Le centre-ouest de la Tunisie en ébullition

Le 19 décembre (le 17 selon d’autres sources) à Sidi Bouzid en Tunisie, un jeune homme s’était immolé par le feu avec de l’essence devant la préfecture, après s’être fait confisqué la marchandise qu’il vendait illégalement. Cinq jours plus tard, un autre jeune s’est mortellement électrocuté en public, en grimpant au sommet d’un poteau électrique. 

De nombreux jeunes chômeurs et des travailleurs sont descendus dans la rue. Des villes des alentours de Sidi Bouzid ont rejoint le mouvement dans un premier temps, puis des villes du nord au sud du pays jusque la capitale, Tunis. Tout en faisant part de sa compréhension, le président Ben Ali a lancé un processus répressif. Le 24 décembre un jeune manifestant tué par balle lors des violents affrontements qui ont secoué la ville de Menzel Bouzayane (ces tirs auraient répliqué à une tentative de groupes de jeune d’incendier un véhicule de police). Des journaux ont été saisis. A l’issue d’un sit-in des avocats à Tunis, maîtres Raouf El Ayadi et Choukri Belaïd ont été arrêtés, dans la soirée du mardi 28 décembre avant d’être libérés le lendemain.Ammar Amroussia, porte parole du Parti communiste ouvrier de Tunisie (PCOT) et correspondant du site albadil.org, a été arrêté à Gafsa pour ses publications et ses déclarations dès le début de ce mouvement de colère des déshérités ; ainsi qu’Attia Athmouni, porte parole du comité de soutien de Sidi Bouzid et membre du Parti démocrate progressiste (PDP) et le journaliste Mouldi Zouabi.Selon sa radio ce dernier était au palais de justice de Jendouba en compagnie des avocats le 29 décembre pour couvrir leur action de solidarité avec les habitants de Sidi Bouzid. Dans sa communication téléphonique avant que la police ne confisque son portable, le journaliste a déclaré depuis le commissariat qu’il a été agressé violement par des agents de police qui ont également cassé ses lunettes.

 

La répression n’a toutefois pas découragé le mouvement social. A Sidi Bouzid la commission administrative de l’union régionale du travail de Sidi Bouzid sous la présidence de Mohamed Saad a tenu, le jeudi 30 décembre, une réunion à l’issue de laquelle une décision de grève générale pour le 12 janvier a été prise à l’unanimité. Selon radio Kalima à Jelma samedi « des syndicalistes et un nombre important d’activistes rejoints par une impressionnante foule de citoyens se sont rassemblés devant le siège de l’Union régionale du travail puis ont marché dans les rues de la ville. Les manifestants ont scandé des slogans pour dénoncer la corruption, demander leur droit aux travail et la levée de l’état de siège qui frappe Sidi Bouzid depuis le début des événements. La police a dispersé les manifestants à coups de matraques.  

A Jerba la police a empêché les avocats de sortir du palais de la justice. Ces derniers étaient contraints d’improviser leur réunion dans le hall du palais.  Les avocats ont brandi des slogans pour demander la levée de l’état de siège imposé sur la ville de sidi Bouzid et dénoncer la corruption et la tyrannie. Le même scenario s’est produit au siège de l’Union régionale du travail où des citoyens venu se joindre au syndicalistes ont été empêché d’y accéder. La police a utilisé les matraques pour venir à bout de cette action. Kalima a appris que la syndicaliste Nejah Hamdani, membre du syndicat de l’enseignement secondaire a été grièvement blessé après avoir été agressé à coup de matraques par des policiers ; son fils a été lui aussi roué de coups. D’autres actions similaires ont eu lieu dans les ville de Makther , Siliana, Jebniana et Sousse. » A Jbeniana plus précisément « des affrontements ont éclaté, vendredi le 31 décembre à 22h, entre les habitants de la ville et les forces de l’ordre. Ces dernières ont lancé des bombes lacrymogènes pour disperser les manifestants. Deux jeunes ont été arrêtés puis relâchés dans la matinée du samedi après avoir été soumis à la torture selon leurs déclarations. »  

Des sit-ins ont eu lieu devant des consulats tunisiens en Europe. Les partis égyptiens Karama, et Alraad, le parti communiste libanais, la Confédération syndicale internationale  ont exprimé leur soutien aux manifestants.  

