie aux frontières qui fait perdre à l’Algérie, une moyenne de 2 milliards de dollars/an. La tenue urgente des états généraux de l’énergie où les universitaires, société civile, entreprises, ministères seront associés pour aboutir à une transition énergétique vers un développement durable aboutissant à un modèle énergétique accepté par chacun, avec l’obligation de résultats.

Nous devons tourner le dos à la rente et nous engager sans attendre vers une transition énergétique fruit d’un modèle énergétique vers le développement durable. Les rares gouttes qui restent doivent être laissées autant que possible pour les générations futures. «Notre meilleure banque est notre sous-sol.» La politique des énergies renouvelables attend des décisions fortes bien expliquées dans le cadre d’états généraux où la parole sera donnée aux citoyens qui, eux, auront à appliquer par conviction, une stratégie énergétique qui repose d’abord sur des économies d’énergie de l’ordre de 10 à 20%, soit plus de 6 millions de tonnes qui seront épargnées.

Les Algériens devraient savoir  qu’au sud du pays un carré de 250km de côté est suffisant pour générer de l’électricité solaire à toute la planète. Le Sahara converti en panneau solaire est capable d’alimenter 300 planètes Terre !  L’Algérie produit 500 fois moins en brûlant une ressource non renouvelable le gaz naturel!  Le Sud n’a pas révélé toutes ses potentialités qui attendent d’être mises en valeur dans le cadre d’un Schéma National d’Aménagement du Territoire  (SNAT) du XXIe siècle. Avec les énergies renouvelables  ( solaires éolien, géothermie )  avec le Barrage vert pour lutter contre l’érosion climatique , nous pouvons faire reverdir le sahara avec une jeunesse qui ne demande qu’à apporter sa part.

C’est dire que cette manne du Sud est de loin plus importante que le peu d’énergie fossile disponible qu’il nous faudra économiser d’une façon drastique avec le concours des citoyens à qui il faudrait expliquer pédagogiquement les enjeux. Justement, le dernier mot est pour l’éducation et la formation de qualité dès l’école, l’apprentissage de l’écocitoyenneté est un combat qui commence à l’Ecole puis au lycée avec le bac du développement durable comme le recommandent les Nations unies et enfin, dans la formation professionnelle et le supérieur avec les métiers du développement durable. C’est cela l’avenir de l’Algérie et non une organisation qui- même avec cette victoire inattendue ; L’accord d’Alger –  a perdu sa raison d’être.

Professeur Chems Eddine Chitour

Ecole Polytechnique enp-edu.Alger

 

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