Le secret américain de Nicolas Sarkozy

Dans les coulisses du pouvoir, il y a ceux mis au devant de la scène, ceux qui restent dans l’ombre et, surtout, ceux des tréfonds que nul n’entrevoit jamais. Qui connaît Frank George Wisner ? Ce senior américain, diplomate et homme de réseaux, pourrait bien être la clé pour expliquer l’ascension fulgurante de Nicolas Sarkozy. Le chef de l’Etat français bénéficie là du meilleur conseiller occulte pour jouer un rôle dans la marche du monde. A condition que le Président continue de servir avant tout les intérêts de l’Empire américain, que celui-ci soit dirigé par Bush ou Obama.

« Un néo conservateur américain à passeport français » : la formule cinglante d’Eric Besson au sujet de Nicolas Sarkozy, formulée en vue de la campagne électorale de 2007, demeure d’une lucidité implacable. Le nouveau ministre chargé de l’immigration n’ira sans doute plus remettre en question le patriotisme de son mentor. Il n’en demeure pas moins que le mystère du succès rapide dans la conquête du pouvoir suprême par Nicolas Sarkozy passe par l’analyse de son rapport personnel aux Etats-Unis.

A cet égard, le destin peut s’avérer facétieux lorsqu’il veut avantager un jeune ambitieux désireux d’atteindre les sommets. C’est vers la fin des années 70 que le jeune loup du RPR saura tirer profit d’une fortune incomparable : le remariage de sa belle-mère, Christine de Ganay, avec un personnage prometteur de la vie politique américaine, Frank George Wisner.

Celui-ci avait déjà hérité d’une charge lourde : le patronyme et la carrière sulfureuse d’un homme exceptionnel, dans ses coups d’éclat comme dans sa folie, Frank Gardiner Wisner (1909-1965), cofondateur de la CIA. Le père Wisner, impliqué dans les renversements du pouvoir au Guatamala et en Iran, restera célèbre pour l’opération Mockingbird (un noyautage réussi des médias américains par des agents de la CIA), avant de se suicider en 1965, victime de démence. Né en 1938 à New York, diplômé de Princeton, le jeune Frank George ne marchera pas exactement dans les pas de son père mais suivra plus habilement un tracé parallèle : la diplomatie, dont on connaît les passerelles avec le monde de l’espionnage. Il apprendra ainsi l’arabe au Maroc dans son détachement effectué pour le compte du Département d’Etat avant un bref passage par Alger après l’indépendance et un long séjour au Vietnam. De retour à Washington en 1968, il sera chargé des affaires tunisiennes. Plus tard, après la spécialisation dans les questions asiatiques et arabes, Frank George Wisner exerça le poste d’ambassadeur en Zambie, en Egypte, aux Philippines et en Inde.

Derrière ces honorables activités, qui ont culminé par un poste de sous-secrétaire d’Etat sous Clinton et , plus récemment, dans sa médiation pour la Troika dans le règlement de la crise au Kosovo, Frank G. Wisner demeure, selon ses détracteurs, la clé de voûte dans l’exécution de l’espionnage économique pour le compte de la CIA. Mieux encore, l’homme est la caricature du personnage multicartes et influent, présent dans tous les centres réels ou fantasmés du pouvoir parmi lesquels les fameux Council on Foreign Relations ou le groupe Bilderberg. Mais c’est en 1997 qu’un tournant s’opère : après avoir longtemps manœuvré dans le monde feutré de la diplomatie et des renseignements, Wisner se risque à mélanger encore plus à mélanger les genres en rejoignant, au sein de son conseil d’administration, l’entreprise Enron ,la célèbre compagnie énergétique qui fera scandale quatre ans plus tard et dont la gigantesque fraude en Californie, portant sur des milliards de dollars, ne sera jamais exactement détaillée, « grâce » à la disparition des milliers de pages caractérisant la fraude fiscale dans la destruction des bureaux de la SEC, gendarme américain des opérations boursières , lors de la chute de la Tour 7 du World Trade Center.

