Le poison de Nalvalny

Nous ne savons pas encore ce qui est arrivé à Alexei Navalny ; il est toujours dans un coma provoqué médicalement dans un hôpital allemand. S’il s’agit d’un empoisonnement, (et c’est loin d’être certain) on ne sait pas encore quel poison et dans quelles circonstances il a pu l’ingérer. Ce qui ne nous empêche pas de spéculer sur ce qui est « hautement probable », comme Mme Theresa May, l’ancien Premier ministre britannique pendant l’affaire Skripal. Nous sommes tenus de pointer les suspects habituels (et politiquement bien commodes). Vous connaissez la routine. Un bébé chrétien a disparu – il est « hautement probable » qu’un juif l’ait enlevé pour ses rituels infâmes. Le lait d’une mère qui allaite se tarit – il est « très probable » qu’une sorcière soit en cause. Un ennemi des autorités russes est tombé malade – il est « très probable » que Poutine l’ait empoisonné.

Pourquoi attendre les rapports médicaux alors que l’histoire est déjà écrite ? Le complot à base de  poison, c’est une routine bien établie. Un renégat du KGB, Litvinenko, a été empoisonné par du Polonium-210 et il est mort douloureusement à Londres. À qui faut-il faire porter le chapeau? À  Poutine, évidemment. (Yasser Arafat, le leader palestinien, avait été empoisonné par la même matière radioactive au même moment, et il a été fortement suggéré que les Israéliens soient derrière tout cela, mais … de tels détails ne feraient qu’embrouiller le lecteur). Un espion à la retraite, M. Skripal (qui aurait rédigé le dossier Steele avec ses histoires de prostituées pisseuses qui ont failli faire capoter la présidence de Trump) aurait été empoisonné par un poison neurotoxique de niveau militaire, le Novichok. Cela s’est produit à proximité de Porton Down, le centre de guerre chimique britannique, mais ne vous y trompez pas: c’était encore Poutine. Skripal s’en était vite remis, mais ce n’est qu’une preuve supplémentaire (comme si nous en avions besoin !) du fait que Poutine et sa communauté de renseignement aiment l’empoisonnement non mortel par un poison complexe.

Le Washington Post a récemment sorti une litanie des cas d’empoisonnement : Piotr Verzilov (le chef des Pussy Riots  ), Vladimir Kara-Murza (un dissident) et d’autres, qui auraient été empoisonnés, mais qui ont survécu. Ce sont des personnes si négligeables qu’il faut être aux abois pour attribuer leurs problèmes d’estomac à Poutine. Pourtant, cela sert à démontrer le génie maléfique de Poutine plutôt que son incompétence. Le Washington Post affirme que l’efficacité a fait place à la théâtralité, et que désormais les empoisonnements dramatiques et non mortels avec des poisons exotiques sont la preuve (comme si nous en avions besoin !) que Poutine était derrière tout cela.

Les accusations d’empoisonnement, c’est un schéma récurrent de récit médiatique. Viktor Pelevin, l’écrivain russe moderne à gros succès, a inclus dans son thriller de 2019 un général du KGB en fuite qui avait été « empoisonné avec un composé chimique rare, qui est assez facile à tracer car à la fin du siècle dernier, son lot avait été fabriqué par le laboratoire secret de la société Krasnoyarsk-PromChimstroy Co » , et il tombe dans le coma. Après lui, un traître potentiel du KGB a été « empoisonné par un poison unique – une telle composition n’avait été fabriquée qu’à l’usine chimique Yenisei vers 2010 » et il est également tombé dans le coma. ” Bon; ce livre a été publié un an avant que Navalny ne tombe malade.

Cette nature baroque complexe de l’empoisonnement « à la russe » vise à souligner la différence entre un régime byzantin arriéré (ils ne peuvent même pas empoisonner correctement, malgré tous leurs efforts) et, disons, la « Compagnie » américaine efficace, la CIA, qui maîtrise parfaitement la capacité d’infecter ses ennemis avec un cancer mortel, comme l’a démontré le défunt président du Venezuela Hugo Chavez. En 2011, les présidents latino-américains ont été frappés parune épidémie de cancer. Les ex-présidents du Brésil, Luis Ignacio Lula de Silva et Dilma Rousseff, ont été diagnostiqués avec un cancer. La même année, la présidente de l’Argentine, Cristina Kirchner, a été diagnostiquée avec un cancer de la thyroïde. Le mari de Mme Kirchner, qui a également été président de l’Argentine et qui était un ami d’Hugo Chavez, était mort d’un cancer l’année précédente. Le premier président indien de Bolivie, Evo Morales, a souffert d’un cancer. Hugo Chavez était mort d’un cancer, et il était certain que c’était la CIA. Bien longtemps avant Chavez, Jack Ruby, qui avait tué Harvey Lee Oswald, l’assassin présumé du président Kennedy, était mort d’un cancer. Mais avant sa mort, Ruby a raconté en détail comment on lui avait implanté une tumeur maligne à l’hôpital de la prison.

