Le 11 septembre et «l’Inquisition américaine»

L’actuelle « guerre au terrorisme » est une forme moderne d’inquisition. Elle contient tous les ingrédients essentiels des Inquisitions française et espagnole.

Afin de justifier un agenda militaire, on utilise la chasse aux « terroristes islamiques » et une guerre préventive mondiale pour « protéger la patrie ».

On décrit la « guerre mondiale au terrorisme » (GMAT) comme un « choc des civilisations », une guerre entre des valeurs et des religions concurrentielles, alors qu’il s’agit en réalité d’une véritable guerre de conquête guidée par des objectifs stratégiques et économiques.

La GMAT est le pilier idéologique de l’Empire américain. Il définit la doctrine militaire américaine, incluant l’usage préventif d’armes nucléaires contre les « États qui financent » le terrorisme.

La doctrine de « guerre défensive » préventive et la « guerre au terrorisme » contre al-Qaïda représentent des éléments de base de la Stratégie de sécurité nationale américaine telle que formulée au début de l’année 2002. Le but est de dépeindre « l’action militaire préventive », c’est-à-dire la guerre, comme un acte « de légitime défense » contre deux catégories d’ennemis, les « États voyous » et les « terroristes islamiques », qui possèderaient, dit-on, des armes de destruction massive.

La logique « de l’ennemi extérieur » et du scélérat, prétendument responsable de la mort de civils américains, a priorité sur le bon sens. Dans la conscience des Américains, les attaques du 11 septembre 2001 justifient des actes de guerre et de conquête :

« Les pertes de vie du 11 septembre 2001 l’ont démontré, le but précis des terroristes est de faire un grand nombre de victimes civiles, et ces pertes pourraient augmenter de façon exponentielle si les terroristes faisaient l’acquisition d’armes de destruction massive ». (Stratégie de sécurité nationale, Maison-Blanche, Washington, 2002)

 

L’Inquisition des États-Unis

La légitimité de l’inquisition n’est pas remise en question. La « guerre mondiale au terrorisme » justifie un budget de défense gigantesque au détriment de la santé, de l’éducation et pratiquement de toute autre catégorie de dépenses publiques d’ordre civil.

La « guerre mondiale au terrorisme » exige la « poursuite » des terroristes à l’aide d’armes sophistiquées. Elle entretient un semblant de croisade religieuse préventive contre le mal servant à occulter les objectifs réels d’intervention militaire.

Les mensonges sous-jacents au 11 septembre sont connus et documentés. L’adhésion du peuple américain à cette croisade contre le mal ne se base sur aucune compréhension ou analyse rationnelles des faits.

L’Inquisition des États-Unis sert à étendre la sphère d’influence du pays ainsi qu’à justifier l’intervention militaire dans le cadre d’une campagne internationale contre le « terrorisme islamique ». Son objectif ultime, qui n’est jamais mentionné dans les reportages de la presse, est la conquête territoriale et le contrôle de ressources stratégiques.

Le dogme de la GMAT est énoncé et formulé par les think tanks (laboratoires d’idées) néoconservateurs de Washington, et mis en œuvre par l’establishment de l’armée et du renseignement. Il s’incarne dans les discours présidentiels et les conférences de presse :

« On nous a prévenu qu’il y a des gens malfaisant dans ce monde. On nous a très clairement prévenus. […] Et nous serons vigilants. Votre gouvernement est vigilant. Les gouverneurs et les maires sont conscients que des gens malfaisants rôdent dehors. Comme je le mentionnais hier, des gens ont déclaré la guerre à l’Amérique et ils ont fait une terrible erreur. […] Mon administration a un travail à faire et elle le fera. Nous allons débarrasser le monde des scélérats. » (George W. Bush, CNN, 16 septembre 2001, souligné par l’auteur)

La compréhension d’événements politiques et sociaux fondamentaux est remplacée par un monde de pure fantaisie où rôdent « des gens malfaisants ». L’objectif de la « guerre au terrorisme » lancée en septembre 2001 est de galvaniser l’appui du public pour une campagne mondiale contre l’hérésie. Le fait de détenir une « cause juste » pour mener une guerre est un élément central aux yeux de l’opinion publique : une guerre est juste si elle est menée pour des raisons morales, religieuses ou éthiques. 