Ont appelé à une manifestation de solidarité Place de la fontaine des innocents à Paris le 6 janvier à 18 h les organisations ci-dessous : C ! – ACHR – ACORT – AFASPA – AMF – ASDHOM -ATF-ATF Paris – ATMF – ATTAC – CAPJPO-EuroPalestine – CEDETIM – CISA – CNT -Comité National de Soutien au Mouvement du Bassin minier – CourantNationaliste Progressiste – CORELSO – CPR — CRLDHT – DAL – Etoile NordAfricaine – Europe Écologie Les Verts – La pelle et la pioche – FASE (Fédération pour une alternative Sociale et Écologique) – FDLT (Forum démocratique pour la liberté et le Travail) – FTCR – Les Alternatifs – Le Mouvement pour une alternative socale, écologique et démocratique, Lutte ouvrière,-Manifeste des Libertés – Mouvement Nahdha – Mouvement Tajdid France – MRAP – NO-VOX – NPA – PCF – PCOF – PCOT – PDP – PG -Réseau Stop la Précarité – Respaix Conscience Musulmane – Reveil des Consciences – SOLIDAIRES – Solidarité Tunisienne — Sorti du colonialisme – UTIT – Voie Démocratique Maroc – Voix Libre)  

Le Parti Socialiste français a publié un communiqué le 30 décembre dans lequel il a critiqué les autorités tunisiennes qui ont recouru à la violence contre des manifestants pacifiques. Le PS a demandé dans le même communiqué aux autorités tunisiennes le respect des libertés et la libération de tous les manifestants arrêtés.  

Selon un câble diplomatique du 17 juillet 2009 publié par Wikileaks  l’ambassadeur des Etats-Unis à Tunis avait estimé : « La Tunisie a de gros problèmes. Le Président Ben Ali est vieillissant, son régime est sclérosé et il n’y a pas de successeur évident. De nombreux Tunisiens sont frustrés par le manque de libertés politiques et éprouvent de la colère envers la famille présidentielle, la corruption, le chômage élevé et les inégalités régionales. L’extrémisme fait peser une menace permanente. […] La Tunisie est un État policier, avec peu de liberté d’expression et d’association, et de graves problèmes de droits humains. […] Pour chaque pas en avant, il y en a un autre en arrière, par exemple le récent rachat d’importants médias privés par des personnes proches du président Ben Ali.

  [Ben Ali] et son régime ont perdu le contact avec le peuple tunisien. Ils ne tolèrent pas de conseils ou de critiques, ni nationales ni internationales. Ils s’appuient de plus en plus sur le contrôle par la police et se concentrent sur la préservation du pouvoir. La corruption dans les premiers cercles s’accentue. Même les Tunisiens moyens sont à présent très conscients de cela, et le choeur de leurs plaintes s’amplifie […]. Les Tunisiens n’aiment vraiment pas, voire détestent la première dame Leila Trabelsi et sa famille. En privé, les opposants au régime se moquent d’elle. Même dans les cercles proches du pouvoir on exprime de la consternation face à ses frasques. Entretemps, la colère monte face au taux de chômage qui grimpe et aux inégalités régionales. En conséquence, les risques pour la stabilité à long terme du régime sont en augmentation. »  

La porte-parole du Ministère des affaires étrangères français a appelé à « l’apaisement ». Le soutien de M. Sarkozy et de l’UMP au régime tunisien, semble toujours de rigueur.



Articles Par : Global Research

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