La CIA est célèbre pour savoir comment provoquer silencieusement une crise cardiaque mortelle. Cet art a récemment été utilisé contre le vigoureux ambassadeur chinois à Tel-Aviv en parfaite santé. Il est mort subitement d’une crise cardiaque et aucune question embarrassante n’a été soulevée. Aucun suivi n’a été nécessaire. Aucune escroquerie n’a même été mentionnée. C’est ainsi que fonctionnent les professionnels, contrairement à … (voir ci-dessus).

Cependant, dans le cas de Skripal et de Litvinenko, la méthode hautement fantaisiste a été appliquée à des agents de renseignement qui étaient devenus des escrocs. Un ancien espion et auteur prolifique de thrillers d’espionnage, John le Carré, avait fait remarquer que l’empoisonnement des traîtres était une stratégie favorite des Russes (et des Britanniques !). Or Alexey Navalny était/est un éminent dissident, pourquoi l’empoisonner ? En général, on leur tire dessus, à ce genre de personnages, ce qui est arrivé à M. Boris Nemtsov. Alexei Navalny pourrait-il être un employé d’un des services spéciaux russes ? Il est, étonnamment, difficile de l’exclure.

Le rôle du principal dissident n’est généralement pas attribué à un type quelconque, mais à un agent fiable. Cela expliquerait la facilité avec laquelle Alexei Navalny s’est sorti de situations difficiles. Il est peut-être le seul homme dans l’histoire de la justice russe à avoir été arrêté, parce qu’il violait les termes d’une libération conditionnelle, et à s’en être sorti. « Une libération conditionnelle est une ordonnance rendue par un tribunal pénal selon laquelle un délinquant ne sera pas condamné pour une infraction à moins qu’une nouvelle infraction ne soit commise dans un délai déterminé ». En général, une deuxième violation active la peine conditionnelle précédente, et le coupable va en prison. Ce n’a pas été le cas pour M. Navalny. Bien qu’il enfreigne régulièrement les lois russes, il s’en est toujours tiré à bon compte, n’étant détenu que le temps nécessaire aux formalités pour sa libération.

Plus suggestif encore est le fait, jusqu’alors inconnu, que la femme de M. Navalny est la fille d’un puissant opérateur de l’ex-KGB et banquier chargé des avoirs russes à Londres, M. Boris Abrosimov. M. Abrosimov est un collègue de l’ex-colonel du KGB et oligarque russe Alexandre Lebedev, propriétaire et patron de quelques journaux britanniques, et son fils est récemment devenu pair du Royaume Uni. Mme Navalny (née Abrosimov) a beau avoir vu son passé effacé de l’internet, l’histoire de son puissant père a été divulguée par une mondaine russe, la filleule de Poutine, Mme Ksenia Sobchak.

Tout cela confirme que Navalny est profondément lié aux sombres recoins où les services de renseignements russes et occidentaux et leurs banquiers forgent leurs liens secrets et mènent leurs batailles secrètes.

Il s’agit-là d’une théorie conspiratoire plus ou moins solide, mais sur laquelle une personne soupçonneuse pourrait se rabattre si elle n’était pas satisfaite de la version traditionnelle de « Poutine le tueur de dissidents ». Mais laissons tomber tout cela pour l’instant et explorons une raison moins évidente mais beaucoup plus sensée.

Puisque l’histoire du poison russe a été si bien établie et scientifiquement élaborée dans les moindres détails, il serait insensé de ne pas en faire usage. Et en effet, dans le cas d’Alexei Navalny, les Américains en ont pleinement profité – pour bloquer la progression du vaccin russe Spoutnik V. Ce vaccin est appelé Spoutnik pour une bonne raison. Comme le légendaire satellite de 1957, le vaccin russe menace de faire tomber l’image du monde entier, si soigneusement construite par les artisans occidentaux. En 1957, comme en 2020, le Spoutnik a détruit le mythe du Russe attardé. Sous le choc, les élites occidentales ont à nouveau découvert que les Russes sont toujours capables de faire des choses grandes et inattendues.