La diabolisation des musulmans et la bataille pour le pétrole

La guerre menée par les États-Unis dans la région élargie du Moyen-Orient et de l’Asie Centrale consiste à prendre le contrôle d’importantes réserves de pétrole et de gaz naturel. Les géants du pétrole anglo-américains cherchent également à prendre le contrôle des voies d’oléoducs et de gazoducs à l’extérieur de la région. (Voir les cartes ci-dessous.)

Les pays musulmans possèdent 66 pourcent des réserves mondiales de pétrole. (Michel Chossudovsky, La « diabolisation » des musulmans et la bataille pour le pétrole, Centre de recherche sur la mondialisation, 4 janvier 2007). En revanche, les États-Unis d’Amérique détiennent à peine deux pourcent de ces réserves. L’Irak a cinq fois plus de pétrole que les États-Unis.

La diabolisation s’applique à un ennemi qui possède plus de 60 pourcent des réserves pétrolières mondiales. « Axe du mal », « États voyous », « États en déliquescence », « terrorisme islamique » : la diabolisation et la diffamation sont les piliers idéologiques de l’Inquisition américaine. Elles tiennent lieu de casus belli afin de mener une bataille pour le pétrole.

Cette bataille pour le pétrole nécessite la diabolisation de ceux qui le possèdent. L’ennemi est défini comme étant diabolique dans le but de justifier une intervention militaire incluant l’assassinat en masse de civils. (Ibid.)  

Origines historiques de l’Inquisition

L’objectif est d’entretenir l’illusion que « l’Amérique est attaquée » par al-Qaïda. Sous l’Inquisition américaine, Washington a un mandat divin autoproclamé d’extirper le fondamentalisme islamique et de « propager la démocratie » à travers le monde.

« Pourchasser Ben Laden » fait partie du consensus. La peur et l’insécurité prévalent sur le sens commun. Malgré les preuves, dans l’esprit des Américains la Maison-Blanche, le Département d’État, le système bipartite ne peuvent pas être tenus responsables des actes criminels (11 septembre) qui se sont soldés par la mort de civils américains.

Nous faisons face à l’approbation absolue et aveugle des structures du pouvoir et de l’autorité politique.

À cet égard, l’Inquisition américaine en tant que construction idéologique est, sous plusieurs aspects, comparable à l’ordre social inquisitorial prédominant en France et en Espagne au Moyen-Âge. L’inquisition ayant débuté en France au 12e siècle a servi à justifier conquêtes et interventions militaires.

Elle a d’abord pris la forme d’une offensive dans le sud de la France contre les Cathares et les Vaudois, qui défiaient les enseignements de l’Église catholique romaine. Le mouvement cathare était une secte religieuse protégée par l’ordre féodal de la région contre le dominion de l’Église catholique et de la monarchie française de Paris. « Les cathares croyaient qu’ils étaient les vrais chrétiens et que l’Église catholique étaient une fausse église, fondée par le démon ».

Au début du 13e siècle, « le pape Innocent III a lancé une croisade contre les cathares » sur ordre de la famille royale française. En fait, la croisade était une guerre de conquête déguisée en campagne contre l’hérésie.

L’Inquisition  dirigée contre l’hérésie avait pour but de consolider le contrôle territorial de la monarchie. Elle fournissait un prétexte pour intervenir militairement dans le sud et le sud-ouest de la France en utilisant l’autorité de l’Église catholique comme façade.

