«Mille milliards de dollars.» La somme, astronomique, qui a donné en 1981 son nom au célèbre film d’Henri Verneuil semblait à l’époque surréaliste. Une vingtaine d’années plus tard, elle représente la prospective la plus optimiste du coût de la guerre en Irak, selon une étude réalisée entre autres par le Prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz.
Rendu public lundi, le rapport indique que la campagne irakienne pourrait coûter au contribuable américain «entre mille et deux mille milliards de dollars». Il contredit sur ce point les estimations de l’administration américaine qui tablait elle sur des estimations à trois chiffres. Washington aurait en effet sous-évalué l’aspect financier de son expédition irakienne. Le Congrès chiffre actuellement à environ 500 milliards de dollars le prix à payer pour établir la démocratie en Irak.
«Même en adoptant une approche prudente, nous avons été surpris de constater l’importance [des coûts de la guerre], ont déclaré les auteurs de l’étude. Nous pouvons affirmer, avec une relative certitude, qu’ils vont dépasser les mille milliards de dollars.»
6 milliards par mois
A ce jour, les Etats-Unis ont dépensé 251 milliards depuis l’invasion de l’Irak. Ils dépensent en moyenne 6 milliards de dollars par mois. Mais ces dépenses ne tiennent pas compte de l’aspect collatéral des dépenses martiales: les pensions d’invalidité, le coût du remplacement des équipements militaires, le prix des munitions, sont autant de postes budgétaires dont Washington ne se soucie pas dans l’immédiat, indique l’étude. Pas plus que la hausse des prix du pétrole sur l’économie américaine.
Mais le gouffre financier irakien inquiète les officiels à Washington. George Bush a demandé mardi à la communauté internationale d’annuler les dettes de l’Irak. Il a aussi rappelé les promesses des Etats qui «se sont engagés à apporter 13 milliards de dollars d’assistance à l’Irak». Pour le président, les pays sont trop lents dans leurs efforts de soutien.
Car en plus du coût exorbitant de la guerre, l’Irak aura besoin d’au moins 8 milliards de dollars pour rebâtir son système de santé. C’est le vice-ministre de la Santé, Ammar al-Saffar, qui a donné ce nouveau chiffre. Face à un tel investissement, le pays en appelle à la solidarité internationale. Et les Etats-Unis sont fortement sollicités. En 2004, ils ont promis 786 millions de dollars pour la construction d’hôpitaux et l’achat d’équipements médicaux. Mais une bonne partie de cette somme aurait en fait été consacrée à des dépenses de sécurité. Autre problème: le seul hôpital rénové grâce aux dons américains dans le pays, à Najaf, est à nouveau en travaux aujourd’hui. Il a été dernièrement la cible d’un attentat.
Dans ce climat de surenchères budgétaires, c’est Samuel Alito, le candidat de George Bush à la Cour suprême, qui a rappelé – citant la Constitution – la dure réalité. Lors d’auditions pour la confirmation de sa nomination, il a indiqué mardi au Sénat que le président ne disposait en aucune façon d’un chèque en blanc pour faire la guerre.
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