Spoutnik V menace d’annuler les bénéfices en espèces de Bill Gates, le sacerdoce de l’OMS et de Big Pharma, qui s’en léchaient les babines, en prévision des montagnes d’argent qu’ils récolteraient au dernier coup de cloche de l’hystérie COVID. Nous parlons de centaines de milliards de dollars, d’un « certificat de vaccination » mondial (comportant le système d’identification ID-2020, dit « camp de concentration numérique »), d’un éternel état d’urgence sanitaire pour des milliards d’habitants de la planète, de la « nouvelle normalité », nécessitant absolument des mises à jour annuelles, du même genre que celles qui ont rendu Microsoft si détesté et Bill Gates si riche. Et tout cela va à vau-l’eau, parce que ces p… de Russes ont déployé leur astucieux vaccin.

L’avion transportant Alexei Navalny n’avait pas encore atteint Berlin, que les États-Unis avaient déjà imposé une interdiction à l’institut produisant le vaccin, et une interdiction secondaire pour le vaccin lui-même, et une interdiction tertiaire à tous ceux qui vendraient, ou achèteraient ou s’administreraient ce vaccin: autant de sanctions sous la menace de se voir interdire l’utilisation du dollar américain, de se voir déconnecté de SWIFT et de Twitter, bref banni de tout le monde dirigé par les Américains. Il s’agit d’une menace dont il ne faut pas se moquer : lorsque les États-Unis ont interdit le Nord Stream-II, toutes les entreprises européennes ont lâché l’affaire comme une patate chaude, malgré les lourdes sanctions [russes] qu’elles allaient certainement subir pour avoir rompu leurs contrats avec les Russes. Elles ont également peur de toucher au pétrole iranien ou à l’argent vénézuélien, puisque les États-Unis l’ont interdit.

S’il fallait choisir entre la pandémie et l’inimitié des États-Unis, la plupart des pays et des entreprises oublieraient rapidement les platitudes sur les personnes âgées qui souffrent et l’égoïsme cruel des sceptiques sans masque dont ils nous ont abreuvés ces six derniers mois, pour passer à autre chose. Laissez crever les personnes âgées ; laissez les enfants transpirer sous les masques pour toujours, mais que Dieu nous préserve de la fureur américaine.

Ce plan pourrait bien se retourner contre ses auteurs. Le peuple américain est bon et il a peur du COVID. Les Américains ne s’opposent pas à ce que le salut vienne de Russie, car les astronautes américains se sont précipités dans le compartiment russe de la station spatiale Soyouz lorsque le leur a présenté une fuite en 2015. La pression des électeurs américains, l’indignation des personnes qui étouffent et qui en ont assez des muselières et de la distanciation sociale, et la crainte d’une mort mondiale imminente attendue depuis trop longtemps, touot cela pourrait l’emporter sur l’interdiction américaine. Les nations d’Europe et du monde entier en ont assez de ces sanctions américaines et des coûts qu’elles entraînent. Les sanctions imposées à la Syrie, à l’Iran, à la Chine et à la Russie ont été mises en œuvre aux dépens de l’Europe. La lutte contre le vaccin russe pourrait être la paille de trop sur le dos du chameau.

Dans cette lutte titanesque pour le sort du monde, pour la vie et la santé, pour des milliards de personnes et de dollars, le sort d’Alexei Navalny ne joue qu’un très petit rôle. C’est en désespoir de cause que les auteurs de cette guerre mondiale  ont été contraints d’utiliser Alexey comme levier pour repousser le vaccin russe. Son travail est maintenant terminé. Les choses sérieuses commencent. Une fois l’interdiction américaine en place, Navalny peut se rétablir et s’envoler pour la Nouvelle-Zélande, pour s’installer à côté de chez Skripal, par exemple, ou même retourner en Russie. Nous ne pourrons jamais vraiment savoir ce qui lui est arrivé, mais cela n’a plus d’importance. Ce qui est important, c’est le vaccin.

Israel Shamir

 

Article original en anglais : Nalvany Poison, UNZ Review, le 1er septembre 2020

Traduction: Maria Poumier pour La plume et l’enclume

Israel Shamir peut être contacté à l’adresse suivante : [email protected]

P.S. Personnellement, je ne pense pas que le Coronavirus vaille les efforts déployés pour le contenir, et je ne pense pas non plus qu’un vaccin soit nécessaire. Mais des milliards de personnes ont été traumatisées jusqu’à l’hystérie, et il est peu probable que celle-ci disparaisse sans vaccin, qu’il s’agisse d’un placebo ou non. Je suis convaincu que le vaccin russe, créé par les meilleurs experts ex-soviétiques, qui avaient débarrassé l’ex-URSS et l’Europe de l’Est de nombreuses maladies, est au minimum plus sûr que tout ce que les grandes sociétés pharmaceutiques et Fauci (connues pour leur AZT) vont produire, et qu’il ne servirait pas à nous pucer ni n’exigerait des mises à jour comme le font les Windows de Bill Gates.



Articles Par : Israel Shamir

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