L’Inquisition est devenue une composante du consensus politique, a été mise à exécution par les inquisiteurs de l’Église, imposée par l’ordre féodal dirigeant et appuyée militairement. Elle avait pour but de maintenir et renforcer l’ordre politique et social, d’étendre les pouvoirs de l’État central et de subjuguer les pouvoirs régionaux en France en exploitant l’offensive contre l’hérésie comme « justification pour faire la guerre ». Ça vous dit quelque chose?

L’ordre inquisitorial actuel

Quiconque doute de la légitimité de l’Inquisition américaine (11 septembre et « guerre mondiale au terrorisme ») est un hérétique adepte des théories de conspiration ou un complice des terroristes.

L’Inquisition américaine participe d’un consensus bipartisan : les Républicains et les Démocrates appuient l’Inquisition américaine.

La « poursuite d’Oussama ben Laden » fait partie des deux plateformes électorales. Il s’agit en fait de la pièce maîtresse de la campagne:

« J’ai [Barack Obama] plaidé en faveur de l’augmentation des ressources et des troupes afin de terminer le combat contre les terroristes qui nous ont réellement attaqués le 11 septembre, et j’ai précisé que nous devons débusquer Oussama ben Laden et ses acolytes s’ils sont dans notre champ de vision. » (Barack Obama, discours d’investiture, convention nationale démocrate, Denver, août 2008)

« Nous avons porté un sérieux coup à al-Qaïda ces dernières années. Mais ils ne sont pas vaincus et ils nous attaqueront encore, s’ils le peuvent. » (John McCain, Discours d’investiture, convention nationale républicaine, St-Paul, septembre 2008)

Il y a un « ennemi extérieur ». La patrie est attaquée. Les terroristes islamiques « menacent notre mode de vie ». « Nous devons nous défendre » de manière préventive contre Oussama et ses lieutenants.

Le Commandement Nord US (Northcom), dont le quartier général est situé sur la base de l’armée de l’air de Petersen au Colorado, a été créé au début de l’année 2002 afin de protéger les États-Unis contre une attaque terroriste. Northcom a été présenté à l’opinion publique comme étant une réaction aux attaques du 11 septembre. Toutefois, les réels objectifs stratégiques de Northcom ne sont pas mentionnés, soit l’utilisation d’armes de défense aérienne sophistiquées, y compris des ogives nucléaires.

Consensus politique

Les porte-parole de l’ordre inquisitorial américain sont les entreprises médiatiques occidentales.

Ceux qui questionnent la validité de ne serait-ce qu’une de ces affirmations ou qui ont des doutes sur les auteurs du 11 septembre sont considérés comme des complices de ceux qui menacent la patrie américaine.

En 1232, le pape Grégoire IX a institué un système de tribunaux religieux spéciaux nommé Inquisition. Les moines dominicains étaient tenus de trouver et questionner les hérétiques : 

« On ne peut anéantir l’hérésie sans anéantir les hérétiques […], leurs défenseurs et leurs sympathisants, et cela se fait de deux façons : […] en les convertissant à la véritable foi catholique ou […] en les brûlant. » (Henry Charles Lea, Histoire de l’Inquisition au Moyen-Âge, p. 535, 1887)

Ceux qui refusaient d’abjurer, c’est-à-dire de renoncer à leur hérésie, étaient brûlés vifs.

L’actuel Patriot Act, les tribunaux militaires, le camp de concentration de Guantanamo, les centres de détention de la CIA, Abou Ghraib, etc., font tous partie d’un système inquisitorial élaboré. Les présumés terroristes sont détenus incommunicado. Ils sont torturés, jugés et condamnés par des tribunaux militaires. On ne leur donne pas le droit d’abjurer.

 

Le but n’est pas de « rendre le monde plus sécuritaire » en mettant les terroristes derrière les barreaux.

De plus, les procès spectacles des présumés terroristes exercent une fonction sociale importante : ils forment une partie intégrante de la campagne de désinformation du Pentagone. Concrètement, ils donnent un vrai visage à l’ennemi, puisque, dans la conscience des Américains, ils entretiennent l’illusion voulant que les « terroristes islamiques » représentent une menace réelle.

