Le Parlement grec ne peut pas passer outre au vote du NON. L’accord avec les créanciers est illégal
FIRA, GRÈCE. Le dimanche 5 juillet, le peuple grec a voté dans le cadre d’un référendum historique pour rejeter l’ébauche d’entente de la « troïka ».
Le référendum a été un véritable « rituel de démocratie ». Le peuple grec a été trahi. Au matin du lundi 6 juillet, au lendemain du référendum, le premier ministre Tsipras a présenté un avant‑projet de 13 pages incluant la plupart des demandes des créanciers. Cette proposition, qui avait été rédigée avant la tenue du référendum en consultation étroite avec les créanciers, visait essentiellement à conduire à l’acceptation des demandes de ces derniers, notamment à soutenir le vote du OUI, défait lors du référendum du 5 juillet.
Ce revirement avait été méticuleusement orchestré. Le peuple grec a été trompé. Le premier ministre Tsipras était « de mèche avec les créanciers », et ce, tout en menant la campagne du NON. Il avait conclu un accord avec les créanciers, il a toujours été favorable à l’acceptation de leurs demandes. Le mandat découlant du NON du peuple grec devait être ignoré. Et la décision de bloquer la mise en œuvre des conséquences du vote du NON avait été prise AVANT le référendum.
Le document postréférendum du 6 juillet présenté par le premier ministre Tsipras a été accepté en fait par la troïka. Il a ensuite reçu l’aval du Parlement grec.
La question importante pour le peuple grec:
Le vote d’acceptation par le Parlement grec est‑il juridiquement contraignant et donne‑t‑il de ce fait au gouvernement le droit de conclure les négociations relatives à la dette AU DÉTRIMENT du peuple grec, passant outre au vote du NON obtenu lors du référendum?
Quel est le rôle d’un référendum en vertu de la constitution grecque?
Si le résultat d’un référendum n’est pas toujours juridiquement contraignant, il n’en donne pas moins au gouvernement un mandat politique explicite dont il doit tenir compte. Un référendum ne peut se fonder sur une tromperie préalable. Et ses résultats ne peuvent être ignorés dans une démocratie.
Le référendum s’est tenu alors que le gouvernement Tsipras avait décidé de céder aux créanciers.
Ni le Parlement ni le gouvernement ne peuvent annuler le VOTE du peuple grec du 5 juillet 2015.
En démocratie, le gouvernement est tenu de tenir compte du vote du NON obtenu lors du référendum, parrainé par le gouvernement Syriza lui‑même.
S’il n’est pas prêt à répondre aux demandes du peuple grec, alors il doit démissionner.
Il importe à ce stade‑ci pour le peuple grec de remettre en cause la légalité de la décision du Parlement. Il convient de noter que la Cour suprême spéciale (Ανώτατο Ειδικό Δικαστήριο) avait avalisé la tenue du référendum.
Ce qu’il faut maintenant établir c’est constitutionnalité du déni par le Parlement de la procédure référendaire et sa sanction de fait du vote du OUI. Cette décision doit être remise en cause. Et cela doit se faire avant que n’intervienne un accord définitif juridiquement contraignant avec les créanciers.
Le texte définitif et détaillé de l’entente de renflouage ne sera sans doute pas rendu public.
Il convient de souligner que de nombreux aspects de cette entente, dont ceux brièvement énoncés dans le document de 13 pages de Tsipras, violent les dispositions de la Constitution grecque (p. ex. les articles 22 et 23 ayant trait aux droits des travailleurs et aux droits sociaux).
Une entente de renflouage ad hoc négociée par des bureaucrates ne peut passer outre aux clauses précises contenues dans la Constitution du pays. C’est là l’objectif ultime des créanciers : saper les fondements de la démocratie grecque.
Michel Chossudovsky
Article original en anglais:
Greece’s Parliament Cannot Override the NO Vote. The Agreement with the Creditors is Illegal, publié le 21 juillet 2015
Traduction par Jacques pour Mondialisation.ca