Ironie du sort, ou étrange coïncidence, la sécurité de ce gratte-ciel (effondré alors qu’il ne fut pas percuté par un avion en ce jour du 11 Septembre 2001) relevait de la compagnie Kroll Associates, qui appartenait alors à l’AIG, assureur dont Wisner est le vice-président . S’il est vrai que les entreprises prestigieuses sont souvent interconnectées de par leurs administrateurs, il est notable de constater la récurrence curieuse de Wisner dans les anomalies du 11 Septembre. Ainsi, pour résumer, l’homme, spécialiste du monde musulman et de l’espionnage économique, responsable haut placé de Enron et de l’AIG, échappe à toute poursuite judiciaire lors du scandale Enron, jamais complètement décrypté de par la destruction des détails compromettants lors de la chute controversée d’un immeuble du World Trade Center qui abritait également, autre heureuse coïncidence, les bureaux de la CIA dédiés précisément à l’espionnage économique…

Quel rapport dès lors entre ce personnage sulfureux et Nicolas Sarkozy, mis à part le lien familial d’antan ?

A priori, il serait logique de présumer que le temps et la distance géographique auront naturellement creusé le fossé entre le chef de l’Etat et la famille de l’ancienne belle-mère. Il n’en est rien. Pour preuve, la campagne électorale de l’UMP qui a porté triomphalement au pouvoir, et dès la première tentative, Nicolas Sarkozy, disposait dans ses rangs d’un acteur discret, responsable de la section anglophone, mais dont le nom est suffisamment éloquent : David Wisner. Celui-ci semble également reprendre le flambeau de la lignée Wisner puisqu’il a intégré le Département d’Etat en septembre dernier, après des études d’arabe.

Et au-delà du légitime renvoi d’ascenseur du chef de l’Etat envers le fils de son parrain d’outre-atlantique, une autre fait passé inaperçu mérite d’être évoqué, non comme la preuve mais plutôt comme l’indice de la volonté présidentielle d’occulter l’existence et les agissements troubles de Wisner. S’il s’avère à l’avenir que les fameux délits d’initiés opérés à la veille du 11-Septembre ont été le fait de citoyens américains avertis, dont le point commun serait d’être à la jonction du renseignement et de la finance, alors il ne serait guère étonnant de voir figurer sur la liste de ces personnes au vent d’un « attentat terroriste imminent » un certain Frank George Wisner. Outre qu’il ait bénéficié de la destruction du dossier fiscal Enron tout en étant dans le même temps responsable de la sécurité du World Trade Center via Kroll Associates ( détenue par AIG), une réçente réaction de Nicolas Sarkozy pourrait laisser penser que le silence en la matière doit s’imposer.

En effet, selon le Canard Enchaîné du 24 septembre 2008, le Président avait vivement critiqué le Pdg de la chaîne info internationale, France 24, pour avoir organisé un débat sur la « théorie du complot » autour du 11-Septembre. Cette réaction de Nicolas Sarkozy pourrait prêter à sourire si elle venait simplement confirmer sa propension légendaire à tout régenter, y compris la programmation audiovisuelle. Mais compte tenu de l’implication éventuelle d’un de ses proches dans les coulisses logistiques et financières de l’attentat du World Trade Center, la colère présidentielle prend une toute autre tournure. De par le signal qu’il envoie ainsi aux journalistes mainstream tentés d’évoquer à l’antenne la question des zones d’ombre du 11-Septembre, le message relève plus de la censure tacite d’un sujet grave que de l’irritation d’un téléspectateur capricieux. Sans aller jusqu’à faire de Wisner un des instigateurs du 11-Septembre, il est plus vraisemblable de supposer que sa position et ses relations l’ont idéalement avantagé pour faire partie de ceux à avoir, « au mieux » anticipé l’événement, au pire participé par une quelconque assistance matérielle, en l’occurrence la mise à disposition de la gestion de la sécurité électronique des 3 tours effondrées, de par l’implosion de bombes pré-installées selon certains scientifiques spécialistes de la démolition contrôlée.

Au-delà des inévitables spéculations sur le rôle exact de Wisner dans l’opération à multiples facettes du 11-Septembre, force est de constater que l’homme dispose des diverses relations accumulées depuis près de 50 ans dans les élites dirigeantes des Etats-Unis et les cercles internationaux pour pouvoir, si besoin est, favoriser le jeune politicien impétueux que son épouse française affectionne. Nicolas Sarkozy doit beaucoup à Jacques Chirac pour son maillage lent et progressif du corps électoral français. Il doit sans doute davantage encore à Frank George Wisner pour avoir obtenu l’assentiment et la faveur de l’hyper-puissance occidentale.

Les parrains occultes du Président et méconnus du citoyen sont souvent les plus redoutables.



Articles Par : Comité Valmy

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