Les arrestations, les procès et les condamnations des « terroristes islamiques » préservent la légitimité de l’État de sécurité national des États-Unis, de son appareil inquisitorial légal servant au maintien de l’ordre.

Le but ultime est d’instiller dans l’esprit de millions d’Américains le fait que l’ennemi est réel et que le gouvernement américain protégera la vie de ses citoyens.

 

Fabriquer la dissidence

 

Washington ne réduit pas ses critiques anti-guerre au silence. Au contraire, l’ordre social inquisitorial permet certaines formes de dissidence. Dans une « démocratie », il est politiquement correct de condamner la politique étrangère américaine en termes vigoureux.

Ce qui n’est pas permis, c’est de remettre en question l’Inquisition.

Les opposants au gouvernement des États-Unis ne sont pas taxés d’hérétiques. De nombreux « progressistes », libéraux et activistes anti-guerre, guidés par d’éminents intellectuels, croient fermement que des musulmans étaient derrière l’attaque du 11 septembre. « Nous sommes contre la guerre, mais nous appuyons la guerre au terrorisme. » 

Le Nouvel ordre mondial fabrique un consensus politique et médiatique (c’est-à-dire la GMAT), mais parallèlement, il crée et façonne sa propre opposition. Il établit les limites de la dissidence. Il « fabrique la dissidence ».

Les candidats à la présidence dans la course bipartisane ont l’appui de puissants intérêts corporatifs, comprenant les pétrolières, Wall Street et les entreprises sous-traitantes du Pentagone.

Par l’intermédiaire de différentes fondations (dont Ford, Rockefeller, Gates et al), ces mêmes intérêts corporatifs appuient et financent simultanément un grand nombre d’organismes progressistes ou libéraux et de médias alternatifs.

Le 11 septembre est la pierre angulaire de l’Inquisition américaine.

Les mouvements anti-guerre dominants adhèrent aux mensonges derrière le 11 septembre.

On condamne la politique étrangère des États-Unis, mais on appuie la « guerre mondiale au terrorisme ». Qu’il soit volontaire ou non, l’appui à la GMAT de ceux qui affirment être opposés à l’administration américaine procure une légitimité à l’ordre inquisitorial à la base de l’actuelle politique étrangère du pays.

En revanche, ceux qui ont de sérieux doutes concernant le récit officiel du 11 septembre, incluant le Mouvement pour la vérité sur le 11 septembre, sont taxés d’hérétiques et de mécréants.

 

La théorie de la « guerre juste »

La théorie de la « guerre juste » (justum bellum) est une vieille tradition. On l’a utilisée à travers l’histoire afin de maintenir l’ordre public et mener des guerres.

Pour ce qui est de l’Afghanistan, le 11 septembre a joué un rôle dans la justification de l’invasion. La guerre contre l’Afghanistan était considérée comme une « guerre juste », menée pour des raisons humanitaires.

Le 12 septembre 2001, pour la première fois dans l’histoire, l’OTAN a invoqué « l’article 5 du Traité de Washington, la clause de défense collective » en déclarant que les attaques contre le World Trade Center (WTC) et le Pentagone « étaient des attaques contre tous les membres de l’OTAN. ».

Sans la moindre preuve et sans la moindre enquête, l’Afghanistan a été étiqueté comme étant « l’État commanditaire » des attaques du 11 septembre. On a décrit l’invasion de l’Afghanistan au début d’octobre 2001 comme une opération antiterroriste dirigée contre les auteurs du 11 septembre et les États les ayant financés.

Des syndicats, des ONG et de nombreux intellectuels « progressistes » ont cautionné l’invasion menée par l’OTAN et les États-Unis. Les événements du 11 septembre ont joué un rôle clé dans l’adhésion de différents secteurs de la société étasunienne, y compris les opposants et les critiques de la politique étrangère de l’administration Bush.

