Le curieux référendum néerlandais sur le traité entre l’UE et l’Ukraine

Le 6 avril 2016 un référendum consultatif a eu lieu aux Pays-Bas, sur la loi de ratification de ce traité. 61,1 pour cent des votants étaient contre.
Déjà au 1er juin 2005 lors d’un précédent référendum sur la constitution européenne un pourcentage similaire, 60,5 pourcent avait voté contre.
Il semble justifié d’interprêter cela comme un résultat anti-Union Européenne, et ça l’est. Cependant ces chiffres ne peuvent pas être comparés sans plus. Le référendum de 2005 était un référendum exceptionnel décidé par le gouvernement. Le second est le résultat d’une nouvelle loi de 2014. Sans parler des nombreuses restrictions et obstacles que cette loi impose, elle comporte encore de grandes fautes.
Le première, biensûr, est que les référendums ne sont que consultatifs. Cependant, les parlementaires, bien qu’en majorité en faveur du traité, ont vite compris, qu’ils ne pourraient pas crûment refuser le résultat et annonçaient d’avance, qu’ils le respecteraient. (C’est une curiosité européenne, que la plupart des citoyens sont contre l’unification de leurs pays, tandis que la majorité de leurs gouvernements et parlements cèdent toujours plus de souvereineté nationale à Bruxelles.)
Une des plus grandes fautes avec cette nouvelle loi néerlandaise, c’est qu’on considère, qu’avec un nombre de votants de moins de 30 pourcent des inscrits, ceux qui ont voté pour ont gagné. À ce premier référendum la plupart de ceux en faveur du traité n’était pas encore conscients de cette étrange anomalie et en allant voter, ils aidaient ceux qui étaient contre à atteindre le seuil des 30 pourcent pour valider le référendum. (32,2 pourcent des inscrits ont voté.)
Donc avec seulement 20 pourcent des inscrits votant contre le traité de l’Union Européenne avec l’Ukraine, ceux qui étaient contre ont gagné. Cette loi a vraiment encore des maladies d’enfance. Ce n’est que grâce à une enquête de RTL-News [1] que nous savons comment ceux qui n’ont pas voté, auraient voté, s’ils avaient été voter: 40 pour cent auraient voté contre et 17 pour cent pour. Et 30 pourcent ne le savaient pas. Ce n’est qu’avec cette information additionnelle, que nous pouvons juger que le résultat du référendum reflète plus ou moins l’opinion publique et que la victoire des opposants est justifiée.
Les parlementaires réagissaient immédiatement en disant qu’ils n’amélioreraient pas cette loi directement après ce premier référendum. La raison va de soi. Tôt ou tard ils devront ratifier ce même traité (ou un traité légèrement modifié pour tromper le peuple.) Alors il y a très peu de chances que les mêmes opposants gagneront le référendum (s’ils en organisent encore un). Car ceux en faveur du traité ne viendront tout simplement plus voter et le seuil des 30 pour cent de votants ne sera pas atteint. Les parlementaires l’interpréteront comme une victoire et la volonté du peuple aura encore perdu, comme beaucoup trop souvent.
Rudo de Ruijter
le 10 avril 2016
Rudo de Ruijter : Chercheur indépendant qu Pays-Bas
Référence
[1] Même si toute la Hollande avait voté, le résultat aurait été non:http://www.rtlnieuws.nl/nieuws/politiek/ook-als-heel-nederland-had-gestemd-was-uitslag-nee-geweest