Aussi, la guerre contre l’Afghanistan a été préparée avant le 11 septembre. À l’époque, les préparatifs de la guerre étaient déjà à un stade avancé, et on a donné le feu vert aux États-Unis et à l’OTAN dans les 24 heures suivant les attaques.

Les reportages de la presse ont toutefois omis de révéler un fait établi et reconnu par les analystes militaires : un grand théâtre de guerre ne peut, en aucune circonstance, être planifié et mis en œuvre en l’espace de quatre à cinq semaines.

Le 11 septembre a été utilisé comme justification pour mener une « guerre humanitaire ». Or, il s’agit d’un fait connu des analystes militaires, la guerre contre l’Afghanistan avait été planifiée bien avant les événements tragiques du 11 septembre 2001.

L’Inquisition espagnole

Aux 14e et 15e siècles, l’Inquisition s’est répandue à d’autres coins de l’Europe. En Italie, l’Inquisition s’en est prise aux mouvements nationalistes dans des régions telles la Lombardie au nord, à Venise ou en Sicile. On l’utilisait dans le but de réprimer ces mouvements politiques. Dans le nord de la France et les territoires germaniques, l’Inquisition est intervenue politiquement et militairement en prétextant s’en prendre à de petites sectes mystiques. Les pouvoirs régionaux, y compris les principautés locales, ont refusé de coopérer à cette inquisition. Dans le monde d’aujourd’hui, cette forme d’interventionnisme s’effectue en envoyant des forces spéciales américaines pour « aider les gouvernements » à combattre le terrorisme.

Conquise par les Musulmans et reconquise en partie par les chrétiens au 13e siècle, l’Espagne était « hétérogène sur le plan religieux, et une certaine tolérance s’était établie si bien que les Musulmans, les Chrétiens et les Juifs puissent vivre en paix ». Vers la fin du 15e siècle, alors qu’avait lieu une consolidation politique et territoriale, « la tolérance espagnole s’est brusquement transformée. L’Espagne a vu naître une forme d’inquisition encore plus impitoyable et dérangeante que n’importe où ailleurs en Europe ». (Bill of Rights in Action)

L’Inquisition espagnole se distinguait, elle aussi, par un procédé consistant à fabriquer un consensus et à pourchasser les hérétiques et les non-croyants. Or, on s’en servait pour appuyer un processus de consolidation territoriale dans la péninsule ibérique, dont le but était de renforcer la monarchie absolue, ainsi que les pouvoirs de l’aristocratie foncière contre les classes marchandes juive et musulmane.

C’est sous les ordres de la reine Isabelle, la Reina Catolica, que l’Inquisition espagnole a été instituée. En 1483, les Reyes Catolicos, Isabelle de Castille et Ferdinand d’Aragon, ont établi un Conseil pour diriger l’Inquisition. Tomas de Torquemada, un conseiller d’Isabelle, est devenu le premier Grand Inquisiteur, lui qui avait autrefois prêché contre les juifs et les musulmans convertis (conversos). Cette inquisition visait la répression des classes marchandes émergentes. « Un pays, un dirigeant, une foi », tel était désormais la devise du Grand Inquisiteur.

 

Le pape a maintenu l’Inquisition et son agenda caché : l’ordre féodal et les guerres coloniales menées par l’Espagne. L’Inquisition espagnole a duré 300 ans.

Aujourd’hui aux États-Unis, le Grand Inquisiteur est le secrétaire du Département de la Sécurité intérieure.

Le système légal

L’Inquisition du Moyen-Âge colportait des accusations sur les bases suivantes :

« Si deux témoins, sous serment, accusaient quelqu’un d’hérésie, l’accusé était cité à comparaître. Les opinions, les préjugés, les rumeurs et les commérages étaient tous admis comme preuves. On ne mentionnait à l’accusé ni le nom de ses accusateurs, ni même les accusations précises.

 

Les inquisiteurs interrogeaient l’accusé en secret. Quiconque refusait d’avouer quoi que ce soit était immédiatement présumé coupable. Ces inquisiteurs étaient uniquement formés sur le plan religieux et tentaient de piéger l’accusé avec des questions d’ordre religieux. Par exemple, un inquisiteur demandait « Croyez-vous ce que croît la Sainte Église? », et le suspect craintif répondait « Je suis un chrétien pieux. »

L’Inquisiteur hurlait « Ah bon! Nous savons déjà que vous croyez aux hérésies! Vous dites que vos croyances sont celles de la véritable chrétienté et que l’Église est une imposture! » (Bill of Rights in Action)

Le recours aux avocats n’était pas permis, car on considérait que défendre un hérétique était de l’hérésie.

« Ils torturaient ceux qui refusaient d’abjurer. Pendant la torture, les inquisiteurs religieux étaient présents en tant que témoins afin de noter les confessions ou le nom d’autres hérétiques. Aussi, le gouvernement exécutait la sentence finale, soit l’emprisonnement ou la peine de mort.

 

Ceux qui abjuraient immédiatement pouvaient recevoir une sentence plus légère: réciter des prières, jeûner, être fouettés en public ou faire un pèlerinage. Certains étaient obligés de porter une croix de feutre jaune cousue sur tous leurs vêtements. Cette croix les étiquetait comme étant d’anciens hérétiques et beaucoup de gens, par crainte, les évitaient.

 

Nombreux sont ceux qui ont été condamnés à la prison à vie parce qu’ils refusaient d’abjurer sur-le-champ. S’ils refusaient totalement d’abjurer, l’Inquisition les confiait aux autorités gouvernementales afin qu’ils soient brûlés vifs. Certains inquisiteurs étaient si consciencieux qu’ils pourchassaient les morts : si une personne décédée était accusée d’hérésie, on pouvait la déterrer et brûler ses ossements.

 

La plupart des personnes accusées d’hérésie ne pouvaient aller en appel. Pour quelques riches ou puissants, il était possible de supplier le pape de modifier la sentence, mais en général, la sentence était définitive. Les familles de ceux qu’on envoyait en prison ou sur le bûcher perdaient leurs biens. »

(Bill of Rights in Action, voir aussi Histoire de l’Inquisition au Moyen-Âge)

Le système légal actuel aux États-Unis comporte toutes les caractéristiques essentielles d’un ordre inquisitorial. La torture est permise « dans certaines circonstances », selon un « avis juridique » du Département de la Justice datant d’août 2002 :

« Si un employé gouvernemental devait torturer un suspect en détention, ‘’ il le ferait afin de prévenir de futures attaques du réseau terroriste al-Qaïda contre les États-Unis’’. Voilà ce qu’indiquait le mémo du bureau de conseil juridique du Département de la Justice en réponse à la demande d’orientation juridique émanant de la CIA. On pouvait également y lire que les arguments axés sur « la nécessité et la légitime défense pouvaient fournir des justifications éliminant tout risque de poursuites judiciaires » par la suite. (Voir le Washington Post, 7 juin 2004)

 

« Même si une méthode d’interrogatoire était susceptible de transgresser, de manière discutable, les limites inscrites dans la Section 2340, et que l’application du règlement n’était pas considérée comme une violation inconstitutionnelle de l’autorité du président en tant que Commandant en chef, nous croyons que dans les circonstances actuelles [la guerre au terrorisme], la possibilité d’utiliser certains moyens de défense justifiés pourrait potentiellement éliminer les risques de poursuites judiciaires. »

(Mémorandum intégral du Département de la Justice du 2 août 2002 en pdf)

 

La torture

« L’Inquisition espagnole était particulièrement terrifiante en raison de ses caractéristiques inhérentes. Les accusés ne savaient jamais qui les accusait. Une fois arrêtés, les biens des hérétiques accusés étaient saisis. »

« Ces biens étaient d’abord administrés par la Couronne, ensuite par le Grand Inquisiteur […]

 

Même si l’accusé était dorénavant un chrétien dévot, il était jugé aussi sévèrement que possible en raison de ses racines. Il n’avait également pas le droit de faire appel à un avocat ou à un défenseur, et on ne lui révélait pas les noms des témoins. »

(Jason L. Slade, L’Inquisition espagnole, 6 août 1996)

La torture était à l’ordre du jour, les accusés n’avaient pas droit à un avocat.

Les méthodes de torture appliquées par les présents inquisiteurs d’aujourd’hui de la CIA sont étrangement similaires aux techniques utilisées par les inquisiteurs du Moyen-Âge, incluant le supplice de l’eau ou aselli, communément appelé « supplice de la baignoire » (waterboarding) dans le jargon de la CIA :

« L’Église s’occupait des tribunaux puisqu’ils étaient institués pour des raisons spirituelles. Toutefois, comme les punitions étaient en général très physiques, l’État s’en chargeait. On employait de nombreux types de torture physique pour la confession des accusés. Les deux plus populaires ou impopulaires étaient le strappado ou poulie et l’aselli ou supplice de l’eau.» (Jason L. Slade, L’Inquisition espagnole, 6 août 1996)


Photo : Le supplice de la baignoire hier et aujourd’hui 

À cet égard, Alfred McCoy signale que la CIA :

« a souvent ajouté à son inaccessible répertoire des méthodes physiques évoquant les tortures ayant été la marque de fabrique de l’Inquisition – la poulie, le supplice de l’eau, le chevalet et les « masques de moquerie ». Par exemple, en 2002 au siège de la CIA près de Kaboul, les interrogateurs américains forçaient les prisonniers «  à se tenir debout les pieds enchaînés et les mains enchaînées au plafond », un effet similaire à la poulie. Au lieu d’utiliser le chevalet de fer pour écarteler le corps de la victime, les interrogateurs de la CIA leur demandaient de se placer dans des « positions inconfortables » semblables à celles provoquées par le chevalet, sans toutefois utiliser de mécanisme, et ce toujours dans le but de provoquer les effets psychologiques de l’automutilation.

(Alfred McCoy, The Hidden History of CIA Torture: America’s Road to Abu Ghraib, Global Research, décembre 2004)

Au 16e siècle, l’Inquisition était acceptée en Espagne. Il existait un consensus. On a fait croire à la population que c’était une bonne chose et que la torture « servait à purifier la société ».

« Un évêque sortait et hurlait le nom des condamnés. Ensuite on amenait les prisonniers portant des robes noires ornées de démons et de flammes et les fonctionnaires les attachaient au bûcher.

 

Un prêtre les défiait : ‘’Renoncez-vous à votre hérésie contre la Sainte Église?’’ Quiconque se repentait était étranglé à mort avant qu’on allume les feux. Cependant, la plupart d’entre eux demeuraient silencieux et provoquants. On allumait les feux et la place retentissait des cris des hérétiques et des acclamations de la foule. »

(Cité dans Bill of Rights in Action, op cit)

Quiconque osait remettre en cause la validité de cette « guerre au terrorisme » était étiqueté comme terroriste et soumis aux lois antiterroristes, qui, à l’époque en Espagne, signifiaient la peine de mort.

Dans l’ambiance inquisitoriale actuelle, la plupart de gens sont sceptiques face au récit officiel du 11 septembre, mais personne n’ose remettre en question la validité de la « guerre au terrorisme ».

« Ces gens sont malfaisants et nous devons les pourchasser, les débusquer. » Le discours est pratiquement le même que celui du Moyen-Âge.

L’objectif ultime est de mater les citoyens, de dépolitiser complètement la vie sociale aux États-Unis, d’empêcher les gens de réfléchir, de conceptualiser, d’analyser les faits et de défier la légitimité de l’ordre social inquisitorial régnant aux États-Unis.

Le mensonge éhonté devient la vérité. La réalité est inversée.

La guerre devient la paix, une « entreprise humanitaire » qui en vaut la peine.

La dissidence pacifique devient de l’hérésie.

Le but est de créer un climat de peur et d’insécurité afin de maintenir le Nouvel Ordre mondial.

Monthy Python le formulait ainsi :

« PERSONNE ne s’attend à l’Inquisition espagnole!

 

Notre meilleure arme c’est la surprise… la surprise et la peur… la peur et la surprise…

 

Nos deux armes sont la peur et la surprise… et une efficacité impitoyable…

 

Nos *trois* armes sont la peur, la surprise, et une efficacité impitoyable… et un dévouement quasi fanatique au pape…

 

Nos *quatre*… non… «*parmi* nos armes… Dans notre arsenal… se trouvent des éléments tels la peur, la surprise…

 

Je reviendrai. »

(Monthy Python, The Sapnish Inquisition)

 

Comment renverser la vapeur?

Saper l’Inquisition;

Révéler les mensonges derrière le 11 septembre;

Briser le consensus;

Révéler les crimes commis par ceux qui occupent de hautes fonctions;

Désarçonner les inquisiteurs :

« Des millions de gens ont été trompés à propos des causes et conséquences du 11 septembre.

 

À travers le pays, l’image d’un « ennemi extérieur » est propagée dans la conscience des américains. Al-Qaïda menace l’Amérique et le monde. On décrit l’abrogation de la démocratie sous la législation Patriot comme un moyen d’assurer la « sécurité intérieure » et le respect des libertés civiles.

 

Lorsque les gens aux États-Unis et à travers le monde découvriront qu’al Qaïda n’est pas un ennemi extérieur, mais une création de la politique étrangère américaine et de la CIA, la légitimité de l’agenda guerrier bipartisan s’écroulera comme un château de cartes… »

(Michel Chossudovsky, America’s War on Terrorism , 2005, en français Guerre et mondialisation, La vérité derrière le 11 septembre

Article original,  9/11 and the « American Inquisition» , publié le 11 septembre 2008.

Traduction Julie Lévesque pour Mondialisation.ca. Révisée par Fausto Giudice, membre de Tlaxcala.


Michel Chossudovsky
 est directeur du Centre de recherche sur la mondialisation et professeur d’économie à l’Université d’Ottawa. Il est l’auteur de Guerre et mondialisation, La vérité derrière le 11 septembre et de la Mondialisation de la pauvreté et nouvel ordre mondial (best-seller international publié en 11 langues).    


Guerre et mondialisation



Articles Par : Prof Michel Chossudovsky

A propos :

Michel Chossudovsky is an award-winning author, Professor of Economics (emeritus) at the University of Ottawa, Founder and Director of the Centre for Research on Globalization (CRG), Montreal, Editor of Global Research.  He has taught as visiting professor in Western Europe, Southeast Asia, the Pacific and Latin America. He has served as economic adviser to governments of developing countries and has acted as a consultant for several international organizations. He is the author of eleven books including The Globalization of Poverty and The New World Order (2003), America’s “War on Terrorism” (2005), The Global Economic Crisis, The Great Depression of the Twenty-first Century (2009) (Editor), Towards a World War III Scenario: The Dangers of Nuclear War (2011), The Globalization of War, America's Long War against Humanity (2015). He is a contributor to the Encyclopaedia Britannica.  His writings have been published in more than twenty languages. In 2014, he was awarded the Gold Medal for Merit of the Republic of Serbia for his writings on NATO's war of aggression against Yugoslavia. He can be reached at [email protected] Michel Chossudovsky est un auteur primé, professeur d’économie (émérite) à l’Université d’Ottawa, fondateur et directeur du Centre de recherche sur la mondialisation (CRM) de Montréal, rédacteur en chef de Global Research.

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